Cass. soc., 19 janvier 1999, n° 96-44.688
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu que M. X..., engagé le 1er février 1976 par la société CGLV et dont le contrat de travail a été rompu le 27 mai 1992 à la suite de son classement en invalidité de la deuxième catégorie, a bénéficié, conformément au contrat d'assurance de groupe souscrit par l'employeur au profit de son personnel avec la CIPC, d'une pension d'invalidité et du maintien des garanties d'un capital décès, de rentes de veuve et d'orphelins et de la couverture maladie ; que par l'effet de la fusion-absorption réalisée en décembre 1993 de la société CGLV par la société Sicasov, cette dernière a été radiée des adhérents de la CIPC en conséquence du changement de statut social des salariés de la société qui passaient d'un régime général d'assurance sociale au régime agricole ; que le 19 juillet 1994, la CIPC a notifié à M. X... le gel de sa pension d'invalidité au niveau atteint le 31 décembre 1993 et l'a renvoyé pour un maintien éventuel des autres garanties à la société Sicasov ; que celui-ci a engagé une action prud'homale à l'encontre de la société Sicasov en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de prévoyance ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° 96-44.688, dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 6 mars 1996 :
Attendu que la société Sicasov fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 6 mars 1996) d'avoir déclaré fondé M. X... en son contredit à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Créteil du 6 juin 1995 qui s'était déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris, alors, selon le moyen, que le litige consécutif à la rupture d'un contrat collectif de prévoyance souscrit par une entreprise au profit de ses salariés, et ayant pour objet la réparation réclamée par un salarié dont le contrat de travail avait été rompu avant qu'il ait été mis fin au contrat d'assurance de groupe dont il bénéficiait, sur le fondement de la faute que son ancien employeur aurait commise en ne souscrivant pas en sa faveur un autre contrat d'assurance lui assurant le maintien des garanties antérieures, ne relève pas de la compétence de la juridiction prud'homale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 511-1 du Code du travail ;
Mais attendu que, selon l'article L. 511-1 du Code du travail, les conseils de prud'hommes sont compétents pour régler les différends qui peuvent s'élever entre les employeurs et leurs salariés à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du Code du travail ; qu'il en résulte que toute action fondée sur la violation, invoquée par un salarié ou un ancien salarié, d'une obligation pesant sur l'employeur, doit être portée devant la juridiction prud'homale ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le différend qui opposait le salarié à son ancien employeur aux droits et obligations duquel il n'était pas contesté que se trouvait la société Sicasov, était né de l'exécution du contrat d'assurance souscrit par ce dernier au profit de l'ensemble de son personnel, lequel constituait un avantage social complémentaire et accessoire au contrat de travail, a exactement retenu la compétence de la juridiction prud'homale ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi n° 96.44-688, dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 septembre 1996 :
Attendu que la société Sicasov fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 11 septembre 1996) de l'avoir déclarée responsable des conséquences dommageables subies par M. X... du fait de la perte du régime d'assurance complémentaire souscrite par la CGLV à son profit, de l'avoir condamnée à lui payer une provision de 150 000 francs et d'avoir commis un expert aux fins de rechercher tous les éléments de fait nécessaires à l'évaluation du préjudice de M. X..., alors, d'une part, que la cassation de l'arrêt s'induit par voie de conséquence de la cassation de l'arrêt rendu par la même cour d'appel le 6 mars 1996, sur le premier moyen de cassation ; d'autre part, qu'en estimant que la société Sicasov, après radiation de l'adhésion au contrat d'assurance prévoyance de groupe qui avait été souscrit par la CGLV prononcée par l'assureur, la CIPC, sur le fondement de ses statuts en raison du passage des salariés du régime général au régime agricole de sécurité sociale consécutif à l'absorption de la société CGLV par la société Sicasov, avait l'obligation de souscrire au profit de M. X... une assurance lui conférant les mêmes garanties, bien que son contrat de travail ait été rompu antérieurement à la date de radiation, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil et les articles 4, 5 et 7 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 ;
Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen rend la première branche du moyen inopérante ;
Attendu, ensuite, qu'après avoir constaté qu'au jour de la fusion-absorption de la société CGLV par la société Sicasov, M. X..., dont le contrat de travail était précédemment rompu, avait droit au bénéfice, jusqu'à sa retraite, de diverses prestations contractées par l'employeur à son profit auprès de la CIPC, la cour d'appel a exactement décidé que, par l'effet de la fusion-absorption, la société Sicasov était tenue de respecter l'engagement pris par la société CGLV envers ses salariés ; qu'ayant constaté que la société Sicasov ne démontrait pas l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée d'assurer au salarié la poursuite des mêmes garanties que celles souscrites à son profit par la société CGLV, elle en a exactement déduit que sa négligence fautive dans le respect de ses obligations la rendait responsable du préjudice subi par M. X... ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 97.43-785 : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.