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Décisions

Cass. com., 25 février 2003, n° 00-22.117

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rapporteur :

Mme Collomp

Avocat général :

M. Feuillard

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Le Bret-Desaché

Paris, du 19 sept. 2000

19 septembre 2000

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, qu'ayant fourni à la société Tasiver des matériaux nécessaires à la réalisation d'un marché dont celle-ci était attributaire, la société Evry façonnage a cédé, selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981, codifiée sous les articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier, une partie des créances dont elle était titulaire à ce titre à la société FMN factoring aux droits de laquelle se trouve la société Fortis commercial finance ; que la société Tasiver s'est opposée à l'action en paiement de la société FMN factoring en faisant valoir que faute de production des bordereaux, certaines des cessions n'étaient pas justifiées et que les créances revendiquées correspondaient partiellement à des prestations sous-traitées par la société Evry façonnage à la société Laubeuf qui exerçait contre elle l'action directe ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Tasiver fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à paiement, alors, selon le moyen :

1 ) qu'en application de l'article 13-1 de la loi du 31 décembre 1975 l'entrepreneur principal ne peut céder à un banquier les créances résultant du contrat avec le maître de l'ouvrage au-delà des sommes qui lui sont dues au titre des travaux qu'il effectue personnellement ; que la cession de la créance correspondant à la dette de l'entrepreneur principal à l'égard du sous-traitant est inopposable à ce dernier ; que l'établissement de crédit, porteur de créances cédées par l'entrepreneur principal ne disposant pas de plus de droit que son cédant, ne peut donc pas s'opposer au paiement du sous-traitant agissant pour obtenir le paiement direct du maître de l'ouvrage ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des dispositions de l'article 13-1 de la loi du 31 décembre 1975 ;

2 ) que l'action directe ne suppose pas nécessairement qu'une procédure soit engagée par le sous-traitant ; que cette action directe passe seulement par une mise en demeure adressée au débiteur et notifiée par lettre recommandée au maître de l'ouvrage ; qu'en statuant comme elle a fait, tout en constatant que l'appelante produisait ladite lettre recommandée et en relevant seulement l'absence de procédure engagée contre elle par la société sous-traitante, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 ;

Mais attendu que l'arrêt relève aussi, par motifs adoptés, que la société Tasiver ne rapportait pas la preuve de l'existence du contrat de sous-traitance dont aurait prétendument bénéficié la société Laubeuf ; qu'ainsi, indépendamment des motifs erronés, exactement critiqués par la seconde branche du moyen, la décision se trouve légalement justifiée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 devenu l'article L. 313-23 du Code monétaire et financier ;

Attendu que pour rejeter les contestations de la société Tasiver, l'arrêt retient que le litige opposant deux sociétés commerciales et la preuve des cessions pouvant être rapportée par tout moyen, celle-ci résultait suffisamment du tampon, apposé sur toutes les factures, faisant état de leur cession ainsi que du fait que la société Tasiver avait déjà effectué, sans protester, plusieurs autres paiements de factures portant le même cachet ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'à défaut de production des bordereaux de cession de créance revêtus de toutes les mentions exigées par l'article 1er de la loi du 2 janvier 1981 devenu l'article L. 313-23 du Code monétaire et financier, fût-elle justifiée par une impossibilité matérielle, les cessions litigieuses, à les supposer même établies, n'étaient pas opposables aux tiers ce dont il résultait que la société FMN factoring ne pouvait demander paiement au débiteur cédé sur le fondement de documents qu'elle ne représentait pas, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 septembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.