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Décisions

ARCEP, 17 mai 2018, n° 2018-0569-RDPI

ARCEP

se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant la société Free et la société Orange

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soriano

Membre :

M. Benghozi, M. Distler, Mme Lombard

ARCEP n° 2018-0569-RDPI

16 mai 2018

L’Autorité  de  régulation des  communications  électroniques  et  des  postes  (ci-après  « l’Arcep » ou « l’Autorité »),

Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») modifiée, notamment ses articles 6, 7 et 12 ;

Vu la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive « accès »), modifiée par la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 ;

Vu la recommandation 2010/572/UE de la Commission européenne du 20 septembre 2010 sur l’accès réglementé aux réseaux d’accès de nouvelle génération (ci-après « recommandation NGA ») ;

Vu le code des postes et des communications électroniques (ci-après « CPCE »), notamment ses articles L. 32, L. 32-1, L. 34-8, L. 34-8-3, L. 36-8, R. 11-1 ;

Vu la décision n° 2009-1106 de l’Arcep en date du 22 décembre 2009 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE, les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée ;

Vu la décision n° 2010-1312 de l’Arcep en date du 14 décembre 2010 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE, les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses ;

Vu la décision n° 2015-0776 de l’Arcep en date du 2 juillet 2015 sur les processus techniques et opérationnels de la mutualisation des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique ;

Vu la décision n° 2017-0870 de l’Arcep en date du 26 juillet 2017 portant adoption du règlement intérieur ;

Vu la recommandation de l’Arcep en date du 23 décembre 2009 relative aux modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique ;

Vu la demande de règlement de différend, déposée à l’Autorité le 15 novembre 2017, présentée par la société Free, société par actions simplifiées, dont le siège social est 8 rue de la Ville l’Évêque, 75008 Paris, et immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous  le numéro  421 938 861, représentée par son directeur réglementaire ;

Vu le courrier du 15 novembre 2017 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a transmis à la société Orange la demande de règlement de différend de la société Free ;

Vu le courrier électronique d’Orange du 16 novembre 2017 sur la régularité de la saisine de la société Free et le courrier du 16 novembre 2017 par lequel la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a mis en demeure la Société Free de régulariser sa saisine ;

Vu le courrier de réponse de la Société Free, enregistré à l’Autorité le 17 novembre 2017 ;

Vu l’enregistrement par l’Autorité, le 17 novembre 2017, de la demande de règlement de différend ainsi régularisée par la société Free ;

La société Free demande à l’Autorité « d’enjoindre à Orange de proposer, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend, un avenant modifiant le contrat  et ayant strictement pour objet de faire droit  aux demandes », lesquelles sont  formulées comme  suit :

« Demande 1 : Durée de droits

« Nous demandons, en contrepartie de notre cofinancement dans les boucles locales optiques déployées par Orange sur fonds privés, à disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau.

« Il est entendu que la jouissance du droit d’accès est soumise au paiement, par le groupe Iliad, d’une quote-part des coûts d’investissements initiaux, des frais d’exploitation et de maintenance (dont location de génie civil) et des réinvestissements qui seraient nécessaires pour maintenir le réseau en bon état de fonctionnement sur sa durée d’exploitation technique et commerciale. Il est entendu qu’Orange restera libre de sa décision de cesser l’exploitation technique et commerciale du réseau.

« Demande 2 : Tarifs

« Nous demandons :

« 2.a. à connaître les liens entre les principaux tarifs du contrat1 et les coûts du réseau que nous cofinançons ; nous souhaitons que le contrat définisse, de manière explicite et transparente, les principaux postes de coûts2 sous-jacents à ces tarifs et la méthode retenue pour évaluer ces coûts (coûts constatés, coûts moyens projetés dans la durée sur la base d’hypothèses à expliciter, etc.).

