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Décisions

Cass. crim., 14 juin 2017, n° 16-84.921

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

Mme Chauchis

Avocat général :

M. Le Baut

Avocat :

Me Bouthors

Dijon, du 23 juin 2016

23 juin 2016

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4, § 1, du Protocole additionnel n° 7 à ladite Convention, 131-21, 314-1, 314-2, 324-1 du code pénal, de l'article préliminaire et des articles 2, 10, 591, 593 et 706-41 et suivants du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt a déclaré le requérant coupable d'abus de confiance et de blanchiment, a ordonné la confiscation de ses biens et prononcé contre lui une peine d'emprisonnement ferme ;

" aux motifs, d'une part, que les éléments du dossier permettent d'établir que le prévenu est l'auteur d'abus de confiance au préjudice de Mme Cécile Y...veuve Z..., personne qu'il savait particulièrement vulnérable en raison de son âge et de sa déficience psychique ; que la multiplication des comptes appartenant tant à la partie civile qu'au mis en examen ne s'explique que par la volonté de M. David X... de dissimuler les abus de confiance au préjudice d'une personne particulièrement vulnérable commis par lui, si bien que le délit de blanchiment est également établi à son égard ; qu'aux motifs, éventuellement adoptés des premiers juges, que M. X... a fait l'acquisition de biens immobiliers à son nom, soit avec l'argent détourné, soit grâce à des emprunts souscrits à son nom, mais dont le remboursement était nécessairement assuré par l'argent détourné ; que de surcroît, il a consenti des prêts à des amis, issus de l'argent appartenant à Mme Z..., en obtenant d'eux une reconnaissance de dette à son propre nom ; que dès lors, il s'est rendu coupable d'une dissimulation ou d'une conversion du produit du délit d'abus de confiance ; que d'autre part, que les agissements particulièrement peu scrupuleux commis par M. X... à l'encontre d'une personne âgée et dans l'incapacité de défendre ses intérêts ne peuvent être que sanctionnés par une peine d'emprisonnement, les actes commis à l'encontre des enfants et des vieillards étant ceux les plus graves tant pour le législateur que pour l'opinion publique ; que ce mis en examen n'a pas su tirer profit des précédents avertissements qui lui ont été précédemment donnés par les juridictions répressives, si bien que la peine de cinq ans d'emprisonnement, dont deux ans avec sursis, prononcée par les premiers juges doit être confirmée ;

" 1°) alors que l'incrimination de blanchiment, de droit strict, est relative au concours apporté au placement du produit d'une infraction principale ; qu'elle ne peut donc légalement être appliquée à l'auteur de l'infraction d'origine mais seulement à d'éventuels comparses dans le cadre du remploi du produit de l'infraction initiale ; qu'en condamnant le requérant du chef cumulé d'abus de confiance et de blanchiment, la cour a violé les textes et principes cités au moyen ;

" 2°) alors que le principe ne bis in idem, qui est d'ordre public, interdit qu'à raison de faits identiques, le prévenu d'abus de confiance, délit principal, soit également poursuivi et condamné du chef de blanchiment du produit de cette infraction ;

" 3°) alors qu'en matière correctionnelle, le juge répressif ne peut prononcer une peine d'emprisonnement ferme qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine, laquelle ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur ainsi que la situation matérielle, familiale et sociale de celui-ci, rendent cette peine nécessaire et si tout autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en prononçant contre le requérant une peine pour partie ferme sans s'interroger sur l'ensemble des critères précités, et sans rechercher si une sanction alternative était manifestement inadéquate, la cour a derechef violé les textes cités au moyen " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel des chefs d'abus de confiance au préjudice de Mme Cécile Y...veuve Z..., d'une particulière vulnérabilité en raison de son âge, et de blanchiment ; que les juges du premier degré l'ont reconnu coupable des faits qui lui étaient reprochés ; que le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;

Sur le moyen, pris en sa première branche :

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable du délit de blanchiment, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen ;

Qu'en effet, l'article 324-1 du code pénal, instituant une infraction générale et autonome de blanchiment, distincte, dans ses éléments matériel et intentionnel, du crime ou du délit ayant généré un produit, réprime, quel qu'en soit leur auteur, des agissements spécifiques de placement, dissimulation ou conversion de ce produit, de sorte que cette disposition est applicable à celui qui blanchit le produit d'une infraction qu'il a commise ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Attendu que le prévenu ne saurait faire grief à l'arrêt de le déclarer coupable, cumulativement, du délit d'abus de confiance aggravé et du délit de blanchiment, ceux-ci ne procédant pas, en l'espèce, de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que pour condamner M. X... à cinq ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis, l'arrêt retient que les agissements particulièrement peu scrupuleux qu'il a commis à l'encontre d'une personne âgée et dans l'incapacité de défendre ses intérêts ne peuvent être que sanctionnés par une peine d'emprisonnement, les actes commis à l'encontre des enfants et des vieillards étant ceux les plus graves tant pour le législateur que pour l'opinion publique et qu'il n'a pas su tirer profit des précédents avertissements qui lui ont été donnés par les juridictions répressives ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les juges ont nécessairement apprécié que toute autre sanction que l'emprisonnement sans sursis était inadéquate, qui répondent aux exigences de l'article 132-19 du code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'ainsi le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.