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Décisions

ARCEP, 5 novembre 2020, n° 2020-1168-RDPI

ARCEP

se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant la société Bouygues Telecom et la société SFR FTTH

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soriano

Membre :

M. Abiteboul, Mme Cottenye, Mme Liebert-Champagne

ARCEP n° 2020-1168-RDPI

4 novembre 2020

L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ci-après « l’Autorité » ou « l’Arcep »),

Vu la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen ;

Vu la directive n° 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre »), modifiée par la directive n° 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 ;

Vu la directive n° 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive « accès »), modifiée par la directive n° 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 ;

Vu la recommandation 2010/572/UE de la Commission européenne du 20 septembre 2010 sur l’accès réglementé aux réseaux d’accès de nouvelle génération (ci-après « recommandation NGA ») ;

Vu le code des postes et des communications électroniques (ci-après « CPCE »), notamment ses articles L. 32, L. 32-1, L. 34-8, L. 34-8-3, L. 36-8, R. 11-1 ;

Vu la décision n° 2009-1106 de l’Arcep en date du 22 décembre 2009 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE, les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée ;

Vu la décision n° 2010-1312 de l’Arcep en date du 14 décembre 2010 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE, les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses ;

Vu la décision n° 2015-0776 de l’Arcep en date du 2 juillet 2015 sur les processus techniques et opérationnels de la mutualisation des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique ;

Vu le modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses publié en octobre 2015 ;

Vu les lignes directrices de l’Autorité de décembre 2015 portant sur la tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique déployés par l’initiative publique (ci-après « lignes directrices tarifaires ») ;

Vu le règlement intérieur de l'Autorité adopté par la décision n° 2019-1685 en date du 10 décembre 2019 ;

Vu la demande de règlement de différend, déposée à l’Autorité le 29 janvier 2020, présentée par la société Bouygues Telecom, société anonyme, dont le siège social est 37-39 rue Boissière, 75016 Paris, et  immatriculée  au  Registre  du  Commerce  et  des  Sociétés  de  Paris  sous  le  numéro  397 480 930 ;

Vu le courrier de régularisation de la saisine transmis par la société Bouygues Telecom, enregistré à l’Autorité le 30 janvier 2020 ;

Vu l’enregistrement par l’Autorité, le 30 janvier 2020, de la demande de règlement de différend ainsi régularisée par la société Bouygues Telecom ;

La société Bouygues Telecom demande à l’Autorité de :

« A - Dire les demandes de ByTel recevables ;

B - Dire que les hausses tarifaires des différentes modalités d’accès au réseau FttH de SFR FTTH au sein de la zone SFMD de ZMD AMII prévues à compter du 1er février 2020, en particulier les tarifs de cofinancement, le récurrent de financement et le tarif de location mensuelle, ne sont pas justifiées par des éléments de coûts clairs et opposables, et sont manifestement déraisonnables et ne peuvent donc pas s’appliquer.

En conséquence, enjoindre à SFR FTTH de transmettre à ByTel un avenant au contrat conclu entre ByTel et SFR FTTH dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend à intervenir, par lequel SFR FTTH renonce à l’application de ces hausses de tarifs rétroactivement au 1er février 2020.

C - Dire que le tarif de location mensuelle à la ligne fixé par SFR FTTH à 16,40 € HT/mois/ligne dans le contrat conclu le 3 janvier 2020 entre ByTel et SFR FTTH est manifestement déraisonnable.

En conséquence, enjoindre à SFR FTTH, de transmettre à ByTel un avenant au contrat conclu entre Bouygues Telecom et SFR FTTH dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend à intervenir, modifiant son contrat d’accès conclu avec ByTel afin que le tarif de location mensuelle à la ligne FttH soit compris entre 12,20 € HT/mois/ligne et un maximum de 13,20 € HT/mois/ligne au sein de la zone SFMD dans la ZMD AMII.

D - Dire que le tarif de location mensuelle à la ligne devant être appliqué par SFR FTTH sera rétroactif à partir du 3 janvier 2020 pour toutes les lignes activées par ByTel au sein de la zone SFMD de la ZMD AMII. »

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes, Bouygues Telecom soutient que :

- l’Autorité est compétente en application des articles L. 34-8-3 et L. 36-8, I du CPCE pour trancher le différend qui l’oppose à la société SFR FTTH ;

- ses demandes sont recevables en raison de l’échec des négociations avec SFR FTTH dès lors que Bouygues Telecom a demandé à plusieurs reprises à SFR puis SFR FTTH une baisse du tarif de location, demande à laquelle SFR puis SFR FTTH ont refusé de faire droit ou n’ont pas répondu et ce, depuis deux ans après la première demande ;

- l’Autorité est compétente, en application de l’article L. 36-8 du CPCE, pour enjoindre à SFR FTTH de pratiquer la baisse de tarif demandée rétroactivement à compter du 1er janvier 2020.

Sur le fond, Bouygues Telecom soutient, d’une part, que sa demande est fondée au regard des obligations réglementaires incombant aux opérateurs d’infrastructure et, d’autre part, que le tarif de location et l’augmentation des tarifs d’accès de SFR FTTH sont déraisonnables et contraires à ses obligations réglementaires.

En premier lieu, Bouygues Telecom soutient que tant les objectifs définis à l’article L. 32-1 du CPCE, que les principes d’objectivité et de transparence applicables aux conventions d’accès et d’interconnexion conformément à l’article D. 99-10 du CPCE, que les obligations énoncées à l’article L. 34-8-3 du CPCE et ses décisions d’application, dont la décision n° 2009-1106 qui prévoit le respect du principe de non-discrimination, d’objectivité, de pertinence et d’efficacité des investissements, ou encore le principe du lien entre les tarifs d’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique et les coûts de déploiement tel que confirmé par la Cour d’appel de Paris dans le cadre du règlement de différend Free contre Orange, imposent que SFR FTTH justifie de la structure de ses tarifs, de la cohérence entre ses différents tarifs et de leur relation avec les coûts sous-jacents qu’il supporte. Par ailleurs, Bouygues Telecom soutient que l’utilisation du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux FttH (fibre to the home) en dehors des zones très denses (ci-après « ZTD »), publié par l’Arcep, permet de calculer des tarifs d’accès cohérents et raisonnables.

En deuxième lieu, s’agissant de la demande relative aux hausses des tarifs d’accès, Bouygues Telecom soutient que celles-ci ne sont pas justifiées et donc manifestement déraisonnables. Bouygues Telecom soutient d’abord que l’augmentation du tarif non-récurrent de cofinancement, qui serait porté de 510 € HT à 520 € HT, n’est pas justifiée. Bouygues Telecom fait valoir en substance que SFR FTTH est le seul opérateur d’infrastructure à avoir augmenté ses prix déjà élevés, sans justification objective. Bouygues Telecom soutient ensuite que l’augmentation du tarif de récurrent de cofinancement, qui passerait de [4,83 €/mois/ligne ; 5,32 €/mois/ligne] à  [5,29 €/mois/ligne ; 5,80 €/mois/ligne] en fonction du nombre de tranches de cofinancement souscrites, n’est pas justifiée, aucun élément nouveau n’étant susceptible d’expliquer une modification du taux de cofinancement, des coûts de location de génie civil ou des coûts de maintenance. Bouygues Telecom soutient en particulier qu’aucun élément nouveau, hormis la cession du réseau de SFR vers SFR FTTH, ne pourrait expliquer une révision du taux de cofinancement, que les coûts de location de génie civil devraient au contraire avoir tendance à baisser dans le temps et que les travaux de suivi de l’exploitation des réseaux FttH devraient contribuer à une baisse des coûts d’exploitation. Bouygues Telecom soutient enfin qu’aucun élément ne justifiant la hausse des tarifs de cofinancement, le tarif de location, résultant du tarif récurrent de cofinancement et de l’amortissement financier de l’investissement de cofinancement du réseau PM (point de mutualisation)-PBO (point de branchement optique), ne devrait pas non plus évoluer.

En troisième lieu, s’agissant de la demande relative au tarif de location, Bouygues Telecom soutient que le tarif de location de SFR FTTH est déraisonnable et contraire à ses obligations réglementaires. Bouygues Telecom fait tout d’abord valoir que SFR FTTH n’a pas justifié de la structure de ses coûts, en contrariété avec les principes de la décision symétrique et les impératifs de visibilité des coûts pratiqués par les opérateurs d’infrastructure (ci-après « OI »). Bouygues Telecom soutient ensuite que l’utilisation du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD (ci-après, modèle de tarification de 2015) démontre que la composante d’amortissement financier est déraisonnable et, en conséquence, que le tarif de location l’est également. En effet, Bouygues Telecom considère qu’en y injectant les tarifs pratiqués par SFR FTTH, l’amortissement financier en résultant est très largement supérieur à celui indiqué dans le modèle de tarification de 2015. Bouygues Telecom soutient en outre qu’en actualisant, au regard de la situation de SFR FTTH et de la réalité du marché, les paramètres de rythme de déploiement, de taux de pénétration FttH et la part de marché de l’opérateur locataire, dont dépend la valeur de l’amortissement financier, dans le de tarification de 2015, un amortissement financier raisonnable devrait s’élever à 7,29 € HT/mois/ligne. Ainsi, Bouygues Telecom argue que l’utilisation du modèle avec ces hypothèses mises à jour devrait conduire à un tarif de location à 12,61 € HT/mois/ligne et qu’en regard le tarif de location de SFR FTTH à 16,40 € HT/mois/ligne apparaît manifestement déraisonnable, eu égard notamment au niveau de la prime de risque associée. Bouygues Telecom soutient enfin que le tarif de location de SFR FTTH est le plus cher parmi les opérateurs d’infrastructure avec lesquels Bouygues Telecom a contractualisé en zones moins denses (ci-après « ZMD »), le maximum constaté s’élevant à 13,20 € HT/mois/ligne.

Vu le courrier du 30 janvier 2020 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a transmis à la société SFR FTTH la demande de règlement de différend de la société Bouygues Telecom ;

Vu le courrier du 4 février 2020 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a transmis aux parties le calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et désigné les rapporteurs ;

Vu le courrier du 14 février 2020 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a transmis aux parties un nouveau calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et rappelé le nom des rapporteurs désignés ;

Vu les observations en défense, enregistrées à l’Autorité le 9 mars 2020, présentées par la société SFR FTTH, société par actions simplifiée, dont le siège social est 124, boulevard de Verdun, 92400 Courbevoie, et immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nanterre sous le numéro 844 717 587 ;

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes, SFR FTTH soutient que :

- les demandes relatives au tarif de location et aux évolutions tarifaires sont irrecevables, à défaut d’échec des négociations entre les parties. Tout d’abord, SFR FTTH avance que les discussions engagées avec SFR à partir de décembre 2017 ne peuvent être prises en compte pour caractériser un échec des négociations et ont concerné un contrat distinct de celui conclu avec Bouygues Telecom. Ensuite, SFR FTTH considère que la demande concernant le tarif de location a évolué au cours des négociations. Enfin, SFR FTTH estime que Bouygues Telecom ne rapporte pas la preuve d’un échec des négociations s’agissant de la demande relative aux évolutions tarifaires, Bouygues Telecom n’ayant manifesté son désaccord que le 3 janvier 2020 alors que la hausse tarifaire a été annoncée le 31 octobre 2019. À supposer que les demandes soient recevables, SFR FTTH estime qu’aucune rétroactivité ne devrait trouver à s’appliquer au regard de l’iniquité qu’elle susciterait ;

- les demandes visant à ce que l’Arcep constate le caractère déraisonnable du tarif de location et des évolutions tarifaires sont irrecevables, et revêtent un caractère normatif, dans la mesure où elles visent à ce que soient définis des principes de tarification qui vont au-delà du cadre réglementaire symétrique, alors que l’Arcep n’a pas compétence dans le cadre d’une procédure de règlement de différend pour adopter une décision à portée réglementaire.

Sur le fond, SFR FTTH estime que les demandes de Bouygues Telecom sont illégitimes, infondées et disproportionnées.

En premier lieu, SFR FTTH soutient que Bouygues Telecom dénature les obligations réglementaires applicables ainsi que les objectifs de régulation.

SFR FTTH estime, en substance, que les principes du cadre réglementaire (transparence, non-discrimination, objectivité, pertinence) sont respectés. Il soutient à cet égard que le principe d’objectivité n’implique pas une obligation de justification des coûts auprès des opérateurs locataires, et que le tarif de location est en lien avec les coûts supportés par SFR FTTH, conformément à ce principe qui n’impose pas un tarif orienté vers les coûts. SFR FTTH fait également valoir qu’un tarif raisonnable n’est pas un tarif orienté vers les coûts et n’empêche ainsi pas, contrairement à ce que prétend Bouygues Telecom, de pratiquer une marge commerciale même importante. Il soutient enfin que le caractère raisonnable d’un tarif doit être apprécié au regard de l’avantage en matière de souplesse que l’offre confère à l’opérateur commercial locataire.

D’autre part, SFR FTTH soutient que les demandes de Bouygues Telecom méconnaissent les objectifs de régulation car elles remettraient en cause l’intérêt de co-investir dans les réseaux FttH alors que le tarif de location de SFR FTTH respecte l’échelle des investissements, d’autant plus que son offre d’accès contient un coefficient ex post facilitant le passage de la location au cofinancement. SFR FTTH soutient également que Bouygues Telecom a la capacité de co-investir, notamment au regard de son projet « Astérix » et de ses capacités financières et que l’offre de SFR FTTH n’empêche pas Bouygues Telecom de fournir des offres compétitives sur le marché de détail.

En deuxième lieu, SFR FTTH estime que Bouygues Telecom dénature la portée du modèle de tarification de 2015 sur lequel il s’appuie aux fins de la démonstration du caractère déraisonnable des tarifs pratiqués. Il soutient d’abord que ce modèle n’a aucune valeur contraignante. SFR FTTH soutient ensuite que Bouygues Telecom, en réalisant un « amalgame entre rémunération du risque (WACC + primes de risque) et marge commerciale »1, réclame en réalité un tarif orienté vers les coûts. SFR FTTH fait ainsi valoir que la prime de risque du modèle de tarification de 2015 vise à rémunérer les risques d’investissement et est composée d’un taux de rémunération du capital, qui  ne correspond en aucun cas à une marge commerciale, et auquel il est justifié d’ajouter une prime de risque spécifique pour le calcul des coûts d’accès aux réseaux FttH. SFR FTTH argue enfin que le modèle de tarification de 2015 produit un tarif orienté vers les coûts auquel il est possible d’ajouter une marge commerciale.

En troisième lieu, SFR FTTH estime en substance que l’offre de location est avantageuse pour Bouygues Telecom au regard de certaines de ses clauses, notamment celle relative à l’application d’une courbe ex post plus favorable pour les opérateurs commerciaux locataires afin de faciliter leur basculement vers le cofinancement. À cet égard, SFR FTTH soutient que l’application de la courbe ex post à l’achat d’une tranche de cofinancement de 5 % chez SFR FTTH revient in fine à proposer une offre d’accès [SDA] % moins chère que celle d’Orange.

En quatrième lieu, SFR FTTH soutient que les ajustements des paramètres du modèle de tarification de 2015 proposés par Bouygues Telecom sont injustifiés et que Bouygues Telecom ne démontre ainsi pas en quoi le tarif de location serait déraisonnable. Tout d’abord, SFR FTTH estime que la mise à jour du taux régulé de rémunération du capital n’est pas justifiée car rien ne garantit qu’il reste au niveau de 7,6 % sur la période 2018-2063. Ensuite, SFR FTTH fait valoir que le tarif forfaitaire de cofinancement ainsi que le rythme de déploiement retenus par Bouygues Telecom ne sont pas exacts car ne tiennent pas compte de l’intégration des zones AMEL. SFR FTTH indique notamment que les coûts auxquels il est exposé sont plus élevés qu’Orange qui dispose d’économies d’échelle sans commune mesure avec celles dont il peut bénéficier. SFR FTTH soutient également que les taux de cofinancement et de pénétration sont faibles en zone SFMD par rapport aux  hypothèses retenues par Bouygues Telecom, [SDA]. En outre, SFR FTTH soutient que, contrairement à ce qu’avance Bouygues Telecom, les coûts de génie civil ont tendance à augmenter et le coût des OPEX de maintenance s’accroit compte tenu notamment de la hausse des dégradations des PM et que le modèle utilisé par Bouygues Telecom n’inclut pas les coûts commerciaux et de structure qu’il convient donc d’ajouter. Enfin, SFR FTTH estime que la comparaison avec les autres opérateurs d’infrastructures n’est pas valable, d’une part en ce qui concerne Orange qui est soumis à un risque et des coûts plus faibles que les autres opérateurs d’infrastructure, et d’autre part en ce qui concerne les opérateurs de réseaux d’initiative publique qui relèvent de situations différentes de celles des opérateurs d’infrastructures intervenant en zone privée.

En cinquième lieu, SFR FTTH soutient que les évolutions tarifaires sont justifiées. SFR FTTH se prévaut de la décision de règlement de différend n° 2018-0569 pour soutenir qu’un opérateur d’infrastructure peut faire évoluer ses tarifs pour tenir compte l’évolution de ses coûts. SFR FTTH estime que les évolutions tarifaires sont liées, à titre principal, à l’application de l’inflation qui n’avait pas été mise en œuvre depuis 2012 et conclut au fait que seul importe le caractère raisonnable des tarifs.

Vu les courriers électroniques du 24 mars et du 6 avril 2020 par lesquels la société Bouygues Telecom a demandé un délai supplémentaire pour produire ses observations en réplique ;

Vu les courriers des 25 mars 2020 et 6 avril 2020 par lesquels la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a transmis aux parties le calendrier prévisionnel modifié de dépôt des mémoires ;

Vu les observations en réplique, reçues à l’Autorité le 7 avril 2020, présentées par la société Bouygues Telecom ;

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes,

Bouygues Telecom maintient que l’échec des négociations est caractérisé pour chacune de ses demandes.

En particulier, Bouygues Telecom soutient d’abord que les négociations avec SFR doivent être prises en compte au regard de la continuité entre l’activité antérieurement gérée par SFR et transférée à SFR FTTH, et souligne l’identité de l’objet des négociations menées entre Bouygues Telecom et ces deux entités. Il estime qu’en tout état de cause, même sans tenir compte des échanges intervenus avec SFR, les discussions entre Bouygues Telecom et SFR FTTH suffisent à démontrer l’échec des négociations. Bouygues Telecom affirme par ailleurs que ses demandes de baisse de tarif de location ont été cohérentes et stables pendant la négociation ; qu’il a toujours demandé un tarif de location à 12,20 € en concédant un tarif maximum à 13,20 €. Bouygues Telecom fait valoir que ses demandes relatives au tarif de location, d’une part, et aux évolutions tarifaires, d’autre part, ont toutes deux été quantifiées et motivées au regard du modèle de tarification de 2015. Enfin, s’agissant plus particulièrement de sa demande relative à l’augmentation des tarifs de SFR FTTH, Bouygues Telecom soutient que SFR FTTH ne peut invoquer l’absence de négociation sur cette demande car, d’une part, la hausse tarifaire annoncée en octobre 2019 traduit un rejet ferme de la part de SFR FTTH de faire droit à ses demandes et, d’autre part, cette demande visant à ce que SFR FTTH renonce à l’application de la hausse tarifaire s’inscrit dans la continuité des demandes de Bouygues Telecom de prix moins élevés, exprimées avant même l’annonce de cette hausse tarifaire.

Par ailleurs, Bouygues Telecom estime en substance que sa demande de rétroactivité n’est pas disproportionnée car elle est limitée et ne revêt pas la même portée aujourd’hui qu’au début des déploiements de la fibre.

Enfin, Bouygues Telecom soutient que ses demandes, visant à ce que l’Arcep dise que les tarifs de SFR FTTH sont déraisonnables, ne se bornent pas à des demandes de constat, mais sont exprimées  au soutien de ses demandes tarifaires. En outre, Bouygues Telecom argue que l’objet de sa demande n’a pas pour effet de donner un caractère normatif à la décision de l’Arcep, ni au modèle de tarification de 2015.

Sur le fond,

Bouygues Telecom maintient ses demandes et complète son argumentation avec les éléments ci-dessous.

En premier lieu, Bouygues Telecom souligne que les objectifs de régulation ne se concentrent pas sur la promotion des investissements mais tendent à un équilibre entre l’incitation aux investissements et l’exercice d’une concurrence effective et loyale, ce qui implique de pratiquer des tarifs ni trop bas ni trop élevés. Bouygues Telecom estime ensuite que l’objet du modèle, dont il n’invoque pas le caractère prescriptif, contrairement à ce que SFR FTTH mentionne dans ses écritures, est bien de traduire la conciliation de ces objectifs de régulation.

En deuxième lieu, Bouygues Telecom soutient que SFR FTTH tente de se soustraire à ses obligations réglementaires. Bouygues Telecom fait valoir, en réponse à l’argument de SFR FTTH selon lequel Bouygues Telecom aurait la capacité de co-investir et n’aurait pas besoin d’une offre de location à un tarif raisonnable, que le développement de Bouygues Telecom n’est pas aussi avancé que le prétend SFR FTTH (il indique notamment disposer d’un parc de clients moins élevé que celui de ses concurrents et que sa croissance doit être nuancée). Bouygues Telecom soutient par ailleurs qu’il n’a pas la même capacité d’investissement que celle de ses concurrents et que, malgré une santé financière en progrès, sa situation reste fragile. Bouygues Telecom soutient à cet égard que la recherche de partenaires financiers (ex. Cellnex) montre, contrairement aux allégations de SFR FTTH, qu’il n’a pas la capacité de financer seul des tranches de cofinancement au sein de la ZMD d’initiative privée, et que le recours à l’offre locative lui permet justement de répartir dans le temps ses différents investissements, l’investissement requis pour co-investir à hauteur de 5 % étant plus élevé que ce que prétend SFR FTTH. Bouygues Telecom estime que les considérations de SFR FTTH sur l’enjeu limité du litige sont fausses, notamment parce que SFR FTTH ne tient pas compte des conséquences à plus long terme sur Bouygues Telecom des tarifs élevés pratiqués par SFR FTTH. Bouygues Telecom conteste enfin le raisonnement de SFR FTTH selon lequel il ne disposerait pas d’un monopole naturel et  soutient  qu’il  n’est  pas  du  tout  établi,  contrairement  à  ce  que  prétend SFR FTTH, que des opérateurs auraient intérêt à proposer des offres de gros alternatives, si le tarif pratiqué par SFR FTTH était déraisonnable.

En troisième lieu, s’agissant de la portée de l’obligation de proposer une offre locative, à tarif objectif et raisonnable, Bouygues Telecom estime en particulier que SFR FTTH associe à tort le tarif raisonnable à un tarif de non-éviction et que Bouygues Telecom ne revendique pas l’application d’un tarif orienté vers les coûts, sans marge commerciale, mais seulement une cohérence entre les tarifs et les coûts conformément au cadre réglementaire. À cet égard, Bouygues Telecom commence par soutenir qu’un tarif orienté vers les coûts n’empêche pas de faire une marge commerciale, l’intégration du coût moyen pondéré du capital (CMPC) ayant pour objet de rémunérer l’investissement et faisant partie de la marge commerciale. En outre, Bouygues Telecom fait valoir que le calcul proposé dans sa saisine, en s’appuyant sur les tarifs de cofinancement de SFR FTTH, intègre donc déjà une marge commerciale. Ensuite, Bouygues Telecom soutient qu’il ne cherche pas à dénoncer la prime de risque associée à l’offre de location mais « le caractère excessif et disqualifiant de l’écart que SFR FTTH cherche à imposer entre ses offres de co-investissement et ses offres locatives, ainsi que la hausse injustifiée de ses prix »2. Enfin, Bouygues Telecom soutient que le tarif de l’offre de location doit être raisonnable en lui-même et que les autres conditions entourant l’offre d’accès, parmi lesquelles le coefficient ex post avantageux pour les opérateurs commerciaux locataires, ne peuvent exonérer SFR FTTH de son obligation réglementaire de pratiquer un tarif de location raisonnable.

En dernier lieu, Bouygues Telecom soutient que les éléments opposés par SFR FTTH pour expliquer les niveaux de coûts et les paramètres à partir desquels ses tarifs sont construits ne sont pas justifiés.

Tout d’abord, Bouygues Telecom fait valoir qu’il n’y a pas de raison de ne pas mettre à jour le taux  de rémunération du capital à la dernière valeur fixée par l’Arcep pour la période 2018-2020, qui correspond à la pratique « couramment suivie par l’Arcep dans ses  différents  modèles  de  tarification »3 et soutient qu’au surplus le tarif de 12,20 € par mois par ligne a été établi à partir du modèle avant la mise à jour du taux de rémunération du capital.

Ensuite, Bouygues Telecom estime en substance que l’augmentation prévue du tarif non-récurrent de cofinancement n’est pas justifiée au motif que ni l’écart de densité entre la zone SFMD de SFR FTTH et la zone AMII d’Orange, ni les économies d’échelle dont bénéficierait Orange, ni la reconstruction du génie civil sur la zone AMEL, ne peuvent expliquer la différence de tarif appliqué. Bouygues Telecom soutient encore que l’augmentation des tarifs sur la zone AMEL intervient après que SFR FTTH ait pris des engagements sur la base de la grille tarifaire alors en vigueur sur la ZMD AMII et alors même que SFR FTTH connaissait les coûts de déploiement sur la zone AMEL.

De plus, Bouygues Telecom soutient en substance que l’adaptation des paramètres du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD à la situation de SFR FTTH (sur le rythme de déploiement, le taux de co-investissement et le taux de pénétration plus faibles que ceux renseignés par SFR FTTH) ne remet pas en cause la conclusion selon laquelle les tarifs pratiqués par SFR FTTH ne sont pas raisonnables et tendent à l’inverse plutôt à une baisse du tarif de location.

Par ailleurs, s’agissant des coûts de génie civil, Bouygues Telecom soutient principalement que les arguments mis en avant par SFR FTTH pour justifier un coût plus élevé ne sont pas valables. En premier lieu, Bouygues Telecom soutient que le modèle prend en compte le coût d’achat du génie civil à Orange si bien que SFR FTTH ne peut, pour justifier l’écart de son tarif de location avec celui du modèle, se prévaloir de l’avantage en matière de coût de génie civil dont bénéficierait Orange, qui est par ailleurs lui-même soumis à ce tarif conformément au principe de non-discrimination. En deuxième lieu, Bouygues Telecom fait valoir que la reconstruction du génie civil, qu’appelle selon SFR FTTH le déploiement en zone AMEL, ne peut à la fois justifier une augmentation du tarif forfaitaire et une augmentation du récurrent de génie civil.

