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Décisions

Cass. 1re civ., 31 octobre 2012, n° 11-15.462

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bargue

Rapporteur :

Mme Verdun

Avocat général :

M. Mellottée

Avocats :

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Waquet, Farge et Hazan

Fort-de-France, du 25 juin 2010

25 juin 2010

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 25 juin 2010), qu'aux termes d'un document manuscrit du 2 décembre 2005, Mme X..., commerçante à Fort-de-France, a reconnu "avoir dans son coffre la somme de 16 500 euros -seize mille cinq cents euros-. Cet argent appartient à M. Philippe Y..." ; que M. Y... prétendant n'avoir récupéré qu'une partie de cet argent, a fait délivrer une sommation interpellative à la dépositaire qui a déclaré avoir intégralement restitué l'argent "entreposé" dans son coffre ; qu'assignée en paiement par le déposant, Mme X... a confirmé ses déclarations et demandé, à titre reconventionnel, le remboursement des diverses sommes d'argent ;

Sur les première, deuxième et troisième branches, réunies, du moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'une somme de 9 200 euros dirigée à l'encontre de Mme X... alors, selon le moyen :

1°/ que les dispositions des articles 1924 et 1341 du code civil ne sont pas d'ordre public et les parties peuvent y renoncer même tacitement, de sorte que les juges peuvent les appliquer d'office ; qu'en déboutant M. Y... de sa demande en paiement au motif relevé d'office que Mme X... devait être crue en sa déclaration selon laquelle la somme de 9 200 euros réclamée avait été restituée à M. Y..., en vertu des articles 1341 et 1924 du code civil, la cour d'appel a violé ces textes ;

2° / que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en jugeant, pour débouter M. Y... de son action en paiement, que Mme X... devant être crue en sa déclaration selon laquelle la somme de 9 200 euros réclamée avait été restituée à M. Y..., sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le respect du principe de la contradiction ;

3°/ que c'est au dépositaire débiteur de l'obligation de restitution qu'il appartient de prouver le fait susceptible d'emporter pour lui décharge de cette obligation ; qu'en déboutant M. Y... de son action en paiement d'une somme de 9 200 euros contre Mme X..., au motif qu'il ne rapportait pas la preuve que cette somme serait restée en dépôt au coffre de Mme X..., la cour d'appel, qui a admis que M. Y... prouvait l'existence du contrat de dépôt litigieux portant sur une somme de 16 500 euros de sorte que c'était au dépositaire de prouver qu'il a bien restitué l'intégralité de cette somme au déposant, a renversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu que, pour écarter le moyen pris par M. Y... de ce que les déclarations de Mme X... valant aveu du dépôt, la preuve de la restitution incombait à la dépositaire, la cour d'appel, tenue, en application de l'article 12 du code de procédure civile, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, s'est bornée, sans introduire un moyen d'office dans le débat, à déduire de l'article 1924 du code civil régissant la preuve du dépôt lorsque sa valeur excède 1 500 euros, que la dépositaire devait être crue également en ce qu'elle affirmait avoir restitué l'entière somme déposée ; que c'est donc sans méconnaître le principe de la contradiction, ni inverser la charge de la preuve, mais par une exacte application de l'indivisibilité des déclarations de la personne recherchée en qualité de dépositaire qu'elle en a déduit que M. Y... qui n'établissait pas que cette déclaration accessoire sur le fait de la restitution fût invraisemblable ou inexacte, devait être débouté de sa demande ; que les griefs du moyen ne sont pas fondés ;

Sur les quatrième et cinquième branches, réunies, du même moyen, reproduites en annexe :

Attendu, d'une part, que c'est sans méconnaître les dispositions de l'article 1347 du code civil que la cour d'appel tout en retenant l'existence d'un commencement de preuve par écrit du dépôt qu'étayaient les déclarations de Mme X..., a fait application du régime spécifique de preuve instauré par l'article 1924 du code civil dès lors que le dépôt dont la valeur excédait celle visée à l'article 1341 du même code, n'était pas prouvé par écrit dans les conditions de ce texte ; que, d'autre part, il ne ressort ni de l'arrêt attaqué ni d'aucune conclusion que le déposant ait soutenu que la photocopie qu'il produisait revêtait les caractères d'une reproduction fidèle et durable au sens de l'article 1348 du code civil ; qu'il s'ensuit que le moyen, nouveau et mélangé de fait en sa cinquième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens, réunis, du pourvoi incident de Mme X..., reproduits en annexe :

Attendu, d'abord, que la cour d'appel, ayant relevé par motifs propres et adoptés, d'une part, que les trois factures que Mme X... justifiait avoir acquittées pour le compte de M. Y... équivalaient au montant du chèque émis par ce dernier et que la créancière, qui ne donne aucune autre explication à ce paiement, a encaissé, d'autre part, que les remises de fonds réalisées sur le compte de M. Y... étaient concomitantes à l'imputation en débit différé du paiement de certaines factures en rapport avec l'activité commerciale de la créancière, a pu, sans dénaturation des documents de la cause, ni inversion de la charge de la preuve, en déduire que les créances alléguées se trouvaient pour l'une éteinte par un paiement libératoire, et pour l'autre causée ;

Qu'ensuite, la cour d'appel, qui n'avait pas à suivre Mme X... dans le détail de son argumentation, a souverainement estimé que les factures et bons de livraisons de meubles meublants produits ne constituaient pas une preuve suffisante d'une créance contre M. Y... ;

Que l'arrêt n'encourt donc aucun des griefs du pourvoi incident ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident.