Cass. com., 20 mai 1997, n° 95-12.925
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Rémery
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
SCP Vier et Barthélemy, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, Me Brouchot, Me Odent
Sur le moyen unique :
Vu l'article 93 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que la cession de l'entreprise, par suite de l'adoption d'un plan de redressement, ne peut porter atteinte au droit de rétention issu du gage avec dépossession qu'un créancier a régulièrement acquis sur des éléments compris dans l'actif cédé ; qu'en l'absence de disposition légale en ce sens le créancier rétenteur ne peut être contraint de se dessaisir du bien qu'il retient légitimement que par le paiement du montant de la créance qu'il a déclarée, et non par celui d'une quote-part du prix de cession qui serait affectée à ce bien pour l'exercice du droit de préférence ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en garantie de concours financiers qu'ils lui avaient accordés, la société Etablissements des héritiers de Georges X... (société HGP) a constitué au profit du Crédit lyonnais, du Crédit commercial de France, de la Banque nationale de Paris, de la Société générale et de la société nancéienne Varin Bernier (les banques) un gage en marchandises portant sur un important lot de tissus écrus qui a été mis en possession d'un tiers convenu, la Société européenne de garantie ; que, la société HGP ayant été ultérieurement mise en redressement judiciaire, le Tribunal, par un jugement du 8 novembre 1991, a arrêté le plan de cession de son activité de tissage au profit de la société Les Tissages des héritiers de Georges X... - Groupe Alain Thirion moyennant un prix de cession dont une quote-part a été affectée au lot de tissus gagé ; que la société cessionnaire, malgré l'opposition du tiers convenu, a pris possession de cette partie du stock sans que la créance déclarée par les banques ne soit payée ; que, rejetant la demande formée par celles-ci, le Tribunal a décidé que " le versement de la quote-part attribuée au pool bancaire par le jugement du 8 novembre 1991 par les soins du commissaire à l'exécution du plan entraînera purge de toute inscription de privilège ou nantissement sur les biens cédés " ;
Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt retient que la prétention des banques apparaît contraire à la lettre de l'article 93 de la loi du 25 janvier 1985 dont l'alinéa 1er, en visant le nantissement, s'applique au gage avec ou sans dépossession, comme à son esprit dès lors que le plan de cession d'une entreprise a pour but d'assurer le maintien d'une activité économique, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et enfin d'apurer le passif dans la mesure du possible ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendue le 12 janvier 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar.