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Décisions

CA Aix-en-Provence, 11e ch. b, 13 septembre 2018, n° 16/05328

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Le Kube (SARL)

Défendeur :

Somagip (SA), Marsotel (EURL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Konstantinovitch

Conseillers :

Mme Peltier, Mme Fillioux

Avocats :

Me Blanc, Me Badie, Me Rouger

TGI Marseille, du 4 mars 2016, n° 12/136…

4 mars 2016

Exposé des faits

Vu le jugement en date du 4 mars 2016, aux termes duquel le Tribunal de grande instance de Marseille :

- Prononce la résiliation du bail liant la société Le Kube (anciennement AR. BO. GI) à son bailleur la société Somagip, aux torts exclusifs du preneur ;

- Fixe la somme due par la société Le Kube à la société Marsotel en réparation du préjudice résultant des nuisances sonores avant redressement judiciaire à la somme de 107.938 euros, outre 8.898,18 euros de frais d'expertise judiciaire ;

- Condamne la société Le Kube à payer à la société Marsotel la somme de 54.612 euros en réparation du préjudice résultant des nuisances sonores subies du 08/04/2013 au 30/11/2014 ;

- Rejette les autres demandes plus amples ou contraires ;

- Condamne la société Le Kube à payer à la société Marsotel la somme de 1 300 euros, et la somme de 1300 euros à la société Somagip, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la société Le Kube aux dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par la société Le Kube.

Vu les dernières écritures de la société Le Kube et de son mandataire au redressement judiciaire, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, aux termes desquelles elle conclut à la réformation du jugement déféré ; au débouté adverse ; à la condamnation des sociétés Somagip et Marsotel à lui payer une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens.

S'agissant de la demande à fin de résiliation du bail, la société Le Kube soutient en premier lieu, exploiter son activité conformément à l'usage des lieux, en ayant bénéficié des autorisations administratives et n'avoir pas changé la destination des lieux sans l'autorisation du bailleur ; en second lieu, elle soutient avoir réalisé des travaux d'insonorisation acoustique conformément aux préconisations de l'expert judiciaire alors que la société Marsotel s'est opposée à ce que de nouvelles mesures soient effectuées et qu'ainsi sa demande de nouvelle expertise a été rejetée par ordonnance du juge de la mise en état du 21 février 2014 ; que depuis la réalisation de ces travaux l'exploitation de son établissement se fait de manière paisible et sans plainte du voisinage.

S'agissant de la demande afin de condamnation, la société Le Kube oppose les dispositions tant de l'article L. 622-21 du Code de commerce que de l'article L. 112-6 du Code de la construction et de l'habitation ; elle affirme enfin que l'existence du préjudice financier allégué n'est pas démontrée.

Vu les dernières écritures de la société Marsotel, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, aux termes desquelles elle conclut au débouté adverse ; à la réformation du jugement déféré ; à la condamnation conjointe et solidaire des sociétés Le Kube et Somagip à lui payer les sommes de 275.814 euros en réparation du préjudice financier et 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens ; à la fixation de sa créance au passif de la procédure collective de la société Le Kube à la somme de 167.244 euros.

Vu les dernières écritures de la société Somagip, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, aux termes desquelles elle conclut à la confirmation du jugement déféré ; au débouté des conclusions de la société Marsotel en ce qu’elles sont dirigées en son encontre ; au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens.

Motifs

SUR CE

Il ressort des débats et pièces du dossier que l'expert a relevé, au cours des accedits du 16 octobre, 18 novembre et 20 novembre 2011, dans différentes chambres de l'hôtel exploité par la société Marsotel (1 à 7 ainsi que 12) des émergences nettement supérieures à la valeur maximale et ainsi constaté la réalité des dites nuisances dans ces chambres.

