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Décisions

Cass. crim., 12 juillet 2016, n° 15-87.348

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

Mme Harel-Dutirou

Avocat général :

M. Lagauche

Avocats :

SCP Foussard et Froger, SCP Lesourd, SCP Piwnica et Molinié

ch. instr. Paris, du 20 nov. 2015

20 novembre 2015

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 15 février 2016, ordonnant l'examen immédiat des pourvois ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur les pourvois de M. Y..., Mme Z..., M. B...:

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II-Sur le pourvoi de Mme A...:

Vu le mémoire personnel produit ;

Attendu que ce mémoire, qui ne vise aucun texte de loi et n'offre à juger aucun moyen de droit, ne remplit pas les conditions exigées par l'article 590 du code de procédure pénale ; qu'il est, dès lors, irrecevable ;

III-Sur le pourvoi formé par la société Les Laboratoires X..., la société IRIS, la société Adir, la société X... Forschung und Pharma Entwicklung Gmbh, la société Biopharma, la société Laboratoires X... industrie, la société Oril industrie, la société Biofarma, la société X... :

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que deux informations ont été ouvertes devant le juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, spécialisé en matière sanitaire, par réquisitoires introductifs du 18 février 2011, contre personne non dénommée, des chefs, d'une part, d'homicides et blessures involontaires, d'autre part, d'obtention indue d'autorisation, tromperie sur les qualités substantielles du Médiator avec mise en danger de la vie de l'homme, prise illégale d'intérêts ; que, dans la seconde information, les juges ont diligenté, notamment, une expertise pour examiner les études épidémiologiques relatives au Médiator et une commission rogatoire dans le cadre de laquelle des perquisitions et saisies de documents ont été effectuées ; que plusieurs mises en examen ont été ordonnées, notamment, celle de la société Les Laboratoires X..., pour obtention indue d'autorisation, tromperie sur les qualités substantielles et sur les risques inhérents à l'utilisation du Médiator avec mise en danger de l'homme et escroquerie, trafic d'influence et complicité de prise illégale d'intérêts, celle des sociétés Laboratoires X... industries, X..., Oril industrie, Biofarma, Biopharma pour obtention indue d'autorisation, tromperie sur les qualités substantielles et sur les risques inhérents à l'utilisation du Médiator avec mise en danger de l'homme et escroquerie ; que M. Charles C..., praticien hospitalier, professeur d'université, membre puis président de la commission d'autorisation de mise sur le marché de 1993 à 2003, M. Michel Y..., professeur agrégé de médecine interne, et M. Jean-Roger D..., professeur en pharmacie, tous deux membres de la commission pendant plusieurs années, ont été mis en examen pour prise illégale d'intérêts ; que les sociétés Adir et IRIS ont été mises en examen respectivement pour complicité et recel de ce délit ; que, par arrêt du 7 mars 2014, devenu définitif à la suite d'un arrêt de la chambre criminelle du 19 décembre 2014, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris s'est prononcée sur plusieurs requêtes en nullité ; qu'elle a été, à nouveau, saisie de demandes des mis en examen tendant en particulier à l'annulation de la saisie des scellés, des mises en examen de MM. C..., Y..., D...et des sociétés Adir et IRIS, du rapport d'expertise définitif, des actes réalisés par l'assistant spécialisé du pôle santé publique du tribunal de grande instance de Paris, de l'ordonnance de disjonction-jonction des procédures rendue par les juges d'instruction ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 56, 56-3, 81, 96, 171, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;