« 2.b. que le contrat de cofinancement prévoie la transmission à intervalles périodiques des grandes masses des dépenses réelles constatées pour la construction et l’exploitation du réseau cofinancé et pour les trois segments de réseaux (NRO - PM exclu ; PM inclus - PBO inclus ; CCF) en distinguant a minima investissement, exploitation et maintenance, location de génie civil, frais de portage financier et le cas échéant les principaux autres grands postes de coûts.

« 2.c. que le principe de modification unilatérale de prix par Orange soit supprimé au profit d’une clause de discussion réciproque et qu’une évolution tarifaire ne puisse être possible que d’un commun accord entre les parties, suite à une négociation de bonne foi, permettant un recouvrement des coûts et une marge raisonnable. »

« 1 Notamment : le tarif de cofinancement du segment entre le PM et le PBO, le prix de construction du CCF, le tarif récurrent par ligne active, le tarif récurrent de maintenance du CCF, les tarifs des liens entre le PM et le NRO.

« 2 Par exemple pour le tarif récurrent attaché au lien entre le PM – PBO, les principaux postes de coûts pourraient être : les dépenses d’exploitation et de maintenance, la location du génie civil et les frais de portage financier de la part non cofinancée.

« Demande 3 : Raccordement des éléments de réseau mobile

« Nous demandons à pouvoir utiliser des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût d’accès aux lignes déployées.

« Il est entendu que nous sommes prêts à prendre à notre charge une quote-part des éventuels coûts d’investissements incrémentaux, notamment de pose d’un boitier (de type PBO) dédié à l’extraction de la fibre concernée. Nous ferons notre affaire du lien optique entre le boitier d’extraction et l’antenne, tant pour la construction que l’exploitation ».

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes, Free soutient que :

- l’Autorité est compétente en application de l’article L. 36-8 du CPCE pour trancher le différend qui l’oppose à Orange ;

- ses demandes sont recevables en raison de l’échec des négociations entre les parties.

Sur le fond, Free soutient que ses demandes sont justifiées et raisonnables.

Concernant sa demande 1, la société Free soutient que sa demande est justifiée, dans la mesure où  le contrat actuel prévoit une cession des droits d’usage à Free sur 20 ans, sans donner de visibilité sur les conditions de l’éventuel renouvellement, ce qui est contraire au principe du cofinancement ab initio d’un réseau FttH mutualisé. Free souligne que le droit d'accès au réseau tel que prévu par le contrat dure en pratique moins de 20 ans, en raison des dates ultérieures de mise à disposition des points de branchements optiques, du fait que tous les logements ne sont pas raccordables et que tous les raccordements finaux ne sont pas construits. Par ailleurs, Free soutient que la durée de 20 ans n’a pas de fondement objectif par référence notamment à la durée d’exploitation des réseaux cuivre et câblé. Free fait en outre valoir que la prévisibilité contractuelle est la seule à même de garantir les droits des cofinanceurs sur le long terme, face aux incertitudes sur les évolutions du cadre réglementaire et à l'existence de l'Arcep. Free soutient que sa demande 1 est raisonnable, dans la mesure où Free est déjà solidaire des dépenses d’exploitation et de maintenance et des réinvestissements de mise à niveau éventuelle du réseau et qu’aucun obstacle juridique ne s’y oppose. Free soutient en outre que rien ne justifie, pour la zone moins dense, une durée des droits plus courte qu’en zone très dense. Free soutient enfin que la limitation du droit d’accès imposée par Orange est contraire à l’objectif d’exercice d’une concurrence effective et loyale et au principe de non-discrimination.

Concernant sa demande 2, la société Free soutient en substance que le contrat de cofinancement n’explicite pas de manière suffisamment détaillée le lien qu’il pourrait y avoir, entre des coûts d’investissements et les différents postes de coûts de fonctionnement, et les tarifs initiaux et récurrents du contrat et qu’elle est ainsi dans l’impossibilité́ d’analyser une hausse qui serait imposée par Orange et, éventuellement, de la contester. Free soutient que sa demande 2 est justifiée, dans la mesure où, dans un contexte où le réseau cuivre a vocation à disparaître au profit du réseau fibre, Free est captif de l’offre de cofinancement des réseaux FttH d’Orange sur la zone AMII. Free indique qu'à titre de comparaison, il existe une visibilité sur les évolutions tarifaires pour le dégroupage de la boucle locale cuivre, et que le besoin de visibilité économique sur la fibre est encore plus important, considérant par ailleurs que sa demande de transparence s’apparente aux mesures d'ordre public économique de transparence généralement mises en place au bénéfice des acteurs minoritaires structurellement captifs d'une société ou d'une copropriété.

