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Décisions

Cass. com., 9 octobre 2012, n° 11-14.498

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Laugier et Caston, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Paris, du 20 janv. 2011

20 janvier 2011

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que par acte du 12 juillet 2001, M. X... et les sociétés Prolease, Locasystem international, JM et Tana X3 Datacomputing (les promettants) se sont solidairement engagés à acheter à M. Y... cinq mille trois cent soixante actions de la société Locasystem international ; que le même jour, MM. X... et Y... ont conclu un protocole comportant une clause de sortie conjointe et précisant la procédure à respecter en cas d'introduction en bourse des titres de la société Locasystem international ; que le 1er novembre 2001, M. Y... a levé l'option dont il était bénéficiaire et a sollicité le versement du prix de cession des actions ; que reprochant aux promettants d'avoir manqué à leurs obligations en ne formulant aucune proposition de rachat des actions de la société Locasystem International, M. Y... les a fait assigner en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à M. Y... la somme de 31 567, 88 euros outre intérêts au taux légal, alors, selon le moyen :

1°/ qu'une introduction en bourse d'une société est une opération publique dont toute personne intéressée est nécessairement informée à l'avance ; qu'il incombait dès lors à M. Y..., nécessairement informé de l'opération destinée à introduire en bourse la société Locasystem international, de faire connaître en temps utile à M. X... son intention d'y participer si tel était le cas ; qu'ayant constaté que l'introduction en bourse de la société Locasystem international avait été réalisée le 2 décembre 2002, et que M. Y... n'avait fait connaître à M. X... son intention d'y participer que le 4 décembre 2003, de sorte que la mise en demeure adressée ce jour là était nécessairement tardive et ne pouvait produire aucun effet, la cour d'appel, qui a pourtant retenu que M. X... avait commis une faute en ne permettant pas à M. Y... de céder ses titres lors de l'introduction en bourse de la société, n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé l'article 1147 du code civil ;

2°/ que le protocole du 12 juillet 2001, qui se borne à énoncer qu': « en cas d'introduction à la cote officielle ou au second marché, ou au marché libre des titres de la société Locasystem international et au jour de l'introduction, M. Jacques X... s'engage irrévocablement à faire en sorte de permettre à M. Hervé Y... de diffuser dans le public la totalité ou une partie des titres que ce dernier possède dans le capital de la société », ne fait nullement obligation à M. X... d'informer particulièrement M. Y... en cas de projet d'introduction en bourse de la société Locasystem international ; que si la cour d'appel a entendu adopter les motifs des premiers juges considérant, pour retenir que M. X... avait manqué à ses obligations, « qu'au vu de la rédaction du paragraphe intitulé Entrée en bourse, M. X... devait informer M. Y... de son intention d'introduire en bourse une partie ou la totalité de ses actions et proposer à Monsieur Y... de définir le nombre d'actions dont celui-ci voulait se dessaisir, afin de constituer et de présenter une offre unique de mise en bourse », elle a dénaturé le protocole du 12 juillet 2001 en mettant à la charge de M. X... une obligation que ce protocole ne stipule pas, et a violé l'article 1134 du code civil ;

3°/ que la clause du protocole du 12 juillet 2001 par laquelle M. X... s'engageait à faire en sorte de permettre à M. Y... de diffuser dans le public la totalité ou une partie des titres que ce dernier possédait dans le capital de la société, s'analyse en une simple obligation de moyen ; que la sanction d'une telle clause suppose la démonstration d'une faute caractérisée du débiteur de cet engagement ; que dès lors, la cour d'appel, en retenant que M. X... avait commis une faute à partir de la seule énonciation qu'il n'avait pas permis à M. Y... de céder ses titres lors de l'introduction en bourse de la société, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;

4°/ que tout jugement doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; qu'en énonçant pour écarter le moyen de M. X... faisant grief à M. Y... de ne pas avoir respecté les obligations mises à sa charge par le protocole du 12 juillet 2001 « qu'il est indifférent à la solution du litige de rechercher si M. Y... a procédé à la cession de ses cinq mille cent soixante actions Locasystem international suivant ordre du 5 janvier 2004 avec ou en l'absence d'autorisation préalable du conseil d'administration », sans dire pourquoi il en serait ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de motif et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'aux termes du protocole signé le 12 juillet 2001, M. X... s'était engagé irrévocablement, en cas d'introduction en bourse des titres de la société Locasystem international, et au jour de l'introduction, à faire en sorte de permettre à M. Y... de diffuser dans le public la totalité ou une partie des titres que ce dernier possédait dans le capital de la société, ce dont il résultait que M. X... était contractuellement tenu d'informer personnellement M. Y... de l'entrée en bourse de la société Locasystem international, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à l'argumentation inopérante visée par la quatrième branche, a pu en déduire, sans dénaturer le protocole, que M. X... avait commis une faute en ne permettant pas à M. Y... de céder ses titres lors de l'introduction en bourse de la société ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1134 et 1589 du code civil ;

Attendu que pour condamner solidairement les promettants à verser une certaine somme à M. Y..., l'arrêt relève que la promesse d'achat du 12 juillet 2001 a prévu que l'acquisition par eux des cinq mille trois cent soixante actions de la société Locasystem détenues par M. Y... "... sera consentie moyennant le prix minimum de 185 francs l'action, à due concurrence de mille six cent vingt et un titres soit 299 885 francs, majoré, au prorata des actions cédées, des résultats après I. S. de la société Locasystem international cumulés des exercices clos à compter de ce jour jusqu'à la levée d'option et ce, déduction faite des dividendes distribués, lequel prix sera payable comptant au jour de la réalisation de la cession " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la promesse d'achat ne fixait un prix que pour mille six cent vingt et une actions, et que le prix des trois mille sept cent trente-neuf autres actions n'était ni déterminé ni déterminable, ce dont il résultait que cette promesse était entachée de nullité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt, après avoir reproduit les termes de la promesse d'achat, relève que par courrier du 1er novembre 2001 adressé à ses cocontractants, M. Y... a rappelé l'engagement d'acquisition de ses cinq mille trois cent soixante actions au prix de 185 francs, soit un montant global de 991 600 francs, et a mentionné : " Par la présente, je lève les options décrites ci-dessus dont je suis bénéficiaire et vous demande en conséquence de verser le prix... " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la levée de l'option n'était pas conforme aux stipulations de la promesse d'achat, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 1134 et 1589 du code civil ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que le moyen tiré de l'absence d'accord des parties sur la chose et sur le prix est inopérant dès lors que M. Y... limite ses réclamations aux nombre et prix garantis ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la promesse d'achat portant sur cinq mille trois cent soixante actions était divisible et autorisait M. Y... à ne céder qu'une partie de ses titres, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche :

Vu les articles 1134 et 1589 du code civil ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que le moyen tiré de l'absence d'accord des parties sur la chose et sur le prix est inopérant dès lors que M. Y... limite ses réclamations aux nombre et prix garantis ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la modification par M. Y... de sa levée d'option pour ne la faire porter que sur mille six cent vingt et une actions n'était pas tardive compte tenu du délai dans lequel cette levée d'option devait intervenir, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné solidairement M. X... et les sociétés Prolease, Locasystem et JM à verser à M. Y... la somme de 33 149, 45 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er novembre 2001, l'arrêt rendu le 20 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.