En outre, s’agissant du coût des OPEX de maintenance, Bouygues Telecom soutient que rien ne justifie leur augmentation au motif qu’aucun opérateur d’infrastructure n’a augmenté son tarif récurrent de cofinancement en conséquence des coûts de maintenance, que le taux de pénétration faible invoqué par SFR FTTH devrait au contraire conduire à des dégradations moindres sur son réseau, que les opérateurs d’infrastructure ne supportent pas l’intégralité de ces coûts, que les dégradations sur le réseau de SFR FTTH sont liés à l’architecture de son réseau en ZMD et qu’il serait ainsi prématuré de répercuter ces surcoûts sur les tarifs d’accès au regard du groupe de travail multi-opérateurs en cours.

S’agissant des coûts commerciaux et de structure, Bouygues Telecom soutient que, contrairement à ce que prétend SFR FTTH, ils sont bien pris en compte avec l’utilisation qu’il fait du modèle, dans les tarifs forfaitaire et récurrent de cofinancement de SFR FTTH.

S’agissant de l’argument de SFR FTTH selon lequel il serait exposé à des coûts et risques supérieurs à ceux d’Orange, Bouygues Telecom soutient que cette explication n’est pas pertinente au regard des tarifs d’accès pratiqués par les autres opérateurs d’infrastructure et à leur cohérence avec les résultats du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD.

Enfin, s’agissant de l’inflation invoquée par SFR FTTH pour justifier la hausse des tarifs d’accès, Bouygues Telecom soutient que sans remettre en cause la possibilité d’une évolution des tarifs, l’inflation et l’indexation ne peuvent être cumulées et justifier une telle augmentation des tarifs d’accès.

Vu le courrier du 14 avril 2020 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a adressé aux parties le premier questionnaire des rapporteurs ;

Vu les secondes observations en défense, reçues à l’Autorité le 11 mai 2020, présentées par la société SFR FTTH ;

Sur les garanties d’impartialité de la procédure,

SFR FTTH estime que le Président de l’Arcep ne présente pas les garanties applicables aux termes de l’article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après « CESDH ») pour connaître du présent différend. D’une part, SFR FTTH soutient que, sur le volet de l’impartialité objective, une procédure d’enquête sur les tarifs d’accès de SFR FTTH a été ouverte de façon concomitante à la saisine de l’Autorité sur le présent règlement de différend et dénoterait ainsi un parti pris du Président, qui délibère en tant que membre de la formation RDPI sur ces deux procédures, sur les tarifs d’accès pratiqués par SFR FTTH. D’autre part, sur le volet de l’impartialité subjective, SFR FTTH soutient d’abord que les termes de la décision d’ouverture de l’enquête adoptée par la formation RDPI du collège de l’Autorité, au sein de laquelle le Président siège, laisseraient entendre que le tarif de location et les évolutions tarifaires prévues ne sont pas conformes aux obligations réglementaires. SFR FTTH soutient ensuite que les déclarations du Président de l’Autorité lors de la conférence en ligne Territoires connectés du 10 avril 2020 sur les pratiques tarifaires en zone privée révèleraient un préjugement de sa part. SFR FTTH demande le déport du Président de l’Arcep de la présente procédure.

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes,

SFR FTTH maintient que la condition tenant à l’échec des négociations n’est pas remplie.

En particulier, s’agissant de la demande relative au tarif de location, et de la prise en compte des échanges avec SFR, SFR FTTH maintient que les échanges avec SFR ne peuvent être pris en compte dans la formalisation du différend.

S’agissant de l’échec des négociations sur la demande  relative  à  la  hausse  des  tarifs  d’accès, SFR FTTH ajoute que l’absence de négociation sur la hausse du tarif de cofinancement est évidente, en ce que Bouygues Telecom n’évoque pas ce tarif dans sa réplique et qu’il utilise le tarif de cofinancement de SFR FTTH pour calculer le tarif de location demandé.

S’agissant des demandes de Bouygues Telecom, visant à ce que l’Arcep dise que les tarifs de SFR FTTH sont déraisonnables, SFR FTTH soutient, contrairement à ce qu’affirme Bouygues Telecom, que ces demandes sont bien distinctes des injonctions sollicitées concernant les tarifs de SFR FTTH et leurs évolutions, et sont irrecevables en ce qu’elles invitent l’Arcep à se prononcer sur la méconnaissance d’obligations réglementaires.

Sur le fond,

SFR FTTH maintient son argumentation et développe les éléments complémentaires ci-dessous.

En premier lieu, s’agissant de la méconnaissance des objectifs de régulation, SFR FTTH avance tout d’abord que la régulation vise avant tout à inciter les opérateurs à investir et qu’il n’y a pas d’opposition, comme le sous-entend Bouygues Telecom, entre l’objectif de concurrence durable et l’objectif de promotion des investissements car le second contribue au premier. SFR FTTH soutient ensuite qu’il n’est pas en monopole sur le marché de gros de la location, contrairement aux allégations de Bouygues Telecom. SFR FTTH estime que Bouygues Telecom peut d’autant moins invoquer le caractère monopolistique du marché de la location sur la zone SFMD que le projet « Astérix » doit justement lui permettre de développer cette activité. Enfin, SFR FTTH soutient que l’offre de location a vocation à être transitoire et réservée aux opérateurs qui n’ont pas les moyens d’investir, ce qui n’est pas le cas de Bouygues Telecom qui se conduit, dans ces conditions, comme  un opérateur inefficace d’un point de vue économique.

En deuxième lieu, s’agissant de son argumentation sur la capacité de Bouygues Telecom à co-investir, SFR FTTH avance tout d’abord que Bouygues Telecom ne peut chercher à relativiser le constat de sa très forte croissance sur le très haut débit compte tenu notamment de la croissance enregistrée par ses concurrents. SFR FTTH souligne ensuite que le projet « Astérix » va au demeurant permettre à Bouygues Telecom de co-investir en ZMD, y compris sur la zone SFMD de SFR FTTH ce qui démontre que l’enjeu du différend est limité. Enfin, SFR FTTH estime que l’argument invoqué selon lequel Bouygues Telecom devrait supporter un coût de 50 millions d’euros en une seule fois pour l’achat d’une tranche de 5 % en cofinancement n’est pas pertinent en ce que ce coût serait lissé sur plusieurs années.

En troisième lieu, SFR FTTH soutient en substance que Bouygues Telecom ne produit aucun élément nouveau pour démontrer qu’il ne peut développer une activité rentable avec le tarif de location pratiqué et renverse la charge de la preuve la faisant peser sur SFR FTTH. SFR FTTH soutient que Bouygues Telecom a fait le choix de pratiquer des tarifs de détail péréqués au niveau national et de proposer des offres agressives sur ce marché, et qu’il ne peut ainsi lui imputer une privation de marge, du reste non documentée. À cet égard, SFR FTTH fait valoir que la privation de marge invoquée ne peut être anticipée au regard du delta entre le tarif de location pratiqué et le tarif de location demandé.

En quatrième lieu, sur la dénaturation des obligations réglementaires applicables, SFR FTTH reproche à Bouygues Telecom une lecture trompeuse de la décision de règlement de différend Free c/ Orange de 2018 en ce qu’il considère que l’obligation de visibilité incombant à l’opérateur d’infrastructure vaut pour toutes les prestations d’accès, y compris la location. Ensuite, SFR FTTH soutient que la réplique de Bouygues Telecom confirme qu’il associe le tarif raisonnable à un tarif orienté vers les coûts. À titre liminaire, SFR FTTH fait valoir que le tarif raisonnable doit s’entendre dans le présent différend, au sens de la demande de Bouygues Telecom, comme un tarif non-excessif permettant de ne pas entraîner d’effet d’éviction sur le marché de détail et qu’à cet égard, Bouygues Telecom ne démontre pas qu’il subirait un tel effet d’éviction. Tout d’abord, s’agissant du niveau du CMPC, SFR FTTH ajoute par rapport à son premier mémoire que ce dernier doit être adapté à la situation des opérateurs d’infrastructure qui peuvent être exposés à des niveaux de risque différents. SFR FTTH soutient ensuite que l’intention du législateur, a bien été, à travers l’obligation  de  « tarif  raisonnable », de donner, en leur imposant une contrainte plus faible que pour un tarif orienté vers les coûts, plus de latitude aux opérateurs d’infrastructure pour fixer leurs tarifs et réaliser une marge. SFR FTTH soutient enfin, en s’appuyant sur le rapport du cabinet Frontier Economics, sollicité dans le cadre du présent différend, qu’un tarif raisonnable correspond à un tarif orienté vers les coûts  auquel est ajoutée une marge raisonnable. Enfin, SFR FTTH soutient que la position de Bouygues Telecom consistant à écarter les avantages liés à l’application d’un coefficient ex post plus avantageux pour les opérateurs locataires est contradictoire avec l’appréciation globale de l’offre  que Bouygues Telecom porte dans le cadre de ce différend et avec les objectifs de régulation, Bouygues Telecom ayant les moyens de co-investir.

En dernier lieu, SFR FTTH revendique, dans le prolongement de ses premières observations, que les demandes tarifaires sont injustifiées.

À titre liminaire, SFR FTTH soutient que l’impact de la crise sanitaire sur le déploiement et la pénétration des réseaux FttH doit être pris en compte dans l’appréciation des demandes.

D’une part, concernant le tarif de location, SFR FTTH maintient son argumentation en développant les éléments complémentaires ci-dessous.

Concernant le taux de rémunération du capital, SFR FTTH estime qu’un taux de 9 % serait pertinent comme l’indique le rapport du cabinet Frontier Economics. SFR FTTH fait valoir que le document d’accompagnement du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD indique lui-même que le taux régulé de rémunération du capital est ajusté en fonction de la situation de l’opérateur d’infrastructure et de l’inflation. Concernant les primes de risque du modèle, SFR FTTH soutient qu’elles sont insuffisantes pour refléter la réalité du risque qu’il encourt et fait valoir, en s’appuyant sur le rapport du cabinet Frontier Economics, qu’une rentabilité globale appropriée pour SFR FTTH doit se situer entre 14 % et 18 %.

Concernant le tarif forfaitaire de cofinancement, SFR FTTH soutient en substance que les périmètres des ZMD Orange et SFR FTTH retenus par Bouygues Telecom ne sont pas exacts et faussent la comparaison faite sur la densité entre ces deux zones, et qu’en tout état de cause, même  en retenant l’approche de Bouygues Telecom, la densité de la ZMD Orange reste supérieure à celle de la ZMD SFR FTTH. SFR FTTH souligne l’impact de cet écart de densité sur le tarif de location. Par ailleurs, SFR FTTH soutient que l’argumentation de Bouygues Telecom sur l’impact limité de la reconstruction du génie civil ne tient pas compte de la réalité des déploiements et que, SFR FTTH supporte par exemple certains coûts de travaux et remplacement qui devraient être à la charge d’Orange. Enfin, selon SFR FTTH, les arguments soutenus par Bouygues Telecom pour estimer qu’Orange ne bénéficie pas davantage d’économies d’échelles que SFR FTTH sont contradictoires, Bouygues Telecom appelant à une appréciation desdites économies au niveau local tout en mettant en avant les économies réalisées par SFR FTTH au niveau national.

Concernant le rythme de déploiement en zone AMII, SFR FTTH soutient que la chronique de déploiement renseignée par Bouygues Telecom est inexacte car ne tient par exemple pas compte du décalage de certains déploiements et que le rythme de déploiement va certainement être affecté par la crise sanitaire.

Concernant le taux de cofinancement, SFR FTTH maintient les taux de cofinancement avancés en soutenant qu’ils correspondent à « la moyenne pondérée du nombre de  prises  cofinancées  en  SFMD »4 par [SDA]. SFR FTTH soutient que son choix d’architecture ne peut pas lui être opposé et n’a pas d’impact sur le taux de cofinancement. SFR FTTH soutient également que Bouygues Telecom dénature la modélisation en indiquant qu’un taux de cofinancement faible conduit, au titre du modèle, à une baisse du tarif de location et retient au contraire que le taux de pénétration qui est corrélé au taux de cofinancement devrait alors être ajusté, en conséquence de la baisse du taux de cofinancement, pour éviter des incohérences dans les résultats du modèle.

Concernant le taux de pénétration, SFR FTTH maintient que le taux plus faible n’est pas dû, contrairement aux allégations de Bouygues Telecom, à l’architecture des PRDM de SFR FTTH ni à une stratégie de SFR FTTH qui aurait privilégié le FttB (fibre to the building). SFR FTTH soutient que la baisse du taux de pénétration fait augmenter en conséquence le tarif de location.

Concernant les coûts de génie civil, SFR FTTH ajoute que ses coûts de génie civil sont plus élevés que ceux d’Orange, notamment en raison des conditions de l’offre GC BLO d’Orange, et soutient, en réponse à Bouygues Telecom, que le au recours au génie civil d’Orange et la reconstruction de génie civil sont complémentaires et en rien contradictoires, comme le prétend Bouygues Telecom.

Concernant le coût des OPEX de maintenance, SFR FTTH soutient que, contrairement à ce que prétend Bouygues Telecom, un taux de pénétration plus faible ne diminue pas le taux de dégradation, et que l’absence de prise en compte des surcoûts de maintenance par Orange ne remet pas en cause le constat fait par SFR FTTH d’une hausse des OPEX de maintenance. Il ajoute que la responsabilité des opérateurs commerciaux peut difficilement être engagée pour recouvrer certains surcoûts et que le groupe de travail multi-opérateurs aboutira à la mobilisation de CAPEX additionnels par les opérateurs d’infrastructure.

Enfin, concernant les coûts commerciaux et de structure, SFR FTTH renvoie à son premier mémoire.

SFR FTTH conclut de la mise à jour des paramètres que le tarif de location raisonnable devrait se situer dans une fourchette comprise entre 16,6 €/mois et 19,4 €/mois.

D’autre part, concernant les évolutions tarifaires, SFR FTTH soutient que la seule prise en compte de l’inflation cumulée depuis 2012 conduit à une hausse de 5,7 % qui est supérieure à celle appliquée au tarif de location et légèrement inférieure à celle appliquée sur le tarif récurrent de cofinancement. Il ajoute qu’il est possible de cumuler indexation et inflation et que le modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD prévoit la possibilité d’ajuster les tarifs d’accès en fonction de l’évolution des prix des biens et services constatés.

Vu les réponses des parties au premier questionnaire enregistrées à l’Autorité le 22 mai 2020 ;

Vu les observations complémentaires, enregistrées à l’Autorité le 23 juin 2020, présentées par la société Bouygues Telecom ;

Sur l’impartialité du Président de l’Arcep,

Concernant les garanties d’impartialité objective, Bouygues Telecom soutient que le principe d’impartialité objective ne fait pas obstacle à ce que le juge puisse connaître à plusieurs reprises des mêmes faits. Bouygues Telecom ajoute, d’une part, que les deux procédures, la décision d’ouverture d’enquête, et la présente procédure de règlement de différend, ont un objet distinct, puisque l’une a pour objet de recueillir les éléments permettant de vérifier le respect d’obligations réglementaires alors que la seconde vise à trancher un différend entre deux parties et, d’autre part, que l’ouverture de l’enquête a précédé l’introduction du règlement de différend. Bouygues Telecom invoque enfin le fait que la décision d’ouverture se borne à relever des éléments factuels et qu’aucune appréciation sur le respect des obligations de SFR FTTH n’y est portée.

Concernant les garanties d’impartialité subjective, Bouygues Telecom estime d’abord que les éléments contenus dans la décision d’ouverture d’enquête sont factuels et que le fait que son objet soit similaire à celui des demandes de Bouygues Telecom dans le cadre du présent règlement de différend n’emporte aucune conséquence sur l’impartialité du Président de l’Arcep. Bouygues Telecom estime ensuite que les propos tenus par le Président de l’Arcep ne peuvent être interprétés comme un préjugement du différend en cours : ces propos se rapporteraient à la procédure d’enquête et non au différend en cours et auraient seulement visé à indiquer que l’examen de la conformité des tarifs d’accès aux obligations réglementaires était en cours.

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes, Bouygues Telecom maintient son argumentation et développe les éléments complémentaires ci-après.

Sur l’échec des négociations concernant sa demande relative à la hausse du tarif de location, Bouygues Telecom soutient, en complément et en réponse aux arguments de SFR FTTH, qu’il a sollicité une baisse des tarifs depuis deux ans et a contesté l’augmentation dès qu’il en a eu connaissance, si bien que SFR FTTH ne peut prétendre que les négociations n’ont jamais été engagées sur sa demande se rapportant à la hausse du tarif de location. Bouygues Telecom ajoute que la signature d’un contrat avec réserves ne contredit pas l’existence d’un différend.

Sur l’échec des négociations concernant sa demande relative à la hausse du tarif de  cofinancement, Bouygues Telecom fait valoir qu’il a contesté à plusieurs reprises la hausse des tarifs de cofinancement et que SFR FTTH n’a pas accepté ces demandes ni même apporté d’éléments justificatifs.

Sur le fond,

En premier lieu, Bouygues Telecom soutient que SFR FTTH ne peut prétendre que l’enjeu du règlement de différend est mineur au regard de son projet « Astérix », étant donné que ce projet ne concerne que l’accès au réseau FttH d’Orange au sein de la zone AMII.

En deuxième lieu, pour répondre à l’affirmation de SFR FTTH selon laquelle il assimilerait le tarif raisonnable à un tarif orienté vers les coûts, Bouygues Telecom soutient que le tarif de location raisonnable ne consiste pas, selon son approche, à partir des coûts pour ajouter le CMPC. Bouygues Telecom estime que SFR FTTH admet lui-même que le tarif résultant du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD n’est pas un tarif orienté vers les coûts puisqu’il considère que ses tarifs de cofinancement, que Bouygues Telecom injecte dans le modèle, comprennent déjà une marge.

En troisième lieu, concernant l’adaptation du modèle générique de tarification de l’accès aux  réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD proposée par Frontier Economics, Bouygues Telecom soutient que celle-ci ne permet pas de vérifier la cohérence tarifaire entre le cofinancement et la location, qui permet d’apprécier le caractère raisonnable du tarif de location.

Bouygues Telecom soutient que le modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné en dehors des ZTD doit être retenu.

En quatrième lieu, concernant le taux de rémunération du capital et la prime de risque retenus par le cabinet Frontier Economics, Bouygues Telecom fait valoir que SFR FTTH est en monopole sur son réseau FttH et ne peut donc se prévaloir de risques spécifiques tels que développés par le cabinet Frontier Economics. Bouygues Telecom rejette ainsi le souhait de SFR FTTH et de Frontier Economics de maintenir un taux de rémunération du capital de 9 % sur la totalité du projet alors que  la tendance pour ce taux est à la baisse pour les activités fixes.

Vu le courrier du 16 juillet 2020 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a adressé aux parties le deuxième questionnaire des rapporteurs ;

Vu la décision n° 2020-0807-RDPI en date du 28 juillet 2020 par laquelle la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction a décidé de proroger le délai dans lequel elle doit se prononcer sur le différend ;

Vu les réponses des parties au second questionnaire enregistrées à l’Autorité le 31 juillet 2020 ;

Vu les observations en réponse, enregistrées à l’Autorité le 31 juillet 2020, présentées par la société SFR FTTH ;

Sur le fond,

SFR FTTH maintient tout d’abord que Bouygues Telecom, a bien la capacité et l’intention de co-investir en zone SFMD.

SFR FTTH maintient ensuite que Bouygues Telecom demande un tarif orienté vers les coûts, car l’objet de sa demande correspond bien à l’application d’un CMPC et de primes de risque.

Enfin, en réponse aux critiques de Bouygues Telecom sur la modélisation retenue par Frontier Economics qui serait impropre à vérifier la cohérence tarifaire entre le cofinancement et la location, SFR FTTH avance que celle-ci est assurée dès lors que les tarifs de cofinancement sont incitatifs et que le tarif de location permet de commercialiser des offres de détail rentables, ce que SFR FTTH a démontré dans ses écritures.

SFR FTTH renvoie pour le reste à ses écritures et aux réponses aux questionnaires.

Vu les courriers  en date du 28 septembre 2020, par  lesquels les sociétés Bouygues Telecom  et  SFR FTTH ont été invitées à participer à une audience devant la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l'Autorité le 13 octobre 2020, et informées que la clôture de l’instruction de la présente affaire était fixée au 2 octobre 2020 ;

Vu la délibération du 30 septembre 2020 par laquelle les membres de la formation RDPI ont statué sur la demande de déport présentée par SFR FTTH dans ses deuxièmes observations en défense en date du 11 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu le 13 octobre 2020, lors de l'audience devant la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Autorité, composée de M. Sébastien Soriano, président,

M. Serge Abiteboul, Mme Joëlle Cottenye et Mme Monique Liebert-Champagne, membres de l’Autorité, et en la présence de Mme Cécile Dubarry, directrice générale de l’Autorité, de M. Jean-Baptiste Benoit, M. Thomas Cocher et Mme Léa Ployaert, rapporteurs, de M. Guillaume Mellier et de Mme Elisabeth Suel, agents de l’Autorité, et des représentants de la société Bouygues Telecom et de la société SFR FTTH :

- le rapport de Mme Léa Ployaert, présentant les conclusions des parties ;

- les observations des représentants de la société Bouygues Telecom ;

- les observations des représentants de la société SFR FTTH.

Sur la publicité de l’audience,

L'article 14 du règlement intérieur susvisé prévoit que « l’audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n'est pas conjointe, la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l'Autorité en délibère. »

Par un courriel en date du 5 octobre 2020, la société Bouygues Telecom a demandé à ce que l’audience ne soit pas publique.

Par un courriel en date du 6 octobre 2020, la société SFR FTTH a demandé à ce que l’audience ne soit pas publique. En conséquence, l’audience n’a pas été publique.

La formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Autorité (composée de

M. Soriano, président, M. Serge Abiteboul et Mme Monique Liebert-Champagne, membres de l’Autorité), en ayant délibéré le 5 novembre 2020 en la seule présence de ses membres, adopte la présente décision.

1          Contexte général

1.1        Présentation des parties

La société Bouygues Telecom est un opérateur de communications électroniques, créée en 1994 et actuellement détenu à 90,5 % par la société anonyme Bouygues SA, présent sur les marchés du haut et très haut débit fixes et mobiles en tant qu’opérateur de détail.

Bouygues Telecom est actuellement le 4e opérateur fixe avec une part de marché qu’il revendique à 12,6 %. Au T3 2019, il revendique ainsi 3,8  millions d’abonnés haut et très haut débit fixe dont      850 000 abonnés FttH. Il indique viser un potentiel de 20 millions de prises raccordables au FttH à fin 2022.

SFR FTTH est une société constituée le 18 décembre 2018 par le groupe Altice qui détient la majorité de son capital, « le solde étant réparti entre les fonds d’infrastructures du groupe français AXA, du groupe allemand Allianz et du fonds canadien OMERS »5.

SFR FTTH a repris l’activité, auparavant exercée par SFR, d’opérateur d’infrastructure sur les réseaux FttH des zones moins denses d’initiative privée et publique. Ainsi, au T2 2020, il exploite environ 2,7 millions de ligne FttH en zones moins denses dont 1,9 millions en zone d’initiative privée et, à terme, il devrait exploiter un total d’environ 5,3 millions de lignes FttH en zones moins denses dont 3,1 millions en zone d’initiative privée.

1.2         La zone couverte par l’offre d’accès aux lignes FttH de SFR FTTH faisant l’objet du présent différend

À titre liminaire, il doit être relevé que la demande de règlement de différend de la société Bouygues Telecom porte sur un contrat d’accès qui ne concerne qu’une partie des lignes FttH exploitées par SFR FTTH : celles issues des déploiements historiques de SFR en zone AMII, et celles issues des engagements « AMEL » de SFR, comme exposé ci-après.

Les principaux opérateurs nationaux, à partir de 2006, ont fait le choix de la réalisation d’une infrastructure de boucle locale nouvelle en fibre optique jusqu’à l’abonné (Fibre to the Home – FttH), afin de répondre à la croissance constante des besoins en matière de débit fixe.

En 2008, le législateur a posé le principe de mutualisation de la partie terminale des réseaux FttH et confié à l’Arcep le soin d’en préciser les modalités. L’Arcep a ainsi précisé la possibilité d’accès sous forme passive à ces réseaux au niveau d’un point de mutualisation (PM), en imposant notamment à l’opérateur d’infrastructure de proposer des conditions d’accès raisonnables avec « plusieurs niveaux d’engagement et d’investissement […] permettant de monter dans l’échelle des investissements » 6.

Comme l’Autorité l’a rappelé dans son avis n° 2017-12937 en date du 23 octobre 2017 rendu à la demande du Sénat et portant sur la couverture numérique des territoires :

- Dans le cadre du programme national « très haut débit », le Gouvernement a lancé le 4 août 2010 un appel à manifestations d’intentions d’investissement (« AMII »), en vue de recueillir les intentions des opérateurs en matière de déploiements de réseaux à très haut débit, à horizon de 5 ans en dehors des zones très denses, qui comptaient alors 148 communes.

- Le 27 avril 2011, le Gouvernement a rendu public les résultats de l’AMII. Il indiquait que « 6 opérateurs – France Télécom, SFR, Iliad, Covage, Alsatis et une société de projet à créer Ezyla – ont manifesté leur intention d’engager, d’ici 5 ans, les déploiements sur plus de 3 400 communes regroupant, avec les 148 communes qui constituent les zones très denses, près de 57 % des ménages. »

- Le 15 novembre 2011, Orange et SFR ont annoncé un accord pour le déploiement de la fibre optique au-delà des zones très denses. En effet, selon les termes du communiqué de presse, parmi « les 11 millions de logements qui seront couverts par France Télécom-Orange et SFR en dehors des zones très denses, 9,8 millions correspondent à des agglomérations pour lesquelles les projets de déploiement des deux opérateurs se recoupaient. Au terme de cet accord, sur ces 9,8 millions de logements, SFR en réalisera 2,3 millions et France Télécom- Orange 7,5 millions. » Les deux opérateurs soulignaient que « L’engagement pris par chacun des signataires est de couvrir chaque commune dans les 5 ans qui suivent l’initialisation des déploiements ».

