Cass. com., 31 mars 2015, n° 14-11.735
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 novembre 2013), que M. X... et M. Y..., ayant créé en 2008 la société à responsabilité limitée CS & A (la société), ont, la même année, ouvert son capital à MM. Z..., A..., B... et C... (les associés majoritaires) avec lesquels ils ont signé une convention prévoyant notamment qu'en cas de vente du fonds de commerce de la société, la moitié de la fraction du prix dépassant la somme de 300 000 euros reviendrait aux associés fondateurs ; qu'une assemblée des associés, réunie le 17 décembre 2009, à l'initiative de MM. Z... et A..., cogérants, a décidé de réduire le capital à zéro et de l'augmenter corrélativement par la création de nouvelles parts d'une valeur nominale de 4 000 euros, la souscription de huit parts nouvelles, dont l'une par un nouvel associé, étant constatée par une assemblée du 16 janvier 2010 à laquelle MM. X... et Y..., qui n'avaient pas participé à l'augmentation du capital social, n'ont pas été convoqués ; que faisant valoir que les décisions prises le 17 décembre 2009 l'avaient été de manière irrégulière, faute d'avoir été adoptées à la majorité requise, MM. X... et Y... ont assigné les associés majoritaires ainsi que la société et demandé leur condamnation au paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts ; qu'une nouvelle assemblée des associés réunie le 19 avril 2011, à laquelle MM. X... et Y..., qui y avaient été convoqués, n'ont pas participé, a de nouveau voté la réduction du capital à zéro et son augmentation par la création de nouvelles parts d'une valeur nominale de 4 000 euros ; que MM. X... et Y... n'ont pas souscrit à l'augmentation du capital social ; que le 22 novembre 2011, la société a vendu son fonds de commerce pour le prix de 420 000 euros ;
Attendu que MM. X... et Y... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen :
1°/ que dans leurs conclusions d'appel, MM. X... et Y... ont expressément soutenu que l'augmentation de capital décidée irrégulièrement le 17 décembre 2009 n'avait pas été utilisée pour combler les pertes de la société CS & A mais à rembourser le compte courant de M. Z... et que l'opération de réduction et d'augmentation du capital social n'avait eu pour but que de les exclure de la société en raison de leur désaccord sur la gestion de la société en les privant du bonus prévu au pacte d'actionnaires lors de la revente du fonds de commerce ; qu'en considérant que MM. X... et Y... ne soutenaient pas que l'opération de réduction et d'augmentation du capital aurait été contraire à l'intérêt social et n'avait eu pour but que de les exclure de la société, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en s'abstenant de rechercher si l'opération de réduction et d'augmentation du capital, effectuée peu de temps avant la revente du fonds de commerce, n'avait pas eu pour but de priver MM. Y... et X... du bénéfice du bonus prévu au pacte d'actionnaires dont ils sont fondés à demander réparation, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ que la disparition de la cause de nullité ne met pas obstacle à l'exercice de l'action en dommages et intérêts tendant à la réparation du préjudice causé par le vice dont la délibération était entachée ; que l'associé irrégulièrement évincé de la société sans indemnisation subi nécessairement un préjudice ouvrant droit à réparation ; qu'en déboutant MM. X... et Y... de leur demande de dommage et intérêts après avoir pourtant constaté qu'ils avaient irrégulièrement été exclus de la société pendant une période de seize mois, la cour d'appel a violé les articles 1382 du code civil et L. 235-13 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que MM. X... et Y... ne démontrent pas que l'opération de réduction et d'augmentation du capital aurait été contraire à l'intérêt social, dès lors que la société présentait au 19 avril 2011 une perte cumulée de 340 000 euros et des fonds propres négatifs de 189 860 euros, et qu'elle n'aurait eu d'autre but que de les évincer de l'actionnariat ; qu'il ajoute que les intéressés, qui n'ont pas souhaité souscrire à l'augmentation de capital régulièrement décidée, se sont exclus eux-mêmes de la société et du bénéfice des droits qu'ils détenaient comme associés et signataires du pacte d'actionnaires ; que la cour d'appel a ainsi, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, procédé à la recherche prétendument omise ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant constaté que pour la période de seize mois qui s'était écoulée entre le 17 décembre 2009 et le 19 avril 2011, durant laquelle leur « exclusion » avait procédé de décisions irrégulières, MM. X... et Y... ne démontraient pas avoir souffert le moindre préjudice, financier ou moral, la cour d'appel a fait l'exacte application des dispositions de l'article 1382 du code civil ;
D'où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.