Cass. com., 14 décembre 1993, n° 92-11.313
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 22 novembre 1991) que la société des Gratuits du nord, devenue depuis société COMAREG nord (société COMAREG), a, par contrat du 11 mai 1988, confié, à la société Loisnard distribution (société Loisnard) (représentée par son liquidateur M. X...) la distribution, pour un secteur déterminé, de diverses publications ; que la convention stipulait en son article 4, une possiblité de dénonciation, par lettre recommandée avec accusé de réception, pour le 1er juillet de chaque année, moyennant un préavis de douze mois ; que, par courrier du 30 novembre 1990 la société Loisnard a averti la société COMAREG de ce qu'elle considérait le contrat comme valide jusqu'au 30 juin 1992, faute d'une résiliation demandée dans le délai contractuel ;
que la société COMAREG, par lettre du 10 décembre 1990, a soutenu avoir notifié par courrier du 14 juin 1990, une résiliation du contrat devant prendre effet le 30 juin 1991 ; que la société Loisnard affirmant n'avoir pas reçu ce courrier, et à la suite de l'échec de pourparlers transactionnels, a assigné la société COMAREG en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation anticipée ;
que la société COMAREG a soulevé devant le tribunal de commerce, une exception d'incompétence territoriale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société COMAREG fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette exception, alors selon le pourvoi, que toute clause dérogeant aux règles de la compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle ait été convenue entre commerçants et qu'elle ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée ; qu'en jugeant que le seul silence gardé par une partie sur des conditions générales de vente adressées après conclusion du contrat pouvait valoir acceptation de l'application d'une clause attributive de juridiction dans le cadre d'un contrat de distribution publicitaire, tandis que ce contrat ne faisait aucune référence à des "conditions générales de vente" et que les propres conditions générales de ce contrat ne comportaient aucune clause attributive de compétence, et tandis que, par ailleurs, n'était alléguée aucune relations habituelle d'affaires entre les parties au moment de la formation du contrat, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 48 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, que la cour d'appel, après avoir relevé dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, que les parties étaient en relations habituelles d'affaires, que les factures ont été régulièrement émises, et, que les conditions générales de vente figurant sur celles-ci n'avaient pas été contestées, a pu retenir la validité de la clause d'attribution de compétence invoquée par la société Loisnard, dès lors que se trouvait ainsi, démontrée l'acceptation, par la société COMAREG, de cette clause ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société COMAREG fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Loisnard la sommde de 317 523,26 francs, alors, selon le pourvoi, qu'il appartient à celui qui se prévaut de la réparation d'un préjudice d'établir le montant réel de celui-ci ; que la proposition transactionnelle de la société COMAREG visait non à réparer le préjudice effectif subi par la société Loisnard du fait de la résiliation, mais était la contrepartie de l'acceptation par cette société d'un accord transactionnel, avec abandon de toute contestation relative à la réception de la lettre de résiliation, si bien que les juges du fond en retenant la proposition transactionnelle comme base de réparation du préjudice, sans rechercher le préjudice réellement subi par la société Loisnard distribution, n'ont pas justifié légalement leur décision au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la société Loisnard n'avait pas donné son accord à la proposition de la société COMAREG de versement de la somme de 131 208 francs parce que le calcul effectué ne prenait pas en compte l'étendue exacte de la période de manque à gagner, l'arrêt retient qu'il n'en demeure pas moins que les éléments de base de cette proposition peuvent être pris en compte ; qu'ainsi la cour d'appel a apprécié souverainement la réalité et l'importance du préjudice subi par la société Loisnard par l'évaluation qu'elle en a faite ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Comareg Nord, envers la société Loisnard et M. X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du quatorze décembre mil neuf cent quatre-vingt-treize.