Free soutient que sa demande 2a est raisonnable en ce qu’elle ne porte pas sur une définition complètement détaillée du lien entre coûts et tarifs et que sa demande de modification du contrat ne porte pas sur le modèle de tarification d’Orange, ni sur la structure tarifaire actuelle, ni sur les tarifs. Free soutient que sa demande 2b est raisonnable car elle est limitée à la fourniture des coûts répartis en grandes masses dont dispose déjà probablement Orange et que le niveau de détail demandé reste sommaire. En outre, Free fait valoir que la transmission des coûts n'est pas « par nature exorbitante, au titre du respect du secret des affaires », dès lors qu’« il n’y a plus de concurrence possible pour le déploiement des réseaux en fibre optique en zone AMII » et que les  coûts ne donnent aucune information sur les autres zones. Free soutient en substance que la demande 2c est raisonnable car la « sécurité juridique du cocontractant » cofinanceur est plus importante « que le risque d’un léger décalage entre deux opérateurs dans l’application d’un nouveau tarif. » Free soutient enfin que ses demandes découlent des principes réglementaires d'objectivité et de pertinence des tarifs, de l'obligation de transparence au bénéfice des opérateurs commerciaux et au bénéfice de l'Arcep, et du principe de non-discrimination, auxquels Orange est assujettie.

Concernant la demande 3, Free soutient en substance que sa demande est justifiée car, dans un contexte où la demande pour les données en situation de mobilité « suit une  croissance exponentielle », notamment avec la 4G, l’arrivée de la 5G et la multiplication des « smallcells » que seule la fibre permet dans la durée de fournir les débits, la latence et la capillarité nécessaires. Free fait valoir que le déploiement isolé d’un réseau en fibre pour raccorder les stations de base mobiles n’est pas rentable, en particulier dans les zones les moins denses. Free soutient que sa demande est justifiée au regard des objectifs d’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale, de développement de l’innovation et de neutralité technologique, car la collecte en fibre optique à partir de points de flexibilité existants du réseau FttH déployé à proximité représente des économies d’échelle. Free soutient que sa demande est raisonnable car il existe des fibres surnuméraires au sein des boucles locales mutualisées déployées par Orange, qu’il n’existe aucun obstacle à les utiliser pour le raccordement des antennes mobiles et que les éventuels surcoûts ponctuels de raccordement qui ne sont pas compris dans les coûts de déploiements des lignes FttH seraient pris en charge par Free. Free soutient enfin que ces demandes sont convergentes avec les préconisations de l’Arcep, qui recommande l’ouverture des boucles locales optiques mutualisées à tous les usages, et notamment au raccordement d’antennes mobiles.

Vu les courriers du 22 novembre 2017 par lesquels la directrice des affaires juridiques de l’Autorité a transmis aux parties le calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et désigné  les  rapporteurs ;

Vu la décision n° 2017-1494-RDPI en date du 12 décembre 2017 par laquelle la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction a décidé de proroger le délai dans lequel elle doit se prononcer sur le différend ;

Vu les observations en défense enregistrées à l’Autorité le 20 décembre 2017, présentées par la société Orange, société anonyme, dont le siège social est 78 rue Olivier de Serres, 75505 Paris cedex 15, et immatriculée au registre de  commerce  et  des  sociétés  de  Paris  sous  le  numéro 380 129 866, représentée par son directeur des affaires réglementaires ;

Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes, Orange soutient que :