" aux motifs que, sur la nullité des scellés Beregi, les scellés effectués lors des perquisitions réalisées du 27 au 30 septembre 2011, au centre Lazlo Beregi ont été déposés au greffe du juge d'instruction dès le 30 septembre 2011, selon le tampon d'enregistrement de ce service ; que les procès-verbaux relatant les circonstances dans lesquelles les saisies ont été effectuées n'étaient pas nécessaires à la connaissance des faits et aux interrogatoires effectués par les juges et avaient pour seul objet de permettre la vérification de la régularité de la saisie, qu'ainsi l'instruction a pu se poursuivre malgré leur absence au dossier ; que le classement de ces procès-verbaux à la procédure d'instruction le 8 janvier 2014, plus de trois mois avant la notification de la fin de l'information, n'a pas porté atteinte aux droits de la défense qui a disposé de délais pour en contester utilement la régularité ; que nonobstant l'absence d'originaux ou de copie certifiée conforme, la signature des procès-verbaux par les représentants des laboratoires X... rend certaine la date de réalisation de ces actes et exclut tout stratagème, qu'aucune nullité n'est encourue ; que les enquêteurs ont fait appel à un médecin du conseil de l'ordre pour prendre connaissance des documents médicaux non anonymisés, qu'à supposer la violation du secret médical comme étant un motif d'annulation, les sociétés requérantes sont irrecevables faute d'intérêt à agir, à demander la nullité de documents au motif qu'apparaît le nom des malades ; que le local Beregi où aucun médecin n'exerce la médecine et reçoit des patients, n'est pas un cabinet médical et aucune nullité ne peut trouver son fondement sur la violation de l'article 56-3 du code de procédure pénale ;

" 1°) alors que la chambre de l'instruction est tenue de répondre aux arguments péremptoires des parties ; que les sociétés requérantes relevaient avoir été interrogées sur les pièces saisies sans pouvoir vérifier leur régularité en l'absence au dossier des procès-verbaux de transport et de perquisition à l'origine de ces saisies ; qu'en écartant la nullité des procès-verbaux de saisies aux motifs inopérants que les procès-verbaux relatant les circonstances des saisies n'étaient pas nécessaires aux interrogatoires et avaient pour seul objet la vérification de la régularité des saisies tandis que, précisément, les sociétés critiquaient l'impossibilité de vérifier la régularité des saisies, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

" 2°) alors qu'en application de l'article 81 du code de procédure pénale, le dossier doit contenir les originaux et les copies certifiées conformes des pièces de la procédure ; que seules des copies, et non certifiées conformes, ont été versées au dossier de la procédure ; qu'en énonçant que les procès-verbaux ont été signés par les représentants des sociétés pour en déduire l'absence de toute irrégularité, tandis que les originaux et les copies certifiées conformes sont indispensables à l'examen de la régularité de l'ensemble de la procédure, la chambre de l'instruction n'a pas davantage justifié sa décision ;

" 3°) alors que les sociétés faisaient valoir que des pièces avaient été irrégulièrement versées à la procédure par l'OCLAESP ; qu'en s'abstenant de répondre à cet argument péremptoire, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

" 4°) alors qu'une partie est recevable à invoquer l'irrégularité d'un acte de la procédure concernant un tiers si cet acte illégalement accompli a porté atteinte à ses intérêts ; qu'il résulte des articles 56 et 56-3 du code de procédure pénale l'obligation, préalablement aux perquisitions et saisies, de procéder à toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et notamment le secret médical ; que le secret médical est général et absolu ; qu'ont été saisies des pièces non anonymisées protégées par le secret médical ; qu'en refusant l'annulation de ces saisies aux motifs inopérants que la perquisition n'a pas eu lieu dans un cabinet médical et que les sociétés étaient irrecevables à demander la nullité d'actes concernant des tiers tandis que ces pièces sont invoquées par l'accusation à l'appui de leurs mises en examen et leur porte nécessairement grief, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés " ;

Attendu que les demanderesses ne sauraient se faire un grief de ce que les copies des procès-verbaux de perquisitions et de saisies effectuées au centre Lazlo Beregi manquants ont été versées tardivement dans la procédure dès lors qu'elles ont été en mesure d'en discuter contradictoirement la régularité et le contenu ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 432-12 du code pénal, L. 1451-1 et L. 5323-4 du code de la santé publique, préliminaire, 80-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;

