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Décisions

Cass. com., 29 janvier 2020, n° 18-17.131

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

M. Ponsot

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Gadiou et Chevallier, SCP Ohl et Vexliard

Colmar, du 28 mars 2018

28 mars 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 28 mars 2018), M. W..., directeur commercial de la société unipersonnelle à responsabilité limitée Taconova, a été nommé en qualité de cogérant de cette société le 5 décembre 2008, aux côtés de M. X....

2. Par une décision du 27 octobre 2015, l'associé unique, la société de droit suisse Taconova AG, a décidé la dissolution anticipée de la société Taconova et désigné M. X... en qualité de liquidateur. Le mandat des deux cogérants, M. X... et M. W..., a alors pris fin.

3. Estimant avoir fait l'objet d'une révocation abusive et non fondée de son mandat de gérant, M. W... a assigné la société Taconova en paiement de dommages-intérêts.

Sur le moyen unique

Enoncé du moyen

4. M. W... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts alors :

« 1°/ que la dissolution anticipée de la société est fautive lorsqu'elle est décidée pour nuire à un tiers, aux associés minoritaires ou à son gérant ; qu'en l'espèce, M. W... avait soutenu que la liquidation de la société n'avait été qu'un prétexte pour l'évincer de son poste de gérant et permettre ainsi à la société Taconova de reprendre les clients qu'il avait auparavant conquis et exploités par sa filiale française ; que dès lors, en se bornant à retenir que M. W... n'avait pas été révoqué, la fin de ses fonctions étant « la conséquence logique et légale de la dissolution de la société Taconova » sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si la dissolution anticipée de la société n'avait pas eu, en réalité, pour objectif d'évincer le gérant de ses fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 223-25 et L. 223-29 du code de commerce ;

2°/ que M. W... faisait valoir que la liquidation n'était que factice puisque, un an après cette prétendue dissolution, le site internet de la société Taconova faisait apparaître M. X... en qualité de directeur commercial, fonction précédemment occupée par M. W... ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire de conclusions tendant à démontrer que la dissolution anticipée de la filiale n'avait visé qu'à évincer son gérant et, partant, abusivement révoquer celui-ci, la cour d'appel a, en toute hypothèse, violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que le juge ne peut statuer par un motif dubitatif ; qu'en l'espèce, en réponse au moyen soulevé par M. W... et tiré de l'absence de convocation à l'assemblée générale, la cour d'appel a relevé qu'"il n'apparaît pas y avoir eu réunion d'une assemblée générale (
)" ; qu'en statuant par ce motif dubitatif, la cour d‘appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que le préjudice subi par le gérant du fait de sa révocation abusive n'est pas nécessairement lié à la perte de sa rémunération mais peut être de nature personnelle ; qu'en conséquence, en énonçant que « M. W... ne percevait aucune rémunération au titre de sa gestion », la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 223-25 et L. 223-29 du code de commerce.»

Réponse de la Cour

5. L'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que, postérieurement à la dissolution de la société Taconova , M. W... et le président de la société Taconova AG ont échangé des courriers desquels il résulte que la société avait un résultat négatif, que l'associé unique était pessimiste quant à la rentabilité de la société et que les qualités et l'engagement professionnel de M. W... n'étaient pas en cause.

6. En l'état de ces seules constatations, dont elle a déduit que la dissolution de la société avait été motivée par des considérations économiques et que M. W... n'avait pas été révoqué de ses fonctions de gérant, le terme de celles-ci étant la conséquence légale de la dissolution, et abstraction faite du motif critiqué par la quatrième branche, qui est surabondant, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à une allégation dépourvue d'offre de preuve et qui ne s'est pas prononcée par des motifs dubitatifs, a légalement justifié sa décision.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.