- l’Autorité n’est pas compétente pour se prononcer sur les demandes 1 et 2 de Free, qui sont irrecevables dès lors qu’elles ne portent pas sur l’évolution des conditions techniques ou tarifaires de l’accès aux lignes FttH d’Orange définies dans le contrat. Orange ne conteste pas la compétence de l’Arcep sur la demande 3 ;

- les demandes sont irrecevables à défaut d’échec des négociations entre les parties, les négociations étant intervenues entre Free Infrastructure et Orange et non entre Free et Orange et concernent un contrat distinct de celui sur lequel porte la saisine. Par ailleurs, Orange considère que la demande 2a a évolué au cours des négociations et est différente de la demande formulée dans la saisine.

Sur le fond, Orange soutient d’abord que les demandes de Free heurtent le principe de protection de la confiance légitime relative au cadre symétrique actuel. Selon Orange, faire droit aux demandes de Free « conduirait à remettre en cause les anticipations sur lesquelles Orange a fondé ses investissements ».

Orange soutient ensuite que les demandes de Free ne sont ni proportionnées ni équitables. Concernant la demande 1, Orange considère que Free part du postulat qu’Orange refusera de « renouveler le contrat » et soutient que la demande est basée sur un « différend prospectif » et sur une « discrimination hypothétique » selon laquelle Free sera exclue dans 20 ans du réseau qu'elle a cofinancé, alors qu'Orange continuerait à l'utiliser. Orange précise notamment qu’elle accorde à Free un droit équivalent à celui dont Orange bénéficie pour elle-même. Orange soutient également que Free bénéficie de garanties contractuelles si un jour Orange manque à ses obligations contractuelles. Orange fait valoir que Free dispose d’ores et déjà en vertu du contrat d’un droit d’accès d’une durée de 20 ans et d’un droit au renouvellement de son droit d’accès, non conditionné à la volonté d’Orange, mais au fait que les caractéristiques techniques des lignes FttH le permettent. Selon Orange, la durée de vie d'une boucle locale ne dépend pas d'une durée prédéfinie et ce mécanisme de renouvellement « permet ainsi de faire un point d’étape et d’apprécier au plus juste la durée de  vie restante des lignes FttH ». En outre, Orange soutient que le cadre réglementaire n’impose aucune obligation concernant la durée du droit d’accès ou de son renouvellement.

Concernant la demande 2, Orange soutient que le raisonnement de Free est prospectif et construit dans la perspective d'un différend tarifaire futur. Orange considère en substance que Free veut se substituer au régulateur concernant les tarifs de l'accès aux lignes FttH et que la demande conduirait à ce que Free et les opérateurs d'infrastructures et commerciaux aient une vue sur l'ensemble des coûts de chacun ce qui porterait atteinte notamment à la protection du secret des affaires.

En particulier, sur la demande 2a, Orange indique que la seule obligation réglementaire tarifaire est une obligation de tarifs raisonnables. Sur la demande 2b, Orange soutient que la régulation a été construite de façon à ce qu’Orange, en tant qu'opérateur d'infrastructure, fixe le tarif de l'accès à ses lignes FttH sous le seul contrôle de l'Arcep. Enfin, Orange soutient que la demande 2c n’est pas raisonnable car elle ferait obstacle à la mise en œuvre par Orange du principe de non-discrimination.

Concernant la demande 3, Orange fait valoir que la demande méconnait le cadre symétrique en vigueur, en vertu duquel l'obligation de faire droit aux demandes raisonnables d’accès aux lignes FttH ne concerne que la desserte des « logements et locaux à usage professionnel », et non le raccordement d’antennes mobiles. Orange soutient ensuite principalement que les conditions techniques et opérationnelles d'utilisation des fibres optiques de son réseau BLOM ne sont pas suffisantes pour garantir le niveau de qualité de service attendu pour le raccordement des antennes mobiles et que le réseau n’a pas été conçu et dimensionné pour les nouveaux usages (4G et 5G), ce qui pourrait remettre en cause la dynamique des déploiements et compromettre le respect de l’obligation de complétude. Orange indique par ailleurs qu’elle propose aujourd'hui des offres de gros activées spécialement conçues pour permettre à un opérateur tiers de raccorder ses antennes mobiles notamment en fibre optique.

