Cass. 1re civ., 23 septembre 2020, n° 19-11.443
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Rapporteur :
Mme Kloda
Avocat général :
M. Lavigne
Avocats :
Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix Texte intégral
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 novembre 2018), M. et Mme T..., qui séjournaient au sein d'un hôtel exploité par la société La Baie dorée (l'hôtelier), ont été victimes d'un vol d'effets personnels dans leur chambre.
2. Ils ont assigné l'hôtelier et son assureur, la société MMA IARD, en responsabilité et indemnisation de leurs préjudices matériel et moral.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. M. et Mme T... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « que l'hôtelier est responsable de plein droit du vol des objets d'un client dans la chambre de celui-ci, dans la limite de cent fois le prix de location de la chambre par journée ; qu'en affirmant cependant qu'il appartenait à M. et Mme T..., clients de l'hôtel, de prouver une faute de l'hôtelier pour engager sa responsabilité du fait du vol d'objets se trouvant dans leur chambre, la cour d'appel a violé les articles 1952 et 1953 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1952 et 1953 du code civil :
4. Il ressort de ces textes que l'hôtelier est responsable de plein droit en cas de vol des effets que les voyageurs apportent dans leur établissement et qu'en l'absence d'un dépôt de ces effets entre les mains de l'hôtelier, d'un refus de celui-ci de les recevoir, ou encore d'une faute de sa part ou des personnes dont il doit répondre, démontrée par le voyageur, les dommages-intérêts dus à ce dernier sont, à l'exclusion de toute limitation conventionnelle inférieure, limités à l'équivalent de cent fois le prix de location du logement par journée.
5. Pour rejeter leurs demandes, l'arrêt retient que M. et Mme T... ne démontrent pas l'existence d'une faute caractérisée de l'hôtelier permettant de retenir sa responsabilité.
6. En statuant ainsi, alors que la responsabilité de l'hôtelier n'est pas soumise à la preuve d'une faute, qui n'est prise en compte que lors de la fixation de l'indemnisation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur la cinquième branche du moyen
Enoncé du moyen
7. M. et Mme T... font le même grief à l'arrêt, alors « que la preuve à l'égard d'une société commerciale peut être rapportée par tout moyen, notamment par une photocopie ou une attestation ; qu'en affirmant cependant que M. et Mme T... n'établissaient pas la valeur des objets dérobés dès lors qu'ils ne produisaient que des photocopies de factures ou estimations, et non les originaux des factures d'achat, la cour d'appel, qui ne pouvait dénier toute force probante aux pièces produites du seul fait qu'il s'agissait de photocopies ou d'estimations, a violé l'article L. 110-3 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 110-3 du code de commerce :
8. Aux termes de ce texte, à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi.
9. Pour rejeter leurs demandes, l'arrêt retient que M. et Mme T... ne produisent aux débats que des photocopies de factures ou d'estimations qui ne présentent aucune valeur probante, les originaux n'ayant pas été fournis.
10. En statuant ainsi, alors que la preuve est libre en matière commerciale, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.