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Décisions

CE, sect. du contentieux, 10 octobre 2003, n° 260867

CONSEIL D'ÉTAT

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Rapporteur :

M. Stirn

Avocat :

SCP Boullez

CE n° 260867

9 octobre 2003

Vu la requête, enregistrée le 7 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. François-Régis A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 19 septembre 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police d'accorder le concours de la force publique à l'exécution du jugement du tribunal d'instance de Paris du 2 mai 2002 ordonnant l'expulsion de Mme Estelle Rouah d'un appartement dont M. A est propriétaire ;

2°) d'enjoindre sous astreinte de 250 euros par jour de retard au préfet de police d'accorder le concours de la force publique à l'exécution de ce jugement ;

3°) subsidiairement de prononcer cette injonction au moins en ce qui concerne la chambre de service louée par bail séparé à Mme Rouah ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient qu'il n'a pas été mesure de répondre au mémoire du préfet de police et qu'ainsi les exigences du caractère contradictoire de la procédure n'ont pas été respectées ; qu'avisé de l'audience la veille seulement, il n'a pas été en mesure de s'y présenter ; que le juge des référés a commis une erreur de droit en appréciant la décision du préfet de police, qui ne peut être fondée que sur des motifs d'ordre public, au regard de considérations humanitaires ; qu'en l'espèce aucun motif d'ordre public ne justifie un refus d'expulsion ; qu'en tout état de cause aucun motif de cette nature n'existe pour la chambre de service que Mme Rouah a sous-louée ; que la condition d'urgence est remplie ; qu'il y a donc lieu pour le juge des référés de faire usage des pouvoirs que lui confère l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;


Considérant qu'en vertu de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, le juge des référés peut rejeter, par une ordonnance motivée, sans audience ni instruction, une requête lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, qu'elle n'est pas fondée ;

Sur la régularité de la procédure de première instance :

Considérant que l'article L. 5 du code de justice administrative dispose que : L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence ; qu'aux termes de l'article L. 522-1 de ce code : Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2...il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique ;

Considérant que, saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative le 18 septembre 2003, le juge des référés, qui, selon cet article, se prononce dans un délai de quarante-huit heures, a tenu une audience publique le 19 septembre et statué à l'issue de cette audience ; que M. A a été informé de la date et de l'heure de celle-ci ; qu'il lui appartenait de s'y rendre pour prendre connaissance des observations présentées le jour même par le préfet de police et pour les discuter devant le juge des référés ; que, faute de l'avoir fait, il n'est pas fondé à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure aurait été méconnu ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'il incombe à l'autorité administrative d'assurer, en accordant au besoin le concours de la force publique, l'exécution des décisions de justice ; que les exigences de l'ordre public peuvent toutefois justifier légalement, tout en engageant la responsabilité de l'Etat sur le terrain de l'égalité devant les charges publiques, un refus de concours de la force publique ;

Considérant que, pour refuser le concours de la force publique sollicité par le requérant, le préfet de police s'est fondé sur la situation de la personne dont l'expulsion était demandée, en faisant valoir qu'elle est âgée de 83 ans, qu'elle réside dans les lieux depuis 35 ans, qu'elle y vit avec sa fille, que ses ressources sont faibles et qu'elle n'a pas de solution de relogement ; qu'en estimant que de tels motifs pouvaient être légalement invoqués pour justifier un refus de concours de la force publique, le juge des référés du tribunal administratif de Paris n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'en l'état du dossier, le refus du préfet ne peut, même en ce qui concerne la chambre de service louée à Mme Rouah en plus de son appartement, être regardé comme entaché d'une illégalité grave et manifeste nécessaire à l'application des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de M. A est manifestement infondée ; qu'il y a lieu, en conséquence, de la rejeter, y compris en ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code ;

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. François-Régis A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. François-Régis A.