Sur la résiliation du bail :

Après un examen exhaustif de l'ensemble des pièces du dossier, et aux termes d'une juste motivation, le premier juge a retenu deux manquements graves de la société Le Kube à ses obligations contractuelles de preneur, en ce que d'une part elle a persisté dans l'organisation de soirées générant des nuisances sonores, et ainsi causé un trouble de voisinage, subi notamment par la société Marsotel qui s'en est plainte dès 2010, faute de pouvoir exploiter paisiblement son établissement hôtelier, d'autre part qu'une activité de discothèque, en tous cas excédant les activités limitativement prévues par le bail, a été exercée dans les lieux loués, lesquels ont comporté une piste de danse à compter de 2010 ; en cause d'appel, il n'est produit aucune pièce susceptible de remettre en cause ces appréciations ; par ailleurs, les circonstances tirées de ce que la la société Le Kube exploite son activité conformément aux autorisations administratives et même à les supposer efficaces, qu'elle a procédé à des travaux d'isolation acoustique de la source, au demeurant différents de ceux préconisés par l'expert, sont inopérantes.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé de ce chef.

Sur le préjudice de la société Marsotel :

S'agissant du préjudice subi par la société Marsotel :

L'Expert a estimé la perte du chiffre d'affaires de la société Marsotel, pour la période du < 16 avril 2010 (date de commencement de l'exploitation de l'hôtel de la société Marsotel) et le 10 décembre 2011 (date de la fermeture provisoire de l'établissement de la société ARBOGI) à la somme de 55.000 euros ; la société Le Kube justifie de travaux d'isolation phonique à la source ainsi que de la pose d'un limitateur d'émissions sonores ; or, et même si comme retenu par le premier juge, il n'en résulte pas démonstration d'une baisse de ces émissions conforme aux préconisations de l'expert, force est d'admettre que la société Marsotel se borne à affirmer que les nuisances persistent sans cependant en justifier notamment postérieurement à la date du 30 novembre 2014 retenue par le premier juge comme terme de l'indemnisation ; en outre, et en dépit des critiques adverses, elle s'abstient de produire tout document comptable susceptible d'établir que le préjudice qu'elle a subi est conforme à l'évaluation de son chiffre d'affaires faite par son expert-comptable, et ce, alors même qu'il est établi que l'établissement a été fermé durant de nombreuses périodes lesquelles auraient pu permettre de mettre en évidence les pertes d'exploitation en litige ; dès lors, la demande à fin d'actualisation du préjudice devra être écartée ; en outre, et après examen de l'ensemble des circonstances de la cause, et alors qu'en l'état, le préjudice ne s'analyse qu'en une perte de chance d'avoir pu mieux exploiter l'établissement, il convient de fixer celui subi jusqu'à la date de redressement judiciaire à la somme de 68.240 euros et à celle de 35.520 euros celui subi postérieurement jusqu'à la date du 30 novembre 2014.

S'agissant des responsabilités des sociétés Le Kube et Somagip :

C'est aux termes de justes motivations, adoptées par la Cour, que le premier juge, en se fondant sur les dépassements des normes applicables, a écarté le moyen développé par la société Le Kube tiré de l'article L. 112-6 du Code de la construction et de l'habitation et écarté la responsabilité du bailleur ; en cause d'appel les sociétés Le Kube et Marsotel ne développent aucun moyen nouveau, ni ne caractérisent une erreur d'appréciation du premier juge ; en outre, il sera observé que la société Somagip a mis en œuvre les moyens propres à garantir la jouissance paisible des lieux, en introduisant une demande à fin de résiliation du bail dès le 8 novembre 2012, soit avant même la date de renouvellement du bail, circonstance permettant d'écarter le grief tiré de la non délivrance d'un congé pour motif grave et légitime ; le jugement déféré sera en conséquence également confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Le Kube et écarté celle de la société Somagip.

Enfin, les dépens seront mis à la charge de l'appelant qui succombe et il sera alloué à chacune des sociétés Marsotel et Somagip une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à la disposition des parties au greffe de la Cour, conformément à l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.

Réforme le jugement déféré s'agissant du montant des sommes allouées en réparation du préjudice résultant des nuisances sonores, et statuant de nouveau,

Fixe la somme due par la société Le Kube à la société Marsotel au titre du préjudice avant redressement judiciaire à la somme de 68.240 euros, outre 8.898,18 euros de frais d'expertise judiciaire.

Condamne la société Le Kube à payer à la société Marsotel la somme de 35.520 euros en réparation du préjudice résultant des nuisances sonores subies après redressement judiciaire jusqu'au 30 novembre 2014.

Confirme le jugement déféré pour le surplus.

Rejette toute autre demande.

Condamne la société Le Kube à payer à la société Marsotel et à la société Somagip une somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Le Kube aux entiers dépens et dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.