En 2018, les intentions de déploiement d’Orange et SFR ont fait, en application de  l’article L. 33-13 du CPCE, l’objet d’engagements juridiquement opposables de la part de ces deux opérateurs devant le Gouvernement8, acceptés après avis de l’Arcep.9 À cette occasion, le périmètre des engagements de déploiement a évolué par un transfert à SFR d’un périmètre géographique, composée de 236 « codes communes » devant initialement être déployées par Orange.10

Le Gouvernement a également invité les collectivités territoriales à saisir et sécuriser, dans le cadre d’appels à manifestations d'engagements locaux (AMEL), de nouvelles opportunités d’investissement privé, afin d’accélérer la couverture numérique de leur territoire.

SFR s’est ainsi engagé, dans ce cadre à déployer un réseau FttH sur de nouvelles communes, au sein des départements des Alpes de Haute Provence, des Hautes Alpes, des Bouches du Rhône, de l’Eure- et-Loir et de la Nièvre11. Ces intentions de déploiement ont fait, en application de l’article L. 33-13 du CPCE, l’objet d’engagements juridiquement opposables de la part de SFR devant le Gouvernement, acceptés après avis de l’Arcep.

Depuis la constitution de SFR FTTH fin 2018, les lignes de ces zones sont déployées et exploitées par SFR FTTH, quand bien même les engagements souscrits en application de l’article L. 33-13 du CPCE restent portés par SFR.

Dans le cadre du présent différend, Bouygues Telecom et SFR FTTH visent la zone dite « SFMD » de SFR FTTH, qui représente le périmètre suivant12 :

- les communes sur lesquelles SFR s’est engagé initialement à déployer, dans le cadre de l’appel à manifestations d’intentions d’investissement (AMII) dite zone AMII. Ne sont pas intégrées dans ce périmètre les communes dont le déploiement a été transféré d’Orange à SFR dans le cadre de l’accord de repartage conclu entre Orange et SFR en 2018 ;

- les zones au sein desquelles SFR s’est engagé, dans le cadre des appels à manifestations d'engagements locaux (AMEL), à rendre 100% des locaux raccordables d’ici fin 2022.13

Les communes cédées par Orange au bénéfice de SFR dans le cadre d’un accord de repartage de la zone AMII en 2018 relèvent d’une autre offre d’accès et forment la zone dite « SFOR ». De la même manière, les réseaux d’initiative publique (RIP) exploités par SFR FTTH ou l’une de ses filiales sont soumis à des offres d’accès distinctes et ne sont pas visés par le présent règlement de différend.

Ne sont pas non plus concernées les communes de la zone très dense qui relèvent également d’une autre offre d’accès.

2          Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes

Bouygues Telecom a saisi la formation RDPI de l’Autorité de demandes relatives au contrat d’accès, entre Bouygues Telecom et SFR FTTH, aux lignes FttH de SFR FTTH déployées sur la zone SFMD, signé avec réserves le 3 janvier 2020 (ci-après : « le contrat d’accès »). Les demandes de Bouygues Telecom portent sur :

- la suppression de la hausse du tarif des tarifs d’accès, entrée en vigueur le 1er février 2020, à savoir le tarif non-récurrent de cofinancement, le tarif récurrent de cofinancement et le tarif de location, avec effet rétroactif au 1er février 2020 ;

- la   diminution   du   tarif   de   location   pour   que   ce   dernier   soit    compris    entre   12,20 € HT/mois/ligne et  un  maximum  de  13,20 € HT/mois/ligne  avec  effet  rétroactif  au 3 janvier 2020.

2.1        Sur la compétence de l’Autorité

Selon l’article L. 34-8-3 du CPCE :

« Toute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne […].

« L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point situé, sauf dans les cas définis par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, hors des limites de propriété privée et permettant le raccordement effectif d'opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d'accessibilité raisonnables. […]

« Il fait l'objet d'une convention entre les personnes concernées. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de l'accès. Elle est communiquée à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes à sa demande.

« Les différends relatifs à la conclusion ou à l’exécution de la convention prévue au présent article sont soumis à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes conformément à l’article L. 36-8. »

Sur le fondement des dispositions du I de l’article L. 36-8 du CPCE, l’Autorité peut être saisie pour se prononcer sur un différend « en cas de refus d’accès ou d’interconnexion, d’échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l’exécution d’une convention d’interconnexion ou d’accès à un réseau de communications électroniques (…). Sa décision est motivée et précise les conditions équitables, d’ordre technique et financier, dans lesquelles l’interconnexion ou l’accès doivent être assurés ».

Le II de l’article L. 36-8 du même code précise qu’« [e]n cas d’échec des négociations commerciales, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut également être saisie des différends relatifs à la mise en œuvre des obligations des opérateurs prévues par le présent titre, (…) notamment ceux portant sur : (…) 2° bis la conclusion ou l’exécution (…) de la convention d’accès prévue à l’article L. 34-8-3. »

Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que l’Autorité est compétente pour connaitre d’un différend, en cas d’échec des négociations, portant sur la conclusion ou l’exécution d’une convention d’accès prévue à l’article L. 34-8-3 du CPCE.

En l’espèce, les demandes de Bouygues Telecom sont relatives aux conditions financières du contrat d’accès aux lignes FttH en dehors des zones très denses de SFR FTTH pour la « zone ZFMD ». La première demande vise à enjoindre à SFR FTTH de transmettre à Bouygues Telecom un avenant au contrat conclu entre Bouygues Telecom et SFR FTTH par lequel SFR FTTH renonce à l’application des hausses du tarif récurrent de cofinancement, du tarif non-récurrent de cofinancement et du tarif de location. La seconde demande vise à enjoindre à SFR FTTH de transmettre à Bouygues Telecom un avenant au contrat conclu entre Bouygues Telecom et SFR FTH, afin que le tarif de location  mensuelle  à  la  ligne  FttH  soit  compris  entre  12,20 € HT/mois/ligne   et   un   maximum   de   13,20 € HT/mois/ligne.

Ces deux demandes portent donc sur les modalités financières d’un contrat d’accès conclu en application de l’article L. 34-8-3 du CPCE, dont il appartient à l’Autorité de connaître.

Par ailleurs, SFR FTTH soutient que les demandes visant à ce que l’Arcep dise que les hausses tarifaires et le tarif de location sont déraisonnables, sont irrecevables, en tant qu’elles constituent des demandes de constat14. SFR FTTH ajoute que ces demandes de constat visent à ce que la décision à intervenir revête un caractère réglementaire alors que l’Arcep n’a pas compétence dans le cadre d’une procédure de règlement de différend pour adopter de telles décisions.15

Bouygues Telecom estime, pour sa part, que « ByTel ne formule aucune demande qui se limiterait à un simple constat. Elle demande à l’Arcep de juger que les tarifs pratiqués ne sont pas raisonnables et d’en tirer les conséquences en enjoignant à SFR FttH de proposer des tarifs conformes à ses obligations »16 et soutient que sa demande ne tend pas à ce que la décision de l’Arcep à intervenir ait une portée réglementaire, l’Arcep ayant toute latitude pour trancher le différend.17

L’Autorité estime que les demandes, tendant à dire que les hausses tarifaires et le tarif de location ne sont pas raisonnables, doivent être considérées comme venant au soutien de la conclusion principale de Bouygues Telecom visant à ce que l’Autorité enjoigne à la société SFR FTTH de transmettre un avenant au contrat par lequel SFR FTTH renonce à la hausse de ses tarifs non-récurrent de cofinancement, récurrent de cofinancement et de location avec effet rétroactif au 1er février 2020 et modifie  son  tarif  de  location  dans  une  fourchette  située   entre   12,20 € HT/ligne/mois   et   13,20 € HT/ligne/mois avec effet rétroactif au 3 janvier 2020.

Par conséquent, les demandes de constat ne peuvent être appréhendées indépendamment des conclusions de Bouygues Telecom tendant à ce qu’il soit enjoint à SFR de renoncer à ses hausses tarifaires et à ce que soit appliqué un tarif de location compris dans un intervalle défini.

Par suite, et conformément aux articles L. 36-8 et L. 34-8-3 du CPCE, l’Autorité est compétente pour se prononcer sur les demandes de Bouygues Telecom.

2.2        Sur la recevabilité des demandes formulées par Bouygues Telecom

Dans le cadre de l’appréciation de la recevabilité du différend dont elle est saisie, il revient à l’Autorité de s’assurer que la condition tenant à l’échec des négociations prévue à l’article L. 36-8 du CPCE est remplie, et ce, au regard des échanges intervenus entre les parties avant sa saisine.

À titre liminaire, SFR FTTH soutient que les discussions avec SFR ne devraient pas être prises en compte pour caractériser l’échec des négociations au motif que SFR n’est pas partie au différend et que les échanges avec SFR ont porté sur une autre offre d’accès que celle objet du présent règlement de différend.

Cependant sans qu’il soit besoin, en l’espèce, d’examiner les échanges entre SFR et Bouygues Telecom18, il ressort de l’instruction que des échanges sont intervenus entre les parties (à savoir entre SFR FTTH et Bouygues Telecom) dont il revient à l’Autorité d’apprécier le caractère suffisant pour caractériser l’échec des négociations entre elles.

a) Sur l’échec des négociations sur la demande visant à une baisse du tarif de location

SFR FTTH estime que les demandes de Bouygues Telecom ne sont pas recevables en l’absence d’échec des négociations. Il soutient à cette fin que Bouygues Telecom n’a « cessé de modifier sa demande  tarifaire,  sollicitant  d’abord  un  tarif  de   13,20 €HT/mois/ligne   puis   un   tarif   de   12,20 €HT/mois/ligne avant finalement de demander l’application d’un tarif de 12,20 €HT/mois/ligne sans qu’il puisse, en tout état de cause, être supérieur à 13,20 €HT/mois/ligne »19. Il fait également valoir que Bouygues Telecom n'a pas présenté de demandes précises et motivées alors que lui incombait la charge de prouver le caractère déraisonnable du tarif de location.

Bouygues Telecom soutient que la demande de baisse de tarif de location qu’il a portée auprès de SFR FTTH a été stable et cohérente, que la distinction entre SFR et SFR FTTH, invoquée par ce dernier, n’est pas opérante pour rejeter la caractérisation du différend et qu’en tout état de cause, même sans tenir compte des discussions avec SFR, les échanges entre Bouygues Telecom et SFR FTTH suffisent pour démontrer un échec des négociations sur la demande relative à la baisse du tarif de location.

Il convient tout d’abord de relever que le compte-rendu de la réunion tenue le 25 avril 2019, en la présence des représentants de SFR, SFR FTTH et Bouygues Telecom20, fait apparaitre que les participants ont échangé sur différentes demandes, portées par Bouygues Telecom, d’évolution de l’offre d’accès aux lignes déployées par SFR FTTH en dehors des zones très denses21. Parmi ces demandes, celle de Bouygues Telecom de diminuer le tarif de location de 16,40 € à 13,20 € figure expressément. Le compte-rendu mentionne à cet égard que « SFR annonce qu’elle ne modifiera pas le tarif de location qui restera à 16,40€ et que les modalités d’évolutions de ce tarif ne sont par ailleurs pas définies. […] ». Ce compte-rendu a été transmis par Bouygues Telecom aux représentants de SFR et SFR FTTH par courrier électronique en date du 16 mai 201922. Il ressort des pièces fournies par les parties dans le cadre de l’instruction que ce compte-rendu n’a pas été modifié ultérieurement par SFR FTTH23.

Dans un courrier en date du 25 avril 2019 à l’adresse de Bouygues Telecom24 dont l’objet est « Accès de Bouygues Telecom aux lignes FttH déployées par SFR FTTH en dehors des zones très denses », SFR FTTH indique « vous avez assorti votre demande d’accès de plusieurs exigences tendant à la modification de stipulations structurantes de l’ODR SFR FTTH. […] nous vous confirmons avoir pris bonne note de votre demande tendant à accéder aux lignes FttH sans attendre la conclusion d’un accord définitif entre les parties quant aux modalités y afférentes […]. [L]a présente autorisation, qui ne saurait en aucune manière valoir reconnaissance du bien-fondé des demandes de Bouygues Télécom, revêt un caractère strictement temporaire, et qu’il convient donc que nous poursuivions nos discussions en vue d’aboutir rapidement à un accord définitif, lequel ne pourra intervenir que sur la base des stipulations structurantes de l’ODR SFR FTTH en vigueur. »

Par la suite, dans un courrier en date du 6 mai 2019 à l’attention de SFR FTTH et de SFR25, dont l’objet est « Accès aux lignes FttH déployées par SFR FTTH en dehors des Zones très Denses », Bouygues Telecom réitère sa demande de baisse du tarif de location mensuelle de SFR FTTH, qu’il juge déraisonnable, et joint notamment une annexe récapitulant l’ensemble de ses réserves au contrat d’accès. Dans cette annexe, Bouygues Telecom considère que le tarif de 16,40 € n’est pas  raisonnable au regard de la modélisation tarifaire de l’Arcep qui donne un maximum de 12,20 € et sollicite « l’application d’un tarif cohérent avec le tarif recommandé par l’Arcep ainsi qu’avec les dernières offres publiées sur le marché » et, en tout état de cause, un tarif « qui ne saurait être supérieur à 13,20€HT/mois/ligne ». Il ressort de l’instruction que ce courrier n’a pas été suivi d’une réponse de la part de SFR FTTH.

Puis, par deux courriers électroniques en date du 12 septembre 201926 et du 24 septembre 201927, Bouygues  Telecom  a  transmis   son   compte-rendu   des   réunions   tenues   respectivement   le   29 août 2019 et le 20 septembre 2019 en la présence de SFR FTTH. À cette occasion, il apparaît que Bouygues Telecom a rappelé qu’il estimait que le tarif de 16,40 € HT/mois/ligne n’était pas raisonnable et a demandé une baisse de ce tarif de location, en particulier au cours de la réunion du 20 septembre 2019, où il demandait « l’application d’un tarif de 12,20€ HT/mois/ligne », et estimait en tout état de cause « que ce tarif ne saurait être supérieur à 13,20€ HT/mois/ligne »28.

Par un courrier électronique en date du 20 octobre 201929, SFR FTTH a transmis à Bouygues Telecom la version mise à jour de l’annexe tarifaire du contrat d’accès aux lignes FttH de SFR FTTH déployées en dehors des zones très denses, qui a porté les tarifs d’accès, y compris de la location, à la hausse.

Dans un courrier en date du 23 octobre 2019 à l’attention de SFR FTTH30, Bouygues Telecom a contesté la « nouvelle grille tarifaire qui prévoit [notamment] que le tarif d’accès à la ligne FttH en location mensuelle en ZMD passe de 16,40€ HT/mois/ligne à 16,73€ HT/mois/ligne » et maintient en particulier sa demande tendant à « l’application d’un  tarif  d’accès  à  la  ligne  en  location  de 12,20€ HT/mois/ligne et qui en tout état de cause ne saurait être supérieur à 13,20€ HT/mois/ligne ». Bouygues Telecom conclut dans son courrier qu’« en l’absence de réponse de votre part sur les points mentionnés supra, et ce au plus tard le 30 octobre 2019, nous serons dans l’obligation de constater le refus de SFR FTTH de faire droit aux demandes de Bouygues Telecom ».

Le 23 octobre 2019, SFR FTTH a adressé à Bouygues Telecom une facture correspondant aux lignes louées par Bouygues Telecom sur la SFMD de SFR FTTH du 1er août 2019 au 31 octobre 201931, appliquant un tarif pour l’accès en location de 16,40 € par mois par ligne.

SFR FTTH a, par un courrier en date du 31 octobre 2019 à l’attention de Bouygues Telecom32, dont l’objet est « révision tarifaire Offre de référence SFR FTTH », informé formellement Bouygues Telecom de l’évolution des conditions tarifaires à compter du 1er février 2020, en joignant la nouvelle version de l’annexe tarifaire, dans laquelle le tarif de location passe de  16,40 € HT/mois/ligne  à 16,73 € HT/mois/ligne.

Dans un courrier en date du 3 janvier 2020 à l’attention de SFR FTTH33, ayant pour objet « Accès aux lignes FttH déployées par SFR FTTH en dehors des zones très denses », Bouygues Telecom indique que « SFR FTTH n’a pas entendu donner de réponses favorables à nos différentes demandes de modifications de l’Offre, notamment au niveau tarifaire, qu’elle a rejetées par principe alors même que nous avons exposé les raisons pour lesquelles ces dernières sont justifiées » et joint l’offre d’accès signée par ses soins en l’accompagnant de réserves portant « essentiellement sur les conditions financières  de  l’Offre ».  S’agissant  du  tarif  de  location  de  SFR  FTTH,  Bouygues  Telecom indique « conteste[r] le tarif de l’Offre en matière d’accès à la ligne FttH en location mensuelle en ZMD d’initiative privée et maintient sa demande d’application d’un tarif de 12,20€ HT/mois/ligne » et précise qu’« [e]n tout état de cause, ce tarif ne saurait être supérieur à 13,20€ HT/mois/ligne ».

Enfin, dans un courrier en date du 20 janvier 2020 à l’attention de SFR FTTH34, Bouygues Telecom conteste les factures qui lui ont été adressées en tant qu’elles portent sur un tarif de 16,40 €. Bouygues Telecom indique qu’il « a, à de nombreuses reprises depuis fin 2017, demandé à SFR puis SFR FTTH la baisse de ce tarif, au tarif de 12,20€ HT/mois/ligne (tel qu’il découle du modèle de l’Arcep), et en tout état de cause, à un tarif qui ne saurait être supérieur à 13,20€/ligne/mois » et que « SFR FTTH a refusé de modifier ce tarif ».

Il ressort de l’ensemble de ces pièces que Bouygues Telecom a demandé de façon réitérée et non équivoque l’application d’un tarif dans un intervalle  compris  entre  12,20 € HT/mois/ligne  et 13,20 € HT/mois/ligne et que SFR FTTH n’y a pas répondu favorablement. Loin d’y faire droit, il a facturé la livraison des accès activés pour Bouygues Telecom sur la zone SFMD au tarif contesté de 16,40 € et a annoncé une évolution de ses conditions tarifaires, impliquant une hausse du tarif de location.

Compte tenu de l’ensemble des échanges intervenus entre les parties et rappelés ci-avant, l’Autorité estime que l’échec des négociations est avéré et que les conclusions de Bouygues Telecom, tendant à enjoindre à SFR FTTH de transmettre à Bouygues Telecom un avenant au contrat d’accès afin que le tarif de location soit compris entre 12,20 € HT/mois/ligne et un maximum de 13,20 € HT/mois/ligne, sont recevables.

b) Sur l’échec des négociations sur la demande visant à ce que SFR FTTH renonce à l’augmentation de ses tarifs d’accès

SFR FTTH soutient que Bouygues Telecom n’a jamais cherché à négocier les nouvelles conditions tarifaires, et en particulier le tarif initial de cofinancement, dont il estime qu’il n’est pas critiqué dans la saisine de Bouygues Telecom et qu’il est même utilisé par ce dernier pour calculer le tarif de location demandé. SFR FTTH fait également valoir que la signature de l’offre d’accès par Bouygues Telecom conforte ce constat35.

Bouygues Telecom soutient que la hausse tarifaire pratiquée par SFR FTTH traduit un rejet ferme de sa part de faire droit aux demandes de Bouygues Telecom au regard du contexte des négociations dans le cadre desquelles Bouygues Telecom a toujours réclamé une baisse de tarif. Il ajoute qu’il a contesté, par plusieurs courriers, la hausse tarifaire ainsi annoncée, et rappelle qu’il se fonde exclusivement sur les tarifs avant hausse pour calculer le tarif de location demandé.

L’Autorité constate que, contrairement à ce que soutient SFR FTTH, Bouygues Telecom a contesté, dès leur annonce, et à plusieurs reprises, les évolutions des tarifs de cofinancement et de location.

Dans le courrier précité en date du 23 octobre 201936, Bouygues Telecom indique « [c]contre toute attente, SFR FTTH nous a fait parvenir le 20 octobre 2019, une nouvelle grille tarifaire augmentant significativement ces prix sans apporter la moindre justification : le prix forfaitaire du cofinancement ab initio passe de 510€ HT/ligne FttH à 520€ HT/ligne FttH // le prix mensuel par ligne FttH affectée en cofinancement passe de 5,32€ HT/mois/ligne à 5,80€ HT/mois/ligne // le prix d’accès à la ligne FttH en location mensuelle en ZMD passe de 16,40€ HT/mois/ligne à 16,73€ HT/mois/ligne. // Bouygues Telecom considère ces tarifs non raisonnables et non justifiés par SFR FTTH [et] maintient ses demandes de révision à la baisse de ces tarifs notamment (i) l’application d’un tarif maximum par ligne FttH Affectée en cofinancement de 4,90€ HT/mois/ligne quel que soit le taux de cofinancement de l’opérateur co-financeur […] » et ajoute comme précisé supra « en l’absence de réponse de votre part sur les points mentionnés supra et ce, au plus tard le 30 octobre 2019, nous serons dans l’obligation de constater le refus de SFR FTTH de faire droit aux demandes de Bouygues Telecom ».

Dans le courrier précité en date du 3 janvier 202037, Bouygues Telecom indique notamment, parmi les réserves dont il assortit le contrat d’accès signé par ses soins, « […] contest[er] expressément le niveau actuel comme la hausse à venir de ces tarifs ». En particulier, s’agissant du prix forfaitaire du cofinancement ab initio, le courrier indique que « Bouygues Telecom a souhaité rediscuter du niveau tarifaire du prix forfaitaire du cofinancement proposé à 510 euros HT dans l’Offre dans la mesure où Bouygues Telecom considère que le niveau tarifaire fixé par SFR FTTH n’est pas raisonnable. Ce tarif raisonnable ne peut excéder un plafond maximum de 350 euros HT en ZMD d’initiative privée. […]. // Loin d’accéder à cette demande de baisse tarifaire, SFR FTTH a adressé à Bouygues Telecom, par courrier en date du 31 octobre 2019, sa nouvelle grille tarifaire applicable à compter du 1er février 2020 laquelle prévoit une hausse du prix forfaitaire du cofinancement ab initio en ZMD à 520 euros HT […] Compte tenu de ces éléments, Bouygues conteste le niveau forfaitaire du cofinancement ab  initio ainsi que la hausse tarifaire qui lui sera applicable à compter du 1er février 2020 […]. C’est pourquoi Bouygues Telecom réitère sa demande de baisse des tarifs de cofinancement ab initio et conteste le principe de la hausse des prix forfaitaires du cofinancement ab initio en ZMD. »

Dans le courrier précité en date du 20 janvier 202038, Bouygues Telecom indique que « SFR FTTH a notifié à Bouygues Telecom, par courrier en date du 31 octobre 2019, sa nouvelle grille tarifaire applicable à compter du 1er février 2020 laquelle prévoit notamment une hausse des prix forfaitaires du cofinancement ab initio en ZMD à 520€, du prix mensuel par ligne FTTH affectée en cofinancement en ZMD à 5,80€ (pour un cofinancement de 5%) ainsi qu’une hausse du tarif de location mensuel à la ligne FttH à 16,73€ HT/mois/ligne. // Bouygues Telecom conteste ces hausses tarifaires qui lui seront applicables lesquelles ne sont justifiées par aucun élément de coûts clairs et opposables en méconnaissance des principes tarifaires prévues par le cadre réglementaire symétrique applicable en matière d’accès à la boucle locale mutualisée ».

L’Autorité constate, au regard des pièces transmises par les parties dans le cadre de l’instruction, que SFR FTTH n’a pas répondu à ces courriers et a décidé d’augmenter les tarifs de l’offre d’accès en notifiant la nouvelle grille tarifaire par courrier en date 31 octobre 201939 alors même que SFR FTTH connaissait les demandes de Bouygues Telecom et les motifs de ces dernières.

SFR FTTH n’est donc pas fondée à soutenir que Bouygues Telecom « n’a […] jamais cherché à négocier ces nouvelles conditions tarifaires (ni n’a donné à SFR FTTH l’occasion de les évoquer avec elle) ».

Dans ces conditions, et compte tenu de l’ensemble des échanges intervenus entre les parties et rappelés ci-avant, l’Autorité considère que l’échec des négociations sur la demande tendant à enjoindre à SFR FTTH de transmettre à Bouygues Telecom un avenant au contrat conclu entre Bouygues Telecom et SFR FTTH, par lequel ce dernier renonce à l’application de ces hausses de tarifs, est avéré.

Compte tenu de l’ensemble des échanges intervenus entre les parties et rappelés ci-avant, l’Autorité considère que l’échec des négociations sur chacune des demandes de la société Bouygues Telecom est avéré et que les conclusions de la société Bouygues Telecom sont recevables.

2.3        Sur la détermination de la date de début de la période couverte par le différend s’agissant des demandes de Bouygues Telecom

Bouygues Telecom demande à l’Autorité qu’elle enjoigne à SFR FTTH de transmettre un avenant au contrat conclu entre Bouygues Telecom et SFR FTTH par lequel SFR FTTTH renonce, à compter du    1er février 2020, à l’application des hausses du tarif récurrent de cofinancement, du tarif non- récurrent de cofinancement et du tarif de location intervenues à cette même date.

Bouygues Telecom demande également à l’Autorité de faire appliquer le tarif de location demandé, à partir du 3 janvier 2020, pour toutes les lignes activées par Bouygues Telecom au sein de la zone SFMD de la ZMD AMII.

Conformément à l’article L. 36-8 du CPCE, « […] l’autorité peut, à la demande de la partie qui la saisit, décider que sa décision produira effet à une date antérieure à sa saisine, sans toutefois que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle la contestation a été formellement élevée par l'une des parties pour la première fois et, en tout état de cause, sans que cette date soit antérieure de plus de deux ans à sa saisine […] ».

Ainsi, l’Autorité peut, dans le cadre d’un règlement de différend, définir les conditions techniques et tarifaires d’une offre d’accès, depuis la date où le demandeur a formellement porté ses demandes auprès de l’autre partie, cette date ne pouvant être antérieure à 2 ans avant la saisine de l’Autorité.

