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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 11 septembre 2014, n° 12/22968

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sfez, Compagnie Financière Européenne (SARL)

Défendeur :

Gauffenic, Société Générale de Surveillance (Sté), SGS Management Services (SAS), Am'tech Medical (SAS), SGS Holding France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

M. Douvreleur, Mme Michel-Amsellem

Avocats :

Me Fertier, Me Schuhler Bourrellis, Me Teytaud, Me Cournot, Me Vallet-Pamart, Me Leblond

T. com. Paris, 13e ch., du 16 nov. 2012,…

16 novembre 2012

Faits et procédure

Par contrat du 15 décembre 2008, Mme Armelle Gauffenic a donné mandat à la société Compagnie Financière Européenne (ci-après société CFE) de l'assister dans la vente de la société Am'Tech Medical, société spécialisée dans le contrôle technique et réglementaire des dispositifs médicaux, dont elle était la présidente et détenait la totalité du capital. Ce contrat prévoyait qu'en cas de réalisation de la transaction, la société CFE recevrait une commission de succès calculée sur la base du prix de cession et précisait que cette même rémunération serait due au cas où, dans les douze mois suivant l'expiration du mandat, la transaction serait réalisée avec un acquéreur présenté par l'entremise de la société CFE.

Par courrier du 27 juillet 2009, Mme Gauffenic a fait savoir à la société CFE qu'elle mettait fin à ce mandat et lui a rappelé qu'elle lui verserait la commission prévue au cas où la transaction se ferait dans les douze mois à venir avec un acquéreur qu'elle lui aurait présenté.

En juillet 2010, Mme Gauffenic a vendu à la société SGS Holding France (la société SGS) l'intégralité des actions composant le capital de la société Am'Tech Medical.

Considérant que cet acquéreur lui avait été présenté par son entremise, la société CFE a demandé à Mme Gauffenic le paiement de la commission contractuellement prévue, soit la somme de 562 120 euros. Mme Gauffenic ayant refusé de régler cette somme en soutenant que la société SGS ne lui avait jamais été présentée comme acquéreur potentiel, la société CFE l'a assignée en paiement devant le tribunal de commerce de Paris. La société CFE a également assigné la SAS SGS, de droit français, la SA Société Générale de Surveillance, de droit suisse, et la société Am'Tech Medical en demandant qu'il leur soit fait injonction de communiquer les actes constatant la cession en cause. M. Jean-Luc Sfez, qui avait été désigné dans le mandat pour « diriger personnellement » la mission confiée à la société CFE, et la société SGS Holding France, acquéreur de la société Am'Tech Medical, sont intervenus volontairement aux débats.

Par  jugement en date du 16 novembre 2012, le tribunal de commerce de Paris a :

mis hors de cause la société SGS Management Services ;

donné acte à la société SGS Holding France et à M. Sfez de leur intervention volontaire ;

débouté Mme Gauffenic de sa demande de nullité du mandat de vente du 15 décembre 2008 ;

dit que la société CFE n'a pas présenté la société SGS Holding France à Mme Gauffenic au sens du mandat signé le 15 décembre 2008 ;

débouté la société CFE de toutes ses demandes ;

débouté Mme Gauffenic de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Vu l'appel interjeté par la société CFE et par M. Sfez le 18 décembre 2012 contre cette décision.

Vu les dernières conclusions, signifiées par la société CFE et M. Sfez le 12 mars 2014, par lesquelles il est demandé à la Cour de :

déclarer l'appel de la société CFE recevable et bien fondé ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu que le mandat de vente définitif est celui en date du 15 décembre 2008 ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a consacré la validité du mandat de vente du 15 décembre 2008 ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu que la présentation au vendeur d'une liste de clients potentiels prévue par l'article 2 du mandat a incontestablement été remplie par la société CFE ;

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a commis une erreur d'appréciation, consistant en une dénaturation des clauses du mandat, en considérant que la société CFE n'était pas éligible à percevoir les commissions qui lui sont dues au motif qu'elle n'aurait pas présenté la société SGS à Mme Gauffenic alors que la société CFE a bien respecté l'article 5 du mandat en présentant le client qui a acquis la société de Mme Gauffenic dans le délai de 12 mois prévu ;

En conséquence,

débouter Mme Gauffenic de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

condamner Mme Gauffenic à payer à la société CFE la somme de 562 120 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2011, et subsidiairement à compter du 14 mars 2011 date d'une sommation régularisée à cette fin ;

donner acte à la société CFE qu'elle renonce à ses demandes de condamnation in solidum contre les sociétés SGS de droit suisse, SGS de droit français et Am'Tech Medical ;

toutefois, compte tenu de l'intervention volontaire de la société SGS Holding France devant le tribunal de commerce de Paris, et par ailleurs de la légitimité des mises en cause des autres sociétés du groupe par CFE, confirmer la décision entreprise en ce qu'elle n'a prononcé aucune condamnation à des dommages et intérêts et aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société CFE ;

A titre subsidiaire et si la cour l'estime nécessaire :

ordonner la production du justificatif du prix de vente de la société Am'Tech Medical à la société SGS sous astreinte de 500€ par jour de retard à compter de l'arrêt avant dire droit à intervenir ;

condamner Mme Gauffenic à payer à la société CFE la somme de 15 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En ce qui concerne le mandat dont la validité est contestée par Mme Gauffenic, les appelants soutiennent qu'il résulte non, comme celle-ci le prétend, de l'acte daté du 10 décembre 2008  qu'elle produit, mais d'un autre  acte daté du 15 décembre 2008. En effet, l'acte du 10 décembre 2008 n'était, selon eux, qu'un projet et a été suivi de l'acte définitif signé le 15 décembre par la société CFE, mais aussi par M. Sfez, habilité en sa qualité d'expert-comptable à fournir le service de conseil en investissements financiers. Les appelants font valoir que, dès lors, ce mandat était conforme aux dispositions de l'article L. 531-2 2° g) du code monétaire et financier, qui permettent aux experts-comptables de fournir le service de conseil en investissements financiers.

Sur le fond de leur demande, les appelants soutiennent que la société SGS qui a finalement acquis la société Am'Tech Medical, a été présentée à Mme Gauffenic par leur intermédiaire. Ils rappellent que cette société faisait partie des « acquéreurs potentiels » dont il lui avait transmis la liste, et qu'ils ont envoyé à la société SGS un document présentant la société Am'Tech Medical, désignée anonymement comme la société « Ray », et lui proposant, au cas où le projet correspondrait à ses objectifs, de poursuivre cette présentation après signature d'un engagement de confidentialité. Ils considèrent avoir donc droit à la commission contractuellement prévue en cas de réalisation de la transaction avec un acquéreur présenté par leur entremise, dans les douze mois à compter de l'expiration du mandat.

Enfin, les appelants demandent à la Cour de mettre hors de cause les sociétés Am'Tech Medical, SGS Holding France, SGS Management Services et Société Générale de Surveillance. Ils indiquent avoir été conduits à mettre en cause ces sociétés, à l'exception de la société SGS Holding France qui est intervenue volontairement, alors qu'ils ignoraient l'identité du véritable acquéreur et qu'ils pouvaient légitimement supposer un accord entre elles et Mme Gauffenic pour éviter le paiement de la commission qui leur était due. Ils soutiennent que, dans ces conditions, les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive que présentent ces sociétés doivent être rejetées.

Vu les dernières conclusions, signifiées par Mme Gauffenic le 15 mai 2013, par lesquelles il est demandé à la Cour de :

recevoir Mme Gauffenic en son appel incident et l'y déclarer bien fondée ;

A titre principal,

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a refusé de reconnaître la nullité du mandat conclu pour violation des dispositions des  articles L. 541-1 et 321-1 du code monétaire et financier ;

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a laissé à la charge de chacune des parties la charge de leurs frais irrépétibles ;

A titre subsidiaire,

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la société CFE n'avait pas présenté à Mme Gauffenic la société SGS Holding France au sens du mandat conclu entre les parties ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société CFE de toutes ses demandes ;

Et, dans tous les cas, principal comme subsidiaire :

débouter la société CFE de toutes ses demandes ;

condamner la société CFE à payer à Mme Gauffenic la somme de 30 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme Gauffenic soutient que le mandat donné à la société CFE est nul et elle demande à la Cour d'infirmer sur ce point le jugement du tribunal. Elle fait valoir que ce mandat résulte, non de l'acte portant la date du 15 décembre 2008 produit par les appelants, mais de l'acte signé le 10 décembre 2008, et qu'en toute hypothèse, l'un et l'autre de ces actes sont nuls puisqu'ils avaient pour objet la fourniture par le mandataire du service de conseil en investissements financiers que le code monétaire et financier réserve aux professionnels ayant la qualité de conseil en investissements financiers, dont sont dépourvus tant la société CFE que M. Sfez.

En ce qui concerne la demande dirigée contre elle par les appelants, Mme Gauffenic soutient qu'elle ne leur doit aucune commission, faute pour eux de lui avoir présenté la société SGS à laquelle elle a vendu, après l'expiration du mandat, la société Am'Tech Medical. Elle souligne qu'aux termes de l'article 5 de ce mandat, la commission n'était due que si la transaction était réalisée avec un acquéreur « présenté par l'entremise de CFE », et considère que cette formule suppose que l'acquéreur ait été « mis en relation » avec elle, ou mis « en sa présence ». Or, tel n'est, selon elle, pas le cas, puisque si la société CFE a identifié la société SGS comme un acquéreur potentiel, parmi d'autres investisseurs et industriels, et lui adressé un document anonyme de présentation de la société Am'Tech Medical, dénommé « Ray », cette société a fait savoir qu'elle n'était pas intéressée par ce projet, de sorte que plus aucune diligence n'a ensuite été accomplie à son égard. Elle demande donc à la Cour de confirmer sur ce point le jugement du tribunal.

Vu les dernières conclusions, signifiées par la Société Générale de Surveillance, la société SGS Management Services, la société Am'Tech Medical et la société SGS Holding France le 13 mai 2013, par lesquelles il est demandé à la Cour de :

mettre hors de cause, sans frais ni dépens, les sociétés :

Société Générale de Surveillance, société de droit suisse, ayant son siège [...]

SAS Am'Tech Medical, ayant son siège [...] ' RCS Nanterre 408 496 529

SAS SGS Management Services, ayant son siège [...] RCS Créteil 410 067 317

condamner la société CFE in solidum avec M. Sfez au paiement au profit de chacune des sociétés SGS, SAS Am'Tech Medical et SGS Management Services, des sommes de :

* 10 000 € (X 3) à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

* 5 000 € (X 3) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

concernant la société SGS Holding France, voir déclarer la société CFE irrecevable en ses demandes sur un fondement contractuel ;

subsidiairement, dans l'hypothèse où la société CFE présenterait des demandes sur un fondement quasi-délictuel contre la société SGS Holding France, constater qu'elle ne démontre ni faute de la société SGS Holding France, ni préjudice, ni lien de causalité entre ces deux éléments ;

En conséquence,

débouter la société CFE de toutes ses demandes à l'encontre de la société SGS Holding France.

condamner la société CFE au paiement d'une somme de 15 000 € au profit de la société SGS Holding France pour procédure particulièrement abusive, outre 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés SGS Management Services et Société Générale de Surveillance font valoir qu'elle sont étrangères à la présente procédure et qu'elles n'ont été en rapport ni avec la société Am'Tech Medical, ni avec Mme Gauffenic, ni avec la société CFE. Elles considèrent que leur maintien dans la cause justifie la condamnation de la société CFE à leur payer, à chacune, la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

La société Am'Tech Medical demande à être mise hors de cause, en soulignant que le litige ne la concerne pas, puisqu'il oppose le vendeur et le mandataire. Elle soutient qu'on ne saurait pas plus lui reprocher de n'avoir pas répondu à la sommation, délivrée par la société CFE, de communiquer le prix auquel elle a été vendue.

La société SGS Holding France, qui a acquis la société Am'Tech Medical, demande également à être mise hors de cause. Elle soutient que sa responsabilité ne peut être engagée, ni sur le terrain contractuel puisqu'elle n'a aucun lien de droit avec la société CFE, ni sur le terrain quasi-délictuel puisqu'elle n'a commis aucune faute. Elle souligne, en particulier, que si la société CFE lui a envoyé un document de présentation d'une société désignée sous le nom « Ray », elle en ignorait l'identité.

Ces sociétés considèrent que la procédure engagée contre elles par la société CFE est abusive et elles demandent à ce titre sa condamnation au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elles estiment avoir subi.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la validité du mandat

Mme Gauffenic verse aux débats un « mandat de vente » en date du 10 décembre 2008, établi avec « DSA Corporate Finance, l'activité 'fusion-acquisition' de CFE », et en présence de la société Am'Tech Medical (pièce n° 1). Les appelants produisent de leur côté un acte également dénommé « mandat de vente » en date du 15 décembre 2008, dont les clauses sont identiques au premier, et qui a été conclu avec la société CFE et en présence de la société Am'Tech Medical et de M. Jean-Luc Sfez (pièce n° 1).

La Cour observe que seul l'acte daté du 15 décembre 2008 porte les signatures de toutes les parties ' Mme Gauffenic, M. Zbirou en qualité de gérant de la société CFE qui a apposé la mention manuscrite « Bon pour acceptation de mandat » et, enfin, M. Sfez -, alors que l'acte du 10 décembre 2008  n'est signé que de Mme Gauffenic et ne comporte aucune autre signature, ce qui ne peut s'expliquer qu'en considérant que, comme le soutiennent les appelants, cet acte n'était qu'un projet et que le mandat définitif n'a été donné que par l'acte signé le 15 décembre par toutes les parties intéressées. Ce caractère préparatoire du document du 10 décembre est au demeurant confirmé par un courrier adressé par Mme Gauffenic à M. Sfez le 11 décembre, soit le lendemain, par lequel elle adresse à son interlocuteur « une version intégrant les derniers éléments, telle que le propose à nos signatures Me Cervoni » et exprime le souhait « que nous soyons ainsi arrivés à la version définitive » (pièce n° 47 produite par les appelants), ainsi que par un autre courrier, en date du 25 mars 2009, dans lequel Mme Gauffenic évoque « le mandat de vente que nous avons conclu avec la société CFE et M. Jean-Luc Sfez le 15 décembre 2008 » (pièce n° 2 produite par les appelants). C'est dès lors l'acte daté du 15 décembre 2008 qui doit être pris en considération pour apprécier, au regard des dispositions du code monétaire et financier, la validité du mandat, laquelle est mise en cause par Mme Gauffenic.

Mme Gauffenic soutient, en effet, que le mandat qu'elle a donné est nul puisqu'il avait pour objet le service de conseil en investissements financiers qui, selon les dispositions du code monétaire et financier, ne peut être fourni que par des professionnels ayant la qualité de conseil en investissements financiers, ce qui n'étaient le cas ni de la société CFE, ni de M. Sfez.

La Cour observe d'abord qu'il n'est pas établi que la mission confiée au mandataire constituait le service de conseil en investissements financiers, alors qu'aux termes de l'article L. 321-2 du code monétaire et financier , la « fourniture de conseil aux entreprises en matière de structure de capital, de stratégie industrielle et de questions connexes ainsi que la fourniture de conseil et de services en matière de fusions et de rachat d'entreprises » constituent non un service d'investissement, mais un « service connexe aux services d'investissement» dont la fourniture est libre. Mais en toute hypothèse, et sans qu'il soit besoin de déterminer précisément la nature juridique du service fourni dans le cadre du mandat qui avait été donné, la Cour constate que, comme le soutiennent les appelants, le conseil en investissements financiers, réservé par principe aux prestataires de services d'investissement et aux conseillers en investissements financiers visés à l'article L. 541-1 du code monétaire et financier , peut, selon l'article L. 531-2 2° g) du même code, être librement fourni par les personnes exerçant l'activité d'expert-comptable. Or, il résulte des termes mêmes de l'acte en cause que M. Sfez a reçu mandat de Mme Gauffenic puisqu'il y est indiqué qu'il « dirigera personnellement la mission convenue aux termes du présent mandat pour le compte de CFE et sera l'interlocuteur privilégié du Client [Mme Gauffenic] » (art. 2 in fine du mandat du 15 décembre 2008). La qualité d'expert-comptable de M. Sfez étant par ailleurs établie (pièce n° 4 produite par les appelants), il y a lieu de constater que le mandat a été donné conformément aux dispositions du code monétaire et financier. Il importe peu à cet égard que M. Sfez n'ait pas, par ailleurs, fourni des prestations d'expertise-comptable à Mme Gauffenic ou à la société Am'Tech Medical, dès lors qu'il n'est pas démontré que la mission qui lui a été confiée aurait constitué son activité principale, alors que l'article L. 531-2 2° g) précité prévoit qu'elle garde un caractère accessoire. Dès lors, la demande de Mme Gauffenic tendant à ce que soit prononcée la nullité du mandat qu'elle a donné par  acte du 15 décembre 2008 sera rejetée.

Sur le droit à rémunération de la société CFE

La rémunération du mandataire était prévue par l'article 5 du mandat du 15 décembre 2008 sous la forme d'une 'commission de succès' due en cas de réalisation de la transaction, c'est-à-dire de cession de tout le capital de la société Am'Tech Medical, et calculée sur la base du prix de cette transaction. Le dernier alinéa de ce même article fixait, dans les termes suivants, les conditions auxquelles le mandataire pourrait recevoir une rémunération, dans le cas où la transaction serait réalisée après l'expiration du mandat :

'Art. 5

(')

La rémunération sera due dans toute hypothèse où le Client [Mme Gauffenic] réaliserait la transaction, directement ou indirectement, dans les douze mois à compter de l'expiration du Mandat, avec un ou des Acquéreurs présentés par l'entremise de CFE '.

Mme Gauffenic ayant révoqué le 27 juillet 2009 le mandat qu'elle avait donné, et ayant vendu la société Am'Tech Medical à la société SGS en juillet 2010, soit moins de douze mois après l'expiration de ce mandat, la question est donc de savoir si la société SGS doit être considérée comme un 'acquéreur présenté par l'entremise' de la société CFE au sens des stipulations ci-dessus.

Il résulte du dossier que dans le cadre de la mission qui lui avait été donnée, la société CFE a d'abord adressé à Mme Gauffenic deux documents en date des 17 décembre 2008 et 24 mars 2009, respectivement intitulés «  Réflexion sur des acquéreurs potentiels » et « Catalogue Acquéreurs Potentiels » (pièces n° 12 et 13 produite par les appelants) et qui comportent une liste d'investisseurs parmi lesquels la société SGS. Par courrier électronique du 9 mars 2009, Mme Gauffenic a fait connaître ses souhaits quant au délai dans lequel l'opération devait être menée à bien et a donné des instructions consistant, notamment, à « prendre contact avec les industriels (SGS Suisse rendez vous à obtenir avec les dirigeants suisses, Intertek, TUV Allemagne, Groupe Onet [...) » (pièces n° 7 et 59 produites par les appelants). Par courriers électroniques des 16 et 20 mars 2009, la société CFE a alors pris contact avec la société SGS et lui a envoyé un document présentant la société Am'Tech Medical, désignée anonymement comme la société « Ray », et lui a proposé, au cas où le projet correspondrait à ses objectifs, de poursuivre cette présentation après signature d'un engagement de confidentialité (pièces n° 8 et 9 produites par les appelants). La société SGS a, par courrier électronique du 23 mars 2009 (pièce n° 9 produite par les appelants), décliné cette proposition dans les termes suivants : « Opportunité d'investissement / Dossier Ray ' Merci pour la présentation relative au potentiel investissement susmentionné. Après mûre réflexion, nous avons décidé de ne pas donner suite à ce projet. » (traduction libre ' pièce n° 9 ter produite par les appelants), de sorte que plus aucune diligence n'a été menée à son égard.

Force est donc de constater que si la société SGS a été identifiée par la société CFE comme un acquéreur potentiel, elle n'a pas été présentée par son entremise, au sens des stipulations contractuelles ci-dessus rappelées, à Mme Gauffenic, puisqu'ayant été approchée sur le projet, sans même que lui soit révélé le nom de la société dont l'achat était proposé, elle a fait connaître qu'elle n'était pas intéressée et a décliné l'offre d'en poursuivre plus avant la présentation ; la société SGS a ainsi elle-même signifié qu'elle refusait d'être présentée à l'initiateur de l'opération comme un acquéreur potentiel avec lequel des contacts auraient pu s'établir avant une éventuelle discussion au cas où elle aurait manifesté de l'intérêt pour cette opération. La société CFE n'est donc pas fondée à demander le paiement, en application du mandat qu'elle avait reçu, de la commission prévue en cas de réalisation de la transaction dans les douze mois de l'expiration de ce mandat. Le jugement entrepris sera donc confirmé.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive

En premier lieu, les sociétés Am'Tech Medical, SGS Management Service et Société Générale de Surveillance demandent la condamnation de la société CFE, in solidum avec M. Sfez, a leur payer chacune la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

En réponse, la société CFE soutient avoir eu connaissance de la réalisation de la transaction par des articles de presse qui ne lui ont pas permis d'identifier précisément l'acquéreur de la société Am'Tech Medical, puisque celui-ci y était désigné sous les noms de « SGS » ou « SGS Group » (pièces n° 26 et 27 produites par les appelants) et que, souhaitant obtenir communication des actes et documents qui lui étaient nécessaires pour établir le bien-fondé de sa demande contre Mme Gauffenic, elle a été contrainte d'assigner les différentes sociétés du groupe SGS et la société Am'Tech Medical. Elle démontre, ce faisant, qu'elle n'a pas abusivement agi contre ces sociétés, étant rappelé qu'elle a renoncé en cause d'appel aux demandes qu'elle avait formées contre elles en première instance et qu'elle sollicite de la Cour qu'elle les mette hors de cause. Les demandes de dommages et intérêts présentées par les sociétés Am'Tech Medical, SGS Management Service et Société Générale de Surveillance seront donc rejetées.

En second lieu, la société SGS Holding France, acquéreur de la société Am'Tech Medical, demande la condamnation de la société CFE au paiement de la somme de 15 000 € pour procédure abusive. Mais cette société étant intervenue volontairement à l'instance, ne peut donc reprocher à la société CFE d'avoir abusivement agi contre elle. Sa demande sera donc rejetée.

Sur les frais irrépétibles

Au regard de l'ensemble de ce qui précède, il serait inéquitable de laisser à la charge des intimées la totalité des frais irrépétibles qu'elles ont engagées et la société CFE sera condamnée à verser en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3 000 euros à Mme Gauffenic et la somme de 1 000 euros à chacune des autres sociétés intimées.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

REJETTE les demandes de dommages et intérêts présentées par les sociétés Am'Tech Medical, SGS Holding France, SGS Management Services et Société Générale de Surveillance ;

CONDAMNE la société Compagnie Financière Européenne, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 3 000 euros à Mme Armelle Gauffenic et la somme de 1 000 euros à chacune des sociétés Am'Tech Medical, SGS Holding France, SGS Management Services et Société Générale de surveillance ;

REJETTE toutes les demandes autres, plus amples ou contraires des parties ;

CONDAMNE la société Compagnie Financière Européenne aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.