Vu les observations en réplique présentées par la société Free et enregistrées à l’Autorité le 17 janvier 2018, par lesquelles elle persiste dans ses conclusions et moyens ;

Sur la recevabilité, Free indique que les courriers du 2 novembre 2016 et du 21 juillet 2017 ont été signés sans ambiguïté par Free, que leur objet fait bien état de demandes d’évolutions contractuelles pour le cofinancement du très haut débit en dehors de la zone très dense, et que la société Orange a répondu à Free ou est restée silencieuse sur chacun des points demandés.

Sur la compétence, Free soutient que toutes les demandes de Free présentent un lien avec les conditions financières du contrat d’accès aux lignes FttH.

Sur le fond, concernant la confiance légitime, Free fait valoir en substance que ce principe n’a pas pour objet d’interdire toute modification du cadre existant et que ses demandes ne remettent en cause ni le cadre réglementaire en vigueur ni les investissements consentis.

Sur les autres points, Free maintient ses demandes et son argumentation.

Concernant la demande 1, Free soutient en particulier que le différend entre Orange et Free est « d’ores et déjà constitué » et que l’existence d’un droit à un éventuel renouvellement du droit d’accès « n’apporte pas le même niveau de garantie » qu’une durée équivalente à l’exploitation technique et commerciale du réseau car aucune stipulation du contrat ne prévoit clairement l’encadrement des conditions de renouvellement. Free soutient que sa demande est justifiée comme contrepartie de son engagement de cofinancement. Si le cadre symétrique ne comprend pas d’obligation expresse de proposer des droits d’usage de long terme, l’objectif du cadre est bien selon Free de permettre aux opérateurs cofinanceurs de disposer d’un accès dans des conditions pérennes et non discriminatoires ce que « seule une durée correspondant à la durée de vie du réseau » peut permettre.

Concernant la demande 2, Free soutient en particulier que contrairement aux affirmations d'Orange, sa demande 2a n’est pas une demande d’orientation des tarifs vers les coûts, et ne vise pas à remettre en cause le cadre réglementaire existant ni à se substituer au régulateur. Free soutient en outre que sa demande est différente de la transmission de la comptabilité réglementaire du dégroupage d’Orange, que les données demandées, qui sont agrégées et ne concernent que le réseau déjà construit et cofinancé par Free, « forment un équilibre équitable entre nécessaire transparence tarifaire et respect du secret des affaires ». Free soutient enfin qu’il est légitime et équitable que les principaux tarifs du contrat ne puissent pas être modifiés unilatéralement par Orange dans le « cas particulier » de la zone AMII, notamment dans la mesure où le nombre de coinvestisseurs est faible, compte tenu des montants en jeu, et du caractère incontournable du réseau.

Sur la demande 3, Free soutient en substance qu’il serait « inéquitable », alors qu’il coinvestit dans le réseau BLOM FttH, qu’Orange lui impose de souscrire ses offres de gros activées qui ne lui permettent pas selon lui le même niveau de différenciation technique que les offres passives. Free fait valoir en outre qu’il ne demande qu’à utiliser des fibres surnuméraires existantes, sans surcharge de travail ou charge financière supplémentaire pour Orange.

Vu les courriers en date du 30 janvier 2018 par lesquels la directrice des affaires juridiques a transmis un questionnaire aux parties ;

Vu les deuxièmes observations en défense, présentées par la société Orange et enregistrées à l’Autorité le 12 février 2018, par lesquelles elle persiste dans ses conclusions et moyens ;

Sur recevabilité et la compétence, Orange maintient que la condition tenant à l’échec des négociations n’est pas remplie et que les demandes 1 et 2 formulées par Free ne relèvent pas de la compétence de l’Autorité.

Sur le fond, Orange maintient son argumentation.

Sur la confiance légitime, Orange soutient en substance que les demandes de Free modifient le cadre réglementaire, la demande 1 visant à s’immiscer dans la liberté contractuelle de l’opérateur d’infrastructure, la demande 2 visant à ce que Free se substitue à l’Arcep, et la demande 3 visant à imposer à Orange une obligation n’existant pas dans le cadre réglementaire symétrique de l’accès aux lignes FttH.

Concernant la demande 1, Orange maintient que le différend n’existe pas à ce jour dès lors que Free a accès de manière effective et pérenne aux lignes FttH d’Orange. Orange soutient également que les conditions tarifaires de renouvellement du contrat sont « strictement encadrées », dès lors qu’Orange a l'obligation contractuelle de proposer, si les conditions liées au renouvellement du droit sont réunies, une tarification assise sur « l’ensemble des coûts à venir et afférentes au câblage FttH ». Orange considère ensuite qu’il serait « déraisonnable et disproportionné » de lui imposer des droits d’usage supérieurs à 20 ans, notamment au regard de ce que proposent les autres opérateurs d'infrastructure. Orange soutient enfin que la demande de Free reviendrait à remettre en cause toute la logique de définition des coefficients ex post.

Concernant la demande 2, Orange soutient en substance que Free commet une erreur d’appréciation en considérant que les tarifs d’accès aux lignes FttH d’Orange sont « discrétionnaires » alors qu’elle est soumise aux principes fixés par l’article L. 34-8-3 du CPCE et notamment à l’obligation de tarifs raisonnables, sous le contrôle de l’Arcep. Orange considère également que contrairement aux affirmations de Free, le cadre symétrique applicable fait référence à l'obligation de transparence concernant l'offre d'accès et non par rapport aux coûts.

Concernant la demande 3, Orange considère que Free a une vision volontairement simpliste et erronée du dimensionnement et de l'exploitation d'un réseau FttH en dehors des zones très denses et souligne notamment que le raccordement en FttH d’élément distant ou de sites sans adresse n’est pas compatible ni avec les principes de dimensionnement ni avec les règles d’exploitation qui prévalent pour le réseau FttH d’Orange et qu’il existe pour certains points de branchement optique des risques de saturation locales. Orange rappelle qu’il n’existe pas de processus opérationnel de désaturation ou de mécanisme de prise en charge des coûts de désaturation. Orange considère enfin que l’Arcep « sous-entend » dans sa consultation publique du 14 juin 2016 sur un projet de recommandation portant notamment sur l'utilisation des fibres surnuméraires que le raccordement en fibre optique des éléments de réseau tels que les antennes mobiles n'a pas vocation à se faire sur les réseaux FttH à tout le moins dans le cadre des offres de cofinancement existantes mais bien dans le cadre d'offres adaptées à ces besoins.

Vu les réponses au premier questionnaire des sociétés Free et Orange, enregistrées à l’Autorité le 20 février 2018 ;

Vu les courriers en date du 27 février 2018, par lesquels la directrice des affaires juridiques a transmis, en application de l’article L. 36-8 du CPCE et de l’article 12 du règlement intérieur de l’Autorité, un questionnaire aux sociétés Bouygues Telecom et SFR et par lesquels les sociétés Bouygues Telecom et SFR ont été invitées à participer à une audition devant les rapporteurs le 14 mars 2018 ;

Vu les courriers en date du 15 mars 2018 par lesquels la directrice des affaires juridiques a transmis un second questionnaire aux parties ;

Vu la réponse de la société Bouygues Telecom au questionnaire du 27 février 2018, enregistrée à l’Autorité le 23 mars 2018 ;

Vu la réponse de la société SFR au questionnaire du 27 février 2018, enregistrée à l’Autorité le 27 mars 2018 ;

Vu les réponses au second questionnaire des sociétés Free et Orange, enregistrées à l’Autorité le 28 mars 2018 ;