En l’espèce, Bouygues Telecom demande à l’Autorité une modification du tarif de location à compter du  3  janvier  2020  soit  à  une  date  postérieure  aux   courriers  en  date   du  6  mai  2019  et   du 23 octobre 2019 envoyés en recommandé avec accusé de réception par lesquels Bouygues Telecom a demandé une baisse du tarif de location. De la même manière, Bouygues Telecom demande à l’Autorité d’enjoindre à SFR FTTH de renoncer à l’augmentation de ses tarifs d’accès à compter du   1er février 2020 soit à une date postérieure aux courriers en date des 23 octobre 2019, 3 janvier 2020 et 20 janvier 2020, envoyés en recommandé avec accusé de réception, dans lesquels Bouygues Telecom a opposé son refus aux nouveaux tarifs pratiqués.

Il apparaît au regard de l’ensemble des éléments recueillis dans le cadre de l’instruction que la demande de renonciation de la part de SFR FTTH, au 1er février 2020, concernant la hausse tarifaire et la demande d’application par SFR FTTH, au 3 janvier 2020, d’un tarif de location situé dans l’intervalle tarifaire demandé, sont recevables dès lors que ces dates sont postérieures aux dates auxquelles Bouygues Telecom a formellement élevé ses contestations.

3          Sur le respect du principe d’impartialité

SFR FTTH fait valoir dans son deuxième mémoire en défense que le Président de l’Arcep ne présente pas les garanties d’impartialité résultant de l’article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (dite « CESDH ») et des dispositions de l’article  9 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.40 D’une part, il soutient que, sur le volet de l’impartialité objective, l’ouverture concomitante de la procédure d’enquête sur les tarifs d’accès de SFR FTTH à la saisine de l’Autorité du présent règlement de différend par Bouygues Telecom dénoterait un parti pris sur les tarifs d’accès pratiqués par SFR FTTH, de la part du Président qui délibère dans ces deux procédures en tant que membre de la formation RDPI41. D’autre part, sur le volet de l’impartialité subjective, SFR FTTH soutient que des passages de la décision d’ouverture de l’enquête laisseraient entendre que le tarif de location et les évolutions tarifaires prévues ne sont pas conformes aux obligations réglementaires. Il fait également valoir que des prises de position publique42 du Président de l’Autorité révèleraient un préjugement de sa part.43 Au-delà de l’exigence d’impartialité, il ajoute que « le respect du principe d’indépendance posé par l’article 6§1 précité est également discutable en l’espèce en raison du cumul par le Collège de l’ARCEP des fonctions réglementaire, de sanction et de règlement des différends. »

Bouygues Telecom soutient dans ses observations complémentaires que le principe d’impartialité objective44 ne fait pas obstacle à ce que le juge puisse connaître à plusieurs reprises des mêmes faits. Bouygues Telecom ajoute, d’une part, que la procédure d’enquête et la procédure de règlement de différend ont un objet distinct, puisque l’une a pour objet de recueillir les éléments permettant de vérifier le respect d’obligations réglementaires alors que la seconde vise à trancher un différend entre deux parties et, d’autre part, que l’ouverture de l’enquête a précédé l’introduction du règlement de différend. Bouygues Telecom invoque enfin le fait qu’aucune appréciation sur le respect des obligations de SFR FTTH n’est portée dans cette décision. S’agissant de l’impartialité subjective45, les termes de la décision d’enquête, qui ne relèvent que des éléments factuels, ne témoignent d’aucun parti pris du Président de l’Arcep. Bouygues Telecom fait ensuite valoir que les propos tenus par le Président de l’Arcep ne peuvent être interprétés comme un préjugement du différend en cours : ces propos ne se rapporteraient pas au présent différend et auraient seulement visé à indiquer que l’examen de la conformité des tarifs d’accès aux obligations réglementaires était en cours, sans qu’aucun parti pris n’en résulte.

Lors de l’audience, SFR FTTH a indiqué retirer ses demandes relatives au respect du principe d’impartialité. L’Autorité en prend acte.

En tout état de cause, le principe d’impartialité n’a, en l’espèce, pas été méconnu.

À titre liminaire, et contrairement à ce que soutient SFR FTTH46, l’Autorité rappelle qu’il ne ressort ni de la jurisprudence du Conseil d’État, ni de celle du Conseil constitutionnel que serait contraire au principe d’impartialité le fait de cumuler pour une autorité administrative indépendante un pouvoir de régulation au sens d’édiction d’une norme, un pouvoir de règlement des différends, de poursuite et d’instruction et un pouvoir de sanction47. À cet égard, il convient de souligner que l’attribution de ces pouvoirs à l’Arcep, destinée au regard des textes européens à ce que soit assurée l’effectivité de la régulation, est, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, assortie des garanties nécessaires, puisque les dispositions du CPCE assurent notamment une séparation entre les  fonctions de règlement des différends, poursuite et d’instruction, d’une part, et celles de sanction, d’autre part, selon des règles d’indépendance fonctionnelle48.

L’Autorité relève ensuite que le seul fait pour la formation RDPI d’avoir ouvert une procédure d’enquête par décision adoptée le 21 janvier 202049, qui est au demeurant antérieure à la saisine en règlement de différend de Bouygues Telecom, pour vérifier le respect par SFR FTTH des obligations comptables et tarifaires d’accès aux lignes FttH alors que le présent différend dont est saisi l’Arcep porte sur des demandes visant à une baisse des tarifs d’accès, ne l’empêche aucunement de connaître du présent différend, au risque sinon de neutraliser l’exercice du pouvoir de contrôle de l’Autorité et, in fine, de remettre en cause l’effectivité de la régulation de l’Arcep. Par ailleurs, l’Autorité rappelle que l’objet d’une enquête prise sur le fondement de l’article L. 32-4 du CPCE50, est de recueillir des informations auprès d’un opérateur pour vérifier le respect de ses obligations. En ce sens, SFR FTTH ne peut reprocher à la formation RDPI, et en particulier à son Président, un quelconque parti pris sur l’issue du présent règlement de différend, dans la mesure où une décision d’enquête n’a pas pour objet de constater un manquement à une obligation ou, en d’autres termes, de prendre parti sur le non-respect d’obligations par un opérateur. En l’espèce, la présente décision d’enquête se borne à relever des éléments factuels, qui ne sauraient en aucun cas exprimer un préjugement de la formation RDPI.

L’Autorité considère enfin que les expressions publiques du Président de l’Autorité reproduites par SFR FTTH ne montrent en aucun cas que le Président se serait prononcé, au stade de ces déclarations, sur le présent règlement de différend. En effet, ces déclarations n’ont pas visé le présent règlement de différend, dont il n’est à aucun moment fait mention, ni même un opérateur en particulier, si bien que SFR FTTH ne peut y voir une prise de position du Président ou de celle de la formation RDPI de l’Autorité sur le sort à réserver au présent litige.

4          Rappel du cadre juridique applicable

La loi de modernisation de l’économie n° 2008-776 du 4 août 2008 a fixé le cadre juridique de la régulation de la partie terminale des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné, en instaurant un principe de mutualisation de la partie terminale des réseaux entre opérateurs. L’article L. 34-8-3 du CPCE dispose ainsi que :

« Toute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne […].

« L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point […] permettant le raccordement effectif d’opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d’accessibilité raisonnables. […] Tout refus d’accès est motivé.

« Il fait l’objet d'une convention entre les personnes concernées. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de l'accès […].

« Pour réaliser les objectifs définis à l’article L. 32-1, et notamment en vue d’assurer la cohérence des déploiements et une couverture homogène des zones desservies, l’autorité peut préciser, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l’accès prévu au présent article. »

En application de ces dispositions, l’Arcep a précisé les modalités de l’accès aux lignes FttH par trois décisions réglementaires :

- la décision n° 2009-1106 en date du 22 décembre 2009 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée ;

- la décision n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses ;

- la décision n° 2015-0776 en date du 2 juillet 2015 sur les processus techniques et opérationnels de la mutualisation des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique.

L’article 6 de la décision n° 2010-1312 impose à l’opérateur d’immeuble, conformément à l’article 2 de la décision n° 2009-1106, d’offrir aux autres opérateurs un accès passif aux lignes au niveau du point de mutualisation « dans des conditions raisonnables, objectives, transparentes et non discriminatoires. »

S’agissant des formes que doit prendre cet accès, l’article 8 de la décision n° 2010-1312 précise que « [l]’opérateur d’immeuble offre, au niveau du point de mutualisation, un accès aux lignes permettant de participer au cofinancement de celles-ci, tant ab initio qu’a posteriori, ainsi qu’un accès passif à la ligne, en location. »

L’Autorité  a précisé les conditions tarifaires de  l’accès aux lignes FttH à l’article 3 de la décision       n° 2009-1106 et à l’article 9 de la décision n° 2010-1312. Ces dispositions prévoient que « les conditions tarifaires de l’accès au point de mutualisation doivent être raisonnables et respecter les principes de non-discrimination, d’objectivité, de pertinence et d’efficacité » et que « le taux de rémunération du capital utilisé pour la détermination des conditions tarifaires tient compte du risque encouru et confère une prime à l’opérateur d’immeuble. » L’article 9 de la décision n° 2010-1312 ajoute que « [l]es conditions tarifaires de l’accès au point de mutualisation doivent correspondre à une prise en charge d’une part équitable des coûts d’installation des lignes et des ressources associées. »

L’Autorité a précisé dans les motifs de la décision n° 2009-1106 la portée des principes tarifaires visés ci-dessus :

- « le principe de non-discrimination : un traitement discriminatoire d’opérateurs se trouvant dans des situations similaires aurait pour conséquence d’affaiblir la dynamique concurrentielle sur le marché de détail, en favorisant artificiellement une situation ou un  choix stratégique ;

- « le principe d’objectivité : la tarification mise en œuvre par l’opérateur doit pouvoir être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables ;

- « le principe de pertinence : les coûts doivent être supportés par les opérateurs qui les induisent ou ont usage des infrastructures ou prestations correspondantes ; ainsi, l’opérateur d’immeuble ne doit pas supporter de coûts induits par la pose de fibres supplémentaires pour d’autres opérateurs ; en outre, ce principe appelle une cohérence entre partage des coûts et partage des revenus ultérieurs éventuels liés à l’accueil d’opérateurs se raccordant ultérieurement à l’immeuble ;

- « le principe d’efficacité des investissements : les coûts pris en compte doivent correspondre à ceux encourus par un opérateur efficace ; il convient donc que l’opérateur d’immeuble ne fasse pas supporter de coûts indus ou excessifs aux opérateurs tiers. »

Le cadre réglementaire de l’accès aux lignes FttH pose par ailleurs, dans le prolongement de la régulation de l’accès au réseau cuivre, le principe d’une échelle des investissements en soutien du développement de la concurrence sur les réseaux FTTH par l’arrivée d’opérateurs commerciaux.

Ainsi, les motifs de la décision n° 2010-1312 indiquent qu’« [e]n dehors des zones très denses, il apparaît nécessaire que l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers des modalités d’accès garantissant un accès pérenne dans des conditions non discriminatoires et permettant de monter dans l’échelle des investissements. » (Soulignement ajouté)

En outre, l’Autorité relève, dans sa décision n° 2010-1312, le considérant 3 de la recommandation de la Commission du 20 septembre 2010 sur l’accès réglementé aux réseaux d’accès de nouvelle génération (NGA) selon lequel « chaque ARN doit imposer une panoplie de mesures correctrices appropriées qui tienne dûment compte du principe d’échelle des investissements » pour en déduire que « [c]eci implique l’existence de plusieurs niveaux d’engagement et d’investissement dans les offres d’accès, adaptées aux opérateurs de petite taille ou aux nouveaux entrants, leur permettant une montée dans l’échelle des investissements » et cite l’avis n° 10-A-18 que l’Autorité de la concurrence lui a rendu sur cette décision51, selon lequel « l’obligation de fournir une offre de gros, telle qu’une offre de location à la ligne, constitue une garantie indispensable pour permettre aux petits opérateurs ou aux nouveaux entrants de servir le marché du très haut débit dans les zones moins denses et devrait à ce titre faire partie des offres régulées »52. (soulignement ajouté)

L’Autorité conclut ainsi dans cette décision qu’« il convient que les offres d’accès en dehors des zones très denses permettent aux opérateurs tiers disposant de capacités d’investissement moindres de prendre en charge une partie des risques liés au déploiement. Ceci se traduit dans ces zones par un droit d’usage pérenne sur un nombre limité de prises accessibles sur la maille d’investissement considérée. La tarification de ces offres pourra refléter, en cohérence avec les recommandations communautaires, le fait que le risque encouru par l’opérateur cofinanceur dépend du volume de prises sur lequel porte sa contribution au partage des coûts. A minima, pour garantir la possibilité d’entrée sur le marché d’opérateurs à faible capacité d’investissement et de prise en charge des risques, une offre passive de location à la ligne doit être proposée par l’opérateur d’immeuble, à laquelle s’applique un taux de rémunération du capital conférant une prime au regard du risque encouru. »53 (soulignement ajouté)

5          Sur l’appréciation des demandes au regard du principe de l’échelle des investissements

À titre liminaire, comme précisé dans le cadre juridique supra, le cadre réglementaire d’accès aux lignes FttH implique la mise en œuvre d’un principe d’échelle des investissements.

En particulier, cette échelle des investissements permet de moduler le niveau d’engagements des opérateurs commerciaux, dans le cadre du déploiement des réseaux FttH, afin de leur permettre d’avoir accès aux lignes en fibre optique tout en maintenant des incitations à investir. Cette échelle des investissements se traduit par la mise à disposition dans les zones moins denses de différentes offres d’accès : d’une part, les offres de location, et, d’autre part, les offres de cofinancement, elles-mêmes découpées en deux catégories (les offres de cofinancement a priori et les offres de cofinancement a posteriori).

Or, comme rappelé ci-avant, les offres d’accès des opérateurs d’infrastructure doivent respecter un principe de pertinence, qui implique que les coûts soient supportés par les opérateurs qui les induisent ou ont usage des infrastructures ou prestations correspondantes, et un principe d’objectivité, qui consiste, dans ce cadre, à ce que la tarification puisse être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables.

Il ressort de ces principes que les niveaux tarifaires retenus pour ces offres d’accès, dont le positionnement relatif doit refléter le risque encouru par l’opérateur commercial, doivent eux-mêmes traduire, en vertu des principes de pertinence et d’objectivité, cette échelle des investissements et qu’en conséquence, une différence entre les niveaux des tarifs des offres de cofinancement et des offres de location doit exister selon le niveau d’investissement et d’engagement que ces offres requièrent.

Au regard de ce qui précède, l’Autorité estime donc que la différence tarifaire entre la location et le cofinancement doit permettre de refléter la flexibilité apportée à l’opérateur commercial par l’offre de location à la ligne passive et de prendre en compte le niveau de risque encouru par l’opérateur d’immeuble. Elle doit dans le même temps être raisonnable afin de permettre, d’une part, aux opérateurs qui achètent des offres de location d’entrer sur le marché et, d’autre part, à un opérateur efficace souscrivant à ces modalités d’accès de proposer une offre compétitive sur le marché de détail.

En particulier, conformément aux principes tarifaires fixés par le cadre réglementaire  de l’accès aux lignes FttH et au principe d’échelle des investissements qui en découle, ainsi qu’aux objectifs mentionnés à l’article L. 32-1 du CPCE visant à l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau, au développement de l’investissement, de l’innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques et à l’aménagement et l'intérêt des territoires et la diversité de la concurrence dans les territoires, l’Autorité considère que, dès lors que le niveau du tarif du cofinancement est fixé, c’est au regard de l’écart tarifaire entre le cofinancement et la location que le caractère raisonnable du tarif de location doit être apprécié.

Afin notamment d’éclairer les opérateurs dans la détermination des tarifs de leurs offres sur le marché de gros dans le respect du principe d’échelle des investissements consacré par le cadre réglementaire, et de la cohérence tarifaire entre l’offre de cofinancement et l’offre de location qu’il implique, l’Arcep a mis en consultation publique en 2015 un modèle générique de tarification de l'accès aux boucles locales optiques mutualisées en dehors des zones très denses (ci-après « le modèle de tarification de 2015 »). Les opérateurs de réseaux de communications électroniques, parmi lesquels Bouygues Telecom et SFR, alors encore en charge de l’activité de déploiement et d’exploitation des lignes FttH en zones moins denses, reprise en 2019 par SFR FTTH, ont répondu à cette consultation publique.

À la suite de cette dernière, l’Arcep a ainsi publié en 2015 des éléments d’orientation sur la tarification en zones moins denses, constitués d’un modèle et de son document d’accompagnement54, ayant vocation à servir de support aux négociations tarifaires entre les différents acteurs du marché de gros par l’introduction d’une méthodologie de référence. Ledit modèle a notamment été utilisé par l’Autorité pour établir les lignes directrices relatives à la tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique déployés par l’initiative publique55.

Concernant les tarifs de cofinancement, l’Autorité rappelle que les offres de cofinancement proposées par les opérateurs d’infrastructure donnent accès à l’opérateur cofinanceur à des droits d’usage de long terme, permettant l’amortissement des investissements correspondant, sur un pourcentage des lignes installées derrière le PM cofinancé, généralement par tranches de 5 %. En pratique, cette offre est composée de deux tarifs principaux :

- un tarif dit « non récurrent », généralement facturé en deux temps (lors de la mise à disposition du point de mutualisation puis lors de la mise à disposition des points de branchement optique) ;

- un tarif dit « récurrent » payé mensuellement par accès activé en aval du PM, qui permet de recouvrer les charges d’exploitation et les coûts de location du génie civil, ainsi que la part non cofinancée des coûts de construction du réseau déjà encourus, appelée la réserve.

En pratique, le modèle56 tel qu’il a été publié en 2015 est constitué de deux modules. Le premier module est relatif au cofinancement et permet de déterminer le niveau du tarif récurrent de cofinancement assurant une rentabilité de l’opérateur d’infrastructure, à partir d’un tarif non récurrent de cofinancement donné. Le deuxième module est relatif à la location et permet, à partir des tarifs de cofinancement, de déterminer le tarif de location assurant une rentabilité à un opérateur de gros fictif qui achèterait des tranches de cofinancement auprès de l’opérateur d’infrastructure pour les revendre en location à la ligne aux opérateurs commerciaux sur un marché de gros secondaire.

Cette modélisation en deux temps permet de vérifier « la relation entre les tarifs des différentes offres publiées par les opérateurs déployant des réseaux »57, à l’égard de laquelle l’Autorité rappelle, dans le document d’accompagnement du modèle, porter une attention particulière. Il importe en effet, comme indiqué dans ce document d’accompagnement de « conserver une distinction tarifaire cohérente entre les accès de court terme, comme la location passive ou activée, et de long terme, comme le cofinancement. Cette distinction entre les tarifs des accès de court terme et de long terme doit rendre compte de la sécurité pour l’opérateur d’immeuble que fournissent les engagements financiers liés à la souscription de droits de long terme par un opérateur commercial. Elle doit notamment refléter, par une différenciation entre les tarifs de long et de court terme, l’avantage en termes de flexibilité apportée à l’opérateur commercial par l’offre de location à la ligne passive ou activée. Cette différenciation doit, tout en préservant les espaces économiques entre les deux types d’offres passives d’une part et entre les offres passives et activées d’autre part, permettre à un opérateur efficace souscrivant à une offre de location à la ligne passive ou activée de proposer une offre compétitive sur le marché de détail. »58

Ainsi, en calculant le tarif de location à partir des tarifs de cofinancement, cette méthode « permet d’assurer l’existence d’un espace économique suffisant entre les deux offres de gros et la préservation d’une incitation au cofinancement [et] la cohérence entre les différentes composantes tarifaires de l’offre ». En d’autres termes, le tarif de location doit être fixé comparativement au cofinancement, de sorte à inciter les opérateurs à co-investir, tout en étant accessible pour un opérateur commercial afin de lui permettre de proposer des offres compétitives sur le marché de détail et ainsi garantir une concurrence effective entre les opérateurs au bénéfice des utilisateurs finals.

Comme indiqué précédemment, c’est donc avant tout en référence au niveau des tarifs de l’offre de cofinancement, une fois que celui-ci est fixé, que doit s’apprécier le caractère raisonnable de l’offre de location de SFR FTTH.

En conséquence, il convient, en l’espèce, de déterminer, dans un premier temps, si la hausse des tarifs de cofinancement est justifiée et, dans un second temps, si le tarif de location est raisonnable au regard de son écart avec le tarif de cofinancement sous-jacent, tel qu’il ressort de l’appréciation portée sur la première demande.

6          Sur la demande de Bouygues Telecom tendant à ce que SFR FTTH renonce à l’application de la hausse de ses tarifs d’accès

6.1        Rappel de la demande

La demande, concernant les hausses tarifaires des différentes modalités de SFR FTTH, formulée par Bouygues Telecom est la suivante :

« ByTel demande à l’Autorité des communications électroniques et des postes de :

[…] Dire que les hausses tarifaires des différentes modalités d’accès au réseau FTTH de SFR FTTH au sein de la zone SFMD de la ZMD AMII prévues à compter du 1er février 2020, en particulier les tarifs de cofinancement, le récurrent de financement et le tarif de location mensuelle, ne sont pas justifiées par des éléments de coûts clairs et opposables, et sont manifestement déraisonnables et ne peuvent donc pas s’appliquer.

[…] En conséquence, enjoindre à SFR FTTH, de transmettre à ByTel un avenant au contrat conclu entre ByTel et SFR FTTH dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend à intervenir, par lequel SFR FTTH renonce à l’application de ces hausses de tarifs rétroactivement au 1er février 2020. »59

6.2        Rappel du cadre juridique applicable aux évolutions des tarifs de l’opérateur d’infrastructure

Conformément  au  cadre  juridique   rappelé  supra,  en  particulier   à  l’article   3  de   la  décision   n° 2009-1106 et à l’article 9 de la décision n° 2010-1312, la tarification mise en œuvre par l’opérateur d’infrastructure doit pouvoir être justifiée, conformément au principe d’objectivité, à partir d’éléments clairs et opposables. Cette obligation doit notamment être respectée à l’occasion des modifications apportées par l’opérateur d’infrastructure aux tarifs d’accès. En effet, un opérateur d’infrastructure doit fournir un accès aux opérateurs commerciaux à des conditions raisonnables, tant au moment de l’élaboration, de la publication que de la modification des conditions tarifaires de son offre d’accès.

Dans le cadre de la décision de règlement de différend n° 2018-0569-RDPI en date du 17 mai 2018 opposant la société Free et la société Orange60, l’Autorité a par ailleurs indiqué que « le cadre réglementaire précisant les modalités de l’accès au réseau FttH a […] bien établi un lien entre les  tarifs d’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique et les coûts de déploiement de ces réseaux ».

La Cour d’appel de Paris61, saisie d’un recours exercé par Orange à l’encontre de cette décision de règlement de différend, a considéré que « [l]es tarifs que la société Orange fixe dans le contrat d'accès qu'elle propose aux autres opérateurs doivent garantir le caractère raisonnable des conditions économiques d'accès à ses lignes locales FttH et respecter les principes de non-discrimination, d'objectivité, de pertinence et d'efficacité. » En estimant qu’il n’est pas contesté que « la société Orange n'est soumise à aucune obligation de corrélation entre ses tarifs et les coûts qu'elle supporte, ni d'orientation vers ces coûts », la Cour d’appel souligne que « [p]our autant, on ne saurait en conclure, comme le fait la société Orange, à l'absence de tout lien entre les tarifs et les coûts dont il pourrait être déduit que la décision attaquée, en imposant une obligation d'explicitation et de transparence, a méconnu les principes posés, en particulier, par l'article L. 34-8-3 du CPCE » et précise que « ce lien résulte directement du cadre réglementaire de l’accès aux boucles locales et du cofinancement ».

Par ailleurs, les décisions n° 2009-1106 et n° 2010-1312 mettent en avant le besoin de prévisibilité des opérateurs commerciaux, à travers plusieurs dispositions, qu’il s’agisse des obligations de transparence (publication des offres) ou des obligations tarifaires.

Dans les motifs de la décision n° 2009-1106 se rapportant à l’obligation de publication des offres d’accès mentionnée à l’article 4 de cette même décision, il est indiqué que l’existence et la publication d’une offre d’accès « doit notamment permettre d’apporter de la visibilité et de la stabilité aux opérateurs dans l’élaboration de leurs plans de développement ». Il est ajouté que « [l]es opérateurs tiers ont besoin, lors de l’élaboration de leurs plans d’affaires et de leurs stratégies techniques et commerciales, de disposer d’une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par l’opérateur d’immeuble. » (Soulignement ajouté)

Dans les motifs de la décision n° 2009-1106 se rapportant aux conditions tarifaires de l’accès, l’Autorité indique « partage[r] pleinement l'analyse de la Commission concernant la nécessité d'un niveau de prévisibilité suffisant pour permettre à l’ensemble des opérateurs, et notamment à ceux souhaitant s’engager dans le co-investissement, de construire des plans d’affaires précis. Pour s’engager dans des projets d’investissement ou de co-investissement aussi importants, les opérateurs ont besoin d’une certaine visibilité sur les coûts qu’ils encourront et  sur  les  recettes  qu’ils percevront. »62

Dans les motifs de la décision n° 2010-1312, l’Autorité précise qu’« [e]n dehors des zones très denses, il apparaît nécessaire que l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers des modalités d’accès garantissant un accès pérenne dans des conditions non discriminatoires et permettant de monter dans l’échelle des investissements. »63

Enfin, dans le document d’accompagnement du modèle de tarification de 2015, l’Arcep explique que la mise à disposition de cette modélisation au bénéfice des acteurs du marché visait notamment à accorder davantage de visibilité aux opérateurs commerciaux sur l’élaboration des grilles tarifaires des offres d’accès de gros : « [a]insi, de nombreux acteurs (opérateurs ou collectivités territoriales impliqués dans des projets de BLOM) ont exprimé à l’Autorité leur besoin d’obtenir une visibilité accrue sur les mécanismes de détermination des tarifs des offres de gros en zones moins denses, notamment afin de fiabiliser l’établissement de leurs plans d’affaires. D’une part, cette visibilité concourra à sécuriser les opérateurs d’immeuble déployant des réseaux quant à la prise en compte dans les modèles de tarification des risques commerciaux et des perspectives de rentabilité liées à l’établissement et l’exploitation sur le marché de gros des BLOM. D’autre part, cette visibilité favorisera la commercialisation des réseaux en donnant des garanties de long terme sur le caractère raisonnable et équitable des conditions d’accès aux réseaux pour tous les opérateurs. »64 (Gras et soulignement ajoutés)

Il ressort de ce qui précède, au regard de l’article L. 34-8-3 du CPCE, des décisions prises pour son application, des objectifs de prévisibilité qu’elles visent ainsi que des objectifs de l’article L. 32-1 du CPCE liés en particulier à la promotion des investissements et de l'innovation dans les infrastructures, à l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau, à l'aménagement et l'intérêt des territoires et la diversité de la concurrence dans les territoires, que, d’une part, les évolutions tarifaires doivent reposer sur des éléments objectifs qui doivent pouvoir être justifiés, et, que, d’autre part, elles ne doivent pas avoir pour effet de fragiliser les investissements consentis par les opérateurs commerciaux en remettant in fine en cause leur accès aux lignes FttH.

6.3        Sur le fond

Dans la présente partie, on entend par « hausse tarifaire » la hausse du tarif récurrent de cofinancement et du tarif non-récurrent de cofinancement (le tarif de location est, quant à lui, analysé en partie 7).

6.3.1         Sur l’appréciation du caractère justifié et raisonnable du mouvement tarifaire

Bouygues Telecom soutient dans sa saisine que « les hausses tarifaires des différentes modalités d’accès au réseau FTTH de SFR FTTH […] ne sont pas justifiées par des éléments de coûts clairs et opposables »65.

SFR FTTH indique pour sa part que « les évolutions tarifaires en cause sont limitées et visent à tenir compte des hausses de coûts (notamment des OPEX en lien avec les dégradations de PM précitées), de l’inflation et de l’indexation des tarifs. »66

En premier lieu, SFR FTTH indique qu’« en l’absence de toute obligation d’orientation vers les coûts, seul importe que les tarifs pratiqués soient raisonnables, indépendamment de l’évolution que ByTel stigmatise. »67

À cet égard, il convient tout d’abord de rappeler que l’Autorité estime qu’il est légitime que SFR FTTH puisse faire évoluer ses tarifs lorsque les circonstances le nécessitent. À ce titre, et ainsi que le relève SFR FTTH, le document d’accompagnement du modèle de tarification de 2015 indique que les tarifs peuvent faire l’objet d’ajustements en fonction de la réalisation ou non d’hypothèses structurantes68.

Toutefois, la prévisibilité des tarifs, et donc dans une certaine mesure leur stabilité, est importante. À cet égard, l’Autorité relève que le modèle de tarification de 2015 est fondé sur une confrontation pluriannuelle des coûts et revenus, visant à assurer une rentabilité financière sur le marché de gros sur un horizon temporel de 25 ans. Le modèle propose ainsi, à partir de cette vision pluriannuelle des coûts et revenus, des tarifs stables sur l’ensemble de la période, qui englobent les fluctuations et les imprécisions incontournables des phases transitoires des premières années.

Ainsi que rappelé dans le cadre juridique exposé ci-avant, les évolutions tarifaires doivent reposer sur des éléments objectifs et tenir compte des besoins de prévisibilité des opérateurs commerciaux.

Ainsi, il revient en l’espèce à l’Autorité de vérifier, d’une part, si la hausse des tarifs d’accès pratiquée par SFR FTTH est justifiée et raisonnable, et, d’autre part, si elle n’est pas de nature à remettre en cause le niveau de prévisibilité suffisant pour permettre à Bouygues Telecom de construire des plans d’affaires précis.

En second lieu, comme exposé ci-avant, le tarif de location s’apprécie à partir des tarifs de cofinancement. Ainsi, l’Autorité note qu’il lui revient, dès lors que Bouygues Telecom conteste la hausse du tarif de location, d’examiner la hausse des tarifs de cofinancement – également contestée par ce dernier – dès lors que son niveau permet de déterminer celui de la location.

Il ressort de l’instruction que SFR FTTH, pour motiver la hausse de ses tarifs d’accès, s’appuie sur les paramètres suivants : l’évolution du taux de rémunération du capital, les primes de risque du modèle de tarification de 2015, l’intégration des zones AMEL de SFR FTTH dans la zone SFMD, le rythme de déploiement de SFR FTTH dans la zone SFMD, le taux de cofinancement, le taux de pénétration, les dépenses d’exploitation (dites « OPEX » pour operational expenditure), l’indexation de ses tarifs et les coûts commerciaux et de structure. Il appelle par ailleurs l’Arcep à prendre en compte le contexte lié à la crise sanitaire dans l’appréciation de ses demandes.

L’Autorité relève toutefois que certains arguments de SFR FTTH ne semblent pas porter sur la modification et l’augmentation des tarifs en tant que telles mais sur le niveau intrinsèque des tarifs. Ainsi, pour les paramètres liés au taux de rémunération du capital, aux primes de risque et aux coûts commerciaux et de structure, SFR FTTH se contente de contester les valeurs retenues par Bouygues Telecom dans son analyse du tarif de location et n’indique pas que les valeurs, que lui-même retient, se seraient écartées de ses hypothèses initiales ayant servi à la construction de ses tarifs. De même, concernant le paramètre lié aux rythmes de déploiement, les seules valeurs transmises par SFR FTTH sont celles retenues par le cabinet Frontier Economics69, qui mènent au demeurant, toutes choses égales par ailleurs70, à [SDA] des tarifs d’accès71. En conséquence, l’Autorité estime que les paramètres évoqués dans le présent paragraphe, n’apparaissent pas, au regard des éléments recueillis dans le cadre de l’instruction, avoir fondé le mouvement tarifaire contesté par Bouygues Telecom.

Concernant les autres paramètres évoqués, SFR FTTH soutient que les valeurs actuelles de ces derniers ne correspondent pas aux hypothèses qu’il avait initialement retenues pour construire ses tarifs et qu’ils justifient donc une évolution tarifaire.

Ainsi, l’Autorité concentrera son analyse sur les paramètres pour lesquels SFR FTTH a indiqué s’être écarté des hypothèses initialement retenues, à savoir : les taux de cofinancement et de pénétration, l’intégration des AMEL, les surcoûts de maintenance et de génie civil, ainsi que les mécanismes d’inflation et d’indexation. En complément, l’Autorité appréciera également l’argument avancé par SFR FTTH concernant l’état d’urgence sanitaire.

a) Sur les paramètres de marché : les taux de cofinancement et de pénétration

Bouygues Telecom soutient « qu’aucun élément nouveau et non lié directement à SFR FTTH ne serait de nature à réviser les prévisions faites par SFR FTTH sur la ZMD AMII/SFMD sur le taux global de cofinancement de son réseau »72. En effet, il soutient, d’une part, que si un taux de cofinancement plus faible que celui initialement prévu devait être constaté, il serait imputable en premier lieu au fait que « [SDA] »73. D’autre part, il soutient également que les choix d’architecture de SFR FTTH, consistant à ne pas localiser les points de raccordement distant mutualisés (ci-après « PRDM ») au niveau des nœuds de raccordement optique (ci-après « NRO »), en ce qu’ils impliqueraient une complexification de l’opération de raccordement aux PRDM, pourraient expliquer en partie les  faibles taux de cofinancement constatés sur la zone SFMD 74 , de même, qu’ils « [auraient] potentiellement réduit le taux de pénétration. »75

Dans ses premières observations en défense, SFR FTTH indique que les taux de cofinancement et de pénétration sur la zone SFMD sont plus faibles que ceux retenus par Bouygues Telecom, notamment à cause « [SDA] » 76 et « [SDA] »77 Ensuite, SFR FTTH argue que les arguments de Bouygues Telecom sur les choix d’architecture de SFR FTTH ne peuvent être retenus puisque d’une part, il n’y a pas d’obligation pour SFR FTTH de localiser les PRDM au niveau des NRO d’Orange et, d’autre part, SFR FTTH propose des solutions techniques appropriées qui n’ont fait l’objet d’aucune demande de la part des opérateurs commerciaux déjà présents sur la zone SFMD.78 Enfin, SFR FTTH indique que « le groupe SFR est un opérateur qui investit massivement en tant qu’OI et OC pour le déploiement des réseaux FTTH » et que par ailleurs « pour SFR FTTH, SFR est une entité indépendante qui constitue donc un OC comme un autre et qui est traité comme tel, conformément au principe de non- discrimination auquel SFR FTTH est tenue. »79

En premier lieu, l’Autorité relève que SFR FTTH ne lui a pas transmis les hypothèses de taux de cofinancement et de taux de pénétration lui ayant permis de fonder ses tarifs initiaux.

En second lieu, il convient de souligner que le réseau de SFR FTTH en zone SFMD étant dans une phase transitoire de déploiements, il est prématuré de tirer, de la situation actuelle, des conclusions sur l’évolution à venir des taux de cofinancement et de pénétration.

En troisième lieu, sur chacun des deux paramètres, l’Autorité note les éléments suivants.

Concernant le taux de cofinancement, si l’Autorité a bien noté que SFR FTTH revendique un taux de cofinancement constaté plus faible que ce qu’il avait préalablement anticipé, elle constate toutefois que SFR FTTH ne procède à aucune analyse des perspectives liées à (i) la création de la société d’Investissements dans la Fibre des Territoires (IFT) par Iliad et InfraVia à laquelle il fait lui-même référence dans ses écritures80 et dont l’objet est « l’acquisition et l’exploitation des tranches de co- financement FTTH dans les zones moyennement denses et peu denses » et « [d’]assurer une présence [de Free] sur l’intégralité des territoires »81 et à (ii) la croissance nationale du nombre d’abonnés FttH et de son impact sur la pénétration du FttH. Or, ces deux paramètres sont susceptibles de faire augmenter à horizon rapproché le taux de cofinancement des réseaux FttH, dans la mesure où la stratégie de certains opérateurs commerciaux est d’augmenter leur taux de cofinancement au fur et à mesure de la souscription de nouveaux  clients  finals.  Enfin,  l’Autorité  relève  également  que  SFR FTTH se prévaut d’un taux de cofinancement plus faible qu’anticipé pour justifier l’augmentation de ses tarifs, alors même que [SDA]82, créant une variation à la baisse du taux de cofinancement non négligeable par rapport à celui initialement envisagé.

Concernant le taux de pénétration, SFR FTTH n’analyse pas les conséquences de l’arrivée de Bouygues Telecom sur son réseau, qui, en tant qu’opérateur commercial d’envergure nationale, devrait avoir un impact positif sur le taux de pénétration. Cette tendance haussière semble d’ailleurs être confirmée par l’évolution observée au niveau national du niveau de mutualisation passive des infrastructures, a fortiori dans un contexte de forte accélération des déploiements FttH observé actuellement83. À titre d’illustration, le pourcentage de lignes FttH avec 4 opérateurs présents en mutualisation passive est passé de 31,1 % au T1 2019 à 48,6 % au T1 202084. Il ne semble pas y avoir, à la connaissance de l’Arcep, d’éléments pouvant justifier que le réseau de SFR FTTH en zone SFMD connaisse un taux de pénétration significativement différent de celui observé à l’échelle nationale.

L’Autorité considère, dans ces conditions, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les choix d’architecture de SFR FTTH, que l’augmentation des tarifs d'accès, au regard de taux de cofinancement et de pénétration qui seraient plus faibles qu’initialement envisagés, n’est pas justifiée.

b) Sur l’intégration des zones AMEL et les surcoûts de génie civil

SFR FTTH justifie également l’augmentation de ses tarifs par l’intégration des zones AMEL au sein de la zone SFMD. En effet, il indique que les zones AMEL sont plus coûteuses à déployer car moins denses et comprenant plus de génie civil en pleine terre, impliquant en conséquence une hausse des coûts de génie civil85 et donc du tarif forfaitaire de cofinancement et

Bouygues Telecom soutient quant à lui que la densité plus faible de la zone SFMD du fait de l’intégration récente des AMEL ne peut expliquer la hausse des tarifs de SFR FTTH86. De même, il soutient que la proportion du réseau cuivre en pleine terre en zone AMEL, qui impliquerait des besoins de reconstruction de génie civil, est limitée et que la comparaison réalisée par SFR FTTH avec la proportion du réseau en pleine terre sur d’autres zones du réseau de SFR FTTH ou d’Orange ne peut pas non plus expliquer ces surcoûts87. Ensuite, selon Bouygues Telecom, SFR FTTH s’est engagé auprès du Ministre en mettant en avant les tarifs d’accès alors en vigueur sur la zone SFMD et n’a pas informé le marché que ces tarifs allaient augmenter, bien qu’il ait pu, avant son engagement, anticiper les coûts de déploiement en zone AMEL.

SFR FTTH explique, dans ses secondes observations en défense88, que les arguments de Bouygues Telecom sur la densité de la zone SFMD de SFR FTTH ne tiennent pas, notamment au regard de la comparaison effectuée avec la zone AMII d’Orange. Il soutient en effet, d’une part, que le périmètre sur lequel Bouygues Telecom évalue les densités de ces zones n’est pas pertinent89 et, d’autre part, que l’indicateur du mètre linéaire moyen entre le point de mutualisation (PM) et le point de branchement optique (PBO), que Bouygues Telecom considère être le principal inducteur de coûts, montre que les coûts sont plus élevés sur la zone SFMD de SFR FTTH90. Par ailleurs, il estime que dans le cadre des engagements L. 33-13 du CPCE sur la zone AMEL, SFR FTTH ne s’est pas engagé à ne pas faire évoluer ses tarifs ; il souligne également que, contrairement à Orange, il n’a pas exclu les raccordements les plus coûteux et ajoute enfin qu’en faisant le choix d’aligner les tarifs des zones AMEL sur ceux de la ZMD privée, il a appliqué une péréquation souhaitée par l’Autorité91.

En premier lieu, avant de prendre des engagements auprès du Ministre sur le fondement des articles

L. 33-13 du CPCE, SFR a dû en toute logique avoir effectué ses estimations de coûts de déploiement92 sur les zones pour lesquelles il entendait prendre ces engagements. Ainsi, à la date de ces derniers, SFR avait pu établir ses hypothèses et anticiper l’éventuel surcoût représenté par les engagements ; si une difficulté avait émergé de son analyse, il eut été alors logique de l’évoquer dans sa lettre d’engagement auprès du Ministre. Le taux de raccordements longs, soumis à tarification spécifique, que SFR s’est engagé à ne pas dépasser dans son courrier à l’adresse du Ministre93, implique d’ailleurs qu’il se soit livré à un exercice d’évaluation des modalités de déploiement du réseau sur les zones concernées et des coûts supportés en conséquence de l’engagement pris.

Ensuite, il convient de noter que dans le cadre de l’instruction, SFR FTTH explique que « contrairement à ce que fait Orange qui propose des tarifs plus élevés pour les raccordements le plus coûteux (classés en « raccordable sur demande »), SFR FTTH a bien fait le choix, conformément à ses engagements L. 33-13, d’aligner ses tarifs dans la zone AMEL sur ceux pratiqués dans ses communes en ZMD privée. »94

Il résulte de ce qui précède que SFR a dû estimer les coûts de déploiement en zone AMEL au moment où il a pris ses engagements et n’a alors pas procédé à un ajustement de ses tarifs. SFR FTTH n’apparait ainsi aujourd’hui pas fondé à se prévaloir de ces engagements pour justifier la hausse de ses tarifs d’accès.

En deuxième lieu, l’Autorité note que les surcoûts allégués, en conséquence de l’intégration des zones AMEL dans la zone SFMD de SFR FTTH, ne sont pas documentés. En particulier, SFR FTTH n’a pas apporté dans le cadre de l’instruction d’éléments, même de manière agrégée, sur les éventuels surcoûts de génie civil qui permettraient d'en apprécier la réalité.

En troisième lieu, l’Autorité relève que la grille tarifaire de SFR jointe à sa lettre d’engagement a certes été présentée à titre indicatif, mais a été un élément du dossier95 qui a éclairé tant l’Arcep dans les avis favorables96 qu’elle a rendus, que le Gouvernement pour accepter ledit engagement par arrêté. En effet, en soulignant dans cet avis le caractère essentiel, pour l’examen des propositions d’engagement de couverture FttH en zone AMEL, de l’appréciation des conditions d’accès aux réseaux dont le déploiement est envisagé, et en relevant particulièrement le fait que l’offre d’accès en vigueur (donc avant hausse) permettait aux opérateurs commerciaux de disposer des mêmes conditions d’accès en zone AMEL que dans les zones AMII et RIP, il apparaît que l’avis favorable de l’Autorité a en partie reposé sur les conditions d’accès, y compris tarifaires, alors en vigueur, c’est-à- dire celles valables avant l’intervention de la hausse tarifaire.

Au demeurant, il ressort de l’instruction97 que SFR FTTH a lancé des appels au cofinancement respectivement sur les zones AMEL Eure-et-Loir et PACA, postérieurement à l’adoption des arrêtés d’acceptation des engagements pris par SFR, en renvoyant à l’offre d’accès en vigueur, qui n’intégraient pas l’augmentation des tarifs d’accès prévue dans le contrat avec Bouygues Télécom au 1er février 2020.

Il ressort de ce qui précède et des éléments du dossier que l’augmentation par SFR FTTH de ses tarifs sur le périmètre dit « SFMD » en raison de surcoûts allégués du fait de l’intégration des zones AMEL n’apparait pas justifiée.

c) Sur les surcoûts de maintenance

SFR FTTH indique faire face « à une hausse des coûts de maintenance en raison, notamment, des conditions dans lesquelles les OC interviennent au PM, lesquels sont fortement dégradés »98 et  précise que, « loin de permettre d’anticiper une baisse des OPEX en raison des travaux et réflexions  en cours, ces coûts vont croissants en raison, précisément, de l’augmentation de ces difficultés, lesquelles s’intensifient à mesure de la pénétration du FTTH. »99

Bouygues Telecom relève pour sa part que le sujet de l’exploitation des réseaux FttH est « un sujet qui est en cours de discussion au sein de la communauté  des  opérateurs  […]  sous  l’égide  de  l’Arcep »100 et que ces travaux multi-opérateurs « auront tendance à réduire les malfaçons et autres incidents, et ainsi contribuer à la baisse des coûts d’exploitation. »101 Il serait par conséquent selon lui prématuré de répercuter ces surcoûts sur les tarifs d’accès au regard des groupes de travail multi- opérateurs en cours.102

Bouygues Telecom indique également, d’abord que « SFR FTTH ne fournit à nouveau aucun élément permettant d’apprécier l’ampleur de cette supposée augmentation et ne démontre a fortiori nullement que cela justifie ni l’augmentation du tarif récurrent de cofinancement, ni celle du tarif de location »103, ensuite, que rien ne justifie l’augmentation des coûts de maintenance au motif qu’aucun autre opérateur d’infrastructure n’a augmenté son tarif de récurrent de cofinancement en conséquence des coûts de maintenance et enfin que les opérateurs d’infrastructure ne sont pas amenés à supporter seuls l’intégralité de ces coûts. Bouygues Telecom ajoute que les dégradations sont liées aux choix d’architecture de réseau de SFR FTTH en ZMD et qu’en tout état de cause le taux de pénétration « beaucoup plus faible » invoqué par SFR FTTH devrait au contraire conduire à des dégradations moindres sur son réseau.

En réponse, SFR FTTH rejette chacun des arguments de Bouygues Telecom. Il estime notamment qu’il n’y a pas de corrélation entre le taux de pénétration et le taux de dégradation et qu’il est difficile en pratique d’aller rechercher la responsabilité des opérateurs commerciaux. Il indique en outre que l’absence de hausse des tarifs chez les autres OI ne remet pas en cause la réalité des surcoûts constatés chez SFR FTTH et que les pistes du groupe de travail multi-opérateurs conduiront « à la mobilisation de CAPEX additionnels importants afin de procéder à la réingénierie de l’architecture des réseaux concernés. »104

Interrogé dans le cadre de l’instruction sur les surcoûts nets générés par ces dégradations105, SFR FTTH a renvoyé aux éléments de justification fournis dans ses deuxièmes observations en défense et précisé ne pas pouvoir « pour des raisons évidentes de secret des affaires, produire davantage d’éléments sur ce point ».

En premier lieu, l’Autorité relève que SFR FTTH n’a ainsi pas apporté d’éléments permettant à l’Autorité d’estimer, même au moyen de données agrégées ou d’une fourchette de prix, les surcoûts générés par les problèmes de maintenance. Dès lors que, selon les propos mêmes de SFR FTTH, ces surcoûts seraient la conséquence de l’activité des opérateurs commerciaux, il apparaît d’autant plus surprenant que SFR FTTH ne produise pas d’éléments, ni de volumétrie ni de coût, concernant les opérations qu’il effectue, a fortiori en arguant de secret des affaires à ce sujet.

En second lieu, si l’Autorité ne remet pas en cause les surcoûts que peuvent engendrer les  problèmes d’exploitation, une évolution des conditions tarifaires, qui conduirait à faire porter la charge financière sur les seuls opérateurs commerciaux, apparait a minima prématurée. L’Autorité rappelle qu’à son initiative, plusieurs groupes de travail réunissant les acteurs du marché travaillent actuellement sur le sujet pour faire émerger des solutions permettant de remédier à cette situation. De plus, les acteurs du secteur ont convergé, lors des discussions en groupe de travail, pour confirmer la responsabilité de principe des opérateurs d’infrastructure quant au maintien de l’intégrité des réseaux, dans la continuité de la décision n° 2015-0776 dont il ressort que l’opérateur d’immeuble est « responsable de la ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique de bout en bout, c’est-à-dire du point de mutualisation jusqu’au dispositif de terminaison intérieur optique »106. À ce titre, la responsabilité de SFR FTTH ne saurait être écartée du seul fait qu’il aurait confié aux opérateurs commerciaux la réalisation de certaines opérations. Enfin, les modalités de refacturation des malfaçons non imputables à l’opérateur d’infrastructure sont également en cours de discussion.

Dès lors, au regard de ce qui précède, l’Autorité considère que les surcoûts de maintenance que SFR FTTH indique subir ne sont pas suffisamment étayés et que l’état des échanges visant à  l’amélioration de la maintenance des réseaux FTTH ne justifient pas de répercuter dès aujourd’hui d’éventuels surcoûts liés à la dégradation des PM dans les tarifs d’accès de cofinancement. Par conséquent, la hausse des tarifs d’accès contestée en l’espèce par Bouygues Telecom n’apparaît pas pouvoir être justifiée par une hausse des coûts de maintenance.

d) Sur les mécanismes d’inflation et d’indexation

Bouygues Telecom soutient, en premier lieu, que l’inflation et l’indexation ne sont pas deux facteurs complémentaires et qu’ils ne peuvent pas être cumulés107, puis que « [l]’augmentation au 1er février 2020 décidée constitue donc une rupture, sans pour autant que SFR FTTH ne l’ait justifiée auprès de ByTel comme l’application de cette inflation »108 et enfin qu’« [u]ne application rétroactive se fondant sur plusieurs années d’inflation, en plus non annoncée, ne peut pas permettre de justifier une telle augmentation».109

SFR FTTH soutient pour sa part que l’inflation qui n’a pas été appliquée sur ses tarifs depuis leur mise en vigueur par SFR en 2012, et dont le cumul s’établit à 5,7 %, « explique presque intégralement la mise à jour du tarif récurrent de cofinancement »110. Il précise que cet argument « est également confirmé par l’évolution de l’indice TP12d Travaux publics/réseau d’énergie et de communication. En effet, sur la seule période 2017 et 2019 (cet indice n’existait pas auparavant), les coûts ont augmenté de 5,6%. »111.

L’Autorité considère que le principe d’un encadrement de l’évolution des tarifs, tel que la mise en œuvre d’une indexation tarifaire, peut, si cette dernière est prévue au contrat d’accès, permettre à l’opérateur d’infrastructure de procéder à une évolution des tarifs, qui devront toutefois rester raisonnables, tout en tenant compte des besoins de prévisibilité des opérateurs commerciaux.

Cependant, le cumul d’indexation de plusieurs années dans un seul mouvement, apparait à l’Autorité contraire aux besoins de prévisibilité de ces derniers.

En l’espèce, l’Autorité relève que l’offre d’accès publiée le 1er mars 2019, en application de laquelle les modifications tarifaires ont été mises en œuvre, ne comprenait pas de clause d’indexation spécifique ; ce mécanisme a été ajouté dans le contrat signé par ByTel le 3 janvier 2020, et repris dans l’offre d’accès modifiée et publiée le 6 mars 2020.

Par ailleurs, l’Autorité note que la clause d’indexation désormais intégrée dans l’offre d’accès publiée le 6 mars 2020 stipule que « les tarifs [peuvent être] révisés uniquement à la hausse une fois par année civile »112. SFR FTTH prévoit donc lui-même que l’indexation est mise en œuvre annuellement et n’envisage pas de mécanisme visant à permettre un effet « rattrapage » pour les années où l’indexation n’aurait pas été appliquée.

L’Autorité estime ainsi que l’augmentation des tarifs d’accès résultant de l’application de l’inflation cumulée sur plusieurs années n’apparait pas justifiée et compromet la prévisibilité des conditions d’accès de Bouygues Telecom. Toutefois, SFR FTTH pourrait, s’il le souhaite, appliquer l’indexation aux tarifs dès 2020, à la condition que les tarifs d’accès en résultant demeurent raisonnables.

e) Sur l’état d’urgence sanitaire

Concernant l’état d’urgence sanitaire, SFR FTTH indique qu’« il est incontestable que cette situation risque d’affecter plusieurs éléments clés pour le déploiement et la pénétration des réseaux FTTH de tous les opérateurs, y compris de SFR FTTH en SFMD. »113 Il invite ainsi l’Autorité à tenir compte de cette situation dans l’appréciation des demandes de Bouygues Telecom.

Tout d’abord, si l’Autorité est consciente des difficultés rencontrées pendant la crise sanitaire, elle estime qu’il est encore trop tôt pour déterminer si cette dernière à un impact structurant et s’inscrivant dans la durée sur le déploiement et l’activité de SFR FTTH. L’Autorité relève à cet égard que SFR FTTH indique lui-même qu’« il n’est pas possible, à date, d’anticiper les conséquences de l’état d’urgence sanitaire »114. A fortiori, SFR FTTH n’a, en réponse aux questions des rapporteurs, communiqué aucun élément précis sur l’impact économique de la crise sanitaire actuelle.

