Cass. com., 20 novembre 2001, n° 98-17.137
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
M. Huglo
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Nicolay et de Lanouvelle, Me Foussard
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 9 avril 1998), que divers avis de mise en recouvrement ont été émis à l'encontre de la société civile immobilière Jeanne d'Arc 2 ; qu'après des mises en demeure de la société, restées infructueuses, et un avis à tiers détenteur, le receveur principal des Impôts de Brive-Ouest a notifié à M. José Y..., associé de la SCI, deux mises en demeure d'avoir à payer certaines sommes représentant la moitié de la dette fiscale de la société ; que M. Y..., après que son opposition ait été rejetée, a saisi le juge de l'exécution de Brive ; qu'il a fait valoir que la procédure était irrégulière faute pour l'administration fiscale d'avoir émis à son encontre un avis de mise en recouvrement ; que le juge de l'exécution, par jugement du 28 mai 1997, a annulé la procédure de recouvrement ; que le receveur principal des Impôts de Brive-Ouest a interjeté appel ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir infirmé le jugement du juge de l'exécution et d'avoir dit la procédure régulière alors, selon le moyen :
1° que le comptable public est tenu d'adresser au redevable de l'impôt un avis de mise en recouvrement préalablement à la notification d'une mise en demeure à son encontre ; que l'établissement d'un avis de mise en recouvrement est nécessaire à l'authentification de la créance à l'égard du débiteur de celle-ci ; qu'en l'espèce, où la cour d'appel a considéré que l'avis de mise en recouvrement émis à l'encontre d'une société pouvait authentifier la créance à l'égard de M. Y... qui n'était pourtant pas visé dans ce titre, et, servir de fondement aux avis à tiers détenteur adressés à son encontre, celle-ci a violé l'article L. 256 du Livre des procédures fiscales, ensemble l'article 2 de la loi du 9 juillet 1991 ;
2° que l'associé d'une société civile ne peut être poursuivi en paiement d'une dette de la société, constatée par un titre exécutoire, qu'après l'introduction d'une instance ayant pour but d'obtenir un titre exécutoire à son encontre ; qu'en considérant qu'il résultait de la jurisprudence civile qu'un titre exécutoire à l'encontre d'une société permettait d'engager directement des poursuites à l'encontre d'un de ses associés et en en déduisant, en l'espèce, qu'un avis de mise en recouvrement émis au nom de la société Jeanne d'X... permettait d'exercer des poursuites à l'encontre de M. Y..., malgré l'absence de titre exécutoire émis contre lui, la cour d'appel a violé l'article 1858 du Code civil ;
3° que l'établissement de l'avis de mise en recouvrement et sa notification ouvre au redevable des possibilités de contestations et de sursis ; qu'en considérant que les poursuites engagées à l'encontre de M. Y... sur le fondement d'un avis de mise en recouvrement établi pour le compte de la SCI étaient régulières sans rechercher si l'absence d'avis de mise en recouvrement adressé à M. Y... n'avait pas privé ce dernier des voies de contestation et de sursis de paiement prévues par le Livre des procédures fiscales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 257 et L. 277 du Livre des procédures fiscales ;
4° que, les jugements ayant force exécutoire, auxquels sont assimilés les avis de mise en recouvrement délivrés par le comptable public, ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés ; qu'en l'espèce, les premiers juges avaient précisément relevé que l'avis de mise en recouvrement émis à l'encontre de la société Jeanne d'X... n'avait pas été notifié à M. Y... (jugement, page 4, paragraphes 4 et 5), qu'en considérant valides les actes de poursuites à l'encontre de M. Y... sans constater si le titre exécutoire délivré à la société Jeanne d'X... lui avait été personnellement notifié, la cour d'appel a donc privé sa décision de base légale au regard de l'article 503 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu en premier lieu que la cour d'appel a retenu à bon droit que l'article L. 211-2 du Code de la construction et de l'habitation, dont l'application n'est pas contestée par le pourvoi, institue à la charge des associés d'une société civile immobilière, tenus au passif social à proportion de leurs droits sociaux, une obligation de paiement sur simple commandement ou mise en demeure, lorsque la mise en demeure qui a été notifiée à la société est demeurée infructueuse, que l'avis de mise en recouvrement émis à l'encontre de la société civile immobilière constitue aux termes de l'article L. 256 du Livre des procédures fiscales un titre exécutoire authentifiant la créance fiscale, dont la personne tenue au paiement d'une imposition incombant à une autre personne peut obtenir copie en application des dispositions de l'article R. 257-2 du même Livre qui déroge ainsi à l'article 503 du nouveau Code de procédure civile, et que la procédure suivie à l'encontre de M. Y... était régulière dès lors qu'un titre exécutoire avait bien été émis à l'encontre de la société civile immobilière et que les mises en demeure à l'encontre de cette dernière étaient demeurées infructueuses ;
Attendu, en second lieu, qu'en application des dispositions de l'article R. 197-4 du Livre des procédures fiscales, M. Y... était recevable à introduire une réclamation, le débiteur solidaire de l'impôt étant soumis aux mêmes obligations et bénéficiant des mêmes droits que le débiteur principal ; que, par ce motif de pur droit, il est répondu aux conclusions invoquées par la troisième branche du moyen ;
Que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.