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Décisions

Cass. 1re civ., 21 janvier 1997, n° 94-19.380

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Aubert

Avocat général :

M. Roehrich

Avocats :

SCP Defrenois et Levis, Me Boulloche, SCP Delaporte et Briard, Me Parmentier, SCP Rouvière et Boutet

Bordeaux, 1re ch. B, du 29 juin 1994

29 juin 1994

Attendu que la SCI Les Résidences de Lormont (la SCI), maître d'ouvrage, souscripteur d'une assurance "dommages-ouvrages" auprès du GAN, a fait construire, sous la maîtrise d'oeuvre de la SA d'architecture et d'urbanisme Tournier-Martin, un ensemble immobilier dont elle a confié le gros-oeuvre à la SARL Les Bâtiments de l'Agenais, en liquidation judiciaire, et dont le représentant des créanciers est M. Y..., cette SARL étant assurée par la compagnie AGP; que les pavillons livrés à MM. C..., B... G... Tam, X... et Roux ayant présenté, après leur réception intervenue en 1982, des désordres, ceux-ci ont assigné la SCI, les architectes, les entrepreneurs et leurs assureurs respectifs en réparation de leurs dommages; que l'arrêt attaqué a rejeté les exceptions de prescription soulevées par le GAN ainsi que l'action récursoire que cet assureur avait formée contre les AGP;

Sur le second moyen du pourvoi principal, formé par le GAN, pris en ses deux branches, et sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la SCI Les Résidences de Lormont, également pris en ses deux branches, qui sont identiques :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir écarté la responsabilité de la SARL Les Bâtiments de l'Agenais et de MM. F... et A..., architectes, alors que, d'une part, en se bornant à retenir que l'entrepreneur n'encourait aucune responsabilité dès lors que la cause des désordres résidait dans l'absence de construction d'un ouvrage qui ne lui avait pas été commandé par le maître de l'ouvrage, la cour d'appel, qui n'aurait pas caractérisé l'existence d'une cause étrangère, aurait violé l'article 1792 du Code civil; et alors que, d'autre part, faute de relever que le maître de l'ouvrage aurait été notoirement compétent, la cour d'appel ne pouvait laisser la responsabilité des désordres à la charge exclusive de celui-ci sans priver sa décision de base légale au regard du même texte;

Mais attendu que, ayant constaté, d'abord, que les travaux de terrassement non prévus au contrat initial mais préconisés par les architectes en cours de chantier pour protéger les pavillons des eaux de ruissellement n'avaient finalement pas été commandés par le maître d'ouvrage, et ensuite que cette attitude avait justifié les plus expresses réserves de ces architectes, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé le risque pris délibérément et en connaissance de cause par le maître de l'ouvrage, en a déduit à bon droit qu'elle ne pouvait retenir la responsabilité des architectes, ni celle de l'entreprise;

Mais, sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi principal formé par le GAN :

Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, pour écarter la prescription soulevée par le GAN, l'arrêt énonce que cet assureur, représenté aux opérations d'expertise par M. de H..., n'a exprimé aucune réserve sur sa garantie et que le fait pour un assureur de suivre sans réserve une expertise témoigne de sa renonciation à se prévaloir de la prescription acquise;

Attendu qu'en relevant d'office ce moyen sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du premier moyen du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a écarté les exceptions de prescription soulevées par la compagnie GAN incendie-accidents, l'arrêt rendu le 29 juin 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée.