Cass. com., 11 octobre 2005, n° 04-14.188
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 24 février 2004), qu'à la suite du décès de M. X..., ses héritiers (les consorts X...) ont, le 10 juin 1994, signé un protocole d'accord avec la société Stequal pour la cession des 202 actions de la société Découpe moulage de Savoie, (la société DMS) pour la somme de 1 850 000 francs ; que le 14 juin 1994, ils ont informé M. Y..., dirigeant cette société de cette cession et ont signé l'acte de vente le 26 septembre 1994 ; que le 31 octobre 1994, M. Y... a cédé à la société Stequal 53 actions de la société DMS au prix de 1 563 500 francs ; que les consorts X... ont assigné la société Stequal et M. Y... pour les voir condamnés à réparer leur préjudice financier pour réticence dolosive et manquement de M. Y... à l'obligation de loyauté ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté leurs demandes formées à l'encontre de M. Y..., en réparation du préjudice subi du fait du manquement de ce dernier à son devoir de loyauté, alors, selon le moyen :
1 / qu'ils demandaient la condamnation de M. Y..., dirigeant de la société DMS, à réparer le préjudice subi du fait de son manquement au devoir de loyauté du dirigeant à l'égard des associés, M. Y... ayant camouflé les négociations qu'il menait avec la société Stequal pour que celle-ci puisse acquérir la majorité des actions de la société DMS, soit une partie de ses propres actions et la totalité de celles des consorts X..., les actions des consorts X... ayant de ce fait été cédées en dessous de leur valeur tandis que M. Y... vendait ses actions à un prix majoré et sauvegardait son emploi de dirigeant ;
qu'en rejetant cette demande au seul motif que "aucun principe du droit des sociétés n'impose aux associés, qui cèdent leurs titres au même moment, d'obtenir un prix identique, même en présence d'un seul et même acquéreur", sans se prononcer sur la violation par M. Y... du devoir de loyauté qui lui incombait en sa qualité de dirigeant de la société DMS, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que M. Y... avait mené des négociations avec la société Stequal pour faire racheter par celle-ci "la majorité de cette société par une société ( ... ) tout en vendant lui-même au meilleur prix un nombre plus ou moins important de ses actions, et en sauvegardant par ailleurs son emploi (de dirigeant)" et que cette cession de la majorité passait nécessairement par la cession de leurs actions, M. Y... n'étant "pas lui-même actionnaire majoritaire", sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé et ainsi qu'il ressortait des pièces du dossier, si M. Y... n'avait pas caché l'existence desdites négociations aux consorts X..., et ainsi manqué à l'obligation de loyauté qui s'impose au dirigeant de société à l'égard de tout associé en dissimulant aux cédants une information de nature à influer sur leur consentement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. Y... n'était pas intervenu lors de la cession des actions des consorts X... et que ceux-ci ne rapportaient pas la preuve de l'existence d'une collusion entre la société Stequal et M. Y..., à la date de la cession de leurs actions, la cour d'appel qui n'était pas tenue de procéder à la recherche relative à la révélation de négociations antérieures à leur cession, a pu statuer comme elle a fait et légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen concernant la société Stequal :
REJETTE le pourvoi.