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Décisions

Cass. 2e civ., 16 mai 2012, n° 11-17.229

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Boval

Rapporteur :

Mme Renault-Malignac

Avocat général :

M. Mucchielli

Avocats :

SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Besançon, du 19 janv. 2011

19 janvier 2011

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 19 janvier 2011), qu'alléguant des actes de concurrence déloyale et de détournement de clientèle qu'elle imputait à la société Publistick, la société AVS communication a obtenu, le 28 avril 2010, du président d'un tribunal de commerce, statuant sur requête, l'autorisation qu'un huissier de justice se rende dans les locaux de la société Publistick afin notamment de "rechercher, de décrire , au besoin de copier ou de faire photocopier ou reproduire tout document social, fiscal, comptable, administratif, de quelque nature que ce soit, susceptible d'établir la preuve l'origine et l'étendue du détournement de clientèle et de salariés opéré par la société Publistick" ; que cette dernière a demandé, en référé, la rétractation de l'ordonnance sur requête ;

Attendu que la société AVS communication fait grief à l'arrêt de rétracter l'ordonnance sur requête du 28 avril 2010, d'ordonner la restitution à la société Publistick des pièces annexées au procès-verbal de constat dressé par l'huissier de justice le 18 mai 2010 et de constater que cette restitution la prive de la possibilité de se prévaloir de ces pièces, alors, selon le moyen :

1°/ que s'il existe un motif légitime d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, une mesure d'instruction peut être ordonnée, sur requête ou en référé ; que la cour d'appel qui, pour rétracter l'ordonnance sur requête ayant notamment confié à l'huissier la mission de se rendre dans les locaux de la société Publistick, d'ouvrir tout placard, tiroir, meuble aux fins de rechercher, de décrire, de reproduire tout document, de quelque nature que ce soit, susceptible d'établir la preuve, l'origine et l'étendue du détournement de clientèle et de salariés opéré par la société Publistick, et après avoir pourtant relevé que les faits de concurrence déloyale allégués par la société AVS communication étaient rendus crédibles et qu'il existait un motif légitime d'en rechercher la preuve, a néanmoins estimé que la mesure ordonnée excédait, par sa généralité, ce que rendait nécessaire l'établissement de la preuve, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il résultait que la mesure était expressément circonscrite aux faits dont pouvait dépendre la solution du litige, a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

2°/ que s'il existe un motif légitime d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, une mesure d'instruction peut être ordonnée, sur requête ou en référé ; que la cour d'appel en énonçant, pour rétracter dans son ensemble l'ordonnance sur requête ayant notamment confié à l'huissier la mission de se rendre dans les locaux de la société Publistick, de rechercher si des fichiers, matériels ou documents de la société AVS communication s'y trouvaient, et de vérifier, à partir de la liste des clients de la société AVS communication, ceux avec lesquels la société Publistick était entrée en relation, que cette ordonnance, en ce qu'elle autorisait également l'huissier à appréhender tout document susceptible d'établir la preuve du détournement de clientèle et de salariés, excédait, par sa généralité, ce que rendait nécessaire l'établissement de la preuve, tout en soulignant qu'il était légitime de rechercher la preuve des actes fautifs prétendus à travers la vérification, dans les locaux de la société concurrente, de la présence de fichiers, matériels ou autres documents émanant de l'entreprise concurrencée, et des transactions réalisées avec la clientèle de celle-ci, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la rétractation ne devait porter que certaines des mesures ordonnées, a violé les articles 145 et 497 du code de procédure civile ;

3°/ que les mesures d'instruction légalement admissibles au sens de l'article 145 du code de procédure civile peuvent consister en la commission d'un huissier afin qu'il procède à des constatations matérielles qu'il recherche et reproduise des documents ; que la cour d'appel qui, pour rétracter l'ordonnance sur requête, a relevé qu'il n'était pas admissible de permettre à l'huissier de fouiller les locaux de la société Publisitck et d'appréhender des documents sans le consentement du requis et sans solliciter au préalable leur remise spontanée, a ajouté aux textes une condition qu'ils ne prévoyaient pas et ainsi violé l'article 145 du code de procédure civile et l'article 1er de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

4°/ que le juge statuant sur la rétractation d'une mesure d'instruction ordonnée sur requête n'a pas à tenir compte des conditions d'exécution de celle-ci ; que la cour d'appel qui, pour rétracter l'ordonnance sur requête ayant autorisé une mesure d'instruction, s'est fondée sur les conditions d'exécution de la mesure d'instruction telles qu'elles résultaient du procès-verbal dressé par l'huissier l'ayant exécutée, a violé les articles 145 et 497 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les mesures d'instruction définies par l'ordonnance du 28 avril 2010 autorisaient l'huissier de justice à se saisir de tout document social, fiscal, comptable, administratif, de quelque nature que ce soit et lui permettaient de fouiller à son gré les locaux de la société, sans avoir préalablement sollicité la remise spontanée des documents concernés et obtenu le consentement du requis, la cour d'appel a exactement décidé, sans ajouter au texte une condition qu'il ne contenait pas, que les mesures ordonnées excédaient dans leur ensemble les prévisions de l'article 145 du code de procédure civile ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.