Cass. 3e civ., 12 avril 1972, n° 70-14.356
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. de Montera
Rapporteur :
M. Lecharny
Avocat général :
M. Tunc
Avocat :
Me Choucroy
SUR LE MOYEN UNIQUE : ATTENDU QUE LA SOCIETE ANONYME COMMERCIALE DES CHAUSSURES BALLY, QUI AVAIT DONNE A BAIL DIVERS LOCAUX A LA SOCIETE DES ETABLISSEMENTS SETAMIL, AUX DROITS DE QUI SE TROUVE PRESENTEMENT LA SOCIETE COMMERCIALE FRANCO-AFRICAINE DENOMMEE SOCIETE TWIGGY, FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR REJETE UNE DEMANDE EN RESILIATION DE BAIL ET ACCESSOIREMENT EN DOMMAGES-INTERETS, INTENTEE PAR UN BAILLEUR CONTRE SON LOCATAIRE QUI AVAIT TRANSFORME LES LIEUX LOUES SANS L'AUTORISATION ECRITE DU PROPRIETAIRE EXIGEE AU CONTRAT, AUX MOTIFS QU'IL APPARAIT A L'EVIDENCE QUE LES FAITS REPROCHES CONSTITUENT UNE INFRACTION A LA CLAUSE DU BAIL, MAIS, QU'EN L'ESPECE, L'INFRACTION NE PRESENTE PAS UN CARACTERE DE GRAVITE SUFFISANTE POUR JUSTIFIER LA RESILIATION, EN EGARD A L'ABSENCE DE DESORDRE AU GROS OEUVRE ET A L'EXISTENCE D'UNE PLUS-VALUE DONT BENEFICIERA, EN FIN DE BAIL, LE BAILLEUR QUI NE SUBIT AINSI AUCUN PREJUDICE, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE, D'UNE PART, LA GRAVITE D'UNE FAUTE NE S'APPRECIE PAS EN FONCTION DU PREJUDICE, MAIS SEULEMENT DE LA NATURE DU MANQUEMENT COMMIS, QU'AINSI LES JUGES DU FOND NE POUVAIENT LEGALEMENT DENIER A L'INFRACTION CONSTATEE TOUT CARACTERE DE GRAVITE PAR DES CONSIDERATIONS TIREES EXCLUSIVEMENT DE L'ABSENCE PRETENDUE DE PREJUDICE, ET SE DEVAIENT EN TOUT CAS DE RECHERCHER, AINSI QU'ILS Y ETAIENT INVITES, PAR DES CONCLUSIONS DEMEUREES SANS REPONSE, SI LES MANOEUVRES DONT LE PRENEUR AVAIT ACCOMPAGNE L'INFRACTION CONSOMMEE, N'ETAIENT PAS DE NATURE A JUSTIFIER LA RESILIATION DEMANDEE, ET QUE, D'AUTRE PART, EN TOUT ETAT DE CAUSE, LA COUR D'APPEL N'A PAS EXAMINE SI, INDEPENDAMMENT DE TOUT PREJUDICE MATERIEL, L'ATTITUDE DU PRENEUR, PAR SA PERSISTANCE CONSCIENTE DANS L'INFRACTION ET SES MANOEUVRES DELIBEREES, N'AVAIENT PAS ETE CAUSE D'UN PREJUDICE MORAL IMPORTANT QUI JUSTIFIAIT TOUT AU MOINS DES DOMMAGES-INTERETS ;
MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR RAPPELE TOUTES LES PHASES DE LA PROCEDURE ET LES INCIDENTS AUXQUELS ELLE A DONNE LIEU, LES JUGES DU FOND ONT, SANS ETRE TENUS DE SUIVRE LES PARTIES DANS LE DETAIL DE LEUR ARGUMENTATION, RELEVE QUE LES TRAVAUX REALISES PAR LA SOCIETE LOCATAIRE, EN INFRACTION AUX CLAUSES DU BAIL, N'AVAIENT APPORTE AUCUNE GENE A L'IMMEUBLE, QU'ILS N'AVAIENT RIEN DETERIORE, ET N'AVAIENT AMENE AUCUN DESORDRE DANS LE GROS OEUVRE, QUE NON SEULEMENT ILS N'AVAIENT NUI NI A L'IMMEUBLE NI A SON PROPRIETAIRE, MAIS ENCORE AVAIENT ETE, POUR LES LOCAUX LOUES, LESQUELS ETAIENT AUPARAVANT SALES ET VETUSTES, UNE CAUSE DE PLUS-VALUE ET D'EMBELLISSEMENT, ET QU'ENFIN, SI, EN DEPIT DE CES AVANTAGES, LA SOCIETE BAILLERESSE NE VOULAIT PAS CONSERVER LES AMENAGEMENTS REALISES, ELLE AURAIT LA FACULTE D'EXIGER LE RETABLISSEMENT DES LIEUX DANS LEUR ETAT PRIMITIF SANS DEBOURS DE SA PART ET AUX FRAIS DE SA LOCATAIRE ;
ATTENDU QU'USANT AINSI DE SON POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION LA COUR D'APPEL A ESTIME QUE LA FAUTE AINSI ANALYSEE N'ETAIT PAS SUFFISAMMENT GRAVE POUR JUSTIFIER LA RESILIATION JUDICIAIRE DU BAIL, ET A CONSIDERE QUE LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTERETS FORMEE PAR LA SOCIETE BALLY, LAQUELLE N'AVAIT PAS PRECISE DANS SES CONCLUSIONS SI ELLE ENTENDAIT OBTENIR REPARATION D'UN PREJUDICE MORAL, N'ETAIT PAS FONDEE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS JUSTIFIE ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 26 JUIN 1970 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.