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Décisions

Cass. 1re civ., 10 septembre 2014, n° 13-13.957

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gridel

Avocats :

SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Paris, du 7 avr. 2009

7 avril 2009

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 janvier 2013), rendu sur renvoi après cassation (Civ. 1re, 1er juillet 2010, pourvoi n° 09-15.358), qu'une assemblée générale du 9 septembre 1999 de la SCP d'avocats cabinet Guy-Jean Veyssade, devenue la société Cabinet Veyssade (le cabinet Veyssade), a pris acte de la décision de retrait de M. X..., avocat associé, qui a été autorisé à emporter les dossiers pour lesquels il avait obtenu l'accord des clients concernés et à se faire remettre ultérieurement les dossiers des clients qui manifesteraient leur intention d'être suivis par lui ; qu'estimant n'avoir pas perdu ses droits patrimoniaux d'associé pour n'avoir pas perçu la valeur intégrale de ses droits sociaux en capital, M. X... a réclamé sa quote-part des bénéfices distribués par le cabinet Veyssade postérieurement au 10 septembre 1999, date de la prise d'effet de son retrait ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Attendu que le cabinet Veyssade fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. X... la somme de 204 668 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 février 2006 jusqu'au parfait règlement, alors, selon le moyen :

1°/ qu'un associé d'une société civile professionnelle ne peut prétendre obtenir une quote-part des résultats réalisés par cette dernière qu'à proportion de ses parts dans le capital de la société ; que le Cabinet Veyssade faisait valoir dans ses écritures d'appel que M. X... avait perçu, à la date de l'assemblée générale extraordinaire du 9 septembre 1999 constatant son retrait, sinon l'intégralité de la valeur de ses droits sociaux, du moins une très grande part de la valeur de ceux-ci en recevant à cette même date une fraction significative de la clientèle de la SCP évaluée à la somme de 200 000 euros, clientèle qu'il a exploitée personnellement à compter de ce moment, et qu'ainsi il ne pouvait prétendre faire valoir l'intégralité de ses droits d'associé sur les bénéfices de la SCP réalisés postérieurement au 10 septembre 1999 ; qu'en se bornant à énoncer, pour faire droit à la demande de paiement d'une quote-part des bénéfices du cabinet pour la période postérieure au 10 septembre 1999, formée par M. X... sur la base de l'intégralité de ses droits sociaux, que celui-ci n'avait pas perçu à cette date la valeur intégrale de ses parts sociales, sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé, s'il n'avait pas été en tout ou partie remboursé de la valeur de ses droits sociaux dès le 9 septembre 1999, par l'attribution, à cette date, d'une fraction significative de la clientèle de la SCP G. J. Veyssade, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1869 du code civil et de l'article 18 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1996 ;

2°/ que les juges ne peuvent dénaturer les écritures des parties ; que dans ses écritures d'appel, la société Cabinet Veyssade faisait notamment valoir que M. X... avait quitté, le 9 septembre 1999, la SCP avec une clientèle évaluée à 200 000 euros, correspondant à 92 % du prix global de ses parts, soit plus que la valeur de ses parts en pleine propriété, seules productives de revenus, d'une part, qu'ayant perçu dès son départ la quasi-totalité du prix global arbitré, représentant un montant supérieur à celle de ses parts en pleine propriété, le retrayant, M. X..., ne pouvait prétendre avoir conservé l'intégralité de ses droits sur le produit de l'activité demeurée au cabinet, d'autre part, et que la demande de M. X... formée sur la base de la totalité de ses droits sociaux ne pouvait prospérer puisque cela impliquerait le maintien de l'intégralité des droits patrimoniaux du retrayant sur les bénéfices futurs pour défaut de paiement, à la date du retrait, d'un seul euro de la valeur de ses droits sociaux ; qu'en énonçant, pour justifier sa décision, que la société Cabinet Veissade ne remettait pas en question les modalités de calcul et le montant total de la somme auquel parvient M. X..., alors que la société Cabinet Veyssade contestait distinctement dans ses écritures non seulement le principe de la demande de M. X... tendant au paiement d'une quote-part des bénéfices du cabinet réalisés postérieurement au 10 septembre 1999, mais encore les modalités de calcul comme le montant total de la somme réclamée à ce titre par ce dernier, la cour d'appel a dénaturé les écritures de la société Cabinet Veyssade en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que la société Cabinet Veyssade rappelait dans ses écritures d'appel que la sentence du bâtonnier en date du 27 mars 2006 n'avait imparti à la SCP G. J. Veyssade d'établir un acte de cession de parts sociales que dans les " 30 jours de la demande qui lui en sera faite par M. X... ", et précisait que ce dernier avait " soigneusement omis de lui présenter à ce jour une telle demande " ; qu'en énonçant, pour faire droit à la demande de paiement d'une quote-part des bénéfices postérieurs au 10 septembre 1999 formée par M. X..., que la SCP G. J. Veyssade n'avait pas établi d'acte de cession de parts sociales conforme aux termes de la sentence du bâtonnier en date du 27 mars 2006, sans rechercher, comme elle y était invitée et alors même qu'elle constatait expressément que la SCP n'était tenue d'accomplir un tel acte que dans les 30 jours suivants la demande faite en ce sens par M. X..., si M. X..., ainsi que lui en faisait l'obligation la sentence arbitrale du 27 mars 2006, avait enjoint à la SCP G. J. Veyssade qu'elle établisse un acte de cession de parts conforme aux termes de cette sentence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1869 du code civil et de l'article 18 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1996 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que M. X... avait quitté le cabinet Veyssade le 10 septembre 1999 sans avoir perçu à cette date la valeur intégrale de ses droits sociaux en capital, l'arrêt en a justement déduit qu'il avait conservé son droit à percevoir des dividendes ; que ce droit, ne pouvant être réduit lorsque l'associé retrayant a obtenu un remboursement partiel de la valeur de ses parts sociales, et n'étant pas subordonné à une demande préalable de sa part, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'examiner une argumentation que ses constatations rendaient inopérante et qui n'a pas commis la dénaturation d'écritures qui lui est reprochée, a légalement justifié sa décision ;

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Attendu que le cabinet Veyssade fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que les intérêts moratoires courent du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent tel une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante ; qu'en faisant droit à la demande de M. X... tendant à obtenir la somme de 32 699 euros d'intérêts légaux calculée sur la quote-part des bénéfices qui lui serait due à compter du 10 septembre 1999, la cour d'appel, qui a fait courir ces intérêts moratoires à compter de l'assemblée générale de la SCP G. J. Veyssade du 9 septembre 1999 alors que la résolution constatant le retrait de M. X... n'était pas de nature à faire courir les intérêts légaux afférents à une éventuelle créance de bénéfices impayés pour la période postérieure à cette date, a violé l'article 1153 du code civil ;

Mais attendu qu'il ne ressort ni des écritures d'appel ni de l'arrêt que le cabinet Veyssade ait contesté la demande de M. X... relative au point de départ des intérêts ;

Que le moyen est nouveau, mélangé de fait et, partant, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.