" aux motifs que sur la nullité des mises en examen de M. Y..., des sociétés Adir et IRIS, l'article L. 793-8 devenu L. 5323-4 du code de la santé publique rappelle que les personnes collaborant aux travaux de l'agence du médicament ne peuvent traiter une question dans laquelle elles auraient un intérêt direct ou indirect ; que nonobstant les déclarations publiques d'intérêt, il existe des indices graves et concordants rendant plausible la commission du délit de prise illégale d'intérêts par M. Y...de 1985 à 2011 en participant à la CAMM qui donnait son avis sur les médicaments fabriqués par le groupe X..., notamment, à la réunion du 5 avril 2007, alors qu'en même temps, il renseignait Les Laboratoires X... sur les appréciations de l'administration concernant ce médicament et l'attitude que devaient tenir Les Laboratoires X... en réponse, que sa mise en examen n'encourt aucune nullité ; que de même, il résulte des indices graves et concordants rendant vraisemblable que la société Adir, en signant un contrat avec M. Y...prévoyant une rémunération, a incité celui-ci à commettre l'infraction de prise illégale d'intérêts, que percevant des fonds en provenance des Laboratoires X..., M. Y...a voulu rendre des services ; que la société IRIS a bénéficié des agissements de M. Y...en recueillant les informations sur les points de vue émis au cours des réunions au sein de l'administration, que la mise en examen de la société IRIS du chef de recel de prise illégale d'intérêts est régulière ; que, sur les mises en examen de M. D...et de la société Adir, M. D...a été nommé à la CAMM à titre personnel de 1984 à 2003 puis en qualité de représentant de l'académie de pharmacie de 2006 à 2009, que les avis qu'il donnait au sein de cette instance étaient écoutés et évidemment d'une grande importance dans la surveillance des médicaments et, notamment, du Médiator en raison de ses compétences et de son ancienneté dans la commission ; que M. D...en donnant son avis à l'Agence du médicament, sous tutelle du ministère de la santé sur le mérite d'un médicament exerçait une mission de service public ; que l'avis qu'il donnait même consultatif participait de la décision et qu'ainsi M. D...avait la surveillance du médicament au sens de l'article 432-12 du code pénal ; que, pour les mêmes motifs que ceux exposés pour M. Y..., les déclarations publiques d'intérêt ne font pas obstacle à la commission de l'infraction ; que les fonctions de surveillance des médicaments et donc du Médiator, sa présence à la commission du 5 avril 2007 pendant laquelle a été évoquée la question du rapport bénéfice/ risque du Médiator, concomitantes à celles de consultant rémunéré des Laboratoires X... qui, de plus, employaient son épouse, sont constitutives d'une situation de prise illégale d'intérêts et la mise en examen du professeur M. D...est régulière ; qu'en souscrivant un contrat et en rémunérant M. D...en exécution du contrat, les sociétés IRIS et Adir ont pu faciliter l'infraction et ces agissements constituent des indices graves et concordants rendant vraisemblable leur participation à l'infraction de prise illégale d'intérêts, que leur mise en examen n'encourt aucune nullité ; que, sur la nullité de la mise en examen de M. C...et de la société IRIS, par arrêt définitif du 7 mars 2014, la chambre de l'instruction a statué sur la régularité de la mise en examen de M. C..., que les requérants ne font valoir aucun nouveau moyen de nullité ; que la société IRIS en passant un contrat et en promettant une rémunération à M. C...à travers la société FC Consulting a facilité l'infraction reprochée à ce dernier et la mise ne examen de la société IRIS, n'encourt aucune nullité ;

" 1°) alors que ne peut être mise en examen que la personne à l'encontre de laquelle existent des indices graves ou concordants de participation à la commission d'une infraction ; que le délit de prise illégale d'intérêts réprime le fait, par une personne chargée de surveiller une entreprise, de recevoir un intérêt dans ladite entreprise ; que les sociétés invoquaient que les membres de la commission d'AMM ne font pas partie d'un organe élaborant des décisions, mais se bornent à donner un avis consultatif ; qu'en ne répondant à aucun de ces arguments péremptoires, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

" 2°) alors que les dispositions du code de la santé publique interdisent aux membres de la commission d'AMM qui ont un intérêt dans une entreprise, de participer aux travaux, délibérations et votes ; que la loi les autorise à conserver des liens avec les entreprises pharmaceutiques ; que ces dispositions ne leur interdisent pas d'être présents aux séances de la commission ; qu'était invoquée l'absence de participation des membres de la commission d'AMM aux délibérations et au vote concernant le Mediator, ces membres ayant été seulement présents ; qu'en s'abstenant de toute réponse à cet argument, la chambre de l'instruction n'a pas davantage justifié sa décision ;

" 3°) alors que la chambre de l'instruction est tenue de statuer sur les moyens de nullité soulevés pour la première fois devant elle ; que la société IRIS invoquait, pour la première fois devant la chambre de l'instruction, notamment, que la loi autorise les membres de la commission d'AMM à conserver des liens avec les entreprises pharmaceutiques, et que M. C...n'avait jamais participé à la formulation d'un avis concernant l'une des molécules du Mediator ; que la chambre de l'instruction ne pouvait pas refuser de se prononcer sur ce moyen aux motifs que la chambre de l'instruction a déjà statué par un arrêt définitif du 7 mars 2014 sur la mise en examen de M. C...tandis que de tels moyens n'avaient pas été soulevés " ;

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à annuler les mises en examen de MM. Y..., D...et des sociétés Adir et IRIS des chefs de prise illégale d'intérêts, complicité et recel de ce délit, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent, sans insuffisance ni contradiction, la réunion par le juge d'instruction d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable que les personnes mises en examen aient pu participer comme auteur ou complice à la commission des infractions de prise illégale d'intérêts qui n'exigent pas que l'intéressé ait une voix délibérative lors des réunions de la Commission d'autorisation de mise sur le marché auxquelles il assiste, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

Qu'ainsi, les griefs ne peuvent qu'être écartés ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que, pour rejeter la demande en nullité de la mise en examen de M. C...du chef de prise illégale d'intérêts, la chambre de l'instruction retient qu'elle l'a déjà examinée et rejetée par son arrêt définitif du 7 mars 2014 ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 156, 164, 173, 174, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;

" aux motifs que, sur la nullité du rapport d'expertise définitif, l'expertise permet de faire connaître aux juges le degré des connaissances depuis les années 1970 des laboratoires X..., de la communauté scientifique et de l'administration sur les fenfluramines et particulièrement le benfluorex, sa parenté avec les amphétamines, son métabolisme et sa qualité d'anorexigène, que l'appréciation des éléments constitutifs des infractions reprochées dépend aussi des documents saisis, des témoignages et des déclarations des mis en examen et demeure de l'appréciation du juge, qu'ainsi l'expertise n'est qu'un élément parmi d'autres pour aider à la décision et ne fixe pas l'issue du procès ainsi qu'il est soutenu par les appelants, que l'annulation ne s'impose pas en l'espèce pour satisfaire aux exigences du procès équitable et des textes conventionnels ; que la mise en cause du benfluorex dans les HTAP et les valvulopathies est admise, que la partie épidémiologique de l'expertise traitée par le professeur F..., s'agissant d'approcher à partir de recherches statistiques quelle pouvait être la part de cette mise en cause dans les HTAP et les valvulopathies, puis d'évaluer le nombre de décès, n'est pas déterminante dans la qualification des faits de tromperie, corruption et escroquerie ; que les experts ont expliqué ce qu'étaient les données brutes, les données source et les données d'extraction, que les parties à l'instar de l'ensemble de la communauté scientifique ont accès aux mêmes données permettant de critiquer la fiabilité des études CNAM, qu'il n'existe aucune atteinte aux droits de la défense ; que les experts n'ont pas expressément utilisé l'expression « à dose thérapeutique et en utilisation chronique » mais que les travaux scientifiques commentés par les experts sont suffisamment précis pour savoir si ceux-ci s'expriment ou pas en doses thérapeutiques et en utilisation chronique ; que le nom du professeur F...dans une liste de noms de scientifiques où apparaissent les noms de Mmes Catherine G..., Anne H..., parmi d'autres scientifiques alors que ces scientifiques exercent dans des spécialités complémentaires est insuffisant pour caractériser une proximité entre eux de nature à donner l'apparence de la partialité, que ceci est confirmé par le fait que le professeur F...n'a rencontré Mme G...qu'une seule fois en 2000 ; que le professeur F...a indiqué dès sa nomination qu'il participait à un travail en commun auquel participait aussi Mme G...sur les rétro virus et qu'il cessait immédiatement ces travaux, que la parution de ces travaux en 2013 avec le nom du professeur F...ne signifie pas que le professeur a continué à participer auxdits travaux ; que les bases de données réalisées par la CNAM sont utilisées par la communauté scientifique à des fins d'études épidémiologiques, qu'il ne peut se déduire d'une formule de politesse, pour avoir eu accès à ces données, une proximité entre le professeur F...et les membres de la CNAM caractérisant l'apparence de partialité ; que le docteur M. I...et les techniciens de la CNAM ne sont ni mis en examen, ni témoins assistés, ni parties civiles, qu'ils n'ont été entendus que sur des informations techniques qu'eux seuls détenaient en raison de leur compétence de spécialiste et non en qualité de représentant de la partie civile, que leurs auditions par les experts ne sont pas contraires aux dispositions de l'article 164 du code de procédure pénale ; qu'il n'existe aucun motif d'annulation de l'expertise ; que les phrases utilisées par l'expert, M. F...et critiquées par la défense peuvent être discutées devant une éventuelle juridiction de jugement et sont à l'appréciation de celle-ci, qu'il n'existe aucune atteinte au droit de la défense et qu'il n'y a pas lieu à cancellation ;

" 1°) alors que les exigences du droit à un procès équitable imposent l'impartialité de l'expert ; que l'impartialité consiste notamment à rechercher si les appréhensions du justiciable peuvent passer pour objectivement justifiées ; que l'appartenance d'un expert à un réseau professionnel peut susciter des doutes objectivement justifiés quant à l'analyse réalisée par cet expert sur les travaux effectués par les membres de son réseau professionnel ; qu'ayant constaté que l'expert avait participé à des travaux en commun avec d'autres professionnels et qu'il était amené à critiquer leurs travaux, la chambre de l'instruction ne pouvait pas se borner à énoncer qu'une telle mention de travail en commun était insuffisante à établir la partialité de l'expert tandis qu'elle a également constaté que celui-ci avait, dès sa nomination, cessé immédiatement cette collaboration et qu'un tel travail en commun peut susciter des doutes objectivement justifiés ; que, dès lors, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

" 2°) alors que, de même, les travaux rédigés par l'expert en collaboration avec des membres de la CNAM postérieurement à sa désignation, peuvent légitimement faire craindre au justiciable un risque de partialité dans sa mission d'analyse des travaux de la CNAM ; qu'en se bornant à énoncer que l'expert aurait simplement fait usage d'une formule de politesse pour accéder aux données de la CNAM pour en déduire l'absence de partialité, la chambre de l'instruction n'a pas davantage justifié sa décision ;

" 3°) alors que la chambre de l'instruction est tenue de se prononcer sur tous les moyens de nullité soulevés devant elle sans pouvoir renvoyer l'appréciation d'un tel moyen à la juridiction de jugement ; que la juridiction de jugement n'a en outre pas qualité pour constater les nullités de l'information lorsqu'elle a été saisie par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ; qu'il appartient à la seule chambre de l'instruction de se prononcer sur les nullités de la procédure ; que l'impartialité s'apprécie également en recherchant les opinions émises par l'expert ; que lorsque les réponses du rapport d'expertise établissent le parti pris de l'expert, la partialité de celui-ci est avérée ; qu'en refusant de constater la nullité de l'expertise au motif qu'il appartient à la juridiction de jugement de se prononcer sur les phrases utilisées par l'expert, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs et les textes susvisés ;

" 4°) alors qu'un expert ne peut pas recevoir les déclarations d'un mis en examen, d'un témoin assisté ou d'une partie civile ; qu'ayant constaté que l'expert avait reçu les déclarations des techniciens de la CNAM, partie civile, la nullité s'imposait ; qu'en estimant que ces techniciens étaient entendus en qualité de spécialistes, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;

" 5°) alors que l'expert doit disposer des moyens nécessaires à l'exercice de sa mission ; que les sociétés invoquaient l'absence d'accès effectif et complet aux données sources par l'expert et aux échocardiographies ; qu'en se bornant à énoncer que les parties avaient eu accès aux mêmes données tandis qu'il lui appartenait de rechercher si l'expert, qui a élaboré son rapport en l'absence de données essentielles à l'identification des effets secondaires du Médiator, avait pleinement exercé sa mission, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision " ;

Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la chambre de l ‘ instruction a écartée à bon droit, ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 173, 174, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;

" aux motifs que, sur la nullité des actes de l'assistant spécialisé, par arrêt définitif du 7 mars 2014, la chambre de l'instruction saisie de la question de l'impartialité de l'assistant spécialisé a annulé les actes effectués par celui-ci et à nouveau critiqués et a apprécié l'étendue de l'annulation, que la demande sur le même fondement de l'impartialité incluse dans les exigences du procès équitable posé par l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme aux fins de réexamen de l'étendue de la nullité qui ne soulève aucun nouveau moyen d'annulation est irrecevable ;

" alors qu'est recevable un moyen de nullité fondé sur l'irrégularité de pièces de la procédure établies postérieurement à un précédent arrêt de la chambre de l'instruction ayant statué sur les nullités de la procédure ; qu'en se référant à l'arrêt de la chambre de l'instruction du 7 mars 2014 pour estimer qu'il avait déjà été statué sur le moyen de nullité soulevé par les sociétés tandis que cet arrêt du 7 mars 2014, s'est prononcé sur la régularité de la procédure jusqu'à la cote D3263 et que les sociétés invoquaient la nullité des pièces cotées postérieurement, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision " ;

Attendu que, si c'est à tort que la chambre de l'instruction a déclaré irrecevable la demande d'annulation des actes accomplis par l'assistant spécialisé, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure dès lors qu'elle relève que le moyen de nullité pris de la partialité de l'assistant spécialisé a déjà été examiné et qu'elle a apprécié l'étendue de l'annulation des actes effectués par celui-ci dans son arrêt définitif du 7 mars 2014 ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du protocole n° 7 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 591, 593 et 657 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;

" aux motifs que, sur la nullité de l'ordonnance de disjonction-jonction, l'ordonnance de disjonction-jonction a été prise dans la procédure 2278/ 11/ 4 dont elle porte la référence, qu'elle vise l'information suivie contre M. Jacques X..., les sociétés SAS X..., SAS Oril industrie, SAS Laboratoires X..., SAS Laboratoires X... industrie, SAS Biofarma, SARL Biopharma, MM. Jean-Philippe J..., Alain K..., l'ANSM, mis en examen des chefs d'homicides et blessures involontaires et les victimes de ces infractions, que les observations des parties ont été sollicitées dans la procédure 2278/ 11/ 4 et que les requérants sont parties à la procédure 2278/ 11/ 4 ; que la chambre de l'instruction n'a pas à connaître du caractère indivisible des faits poursuivis dans la procédure 2278/ 11/ 4 dont elle n'est pas saisie ; que la jonction critiquée permet, en cas de renvoi devant une juridiction de fond, le jugement dans de meilleurs délais de certains faits d'homicides et blessures involontaires ; qu'il s'agit d'une bonne administration de la justice ; que la qualité concomitante de mis en examen et prévenu n'est pas acquise à ce stade de la procédure et ne peut être le fondement d'une nullité au motif d'une éventuelle atteinte aux droits de la défense alors que la procédure est contradictoire et équitable conformément à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que les infractions d'homicides et blessures involontaires reprochées au préjudice des personnes visées par l'ordonnance sont dorénavant poursuivies dans la seule procédure 2278/ 11/ 3 et qu'il n'existe aucune atteinte à la règle non bis in idem ;

" 1°) alors que le principe ne bis in idem interdit qu'une même personne puisse, pour les mêmes faits, faire l'objet de deux poursuites ; que les poursuites exercées du chef d'homicides et blessures involontaires dont l'instruction est toujours en cours sous le n° 2278/ 11/ 4, identiques aux faits d'homicides et de blessures involontaires poursuivis sous le n° 2278/ 11/ 3, portent atteinte au principe ne bis in idem ; qu'en s'abstenant de toute réponse à cet argument et en se référant aux seuls faits faisant l'objet de la procédure n° 2278/ 11/ 3, la chambre de l'instruction a méconnu le principe susvisé ;

" 2°) alors que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier sa décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties, l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivalant à leur absence ; que le droit au procès équitable requiert d'une juridiction supérieure qu'elle examine réellement les questions qui lui sont soumises et ne se contente pas d'entériner purement et simplement la décision d'une juridiction inférieure ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction était saisie d'un mémoire déposé, le 9 juin 2015, et régulièrement visé critiquant l'atteinte faite par l'ordonnance au principe de bonne administration de la justice ; qu'en se bornant à reprendre la motivation de l'ordonnance attaquée sans répondre à ce moyen, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision et a méconnu les textes susvisés " ;

Attendu que, pour écarter la demande en nullité de l'ordonnance de jonction-disjonction prise de la violation de la règle non bis in idem, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision dès lors que les jonctions et disjonctions de procédure constituent des mesures d'administration judiciaire et que les demanderesses ne sauraient se faire un grief de ce que les faits disjoints de la procédure n° 2278/ 11/ 4 et joints à la procédure n° 2278/ 11/ 3 ne sont plus poursuivis que dans cette dernière procédure ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.