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Décisions

Cass. com., 14 février 2018, n° 16-24.790

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Limoges, du 15 sept. 2016

15 septembre 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 29 mars 2013, M. Christian X..., Mme Marie-France X... et M. Nicolas X... (les consorts X...) ont cédé à la société Gesadel la totalité des actions composant le capital social de la société NTP ; qu'il était convenu d'un prix provisoire, qui constituerait le prix définitif sous diverses conditions ; que toutefois, l'article 3 de la convention prévoyait que le prix des actions devait être déterminé par les experts des parties, conformément aux dispositions prévues par cet article ; qu'en cas de différend entre les experts sur les modalités et conditions d'arrêté des comptes de référence, il était stipulé qu'ils pourraient, en accord avec les parties, désigner un nouvel expert, lequel agirait en qualité de mandataire de celles-ci et serait chargé de régler ce différend et de procéder, le cas échéant, à la détermination du prix ; qu'enfin, si aucun nouvel expert n'était désigné ou si le nouvel expert ainsi désigné ne voulait ou ne pouvait exécuter la mission confiée, quel qu'en soit le motif, il était prévu qu'il serait remplacé par un expert désigné conformément à l'article 1843-4 du code civil, soit d'un commun accord par les parties, soit à défaut d'accord, par ordonnance du président du tribunal de commerce de Limoges statuant en la forme des référés, sans recours possible, à la requête de la partie la plus diligente ; que dans ce cas encore, il était stipulé que cet expert déterminerait le prix des actions en qualité de mandataire de parties et en se référant aux stipulations du présent article et que le prix qu'il fixerait devait s'imposer aux parties ; que les experts des parties n'ont pas trouvé d'accord ; qu'un expert a été désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce du 24 octobre 2014 avec mission, au vu de l'article 1843-4 du code civil, de déterminer le prix de cession définitif de l'intégralité des actions composant le capital de la société NTP ; que l'expert a déposé un prérapport et a déterminé le prix de cession en considérant que sa mission, telle que définie par l'ordonnance de désignation, lui laissait une latitude d'analyse pour passer du prix provisoire au prix définitif ; qu'estimant qu'il subsistait une ambiguïté sur le périmètre de la mission de l'expert qui, selon eux, devait s'exercer dans le respect des stipulations du contrat, les consorts X... ont présenté devant le président du tribunal de commerce une requête en interprétation de son ordonnance du 24 octobre 2014 ; que par une ordonnance du 10 juillet 2015, le juge ainsi saisi a retenu qu'une ambiguïté résultait de la modification apportée par l'ordonnance du 31 juillet 2014 à l'article 1843-4 du code civil et que dans le cas d'espèce, il convenait de se référer à l'ancienne rédaction de ce texte, en vigueur à la date de la conclusion du contrat de cession ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1843-4 du code civil, ensemble l'article 1134, alinéa 1er, du même code, dans leur rédaction applicable à la date de la convention des parties ;

Attendu que pour accueillir l'appel des consorts X... dirigé contre l'ordonnance interprétative, l'arrêt retient qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'il soit fait appel d'une décision interprétative rendue dans le cadre de l'application de l'article 461 du code de procédure civile ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que les parties étaient convenues de recourir aux dispositions de l'article 1843-4 du code civil pour fixer le prix de cession des actions faisant l'objet du contrat, ce dont il résultait qu'aucun recours n'était possible, ni contre l'ordonnance prise sur le fondement de ce texte, ni contre la décision l'interprétant, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 125 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt relève que la société Gesadel ne conteste pas la recevabilité de l'appel qui a été formé contre l'ordonnance interprétative du 10 juillet 2015 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de soulever d'office la fin de non-recevoir résultant du caractère d'ordre public des dispositions de l'article 1843-4 du code civil, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.