Or, comme rappelé précédemment, les tarifs d’accès FttH visent à assurer une rentabilité financière du projet de déploiement sur le marché de gros sur un horizon temporel raisonnable115, pour donner une visibilité aux investisseurs quant aux retours sur investissements attendus. Dans ces conditions, de la même manière qu’il est trop tôt pour établir que les conséquences de la crise s’inscriront dans la durée, il est trop tôt pour considérer qu’elles sont de nature à modifier en profondeur les hypothèses sous-jacentes à la construction par SFR FTTH de ses tarifs.

Au surplus, l’argument relatif à l’impact de la crise sanitaire, pour justifier la hausse tarifaire au jour de l’élaboration de la nouvelle grille tarifaire puis de sa mise en œuvre, ne saurait être invoqué alors que l’état d’urgence sanitaire n’a été déclaré que postérieurement à l’entrée en vigueur des nouveaux tarifs d’accès.

Dans ces conditions, l’Autorité estime que la crise sanitaire ne peut, à ce stade, au regard du manque de recul sur son impact réel, être prise en compte dans l’appréciation des demandes de Bouygues Telecom.

En conclusion, compte tenu de ce qui précède, la hausse des tarifs de cofinancement de SFR FTTH, contestée par Bouygues Telecom, n’apparaît pas justifiée.

6.3.2         Sur l’appréciation du niveau tarifaire actuel

L’Autorité relève au demeurant que les tarifs initiaux de cofinancement de SFR FTTH sont déjà, après ceux pratiqués par Orange, les plus élevés du marché sur des zones de déploiement comparables et que les autres opérateurs d’infrastructure n’ont pas annoncé d’évolution de leurs propres tarifs de cofinancement à la date de la présente décision. Aussi, et indépendamment de la question des économies d’échelles propres à chaque opérateur, en considérant que SFR FTTH se comporte comme un opérateur efficace, et à tout le moins comme un opérateur au moins aussi efficace que les autres opérateurs d’infrastructure, les tarifs initiaux de SFR FTTH devraient en toute logique déjà permettre une juste rémunération de ses investissements.

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Figure 1 : Tarifs de cofinancement pratiqués par les opérateurs d’infrastructure en Zones Moins Denses

Aucun élément recueilli dans le cadre de l’instruction ne permet par ailleurs de considérer que les tarifs initiaux de cofinancement de SFR FTTH feraient obstacle à une juste rémunération de ses investissements.

De plus, l’Autorité constate que dans des zones d’initiative publique, sur lesquelles les opérateurs n’avaient pas, lors de l’appel à manifestations d’intention d’investissement de 2011, manifesté leur intérêt pour déployer un réseau FttH sur fonds privés, notamment parce que ces zones sont plus coûteuses à déployer, les subventions publiques ont été de moins en moins sollicitées au fil des attributions de réseau d’initiative publique et certains opérateurs se sont même récemment vus attribuer lesdites zones quasiment sans subvention tout en pratiquant des tarifs similaires à ceux de la zone AMII116. Cette capacité d’opérateurs d’infrastructure à trouver une rentabilité en pratiquant des tarifs de zone AMII sur des zones plus coûteuses que la zone AMII dénote a priori que ces tarifs ne sont pas susceptibles de dégager une rentabilité insuffisante sur la zone AMII.

En outre, il apparaît que SFR, en appelant à un repartage de la zone AMII117 qui s’est traduit en 2018 par la cession à SFR de communes initialement prévues pour être déployées par Orange, avait anticipé une rentabilité suffisante de son activité d’opérateur d’infrastructure sur lesdites zones.

Il en ressort que les tarifs initiaux de SFR FTTH n’apparaissent pas a priori engendrer une rentabilité insuffisante de son activité d’opérateur d’infrastructure. Ainsi, si la hausse des tarifs n’apparaît pas justifiée, comme présenté précédemment, le maintien des tarifs de SFR FTTH à leur niveau initial n’apparaît pas non plus présenter des effets qui le rendraient inéquitable au regard de son impact  sur l’équilibre de l’activité d’opérateur d’infrastructure de SFR FTTH.

Dès lors, la demande de Bouygues Telecom tendant à ce que SFR FTTH renonce à la hausse de ses tarifs d’accès, apparaît justifiée et proportionnée.

En conclusion, compte tenu de ce qui précède, de l’article L. 34-8-3 du CPCE, des décisions réglementaires prises en son application, et des objectifs de régulation mentionnés à l’article L. 32-1 du CPCE, notamment de « développement de l’investissement de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques », de « promotion des investissements et de l'innovation dans les infrastructures améliorées et de nouvelle génération », d’« exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale », d’« aménagement et l’intérêt des territoires » et de « diversité de la concurrence dans les territoires », l’Autorité estime qu’il est justifié et proportionné que SFR FTTH propose un avenant au contrat d’accès signé par Bouygues Telecom, dédié au présent différend, par lequel il rétablit ses tarifs de cofinancement initiaux sur la zone SFMD, sans préjudice d’une éventuelle application dès 2020 du mécanisme d’indexation prévu au contrat d’accès.

Il apparaît raisonnable que SFR FTTH transmette à cette fin à Bouygues Telecom un avenant au contrat d’accès signé par Bouygues Telecom au sein de la zone SFMD dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision.

7          Sur la demande de Bouygues Telecom concernant le niveau du tarif de location mensuelle fixé par SFR FTTH

7.1        Rappel de la demande

La demande, concernant le tarif de location mensuelle fixé par SFR FTTH, formulée par Bouygues Telecom est la suivante :

« ByTel demande à l’Autorité des communications électroniques et des postes de :

[…] Dire que le tarif de location mensuelle à la ligne fixé par SFR FTTH à 16,40 € HT/mois/ligne dans le contrat conclu le 3 janvier 2020 entre ByTel et SFR FTTH est manifestement déraisonnable.En conséquence, enjoindre à SFR FTTH, de transmettre à ByTel un avenant au contrat conclu entre ByTel et SFR FTTH dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend à intervenir, modifiant son contrat d’accès conclu avec ByTel afin que le tarif de location mensuelle  à  la  ligne  FttH  soit  compris  entre   12,20 € HT/mois/ligne   et   un   maximum   de   13,20 € HT/mois/ligne au sein de la zone SFMD dans la ZMD AMII.

[…] Dire que le tarif de location mensuelle à la ligne devant être appliqué par SFR FTTH sera rétroactif à partir du 3 janvier 2020 pour toutes les lignes activées par ByTel au sein de la zone SFMD de la ZMD AMII. »118

7.2        Sur le fond

S’agissant des offres d’accès, la réglementation de l’Autorité sur les modalités de l’accès au réseau FttH et notamment la décision n° 2010-1312 impose, comme rappelé dans le cadre juridique exposé ci-avant, aux opérateurs d’infrastructure de proposer une offre de cofinancement, tant ab initio qu’a posteriori, ainsi qu’une offre de location à des conditions tarifaires raisonnables. Ces différents « niveaux d’engagement et d’investissement »119 doivent permettre « de monter dans l’échelle des investissements »120.

7.2.1         Sur l’argument relatif à la capacité de Bouygues Telecom de co-investir

Bouygues Telecom soutient que l’offre de location est le premier barreau de l’échelle des investissements121 qui « doit lui permettre de développer une base de clients FttH, qu’il pourra ensuite utiliser pour investir dans ledit réseau » et que « cette échelle des investissements […] n’est efficace qu’à la condition que les tarifs de gros d’accès soient raisonnables. »122

SFR FTTH estime de son côté que Bouygues Telecom a la capacité de co-investir123, au regard de son développement sur le marché du FttH et ses ambitions de cofinancement via le projet « Astérix » et que l’offre de location a été imposée pour répondre aux besoins des opérateurs qui n’ont pas la capacité d’investir, que c’est donc « par pur opportunisme que ByTel revendique une baisse du Tarif de location en se refusant à gravir les barreaux de l’échelle des investissements. »124

Il convient de rappeler qu’en vertu du cadre réglementaire rappelé supra, « il apparaît nécessaire qu[‘en dehors des zones très denses] l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers des modalités d’accès garantissant un accès pérenne dans des conditions non discriminatoires et permettant de monter dans l’échelle des investissements » 125; et que l’opérateur d’infrastructure offre, au niveau du point de mutualisation, un accès passif à la ligne, en location, conformément à l’article 8 de la décision n° 2010-1312. À ce titre, la fourniture d’une offre de location est une obligation incombant aux opérateurs d’infrastructure qui sont tenus de la proposer à tout opérateur commercial à des conditions raisonnables.

En conséquence, et sans qu’il ne soit besoin de se prononcer sur le positionnement actuel ou à venir de Bouygues Telecom vis-à-vis des offres d’accès mis à sa disposition par SFR FTTH, ce dernier doit lui proposer une offre de location, à des conditions techniques et tarifaires raisonnables, comme à tout autre potentiel opérateur commercial qui pourrait souhaiter y recourir.

7.2.2         Sur l’appréciation du caractère raisonnable du tarif de location de SFR FTTH

Pour trancher le présent différend, l’Autorité relève qu’il convient d’abord de déterminer si le tarif de location de SFR FTTH fixé à 16,40 €/mois/ligne, comme le prétend Bouygues Telecom, et le conteste SFR FTTH, est déraisonnable. Il convient ensuite, le cas échéant, de déterminer si la demande de Bouygues Telecom de fixer le tarif dans une  fourchette  comprise  entre  12,20 €/mois/ligne  et  13,20 €/mois/ligne est raisonnable, au regard des éléments recueillis dans le cadre de l’instruction.

a) Sur la capacité de Bouygues Telecom à fournir des offres de détail compétitives à partir du tarif de location de SFR FTTH

Bouygues Telecom fait valoir que le tarif de location de SFR FTTH affecte la compétitivité de ses offres de détail. SFR FTTH, à l’inverse, argue que son tarif de location n’est pas déraisonnable puisque Bouygues Telecom propose des offres rentables sur le marché de détail.

En particulier, Bouygues Telecom soutient que « le maintien par SFR FTTH d’un tarif de gros de location mensuelle à la ligne manifestement déraisonnable ne permet pas aux opérateurs commerciaux dont ByTel, […] de construire des offres de détail compétitives »126.

SFR FTTH soutient, quant à lui, que Bouygues Telecom ne démontre pas en quoi le tarif de location de SFR FTTH l’empêche de proposer des offres de détail compétitives et produit un parangonnage des offres de détail sur le marché national pour affirmer que celles de Bouygues Telecom sont « bien positionnées »127 et rentables, notamment au regard de ses résultats financiers et de sa part de marché128. Il ajoute également que « dès lors que les tarifs pratiqués pour les offres de détail sont péréqués et que le contenu des offres est identique selon les zones, la rentabilité des offres doit s’apprécier de manière globale, et non pas seulement sur la zone SFMD »129.

En réponse, Bouygues Telecom réfute la pertinence de cette analyse130 et fournit, dans le cadre de l’instruction, un certain nombre d’éléments chiffrés ainsi qu’un tableau visant à démontrer que les offres d’entrées de gamme du marché révèlent des marges négatives sur les coûts incrémentaux lorsque le tarif de location proposé par SFR FTTH est utilisé comme donnée d’entrée131. En particulier, il indique qu’« [a]vec un tarif de location de 16,40 € HT/ligne/mois, les Marges sont toujours négatives, qu’elles que soient les offres analysées. // A l’inverse, lorsque, comme le demande ByTel   à   SFR   FTTH,   le   tarif   de   location   est   compris   entre    12,20 € HT/client/mois    et   13,20 € HT/client/mois, la quasi-totalité des offres sélectionnées – selon les options envisagées – produisent une marge sur coûts incrémentaux positive. »132

À titre liminaire, l’Autorité relève que la mise en œuvre par un opérateur commercial d’un tarif de détail unique résulte d’une construction à partir des différents tarifs de gros proposés par les opérateurs d’infrastructures.

Or, l’Autorité estime que, si une offre de détail peut apparaître compétitive à l’échelle nationale, cela ne signifie pas pour autant que les tarifs de chacune des offres de gros des différents opérateurs d’infrastructure sur la base desquelles cette offre de détail est construite, sont eux-mêmes raisonnables. Ainsi, si un tarif de gros raisonnable permet à un opérateur commercial de fournir des offres compétitives sur le marché de détail, l’analyse du caractère raisonnable des tarifs de gros de SFR FttH ne saurait être réduite à une analyse de la compétitivité des offres de détail de Bouygues Télécom sur le marché national.

Comme rappelé dans le cadre juridique exposé supra, l’examen du caractère raisonnable du tarif de location appelle, dès lors que les tarifs du cofinancement sont fixés, à une appréciation de l’écart tarifaire entre les offres de cofinancement et de location.

Du reste, l’Autorité relève que Bouygues Telecom et SFR FTTH ont tous deux soutenu, lors de l’audience devant la formation RDPI, le principe d’une construction du tarif de location à partir des coûts de déploiement et d’exploitation du réseau et/ou des tarifs de cofinancement. SFR FTTH a notamment indiqué que la confrontation des tarifs obtenus avec les prix présents sur le marché de détail n’intervenait que dans un second temps, pour contrôler la cohérence du résultat.

b) Sur les autres conditions prévues dans l’offre d’accès

SFR FTTH soutient dans ses observations en défense133 que « [l]’Offre signée par ByTel lui permet de bénéficier de plusieurs clauses particulièrement avantageuses et dont cette dernière ne tient pas compte dans l’appréciation qu’elle porte sur ses conditions tarifaires »134. Il renvoie à l’appui de cette assertion aux clauses portant sur les objets suivants : allongement de la durée du droit d’usage concédé aux opérateurs commerciaux cofinanceurs, indexation des dépenses d’investissement et de fonctionnement, évolution du contrat plus protectrice avec notamment une limitation des cas de modification unilatérale des conditions tarifaires de l’accès, ainsi que l’application d’une courbe ex post (courbe qui détermine le niveau du tarif d’achat d’une tranche de cofinancement en fonction de la date d’achat) plus favorable pour les opérateurs commerciaux locataires afin de leur permettre de monter dans l’échelle des investissements.

S’agissant de ce dernier point, l’offre d’accès en vigueur de SFR FTTH, qui a été signée par Bouygues Telecom, permet effectivement le rachat de tranches de cofinancement a posteriori à des tarifs plus favorables pour les opérateurs commerciaux déjà locataires par rapport aux tarifs soumis aux opérateurs qui n’étaient pas déjà locataires135. SFR FTTH soutient qu’en tenant compte des économies qui seront réalisées sur l’achat de tranches de cofinancement, « l’offre de location est [en conséquence] [SDA]% moins chère que celle d’Orange en dépit d’un tarif facial de location à la ligne plus élevé pour un opérateur désireux de gravir l’échelle des investissements en migrant de la location vers le cofinancement. »136

Bouygues Telecom soutient pour sa part que les modalités visées par SFR FTTH et prévues dans le contrat d’accès « n’exon[èrent] [pas] SFR FTTH de son obligation de proposer un accès locatif à un tarif raisonnable. »137

D’une part, concernant les clauses portant sur l’allongement de la durée du droit d’usage concédé aux opérateurs commerciaux cofinanceurs, l’indexation des dépenses d’investissement et de fonctionnement et l’encadrement des évolutions du contrat avec notamment une limitation des cas de modification unilatérale des conditions tarifaires, l’Autorité note qu’elles n’ont pas d’influence sur l’écart tarifaire entre les offres de cofinancement et de location et donc, à tarifs de cofinancement donnés, sur le niveau tarifaire de la location.

D’autre part, concernant l’application d’une courbe ex post plus favorable pour les opérateurs commerciaux locataires, l’Autorité relève qu’elle ne permet pas de faciliter l’accès au premier barreau de l’échelle des investissements par le biais de l’offre de location, puisqu’elle ne bénéficie pas à un opérateur qui resterait locataire. Or, il ressort de ce qui précède que SFR FTTH est tenu de proposer une offre de location permettant de répondre aux besoins d’accès des opérateurs ayant recours à ce premier barreau de l’échelle des investissements.

En conséquence, l’Autorité estime que, même si certaines clauses proposées par SFR FTTH pourraient être avantageuses pour Bouygues Telecom, il convient d’apprécier le caractère raisonnable du tarif de l’offre de location indépendamment de l’existence d’autres conditions visant à inciter davantage les opérateurs commerciaux « locataires » à co-investir. Les modalités susmentionnées prévues dans l’offre d’accès de SFR FTTH ne peuvent donc être prises en compte dans l’appréciation du caractère raisonnable du tarif de l’offre de location imposé par la décision      n° 2010-1312. L'Autorité souligne par ailleurs qu'il demeure possible pour SFR FTTH de proposer sur le marché une offre d’accès distincte, prenant en compte l'existence de ce type de conditions, à des tarifs le cas échéant différents.

c) Sur les modèles tarifaires et les paramètres utilisés par les parties pour apprécier le caractère raisonnable des tarifs de SFR FTTH

Les parties s’accordent sur le fait qu’il doit exister un espace économique entre l’offre de cofinancement et l’offre de location afin notamment de préserver une incitation à l’investissement :

- Bouygues Telecom soutient ainsi que « le tarif de location à la ligne, correspondant au premier barreau de l’échelle des investissements : - Ne doit pas être tellement bas qu’il décourage le co-financement, comme le souligne à juste titre SFR FTTH. […] // - Mais il ne doit pas non plus être si élevé, qu’il permette à l’OI d’exploiter sa position de monopole pour fausser la concurrence »138.

- SFR FTTH fait valoir, quant à lui, que « le tarif de la location à la ligne doit permettre à l’OC de commercialiser des offres compétitives et, dans le même temps, ne doit pas nuire à l’attractivité du cofinancement, qui est l’objectif même que poursuit le cadre réglementaire applicable. »139

Comme exposé supra, l’Autorité partage l’approche soutenue par les parties sur la cohérence tarifaire entre l’offre de cofinancement et l’offre de location qui correspond aux principes de la régulation tarifaire de l’accès aux lignes FttH, et en particulier aux principes de montée dans l’échelle des investissements et d’incitation à l’investissement.

L’Autorité relève toutefois que Bouygues Telecom et SFR FTTH s’opposent sur la modélisation du tarif de location.

Bouygues Telecom, afin de démontrer le caractère déraisonnable du tarif de location de SFR FTTH, utilise le modèle de tarification de 2015140.

SFR FTTH, de son côté, invoque le caractère non contraignant du modèle de tarification de 2015 en se prévalant de son document d’accompagnement141. Néanmoins, il s’appuie tout de même sur ce modèle en retenant, pour les calculs fournis dans le cadre de l’instruction visant à justifier le caractère raisonnable de son tarif de location, deux méthodes distinctes : d’une part, une méthode alternative mentionnée dans le document d’accompagnement (cf. infra), qui nécessite un reparamétrage significatif de la méthode publiée en 2015 par l’Autorité pour être utilisable et, d’autre part, la méthode publiée du modèle de tarification de 2015 (cf. supra).

  •  La modélisation alternative exploitée par SFR FTTH ne permet pas d’examiner le caractère raisonnable du tarif de location et ses données d’entrée ne peuvent pas être vérifiées.

Afin de modéliser son tarif de location et de démontrer son caractère raisonnable, SFR FTTH a mandaté le cabinet Frontier Economics. Ce dernier s’est référé 142 dans ses travaux à une modélisation alternative évoquée dans le document d’accompagnement du modèle de tarification de 2015143 qui, plutôt que de déterminer le tarif de location à partir des tarifs de cofinancement, le détermine directement à partir des coûts de déploiement et d’exploitation.

Toute une partie de la démonstration mise en avant dans le cadre de l’instruction par SFR FTTH s’est ainsi appuyée sur l’utilisation de cette modélisation alternative. Frontier Economics indique à cet égard que « [l]e modèle de l’Arcep a été recalibré afin de calculer le tarif de location proposé par un opérateur d’immeuble en tenant compte du rendement nécessaire pour une offre d’accès de court- terme »144, et soutient que « [l]es tarifs de location mensuelle ainsi déterminés à partir de ce modèle pour un opérateur comme SFR FTTH pourraient se situer entre 16,6€ et 19,4€. »145

Bouygues Telecom soutient pour sa part que la modélisation alternative utilisée par le cabinet Frontier ne permet pas de vérifier la cohérence tarifaire entre le cofinancement et la location, critère qui permet d’apprécier le caractère raisonnable du tarif de location146. Comme précisé supra, SFR FTTH considère à l’inverse que la cohérence tarifaire de ses deux offres est assurée dès lors que le tarif de location ne remet pas en cause l’incitation au co-investissement et qu’il permet de commercialiser des offres de détail rentables147.

En premier lieu, la modélisation alternative utilisée par le cabinet Frontier Economics s’appuie sur un coût à la ligne (de [525-625] €, construit comme étant la moyenne pondérée de 25 % de lignes à [750-850] € et de 75 % de lignes à [450-550] €148), sans que ni le cabinet Frontier ni SFR FTTH n’aient justifié l’utilisation de ces valeurs (en particulier les valeurs de [450-550] € et [750-850] €). Interrogé dans le cadre de l’instruction sur la formation des coûts de déploiement, SFR FTTH n’a pas souhaité communiquer ces données, les estimant couvertes par le secret des affaires149. Ainsi, en l'état des éléments transmis dans le cadre des échanges entre les parties, l’Autorité n’a pas été mise  en mesure de pouvoir vérifier la pertinence des coûts renseignés par SFR FTTH, et notamment le coût à la ligne.

En second lieu, il doit être souligné, comme exposé supra, que le caractère raisonnable de l’offre de location doit s’apprécier au regard des tarifs de cofinancement (cf. partie 5 en particulier). Or l’alternative à la méthode du modèle de tarification de 2015 détermine le tarif de location directement à partir des coûts de déploiement et d’exploitation, sans considération pour les tarifs de cofinancement. Dans ces conditions, cette méthode alternative ne permet pas à elle seule de s’assurer de la cohérence tarifaire entre les différentes modalités d’accès que sont les offres de cofinancement et de location, et donc de la bonne mise en œuvre de l’échelle des investissements.

Dès lors, au regard de ce qui précède, l’Autorité considère, qu’en l’état, la modélisation alternative utilisée par SFR FTTH ne permet pas de s’assurer, dans le cadre du présent règlement de différend, du caractère raisonnable de son tarif de location.

  • À défaut de pouvoir s’appuyer sur la modélisation alternative mise en avant par SFR FTTH pour justifier son tarif, le modèle de tarification de 2015 mis en consultation publique en 2015 constitue une référence pertinente pour évaluer le caractère raisonnable du tarif de location de SFR FTTH

SFR FTTH, estime, dans ses premières observations en défense, que Bouygues Telecom dénature la portée du modèle de tarification de 2015 sur lequel il s’appuie aux fins de la démonstration du caractère déraisonnable des tarifs pratiqués. SFR FTTH soutient en effet que « le Modèle, d’une part, n’a aucune valeur contraignante et, d’autre part, ne conduit pas à calculer des tarifs incluant la marge raisonnable que les OI ou les OC fournissant des prestations de location à la ligne sont en droit de pratiquer »150. Il indique en ce sens que « ByTel réalise donc un amalgame entre rémunération du risque (WACC + prime de risque) et marge commerciale »151 et que « ByTel réalise un contresens économique majeur et réclame, en réalité, l’application d’un tarif orienté vers les coûts ».152

Bouygues Telecom, quant à lui, indique que « le Modèle conçu par l’Arcep intègre l’ensemble de ces paramètres et objectifs [à savoir : les objectifs de régulation mentionnés aux articles L. 32-1 du CPCE et dans les décisions du cadre réglementaire FttH]153 [et] permet d’illustrer le niveau des tarifs raisonnables et des écarts entre tarif de co-investissement et tarif locatif, permettant à la fois une juste rémunération de l’opérateur d’infrastructure, et un accès équitable et effectif de l’opérateur commercial à l’infrastructure, y compris sous forme locative ».

À titre liminaire, l’Autorité rappelle qu’en pratique, dans le premier module du modèle de tarification de 2015, relatif à la détermination du tarif récurrent de cofinancement, les coûts utilisés sont les coûts de déploiement et d’exploitation du réseau et les recettes sont la vente des offres de cofinancement au tarif fixé par l’opérateur d’infrastructure. La prime de risque de l’opérateur d’infrastructure utilisée dans le calcul pour majorer le taux de rémunération du capital154 vise à le rémunérer de l’ensemble des incertitudes relatives à la demande sur les marchés de gros et de  détail, aux coûts de déploiement, au progrès technique et au contexte macroéconomique pesant sur l’économie du projet.

Dans le second module, relatif à la détermination du tarif de location, les coûts utilisés sont les coûts d’achat de l’offre de cofinancement, les recettes sont la vente des offres de location ; la prime de location155, différente de la prime de risque de l’opérateur d’infrastructure utilisée pour le calcul du tarif récurrent de cofinancement, vise à rémunérer l’opérateur de gros fictif des incertitudes relatives au taux de remplissage des tranches de cofinancement achetées (le cofinancement s’achète par tranche de 5 % du réseau, alors que la location se vend à la ligne). Cette prime de location vient  donc se rajouter à la prime de risque de l’opérateur d’infrastructure.

Dans ce cas, comme illustré dans le schéma ci-dessous, le tarif de location comprend :

- le tarif récurrent du cofinancement (lui-même construit pour rémunérer l’opérateur d’infrastructure) ;

- l’amortissement du tarif non-récurrent du cofinancement, actualisé avec un coût moyen pondéré du capital et majoré d’une prime de risque de location.

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En premier lieu, même si ce modèle n’est pas prescriptif, comme le souligne SFR FTTH dans ses écritures, il demeure un outil de référence permettant de vérifier l’écart tarifaire entre les tarifs de location et les tarifs de cofinancement (lesquels constituent, comme il vient d’être indiqué, des données d’entrée pertinentes), susceptible de garantir l’effectivité de l’échelle des investissements et, in fine, le caractère raisonnable du tarif de location.

Surtout, il permet d’intégrer comme données d’entrée les tarifs de cofinancement de SFR FTTH qui sont connus et publiés dans ses offres d’accès (contrairement aux coûts de déploiement utilisés dans la méthode alternative employée par le cabinet Frontier Economics dont la valeur est donnée sans justification).

En deuxième lieu, l’Autorité considère que l’argument de SFR FTTH selon lequel le modèle de tarification de 2015 produit un tarif orienté vers les coûts ne saurait prospérer. En effet, l’utilisation du seul deuxième module de ce modèle (relatif à la location), en partant des tarifs de cofinancement fixés par SFR FTTH, inclut nécessairement la rémunération qu’il s’est lui-même attribué lors de la construction de ses tarifs de cofinancement. Comme exposé précédemment, à cette rémunération s’ajoute, pour la construction du tarif de location et pour assurer l’étagement entre les deux offres, la rémunération de l’opérateur « intermédiaire » qui a recours à l’offre de cofinancement pour proposer in fine une offre de location. Dans le modèle de tarification de 2015, tel qu’utilisé pour la construction des lignes directrices tarifaires adoptées par l’Autorité le 7 décembre 2015, cette rémunération de l’opérateur « intermédiaire » se traduit par l’utilisation d’une prime de risque de location égale à 4 %, venant majorer un coût moyen pondéré du capital par ailleurs fixé à 9,5 % les deux premières années puis à 8,7 % les années suivantes.

En dernier lieu, l’Autorité relève que, dans sa réponse au second questionnaire des rapporteurs, SFR FTTH s’est également appuyé lui-même sur la méthode du modèle de tarification de 2015156.

Dès lors, au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, l’Autorité considère pertinent de retenir la méthode du modèle de tarification de 2015 s’appuyant sur les tarifs de cofinancement pratiqués par SFR FTTH pour examiner la demande de Bouygues Telecom.

  • L’Autorité estime que l’analyse de la pertinence du jeu de paramètres fourni par les parties doit se concentrer sur ceux des paramètres qui jouent un rôle pivot dans l’écart tarifaire entre le cofinancement et la location

Pour rappel, les deux parties ont transmis dans le cadre de la procédure157 le modèle de tarification de 2015 pour justifier le caractère raisonnable ou non du tarif de location de SFR FTTH. Si elles utilisent bien dans ce cadre le même modèle, leurs différences d’approche résultent dans le choix de valeurs de paramètres différentes, ce qui les conduit pour  Bouygues  Telecom  à  des  tarifs  de  12,61 €/mois/ligne et pour SFR FTTH à des tarifs de [18-20] €/mois/ligne.

À titre liminaire, l’Autorité relève que :

- l’utilisation des valeurs des paramètres renseignées par SFR FTTH peut conduire à des résultats incohérents. En effet, en utilisant le modèle de tarification de 2015 pour modéliser les tarifs de cofinancement158 pratiqués par SFR FTTH à l’aide du jeu de paramètres retenu par le cabinet Frontier Economics 159 (dont une part est commune à la détermination des tarifs de location et de cofinancement), il est possible de déterminer la prime de risque de cofinancement160 pratiquée par SFR FTTH. Le résultat obtenu par cette modélisation en injectant les valeurs des paramètres de SFR FTTH est une prime de risque de cofinancement négative égale à -[1-2] %. Or, une prime de risque négative signifierait que les tarifs de cofinancement utilisés par SFR FTTH ne permettraient même  pas de couvrir les coûts générés par le déploiement et l’exploitation du réseau et seraient donc inférieurs aux tarifs qui résulteraient d’une obligation tarifaire d’orientation vers les coûts, plus stricte qu’une obligation de tarif raisonnable.

- comme rappelé ci-avant, le modèle de tarification 2015 permet d’intégrer comme données d’entrée les tarifs de cofinancement de SFR FTTH qui sont connus et publiés dans ses offres d’accès. Dès lors, le recours à ces tarifs de cofinancement comme données d’entrée apparait d’autant plus pertinent qu’ils sont, eux, connus des deux parties, qu’ils ont été librement fixés par SFR FTTH, que leurs niveaux avant la hausse pratiquée par SFR FTTH ne sont pas contestés par Bouygues Telecom dans le cadre du présent règlement de différend161 et que ces niveaux n’apparaissent pas éloignés des tarifs de cofinancement des autres opérateurs d’infrastructures. Bouygues Telecom indique  d’ailleurs  qu’« elle intègre les tarifs de co-financement fixés par SFR FTTH elle-même dans ses calculs »162.

Ensuite, concernant l'examen des valeurs retenues par les parties :

En premier lieu, dans son utilisation habituelle, cf. supra, le modèle détermine un tarif récurrent de cofinancement (1er module) et un tarif de location (2ndmodule). Comme rappelé ci-avant, les tarifs de cofinancement de SFR FTTH ont été utilisés comme données d’entrée du 2nd module. Ainsi, il n’apparait pas nécessaire à l’Autorité de se prononcer sur les valeurs retenues pour les paramètres qui n’influencent que les tarifs de cofinancement, puisque, ces tarifs étant déjà fixés, ces paramètres, à savoir le taux de cofinancement, les coûts de génie civil et les coûts de maintenance, n’auront aucune influence sur l’écart tarifaire entre le cofinancement et location. Dès lors, l’Autorité estime pertinent de concentrer son analyse sur les paramètres « marqueurs » de cet écart tarifaire aux fins de l’appréciation du caractère raisonnable du tarif de location. Il s’agit des paramètres suivants, ci- dessous analysés : le taux de pénétration, le rythme de déploiement de SFR FTTH, le coût moyen pondéré du capital et les coûts commerciaux et de structure.

En deuxième lieu, l’Autorité relève que SFR FTTH n’apporte pas d’éléments précis pour justifier les valeurs des paramètres retenues, alors qu’il y était invité dans le cadre de l’instruction163. Par ailleurs, le tarif non-récurrent de cofinancement à la ligne utilisé en entrée des deux modèles du cabinet Frontier Economics communiqués à l’Autorité par SFR FTTH dans le cadre de l’instruction pose question : il est renseigné à [525-625] € alors que le non-récurrent de cofinancement de SFR FTTH figurant dans le catalogue de ses tarifs d’accès s’élève à 510 € avant l’augmentation tarifaire du 1er février 2020, et à 520 € après cette augmentation.

Concernant le taux de pénétration

Bouygues Telecom indique que « compte tenu des perspectives à venir sur la fermeture technique de la boucle locale cuivre, ByTel estime que les taux de pénétration retenus par l’Arcep pour les années 2020 et suivantes, avec un taux maximum de 80% atteint en 2033 (et stable après), sont onservateurs, et qu’il est donc proportionné de les conserver en l’état pour réaliser l’ensemble des calculs dans la présente saisine. »164

SFR FTTH, quant à lui, indique que « la pénétration en SFMD est beaucoup plus faible que celle retenue par ByTel »165 et retient, par l’intermédiaire du cabinet Frontier Economics, « un taux inférieur de [SDA]% sur les premières années puis trajectoire cohérente avec DSL (2002-2013) pour atteindre un taux de 80% en fin de période. »166

Cependant, il doit être relevé que SFR FTTH a renseigné pour les premières années un taux de pénétration constaté167 supérieur à celui renseigné par le cabinet Frontier, mais également supérieur à celui retenu par Bouygues Telecom.

Ainsi, il convient de noter, d’une part, que le scénario de pénétration utilisé dans le modèle ayant servi à l’élaboration des lignes directrices tarifaires « Scénario DSL (2002-2013) » est, sur les premières années, plus protecteur pour SFR FTTH que le taux constaté de SFR FTTH. D’autre part, SFR FTTH ne justifie pas la construction de l’hypothèse de taux de pénétration retenue par Frontier Economics en particulier pour l’avenir. À ce sujet, l’Autorité renvoie aux éléments évoqués sur le taux de pénétration dans la section supra traitant de la demande de Bouygues Telecom concernant les hausses tarifaires.

Au regard de ces éléments, l’Arcep estime pertinent de retenir le taux de pénétration « Scénario DSL (2002-2013) » qui est le taux de pénétration de référence du modèle de tarification de 2015, et qui est celui retenu par Bouygues Telecom.

Concernant le rythme de déploiement de SFR FTTH

Bouygues Telecom indique « prendre en compte dans le modèle de l’Arcep le rythme de déploiement réel de SFR FTTH sur la ZMD AMII/SFMD, en prenant en compte qu’à la fin 2020 92 % des locaux programmés seront rendus raccordables »168, puis intègre les zones AMEL en se « bas[ant] sur les engagements pris par SFR FTTH dans les zones AMEL pour définir  le  rythme  de  déploiement  associé. »169

SFR FTTH indique quant à lui que « [p]remièrement, [la] chronique de déploiement [fournie par Bouygues Telecom] est inexacte. Elle ne tient par exemple pas compte du décalage des déploiement en PACA, dont les 56.000 prises à déployer en 2019 vont l’être en 2020 […] »170 et « [d]euxièmement, la crise sanitaire et ses conséquences économiques vont nécessairement influer sur les rythmes de déploiements dans des proportions que SFR FTTH espère minimes mais qui ne peuvent, à ce stade, être anticipées. »171

S’agissant de l’argument relatif au rythme de déploiement et à son affaiblissement suite à la crise sanitaire, l’Arcep note, d’une part, que SFR FTTH indique lui-même dans ses écritures qu’il est encore trop tôt pour « anticiper les conséquences de l’état d’urgence sanitaire et, plus généralement, de la pandémie qui sévit actuellement en France (et au plan mondial) »172 et, d’autre part, que les hypothèses de rythme de déploiement fournies par SFR FTTH par l’intermédiaire du cabinet Frontier Economics mènent, avec le modèle de tarification de 2015, toutes choses égales par ailleurs, à une diminution de l’écart tarifaire entre le cofinancement et la location et donc, avec des tarifs de cofinancement fixés, à une diminution du tarif de location. Par conséquent, les hypothèses du modèle de tarification de 2015 sont protectrices pour SFR FTTH, et l’Arcep estime qu’il est dès lors pertinent d’y recourir en l’espèce.

Concernant le coût moyen pondéré du capital

SFR FTTH indique par l’intermédiaire du cabinet Frontier que « [d]u fait de son statut d’opérateur alternatif, le coût du capital « standard » pour SFR FTTH devrait être supérieur au coût du capital « standard » d’Orange »173, et précise que « le WACC standard de SFR FTTH ne saurait correspondre au dernier WACC régulé adopté par l’ARCEP pour les activités fixes régulés d’Orange. Un WACC de 9% apparaît, selon les analyses de Frontier, approprié pour SFR FTTH. »174

Bouygues Telecom indique que « [c]ompte tenu de la décision n°2017-0830 de l’Arcep en date du 4 juillet 2017 fixant le taux de rémunération du capital employé pour la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des activités fixes et mobiles régulées pour les années 2018 à 2020, il convient de mettre à jour le coût du capital pris en compte dans le modèle » et précise ensuite avoir « mis à jour la ligne 57 de l’onglet « Hypothèses » (scénario intitulé « Régulation asymétrique 2014 » dans la catégorie « Taux de rémunération du capital ») en modifiant le taux de rémunération du capital à partir de la cellule H57 (5ème année) de 8,7% à 7,6%, soit pour cette année ainsi que pour les années suivantes »175.

L’Autorité note que le taux de rémunération du capital employé pour la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des activités fixes et mobiles régulées pour les années 2018 à 2020 a une valeur de 7,6 %176 et que ce taux de rémunération sera de 4,8 % à compter de l’année 2021177. S’il a pour objet direct, dans les décisions successives de l’Autorité qui le fixent, la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des opérateurs qualifiés de puissants dans le cadre des décisions d’analyses de marché, ce taux réglementaire de rémunération du capital est construit à l’aide d’une méthodologie se basant sur des données relatives à des opérateurs télécoms européens qui ne sont pas tous des opérateur historiques178 et qui exercent des activités diversifiées. Ensuite, contrairement à ce que prétend SFR FTTH, son champ d’application ne se limite pas aux activités fixes régulées d’Orange. À titre d’illustration, il a été utilisé par le passé par l’Autorité pour la fixation des tarifs de terminaison d’appel mobiles, applicables à des opérateurs tels que Bouygues Telecom, Euro Information Telecom, Free Mobile, Omea Telecom ou encore SFR. Son utilisation est également pertinente pour les activités de SFR FTTH, le risque spécifique au FttH étant par ailleurs déjà pris en compte via l’utilisation d’une prime de risque venant s’ajouter au taux de rémunération du capital.

Ainsi, le coût moyen pondéré du capital qui est modélisé, dans le modèle de tarification de 2015, tel qu’utilisé pour la construction des lignes directrices tarifaires, sur l’horizon économique du projet à 9,5 % les deux premières années et 8,7 % pour les années suivantes, apparait conservateur ; il n’apparaît en conséquence pas devoir être modifié à la hausse comme le soutient SFR FTTH.

Concernant les coûts commerciaux et les coûts de structure

SFR FTTH indique que « le Modèle n’inclut pas la prise en compte des coûts commerciaux et des coûts de structure supportés par l’OI. »179

Bouygues Telecom indique que « le tarif de cofinancement et de récurrent de cofinancement de SFR FTTH, les deux composant le tarif de location, sont d’ores et déjà supposés inclure des coûts commerciaux et de structure ajoutés par SFR FTTH. »180

L’Arcep relève que l’argument selon lequel le modèle n’inclurait pas la prise en compte des coûts commerciaux et de structure supportés par l’opérateur d’infrastructure n’a pas de conséquences dans le calcul de l’écart tarifaire entre le cofinancement et la location, puisque ces coûts ont vocation à être déjà compris dans le calcul des tarifs de cofinancement à partir duquel est construit le tarif de location. Par conséquent, ils ne peuvent pas par essence impacter la valeur de l’écart entre les tarifs de cofinancement et de location.

Dès lors, au regard de ce qui précède, il apparaît pertinent, dans le cadre du présent règlement de différend, de retenir, pour les valeurs des paramètres « marqueurs » de l’écart tarifaire, celles résultant de l’analyse ci-avant, à savoir les valeurs retenues dans le modèle de tarification de 2015 et un coût moyen pondéré du capital à 9,5 % pour les deux premières années et 8,7 % pour les années suivantes. Ce jeu de paramètres produit des résultats cohérents, et permet de répondre aux objectifs de régulation mentionnés à l’article L. 32-1 du CPCE visant à concilier promotion de l’investissement et exercice d’une concurrence effective et durable au bénéfice des utilisateurs finals.

d) L’utilisation de la méthode générique de l’Arcep révèle le caractère déraisonnable du tarif de location de SFR FTTH

Comme explicité supra, le paramètre financier dans le modèle de tarification de 2015 permettant d’apprécier l’espace économique existant entre les offres de cofinancement et de location est, la « prime de location »181. Ce paramètre revêt donc un caractère déterminant pour apprécier le caractère raisonnable du tarif de location de SFR FTTH.

D’après la méthode du modèle de tarification de 2015, le couple constitué des tarifs initiaux de cofinancement182 et de location de SFR FTTH correspond à l’application par SFR FTTH d’une prime de location de 11,8 %, venant s’appliquer en sus du coût moyen pondéré du capital du projet  (égal à  9,5 % les deux premières années, puis 8,7 % sur le reste de la durée du projet dans le jeu de paramètres du modèle de tarification de 2015 tel qu’utilisé pour la construction des lignes directrices tarifaires).

Comme développé ci-avant, l’écart entre le tarif de location et le tarif de cofinancement doit à la fois permettre d’inciter au cofinancement, mais également garantir une faculté d’entrée sur le marché pour des opérateurs qui achètent des offres de location, ainsi que permettre à un opérateur efficace souscrivant à ces modalités d’accès de proposer une offre compétitive sur le marché de détail.

Or, l’Autorité relève que :

‐ cette prime est près de trois fois supérieure à celle de 4 % retenue par l’Arcep pour initialiser le modèle proposé à titre de référence pour le marché ;

- avec un tel écart, SFR FTTH applique une prime de location largement plus élevée que les principaux opérateurs d’infrastructure comparables, qui pratiquent par ailleurs des tarifs de cofinancement comparables. En effet, il apparaît qu’en utilisant la méthode retenue par l’Arcep, les primes de location des autres opérateurs d’infrastructure comparables (cf. tableau infra) ne dépassent pas 4,3 %183 ;

- la situation constatée chez ces opérateurs montre qu’elle n’a pas empêché la venue d’opérateurs commerciaux cofinanceurs et par là-même l’incitation au cofinancement.

Dans ces conditions, l’Autorité estime que le besoin de garantir une cohérence tarifaire entre les deux types d’offres d’accès, à savoir la location et le cofinancement, ne justifie pas le recours à une prime de location à 11,8 %. Au contraire, l’Arcep estime qu’un tel niveau de prime conduit à un tarif de location déraisonnable, de nature à constituer une barrière à l’entrée sur le marché pour les opérateurs locataires et à remettre en cause l’exercice d’une concurrence effective et loyale entre les opérateurs, contraire aux objectifs visés par l’article L. 32-1 du CPCE.

Par conséquent, il ressort de l’ensemble de ce qui précède que le tarif de location de SFR FTTH à 16,40 € HT/mois/ligne est déraisonnable.

e) La demande de Bouygues Telecom de fixer un tarif de 13,20 €/mois/ligne apparaît justifiée et proportionnée

La demande de Bouygues Telecom porte sur une fourchette tarifaire dont les bornes inférieure et supérieure sont respectivement de 12,20 €/mois/ligne et 13,20 €/mois/ligne. Les primes de location associées à ces bornes, en utilisant le modèle de tarification de 2015 et son jeu de paramètres, ainsi que les tarifs initiaux de cofinancement ab initio de SFR FTTH, s’élèvent respectivement à 2,2 % et  4,6 %. La valeur de 4,6 % correspondant à la prime de location du haut de la fourchette tarifaire demandée par Bouygues Telecom est supérieure aux valeurs résultant de la comparaison avec les autres opérateurs d’infrastructure et la valeur telle qu’initialisée dans le modèle de tarification de 2015 dans le but de permettre un bon étagement des offres.

Ainsi, l’Autorité constate que la valeur de cette prime de risque de location paraît de nature à assurer un écart tarifaire suffisant entre le tarif de location et les tarifs de cofinancement.

Par ailleurs, l’Autorité relève que le tarif de location de 13,20 €/mois/ligne demandé par Bouygues Telecom correspond à la borne haute des tarifs de location de principaux opérateurs d’infrastructure comparables à SFR FTTH. De plus, alors que leurs tarifs de cofinancement sont similaires aux tarifs de cofinancement initiaux de SFR FTTH, l’Autorité relève que leurs tarifs de location ne semblent pas remettre en cause la venue des opérateurs cofinanceurs, et donc l’incitation au cofinancement.

Au vu de l’ensemble des éléments exposés ci-avant, et compte tenu des objectifs de régulation visés à l’article L. 32-1 du CPCE, et à l’exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, de l'investissement efficace dans les infrastructures, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques et la définition de conditions d'accès aux réseaux ouverts au public et d'interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et l'égalité des conditions de la concurrence, la demande de Bouygues Télécom de bénéficier d’un tarif de location qui, au regard des tarifs de cofinancement initiaux de SFR FTTH, ne dépasse pas la borne haute de 13,20 €/mois/ligne, apparaît justifiée et proportionnée puisque ce tarif :

- permet d’assurer la rémunération de l’investisseur ;

- préserve l’échelle des investissements ;

- ne crée pas de barrières artificielles à l’entrée d’opérateurs commerciaux sur le marché ;

- est cohérent avec les pratiques tarifaires des autres opérateurs d’infrastructure.

Dès lors, l’Autorité estime qu’il doit être fait droit à la demande de Bouygues Telecom tendant à ce que SFR FTTH fixe le tarif de location en zone SFMD à un niveau qui, au regard de ses tarifs initiaux de cofinancement, ne saurait dépasser 13,20 €/mois/ligne, sans préjudice d’une éventuelle application dès 2020 du mécanisme d’indexation prévu au contrat d’accès.

En conclusion, il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent, de l’application du cadre réglementaire et des objectifs visés à l’article L. 32-1 du CPCE, en particulier de « développement de l’investissement », d’« exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective  et  loyale », d’« aménagement et l’intérêt des territoires » et de « diversité de la concurrence dans les territoires », que la demande de Bouygues Telecom tendant à ce que SFR FTTH fixe le tarif de location à un maximum de 13,20 € HT/mois/ligne, est justifiée et proportionnée.

Il apparaît raisonnable que SFR FTTH transmette à cette fin à Bouygues Telecom un avenant au contrat d’accès signé par Bouygues Telecom au sein de la zone SFMD dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision.

8          Sur la date d’effet des demandes de Bouygues Telecom

Bouygues Telecom demande à l’Autorité l’application, à compter du 1er février 2020, de l’annulation de la hausse des tarifs d’accès de SFR FTTH et l’application, à compter du 3 janvier 2020, du tarif de location qu’il sollicite.

En l’espèce, l’Autorité a fait droit à la demande d’annulation de la hausse des tarifs de cofinancement et a donc apprécié la demande de baisse du tarif de location au regard du tarif de cofinancement initial.

Ainsi, dans les circonstances de l’espèce et pour les besoins du présent règlement de différend, il y a lieu de traiter, de manière conjointe et cohérente, la demande de rétroactivité pour l’annulation de la hausse tarifaire et pour la baisse du tarif de location, au risque de ne plus refléter, sur une période déterminée, l’écart tarifaire entre le tarif de location et le tarif de cofinancement, sous-jacent au tarif de location raisonnable de SFR FTTH.

L’Autorité relève que Bouygues Telecom demande, d’une part, une application du tarif de location à une date très proche de celle de la saisine de l’Autorité du présent différend et, d’autre part, une application de l’annulation de la hausse à la date d’entrée en vigueur de cette hausse tarifaire, qui  est donc postérieure à la saisine de l’Autorité. De plus, la modification de la grille tarifaire de l’offre d’accès de SFR FTTH en dehors des zones très denses ne devrait pas générer de complexités de mise en œuvre telles que l’acceptation de la demande de rétroactivité revêtirait un caractère disproportionné.

L’Autorité relève en outre que SFR FTTH n’apporte pas d’élément démontrant en quoi la demande de rétroactivité serait inéquitable, à l’exception du renvoi à la décision de règlement de différend opposant les sociétés Free Infrastructure contre France Telecom185, dont il n’indique pas dans quelle mesure la solution retenue dans cette décision trouverait à s’appliquer dans le présent différend. À cet égard, l’Autorité estime, à l’instar de Bouygues Telecom, que la solution consacrée dans le règlement de différend Free Infrastructure contre France Telecom, commandée par les enjeux liés à l’amorce des investissements dans la fibre, ne saurait être étendue au présent différend, plus de 10 ans après le début de déploiement des réseaux en fibre optique.

Dès lors que la demande de rétroactivité est recevable et que la demande de modification du tarif de location, d’une part, et celle d’annulation de la hausse, d’autre part, sont fondées et raisonnables, et que SFR FTTH était averti de l'opposition de Bouygues Telecom au tarif de location pratiqué et de l'éventualité qu'une décision de l'Arcep, saisie du règlement de différend, le modifie, il ne serait pas équitable que Bouygues Telecom s’acquitte d'un montant supérieur au tarif fixé dans la présente décision à compter du 3 janvier 2020. Le maintien d’un tarif de location déraisonnable sur la période litigieuse, soit du 3 janvier 2020 à la date d’adoption de la présente décision, ne permettrait pas à Bouygues Telecom d’avoir accès à l’offre de location de SFR FTTH dans des conditions de concurrence effectives et pérennes.

Par conséquent, il ressort de l’ensemble des développements qui précèdent que les demandes de Bouygues Telecom tendant à une annulation de la hausse des tarifs d’accès au 1er février 2020 et à une application rétroactive du tarif de location au 3 janvier 2020, présentent un caractère équitable et proportionné, et doivent, par suite, être acceptées.

Décide :

Article 1.   La société SFR FTTH doit proposer, dans un délai d’un mois à compter de la notification   de la présente décision, un avenant au contrat d’accès aux lignes FttH de SFR FTTH en dehors des zones très denses signé avec Bouygues Telecom par lequel :

- elle rétablit les tarifs de cofinancement en vigueur avant le 1er février 2020 à savoir :

(i) le tarif du récurrent de cofinancement dans un intervalle de 5,32 à 4,83 euros par mois par ligne activée, dégressif en fonction du taux de cofinancement, et (ii) le tarif du non-récurrent de cofinancement de 510 € par ligne, sans préjudice d’une éventuelle application dès 2020 du mécanisme d’indexation prévu au contrat d’accès ;

- le tarif de location fixé n’excède pas 13,20 € HT par mois par ligne, sans préjudice d’une éventuelle application dès 2020 du mécanisme d’indexation prévu au contrat d’accès.

Article 2. SFR FTTH appliquera la grille tarifaire ainsi modifiée, à compter du 1er février 2020 s’agissant des tarifs de cofinancement mentionnés à l’article 1 de la présente décision, et à compter du 3 janvier 2020 s’agissant du tarif de location mentionné au même article.

Article 3. La directrice des affaires juridiques de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse est chargée de notifier la présente décision aux sociétés Bouygues Telecom et SFR FTTH. Elle sera rendue  publique sous réserve des secrets protégés par la loi.

NOTES :

1 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 53

2 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 59

3 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 61

4 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 98

5 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 9.

6 Décision n° 2010-1312, page 32

7 https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/17-1293.pdf

8 Arrêté du 26 juillet 2018 portant acceptation de la proposition d’engagements de la société Orange au titre de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques (https://www.arcep.fr/fileadmin/cru- 1539874638/reprise/textes/arretes/2018/arr-26_juillet_2018_L-33-13-Orange.pdf) et Arrêté du 26 juillet 2018 portant acceptation d’engagements pris par la société SFR au titre de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques (https://www.arcep.fr/fileadmin/cru-1539874638/reprise/textes/arretes/2018/arr_26_juillet_2018_L-33-13- SFR.pdf)

9 Avis n° 2018-0364 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 12 juin 2018 rendu à la demande du ministre chargé des communications électroniques portant sur la proposition d’engagements d’Orange au titre de l’article L. 33-13 (https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/18-0364.pdf) et Avis n° 2018-0365 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 12 juin 2018 rendu à la demande du ministre chargé des communications électroniques portant sur la proposition d’engagements de SFR au titre de l’article L. 33-13 (https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/18-0365.pdf)

10 Avis n° 2018-0365 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 12 juin 2018 rendu à la demande du ministre chargé des communications électroniques portant sur la proposition d’engagements de  SFR au titre de l’article L. 33-13, page 4

11 Arrêté du 20 mai 2019 portant acceptation d'engagements pris par la société SFR sur les départements des Alpes-de- Haute-Provence, des Hautes-Alpes et des Bouches-du-Rhône au titre de l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques ; Arrêté du 10 octobre 2019 portant acceptation d'engagements pris par la société SFR sur le département d'Eure-et-Loir au titre de l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques ; Arrêté du 19 décembre 2019 portant acceptation d'engagements pris par SFR sur le département de la Nièvre au titre de l'article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques

12 Réponses de SFR FTTH, au premier questionnaire des rapporteurs, Q.9

13 Bouygues Telecom vise dans sa saisine le  contrat entre  SFR  FTTH  et Bouygues Telecom pour l’accès au réseau  de      SFR FTTH au sein de la « ZMD AMII/SFMD » (point 5, page 5 notamment). Dans ses observations en défense, SFR FTTH indique que le contrat couvre également les communes remportées par SFR FTTH dans le cadre des appels à manifestation d’engagements locaux (« AMEL ») (premières observations en défense de SFR FTTH, page 7). Bouygues Telecom indique dans sa réplique que « [l]es conclusions [sur ses demandes] restent les mêmes si l’on tient compte, à la demande de SFR FTTH, des déploiements modifiés pour tenir compte de l’inclusion des zones AMEL » (point 416, page 76 des observations en réplique de Bouygues Telecom ; voir également les réponses de Bouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Q.19).

