Cass. com., 21 mars 2018, n° 16-13.867
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Odent et Poulet
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 13 janvier 2016), que, par acte du 14 septembre 2011, la société MDE 95 a acquis de la société PG 96, gérée par M. X..., la totalité des parts composant le capital de la société STDU, également gérée par M. X..., une convention de garantie de passif étant souscrite par acte séparé du même jour ; qu'estimant qu'elle aurait dû être avertie avant la cession de ce que la société STDU avait pris l'initiative d'interrompre ses relations contractuelles avec la société Honda France Manufactoring (la société HFM) depuis juin 2011, la société MDE 95 a assigné la société PG 96 et M. X... en responsabilité ;
Attendu que la société MDE 95 fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'indemnisation alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 1.14 de la convention du 14 septembre 2011, la société PG 96 a garanti que « tous les contrats, accords, engagements auxquelles la société (STDU) est partie sont juridiquement valables et ont force obligatoire » et qu'elle « n'a pas entrepris d'y mettre fin », sans distinguer suivant le type de contrat ou accord concerné ; qu'en affirmant cependant que le contrat liant la société STDU et la société Honda France Manufacturing (HFM) ne relevait pas de ces stipulations dès lors qu'il « constituait un contrat cadre ne fixant aucune quantité, aucune fréquence et aucun prix, les commandes étant ensuite passées en fonction des besoins de HFM » de sorte qu'il « ne pouvait être reproché au cédant une fausse déclaration dans les déclarations de garantie du fait de la rupture, courant juin 2011, des relations entre STDU et HFM », la cour d'appel a introduit une distinction non prévue par la convention de garantie et l'a ainsi dénaturée, violant l'article 1134 du code civil ;
2°/ que l'article 2.1.1 de la convention du 14 septembre 2011 stipulait que « le garant (...) s'oblige, en conséquence, à indemniser intégralement le bénéficiaire de toute perte, dommage ou préjudice que celui-ci et/ou la société pourrait subir en raison (...) de l'omission d'informations significatives concernant la société » ; que les parties avaient ainsi inclus dans la garantie toute omission d'informations significatives pour la société STDU, sans en restreindre le domaine à travers des annexes notamment ; qu'en jugeant cependant que « les parties n'avaient pas entendu annexer à l'acte de cession et à la garantie venant l'assortir, de liste de clients dit stratégiques, comme le veut l'usage », pour en déduire que « l'ensemble des clients de STDU ont été lors de la cession considérés comme interchangeables et que la fin des relations avec HFM ne constituait pas, au sens de l'article 2.1.1 de la convention, l'omission d'informations significatives concernant la société, qui auraient imposé au cédant d'en faire état en annexe des documents contractuels », la cour d'appel a limité le champ d'application de la garantie du cédant en la conditionnant à la présence d'une annexe répertoriant les clients stratégiques, contrairement aux stipulations précitées ; qu'ainsi, la cour d'appel a dénaturé la convention de garantie et violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que la garantie donnée au cessionnaire par le cédant doit s'appliquer dès lors qu'une différence est constatée entre la situation sociale décrite par le cédant et la situation réelle de la société dont les titres ont été cédés, sans qu'il y ait lieu de prendre en compte les efforts réalisés par le cessionnaire postérieurement à la cession pour pallier les pertes subies ; qu'en affirmant cependant, pour débouter la société MDE 95 de sa demande d'indemnisation, que « le chiffre d'affaires de STDU n'a connu aucune baisse postérieurement à la fin des rapports commerciaux entretenus avec HFM puisqu'il a progressé de 10 % en 2011, pour augmenter de nouveau en 2012, et il n'est pas démontré que la perte du client HFM ait eu des conséquences dommageables sur l'activité de STDU », tout en constatant pourtant que le chiffre d'affaires perdu à la suite de la rupture des relations contractuelles avec la société HFM « représentait entre 7 et 18 % entre 2008 et le premier semestre 2011 », la cour d'appel a pris en compte, à tort, les efforts déployés par le cessionnaire après la cession pour remédier à une perte significative de chiffre d'affaires causée par la rupture des relations commerciales entre les sociétés STDU et HFM avant la cession, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
4°/ que la cour d'appel a constaté, par motifs adoptés, qu'« il existait bien un contrat, volontairement interrompu par M. X..., que ce contrat était naturellement substantiel, car il représentait plus de 120 000 € sur les 6 premiers mois de 2011, sur un chiffre d'affaires sur la même période de 675 780 € » ; qu'en affirmant toutefois, pour débouter la société MDE 95 de sa demande d'indemnisation, qu' « il n'est ainsi pas démontré que la perte du client HFM ait eu des conséquences dommageables sur l'activité de STDU », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'article 2.1.1. de la garantie souscrite disposait que "Le garant garantit l'exactitude et le caractère complet de toutes les déclarations ci-dessus et s'oblige à indemniser intégralement le bénéficiaire de toute perte, dommage ou préjudice que celui-ci pourrait subir en raison de l'inexactitude de l'une quelconque de ces déclarations ou de l'omission d'informations significatives concernant la société", ce dont il résulte que les parties avaient subordonné la mise en oeuvre de la garantie à l'existence d'un préjudice, l'arrêt retient que les relations commerciales avec la société HFM représentaient entre 7 et 18 % du chiffre d'affaires hors taxes de la société STDU entre 2008 et le premier semestre 2011, mais que ce chiffre d'affaires n'a connu aucune baisse après la fin des relations contractuelles avec la société HFM puisqu'il a progressé en 2011, pour augmenter de nouveau en 2012 ; qu'en l'état de ces seuls motifs, dont elle a souverainement déduit qu'il n'était pas démontré que la perte de ce client ait eu des conséquences dommageables sur l'activité de la société STDU, la cour d'appel a pu rejeter les demandes d'indemnisation formées par la société MDE 95 ; que le moyen, inopérant en ses deux premières branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.