Cass. com., 3 mars 2015, n° 13-15.496
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 octobre 2012) rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 15 mars 2011, pourvoi n° 10-10. 450), qu'en 2003, M. X... a cédé la totalité des actions représentant le capital de la société Arbois à la société Sauvagine, qui s'est substitué la société Groupe Emeraud, aujourd'hui devenue, après absorption de la société Sauvagine, la société Sauvagine groupe Emeraud (la société Sauvagine) ; que la cession a été assortie d'une garantie de passif consentie par le cédant, dont le Crédit du Nord s'est solidairement rendu caution ; qu'après avoir été révoqué de ses fonctions de président-directeur général de la société Arbois, M. X..., invoquant la rupture du contrat de travail qui le liait à cette société et qui, suspendu par sa désignation en qualité de mandataire social, avait repris effet lors de la révocation de ses mandats sociaux, a assigné la société Arbois devant un conseil de prud'hommes ; que la société Sauvagine a mis en oeuvre la garantie de passif en invoquant l'instance prud'homale engagée par M. X... ainsi que l'appel en garantie de la société Arbois par la société Renault véhicules industriels (la société RVI) dans un litige de contrefaçon ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Sauvagine fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre du passif résultant de l'instance prud'homale engagée par M. X... alors, selon le moyen :
1°/ que la clause qui vise à « garanti (r) personnellement l'exactitude et la sincérité de chacune des déclarations ci-dessus, et (d') indemniser le bénéficiaire de toutes les conséquences dommageables pour lui d'une quelconque inexactitude, même si sa bonne foi était établie » n'a pas pour objet de garantir le cessionnaire du seul passif antérieur à la cession, mais de le garantir de tout passif qui serait la conséquence dommageable de l'inexactitude des déclarations du cédant concernant l'existence de faits ou actes antérieurs à la cession dont la révélation serait importante ; qu'en se bornant à relever, pour exclure les sommes litigieuses du périmètre de la garantie de passif, que la société Sauvagine (cessionnaire) avait eu connaissance de l'existence du contrat de travail de M. X... après la cession, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le cessionnaire en avait pris connaissance avant la cession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que la clause qui vise à « garanti (r) personnellement l'exactitude et la sincérité de chacune des déclarations ci-dessus, et (d') indemniser le bénéficiaire de toutes les conséquences dommageables pour lui d'une quelconque inexactitude, même si sa bonne foi était établie » n'a pas pour objet de garantir le cessionnaire du seul passif antérieur à la cession, mais de le garantir de tout passif qui serait la conséquence dommageable de l'inexactitude des déclarations du cédant concernant l'existence de faits ou actes antérieurs à la cession dont la révélation serait importante ; qu'en jugeant néanmoins, pour exclure du périmètre de la garantie de passif les sommes que le cessionnaire a été condamné à payer par arrêt du 15 mai 2007, que cette condamnation serait la conséquence d'un événement postérieur à la cession, à savoir la carence des nouveaux dirigeants de la société cédée à mettre en oeuvre une procédure de licenciement pour se séparer de M. X..., sans rechercher si la déclaration inexacte, sinon mensongère, de M. X... n'avait pas été à tout le moins pour partie à l'origine de l'augmentation du passif de la société cédée, de sorte que la garantie de passif devait nécessairement bénéficier totalement au cessionnaire victime d'une déclaration inexacte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate que les nouveaux dirigeants de la société Arbois n'ont pas tenu compte de la lettre de M. X... du 26 avril 2004 dans laquelle il les prévenait qu'en cas de révocation de ses fonctions d'administrateur, il y aurait lieu de le réintégrer en qualité de salarié, et que ces dirigeants se sont ainsi abstenus de mettre en oeuvre la procédure de licenciement que cette situation exigeait dès lors qu'ils avaient décidé de mettre fin au contrat de travail ; qu'il en déduit que la condamnation prononcée à l'encontre de la société Arbois, dans le cadre du litige prud'homal l'opposant à M. X..., est la conséquence d'un événement postérieur à la cession né de la carence des dirigeants de la société Arbois à mettre en oeuvre une procédure de licenciement pour se séparer de M. X... ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le passif invoqué n'était pas imputable à une déclaration inexacte de M. X..., la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer les recherches inopérantes invoquées, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Sauvagine fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en garantie d'éviction formée contre M. X... alors, selon le moyen, que le vendeur doit s'abstenir de toute action personnelle de nature à troubler la paisible jouissance de la chose vendue ; qu'en l'espèce M. X... vendeur de la totalité de ses actions dans la société Arbois a, après avoir garanti n'avoir aucun contrat de travail avec celle-ci, a agi en rupture abusive de son contrat de travail de sorte que le passif de la société Arbois s'est trouvé, après la cession, aggravé de plus de 100 000 euros ; qu'en affirmant que la condamnation de la société Arbois suite à l'action personnelle de M. X... ne relevait pas de la garantie d'éviction du vendeur, la cour d'appel a violé l'article 1626 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que les condamnations infligées à la société Sauvagine dans le cadre du litige prud'homal l'opposant à M. X... étaient la conséquence du non-respect par la société Arbois des règles du licenciement, ce dont il résulte qu'elles n'étaient pas imputables à M. X..., la cour d'appel en a déduit à juste titre qu'elles ne relevaient pas de la garantie d'éviction ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.