14 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 38 à 39 ; Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 33 à 35

15 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 39-40 ; Observations en défense n°2 SFR FTTH, page 36

16 Observations en réplique de Bouygues Telecom, pages 19 à 21

17 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 21

18 L’Autorité relève néanmoins l’identité d’objet entre l’offre d’accès discutée avec SFR et le contrat sur lequel porte le présent règlement de différend, ainsi que l’identité des demandes présentées par Bouygues Telecom auprès de SFR puis de SFR FTTH. Elle relève par ailleurs que SFR FTTH appartient au même groupe de sociétés que SFR, ces deux sociétés constituant des filiales du groupe Altice. En effet, le capital de SFR FTTH est détenu à majorité par le groupe Altice et a été créé à la suite d’un apport par la société SFR de l’activité de déploiement de réseaux FTTH en ZMD qu’il exerçait jusqu’alors.

19 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 35-36

20 La société SFR FTTH était à cette date constituée. SFR FTTH indique en effet, en page 9 de ses premières observations en défense, que « SFR FTTH est une société constituée le 18 décembre 2018 ». SFR FTTH précise, en réponse au premier questionnaire des rapporteurs (question n°8) que « L’opération de réorganisation (qui n’est pas purement interne) a pris effet le 1er mars 2019. » Lionel Recorbet, représentant de la société SFR FTTH, faisait d’ailleurs partie des participants de la réunion en date du 25 avril 2019 (pièce n°8 de la saisine de Bouygues Telecom). De plus, il est même signataire, en tant que représentant de la société SFR FTTH, d’un courrier adressé à Bouygues Telecom à cette date.

21 Compte rendu qui reprend les demandes portées par Bouygues Telecom auprès de SFR dans un courrier de réserves en date du 21 décembre 2018, SFR ayant précisé que « deux nouvelles offres de référence ont été publiées fin mars » et que « par rapport aux offres préexistantes » peu de changements y avaient été apportés en « dehors de l’intégration des raccordements longs.

22 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 8

23 Réponses au premier questionnaire des rapporteurs, Q.1

24 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 7

25 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 9 26 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 10 27 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 11 28 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 11

29 Réponse deBouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Q.1, annexe 5

30 Réponse de Bouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Q.1, annexe 4

31 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 13 ; Premières observations en défense de SFR FTTH, page 28

32 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 12

33 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 15

34 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 14, courrier ayant pour objet la « Contestation des factures de redevance mensuelle de maintenance du CCF et des lignes FttH actives n°SF19100013, SF19110003 et SF19120010 »,

35 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 37 et38 ; deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 31 à 33

36 Réponse de Bouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Q.1), annexe 4

37 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 15

38 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 14

39 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 12

40 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 11

41 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 15 et 16

42 Déclarations du Président de l’Autorité lors d’une audition devant la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat le 22 avril 2020 (pièce n°17 annexée aux deuxièmes observations en défense de SFR FTTH) : « Notre objectif est de débloquer les investissements et les innovations au plus vite après la fin du confinement, monsieur Fouché. Tout dépendra aussi de la réactivité du tissu des sous-traitants. Vous avez raison, monsieur Jacquin, nous pouvons demander des efforts aux opérateurs ; certains y sont prêts, et les ont anticipés. Tous n'ont pas recouru au chômage partiel de la même manière » ;

Déclarations du Président de l’Autorité dans le cadre de la conférence en ligne Territoires connectés du 10 avril 2020 dernier (pièce n°20 annexée aux deuxièmes observations en défense de SFR FTTH) : « Alors ce que je voudrais dire c'est que nous sommes conscients de la question de la tarification de la fibre qui est un sujet très sensible pour tout le monde. Il y a aujourd'hui dans les zones privées un travail en cours de I’ARCEP puisque ça ne vous aura pas échappé qu'il y a un des grands opérateurs qui déploie la fibre en zone privée qui a des pratiques tarifaires qui posent question. Je voudrais dire que I' ARCEP y travaille. L'ARCEP ne laissera pas de passagers clandestins du système, ne laissera pas un acteur qui profiterait de la situation pour pratiquer des prix plus élevés en ayant instauré un monopole privé. Comptez bien sur I'ARCEP pour remettre les points sur les « i » sur ce sujet. »

43 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 17 à 25

44 Observations complémentaires de Bouygues Telecom, pages 5 à 12

45 Observations complémentaires de Bouygues Telecom, pages 12 à 16

46 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH page 14 : « SFR FTTH souligne enfin que, au-delà même de cette exigence d’impartialité, le respect du principe d’indépendance posé par l’article 6§1 précité est également discutable en l’espèce en raison du cumul par le Collège de l’ARCEP des fonctions réglementaire, de sanction et de règlement des différends ».

47 Voir notamment décision n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012, Société Groupe Canal Plus et autre, cons. 16 ; CE, 30 juillet 2003, Banque d’escompte et Wormser Frères réunis, n° 238169, au Recueil p. 351 ; CE, 26 juillet 2007, Sté Global Equities, n° 293624 ; voir également Cour d’appel de Paris, 30 janvier 2007, SFR c/ AFONE, 2006/07964 (sur le cumul des fonctions de sanction et de règlement de différend) et Cour d’appel de Paris, 28 juillet 2015, Orange c/ Free, 2015/17204 (sur le cumul des fonctions réglementaire et de règlement de différend)

48 Voir notamment décision n° 2011-200 QPC du 2 décembre 2011, Banque Populaire Côte d’Azur ; Conseil d’État, 26 mars 2012, Société Pages Jaunes Groupe, n° 353193 ; Conseil d’État, avis n° TP/AG-388430 donné le 12 février 2014 sur le projet d’ordonnance relatif à l’économie numérique

49 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pièce 33

50 L’article L. 32-4 du CPCE prévoit notamment que « Le ministre chargé des communications électroniques et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peuvent, de manière proportionnée aux besoins liés à l'accomplissement de leurs missions, et sur la base d'une décision motivée :

1° Recueillir auprès des personnes physiques ou morales exploitant des réseaux de communications électroniques ou fournissant des services de communications électroniques les informations ou documents nécessaires pour s'assurer du respect par ces personnes des principes définis aux articles L. 32-1 et L. 32-3, ainsi que des obligations qui leur sont imposées par le présent code ou par les textes pris pour son application ; […] »

51 Avis de l’Autorité de la concurrence n° 10-A-18 du 27 septembre 2010 relatif à un projet de décision de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes portant sur le déploiement de la fibre optique en dehors des zones très denses, page 15

52 Décision n° 2010-1312, page 32

53 Décision n° 2010-1312, page 33

54 https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/modele_PRDM-PTO.xlsx ; https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/doc-model-tarif-acces-ftth-oct2015.pdf

55 https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/lignes-dir-ARCEP-tarification-RIP-dec2015.pdf

56 Le modèle est un modèle de flux de trésorerie fondé sur une confrontation pluriannuelle de l’ensemble des coûts et des revenus supportés par un opérateur agissant sur le marché de gros. La modélisation repose donc sur une vision prospective de ces coûts et revenus, déterminés à partir d’hypothèses sur des séries chronologiques prévisionnelles relatives aux paramètres financiers et au comportement des acteurs sur les marchés de gros et de détail. Le modèle vise à déterminer, par l’actualisation des flux financiers sur une longue période depuis le lancement du projet jusqu’à un horizon temporel de référence, les niveaux tarifaires assurant la rentabilité à cet opérateur de gros étudié. Concernant l’actualisation des flux financiers, le document d’accompagnement du modèle de tarification de 2015 précise qu’« [e]n pratique, pour équilibrer les flux financiers du projet, le modèle de l’Arcep obtient une valeur actuelle nette (VAN) nulle sur l’ensemble de la période considérée en garantissant un taux de rentabilité interne (TRI) cible à l’opérateur d’immeuble. » (page 15) Afin de déterminer le taux d’actualisation nécessaire au calcul de la valeur actuelle nette des flux de trésorerie sur l’horizon temporel du projet, le modèle utilise les paramètres relatifs au coût moyen pondéré du capital, à la prime de risque du projet, et au taux d’inflation (page 29 du document d’accompagnement).

57 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 10

58 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 11

59 Saisine de Bouygues Telecom, page 79

60 Décision n° 2018-0569-RDPI de  l’Autorité  de régulation  des communications électroniques et  des postes en date  du   17 mai 2018 se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant la société Free et la société Orange

61 CA Paris, pôle 5 - ch. 7, 26 sept. 2019, n° 18/15781

62 Décision n° 2009-1106, page 28

63 Décision n° 2010-1312, page 30

64 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 8

65 Saisine de Bouygues Telecom, page 7

66 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 75

67 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 76

68 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 16

69 Réponse de SFR FTTH au deuxième questionnaire des rapporteurs, pièce n° 44

70 En considérant comme jeu de paramètres initial celui du modèle de tarification de 2015, tel qu’utilisé pour la construction des lignes directrices tarifaires adoptées par l’Autorité le 7 décembre 2015

71 En utilisation du modèle de tarification de 2015

72 Saisine de Bouygues Telecom, page 58

73 Saisine de Bouygues Telecom, page 58

74 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 72 75 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 74 76 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 71 77 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 71

78 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 98 à 100

79 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 100

80 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 23

81 Communiqué de presse d’iliad en date du 28 février 2020 : https://www.iliad.fr/presse/2020/CP_280220.pdf

82 Réponse de SFR FTTH au premier questionnaire des rapporteurs, Q. 11

83 https://www.arcep.fr/cartes-et-donnees/nos-publications-chiffrees/observatoire-des-abonnements-et-deploiements-du- haut-et-tres-haut-debit/observatoire-haut-et-tres-haut-debit-abonnements-et-deploiements-t1-2020.html

84 https://www.arcep.fr/cartes-et-donnees/nos-publications-chiffrees/observatoire-des-abonnements-et-deploiements-du- haut-et-tres-haut-debit/observatoire-haut-et-tres-haut-debit-abonnements-et-deploiements-t1-2020.html

85 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 66 à 70

86 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 64

87 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 66

88 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 91 à 97

89 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 91 et 92

90 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 92

91 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 96 et 97

92 Ainsi, pour exemple, dans le catalogue de services de l’appel à manifestation d’engagement local d’Eure-et-Loir qui a ensuite donné lieu à un engagement de SFR en application de l’article L. 33-13 du CPCE auprès du Ministre, le Syndicat Mixte Ouvert Eure-et-Loir Numérique, porteur du projet, exigeait des opérateurs d’infrastructures intéressés pour déployer sur fonds propres qu’ils présentent « un plan d’entreprise crédible » : https://www.numerique28.fr/wp- content/uploads/2018/04/180423_consultation_AMEL_Eure-et-Loir.pdf

93 Dans sa lettre d’engagement relative à l’appel à Manifestation d’Engagements Locaux (AMEL) du programme d’aménagement numérique 2018-2022 sur le département de la Nièvre (https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/annexes- 19-1617.pdf), SFR indique : « Altice France / SFR s’engage à ce que le nombre de raccordements longs ne dépasse pas 8% des raccordements à l’échelle du projet et 20% à l’échelle d’une commune ».

94 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 96

95 L’Autorité a ainsi indiqué dans son avis, s’agissant des conditions tarifaires associées à l’engagement : « En l’espèce, SFR renvoie, à titre indicatif et en annexe de son courrier d’engagement, à son offre de référence en dehors des zones très  denses en vigueur. SFR proposera dans la zone AMEL des départements concernés des conditions d’accès identiques à celles qu’il propose en zone AMII. Les principales conditions tarifaires de cette offre sont rappelées en annexe 2 du présent avis. SFR introduit, sur le segment qui relie le PBO au local de l’utilisateur final et est construit lors de la souscription d’une offre commerciale par un client, une catégorie de lignes dénommées « raccordements longs », examinée dans la section qui suit (cf. point 3.1.2). En dehors de ces « raccordements longs », l’offre d’accès proposée par SFR permettra ainsi aux opérateurs commerciaux de retrouver dans cette zone AMEL les mêmes conditions d’accès que celles qu’ils connaissent ailleurs sur le territoire, tant en zone AMII que sur les réseaux d’initiative publique. » (Soulignements ajoutés).

96 Avis n° 2019-0635 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 23 avril 2019 rendu à la demande du ministre chargé des communications électroniques portant sur la proposition d’engagements de  SFR dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Hautes-Alpes et des Bouches-du-Rhône au titre de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques (page 5) ; Avis n° 2019-0861 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 4 juillet 2019 rendu à la demande du ministre chargé des communications électroniques portant sur la proposition d’engagements de SFR sur le département de l’Eure-et-Loir au titre de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques (page 5) ; Avis n° 2019-1617 de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en date du 7 novembre 2019 rendu à la demande du ministre chargé des communications électroniques portant sur la proposition d’engagements de  SFR sur le département de la Nièvre au titre de l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques (page 5)

97 Réponses de SFR FTTH au premier questionnaire des rapporteurs, Q.10, notamment : « Les dates des appels à cofinancement des déploiements en zone AMEL et la version de l’offre alors en vigueur sont les suivantes : / Pour l’AMEL Eure-et-Loir : Le 17 octobre 2019. La version V1.1 de l’offre SFMD était alors applicable ; Pour l’AMEL PACA : Le 21 octobre 2019. La version V1.1 de l’offre SFMD était alors applicable […] »

98 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 72

99 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 73

100 Saisine de Bouygues Telecom, point 287, page 60

101 Saisine de Bouygues Telecom, point 290, page 60

102 Observations en défense de Bouygues Telecom, pages 78 à 80

103 Observations en défense de Bouygues Telecom, point 435, page 78

104 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 105 et 106

105 Réponses de SFR FTTH au premier questionnaire des rapporteurs, Q.31

106 Décision n°2015-0776, 4.2.1, page 43

107 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 84

108 Observations en réplique de Bouygues Telecom, point 484, page 85

109 Observations en réplique de Bouygues Telecom, point 485, page 85

110 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 76

111 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 76

112 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 15, contrat d’accès aux lignes FttH de SFR FTTH en dehors des zones très denses, 15.4

113 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 86

114 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 85

115 L’horizon temporel retenu dans le modèle de tarification de 2015 est de 25 ans.

116 C’est le cas de la Délégation de Service Public attribuée à Altitude Infrastructure THD pour la construction, l’exploitation, la maintenance et la commercialisation du réseau THD de l’Yonne qui bénéficie d’« un financement privé complet du réseau (aucune subvention publique) »: Communiqué de presse d’Altitude infrastructure en date du 11 mars 2020 : https://www.altitudeinfra.fr/wp-content/uploads/2020/07/20200311-ClosingYconikVF.pdf

C’est également le cas de la Délégation de Service Public du Gard attribué à SFR collectivité, « pour un montant global d’investissement de premier établissement de 210 M€. Le montant de la subvention publique initialement prévu de 44 M€ a été ramené à 7 M€. Celle-ci ne porte pas sur l’Investissement de premier établissement (IPE), elle n’est destinée qu’à « compenser » le surcoût des raccordements longs » : https://www.avicca.org/actualite/attribution-de-la-dsp-du-gard

117 M. Patrick Drahi, président directeur général d’Altice, lors de son audition devant la Commission des affaires économique, le 27 mai 2015 (http://www.assemblee-nationale.fr/14/cr-eco/14-15/c1415060.asp) : « Je rebondis sur la dette. SFR-Numericable a dégagé, dès le premier trimestre, des centaines de millions d’économies, qui deviendront d’ici à quelques mois des milliards que nous allons réinvestir – nous ne les utiliserons pas pour verser des dividendes. […] Et quand vous rajoutez les 1,5 milliard de dividendes versés chaque année aux actionnaires, vous voyez que mes capacités financières en France sont voisines, voire supérieures à Orange. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi je devrais n’en faire que 20 % – ou 10 % comme je vous l’ai expliqué. Je veux donc en faire 50 %. Cela passe-t-il par une renégociation des accords ? Je ne renégocie rien du tout, je dis simplement que je veux en faire plus. Les retards sont liés au gel des investissements sous la période précédente ; mais aujourd’hui, la cadence de modernisation de notre réseau et d’extension en fibre optique sur nos zones non couvertes est la plus élevée de France ».

M. Michel Combes, alors directeur général d’Altice NV et président-directeur général du groupe SFR, lors de son audition devant la Commission des affaires économique, le 29 juin 2016 (http://www.assemblee-nationale.fr/14/cr-eco/15- 16/c1516092.asp), avait également précisé : « [d]epuis des mois, j’appelle donc à un rééquilibrage dans les zones AMII entre Orange et SFR qui permette aux deux de contribuer à parité sur ces zones ».

118 Saisine de Bouygues Telecom, page 79

119 Décision n° 2010-1312, page 32

120 Décision n° 2010-1312, page 32

121 Saisine de Bouygues Telecom, point 86, page 19,

122 Saisine de Bouygues Telecom, point 88, page 19

123 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 50 et51 et pages 11 à 23 ; deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 48 à 51

124 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 49

125 Décision n°2010-1312, p. 30

126 Saisine de Bouygues Telecom, point 93, pages 19 et 20, point 93

127 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 26

128 Notamment, deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 62

129 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 27

130 Observations en réplique de Bouygues Telecom, pages 42 et 43

131 Réponses de Bouygues Telecom au premier questionnaire, question n°16 : « [SDA] ».

132 Réponse de Bouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Q.16

133 Premières observations en défense de SFR FTTH, pages 62 à 65

134 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 62

135 Saisine de Bouygues Telecom, pièce 15, Annexe 2 du contrat d’accès aux lignes FttH de SFR FTTH en dehors des zones très denses – prix et pénalités

136 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 64

137 Observations en réplique de Bouygues Telecom, point 305, page 60

138 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 28

139 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 43

140 Saisine de Bouygues Telecom, point 367, page 73 de sa saisine

141 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 52

142 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, Annexe 31

143 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, pages 30 et 31: « Une autre méthode de modélisation possible consisterait à considérer que l’offre de location à la ligne est proposée directement par l’opérateur d’immeuble, sans passer par un opérateur générique. Pour ce faire, il suffirait de considérer que l’opérateur d’immeuble supporte l’intégralité des coûts de déploiement pour construire cette offre et l’utilise pour desservir la totalité des clients du réseau. »

144 Deuxièmes observations de SFR FTTH, Annexe 31, page 43

145 Deuxièmes observations de SFR FTTH, Annexe 31, page 6

146 Observations complémentaires de Bouygues Telecom, pages 22 à 25

147 Réponse de SFR FTTH au deuxième questionnaire des rapporteurs, Q.4

148 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, Annexe 31, page 45

149 Réponse de SFR FTTH au deuxième questionnaire des rapporteurs, Q. 17

150 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 51 151 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 53 152 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 53

153 Observations en réplique de Bouygues Telecom, points 118 et 119, page 30

154 Cette prime de risque est bien visée par le cadre réglementaire national. Les articles 3 et 9 respectivement de la décision n° 2009-1106 et de la décision n° 2010-1312 prévoient que « Le taux de rémunération du capital utilisé pour la détermination de ces conditions tarifaires tient compte du risque encouru et confère une prime à l’opérateur d’immeuble ». Par ailleurs, en raisonnant par analogie avec la régulation asymétrique, on peut constater que dans le cadre du déploiement des réseaux de nouvelle génération, le code européen prévoit à son article 74 que : « Dans les cas où les autorités de régulation nationales jugent les obligations en matière de contrôle des prix appropriées, elles permettent à l’entreprise de recevoir une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu de tout risque spécifiquement lié à un nouveau projet d’investissement particulier dans les réseaux. »

155 En page 22, la notice du modèle Arcep précise que « [p]our rendre compte du risque encouru par l’opérateur d’immeuble qui intervient dans une situation d’incertitude, il est souhaitable que le coût moyen pondéré du capital soit augmenté d’une prime de risque sur l’ensemble de la durée d’exploitation du projet afin de garantir le TRI du projet. Conformément aux principes exposés plus haut, cette prime de risque liée au projet est différenciée en fonction du segment de réseau ou de l’offre considérés. Ainsi, on distingue dans la modélisation trois primes de risque liées au projet :

- une prime de risque associée aux segments compris entre le PRDM et le PBO pour le calcul du récurrent de cofinancement et du tarif des droits d’usage de l’offre de raccordement distant ;

- une prime de risque associée au segment PM-PBO pour le calcul du tarif de l’offre de location ; […] »

156 Réponses de SFR FTTH au deuxième questionnaire des rapporteurs, annexe n° 44, page 5 : « [c]ela est aussi cohérent avec les résultats issus de la version initiale du modèle de l’Arcep. Avec des hypothèses considérées raisonnables et représentatives de la situation de SFR FTTH, les tarifs de cofinancement et de location qui ressortent du modèle s’élèvent à [7-8]€ et [18-20]€ » ;

157 Réponse de Bouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Annexe 11 ; Réponse de SFR FTTH au deuxième questionnaire des rapporteurs, pièce 44

158 Le premier module du modèle décrit supra) permet le calcul des tarifs de cofinancement du projet de l’opérateur d’infrastructure

159 Réponse de SFR FTTH au deuxième questionnaire Pièce n°44.

160 Pour rappel, cette prime vise à rémunérer l’opérateur d’immeuble de l’ensemble des incertitudes relatives à la demande sur les marchés de gros et de détail, aux coûts de déploiement, au progrès technique et au contexte macroéconomique pesant sur l’économie du projet.

161 Observations complémentaires Bouygues Telecom, page 19

162 Observations en réplique de Bouygues Telecom, point 129, page 32

163 Réponse de SFR FTTH au deuxième questionnaire des rapporteurs, Q.3

164 Saisine de Bouygues Telecom, point 356, page 71

165 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 71

166 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, Annexe 31, page 36

167 Réponses de SFR FTTH au premier questionnaire des rapporteurs, Q.11 168 Saisine de Bouygues Telecom, point 344, page 69

169 Observations en réplique de Bouygues Telecom, point 379, page 69

170 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 97

171 Deuxièmes observations en défense, page 97

172 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, pages 85 et 86 : « Quand bien même il n’est pas possible, à date, d’anticiper les conséquences de l’état d’urgence sanitaire et, plus généralement, de la pandémie qui sévit actuellement en France (et au plan mondial), il est incontestable que cette situation risque d’affecter plusieurs éléments clés pour le déploiement et la pénétration des réseaux FTTH de tous les opérateurs, y compris de SFR FTTH en SFMD. »

173 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, Annexe n° 31, page 26

174 Deuxièmes observations en défense de SFR FTTH, page 7

175 Réponse de Bouygues Telecom au premier questionnaire des rapporteurs, Q.18

176 Décision n° 2017-0830 de l’Arcep en date du 4 juillet 2017 fixant le taux de rémunération du capital employé pour la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des activités fixes et mobiles régulées pour les années 2018 à 2020

177 Décision n° 2020-1163 de l’Arcep en date du 22 octobre 2020 fixant le taux de rémunération du capital employé pour la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des activités fixes et mobiles régulées à compter de l’année 2021

178 Les entreprises choisies pour composer le groupe de pairs sont choisies selon cinq critères : (i) elles sont cotées en bourse et ont des actions liquides, (ii) sont propriétaires d’infrastructures de communications électroniques dans lesquelles elles investissent, (iii) exercent principalement leurs activités dans l’Union, (iv) ont une notation financière « investment grade » et (v) ne sont pas, ou n’ont pas été récemment, associées à des opérations importantes de fusion et acquisition. (cf. décision n° 2020-1163 de l’Arcep en date du 22 octobre 2020 fixant le taux de rémunération du capital employé pour la comptabilisation des coûts et le contrôle tarifaire des activités fixes et mobiles régulées à compter de l’année 2021)

179 Premières observations en défense de SFR FTTH, page 73

180 Observations en réplique de Bouygues Telecom, page 81

181 Pour rappel, le risque couvert par cette prime est distinct de celui encouru par l’opérateur d’infrastructure, elle rémunère l’opérateur fictif des incertitudes relatives au taux de remplissage des tranches de cofinancement achetées

182 Le tarif récurrent de cofinancement utilisé étant celui de 5,32 €/mois/ligne. Ce tarif récurrent de cofinancement correspond à l’achat d’une tranche de 5 %, c’est le plus élevé parmi ceux proposés par SFR FTTH et donc le plus conservateur pour SFR FTTH.

183 Les opérateurs d’infrastructure présents dans le tableau estimant les primes de risque de location, ont vocation à exploiter plusieurs centaines de milliers de lignes FttH (et même, hors TDF, plusieurs millions de lignes) et peuvent donc être retenus comme opérateurs comparables. Free, en revanche, ne saurait être retenu car il exploite 60 000 lignes FttH en zones moins denses et aucun OCEN ne souscrit à son offre de location.

184 Certains opérateurs d’infrastructure séparent la facturation du tarif de cofinancement en deux : une partie à la pose du PM et une autre à la pose du PBO, alors que d’autres facturent l’ensemble du tarif à la pose du PBO. Ainsi, il peut y avoir  des primes de risque différentes avec des tarifs pourtant identiques.

185 Décision n° 2011-0846 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 21 juillet 2011 se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant les sociétés Free Infrastructure et France Télécom