Vu les courriers en date du 5 avril 2018 par lesquels la directrice des affaires juridiques a transmis aux parties le questionnaire du 27 février 2018 adressé aux sociétés Bouygues Telecom et SFR, et les réponses des sociétés Bouygues Telecom et SFR à ce questionnaire ;

Vu le procès-verbal de l’audition de la société Bouygues Telecom du 14 mars 2018 effectuée par les rapporteurs ;

Vu le procès-verbal de l’audition de la société SFR du 14 mars 2018 effectuée par les rapporteurs ;

Vu les courriers en date du 9 avril 2018 par lesquels la directrice des affaires juridiques a transmis aux parties la copie signée des procès-verbaux des auditions des sociétés Bouygues Telecom et SFR effectuées par les rapporteurs ;

Vu les courriers en date du 9 avril 2018, par lesquels les sociétés Free et Orange ont été invitées à participer à une audience devant la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l'Autorité le 3 mai 2018, et informées que la clôture de l’instruction de la présente affaire était fixée au 20 avril 2018 ;

Vu les observations sur les réponses aux questionnaires adressés aux sociétés Bouygues Telecom et SFR ainsi que sur les procès-verbaux de leurs auditions, présentées par la société Free et enregistrées à l’Autorité le 16 avril 2018, par lesquelles elle persiste dans ses conclusions et moyens ;

Vu les troisièmes observations en défense, présentées par la société Orange et enregistrées à l’Autorité le 16 avril 2018, par lesquelles elle persiste dans ses conclusions et moyens et par lesquelles Orange soutient en substance que le questionnaire du 27 février 2018 et les auditions du 14 mars 2018 des sociétés Bouygues Telecom et SFR, tiers à la procédure, sont contraires aux dispositions de l’article L. 36-8 du CPCE et à l’article 12 du règlement intérieur de l’Arcep et demande à ce que ces éléments soient écartés des débats.

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu le jeudi 3 mai 2018, lors de l'audience devant la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Autorité, composée de M. Sébastien Soriano, président,

M. Pierre-Jean Benghozi, M. Philippe Distler et Mme Martine Lombard, membres de l’Autorité, et en  la présence de Mme Cécile Dubarry, directrice générale de l’Autorité, Mme Anaïs Aubert, Mme Mélissa Nobileau et M. Younès Rifad, rapporteurs, de M. Jeremy Bonan, Mme Lénaïg Catz, M. Ahmed Haddad, M. Adrien Laroche, M. Stéphane Lhermitte, M. Guillaume Mellier, Mme Agate Rossetti, Mme Elisabeth Suel et de M. Hubert Virlet, agents de l’Autorité, et des représentants de la société Free et de la société Orange :

- le rapport de Mme Mélissa Nobileau, présentant les conclusions des parties ;

- les observations des représentants de la société Free ;

- les observations des représentants de la société Orange.

Sur la publicité de l’audience

L’article 14 du règlement intérieur susvisé prévoit que : « L’audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n’est pas conjointe, la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Autorité en délibère ».

Par un courrier du 19 avril 2018, la société Orange a demandé à ce que l’audience ne soit pas publique. Par un courrier électronique du 23 avril 2018, la société Free a indiqué ne pas s’opposer à la publicité de l’audience. Lors de l’audience, la société Free a accepté que l’audience ne soit pas publique. En conséquence, l’audience s’est tenue à huis clos.

La formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Autorité (composée de Mme Martine Lombard, M. Pierre-Jean Benghozi et M. Philippe Distler, membres de l’Autorité), en ayant délibéré le 17 mai 2018 en la seule présence de ses membres, adopte la présente décision.

1          Contexte général

1.1         Présentation des parties

La société Free SAS (ci-après : « Free ») est une filiale du groupe Iliad, présent sur les marchés du haut et du très haut débit fixes et mobiles en tant qu’opérateur de gros et de détail. Pour fournir le segment de marché du très haut débit fixe, Free, en tant qu’opérateur commercial, souscrit principalement des lignes à très haut débit en fibre optique (FttH) auprès des opérateurs d’infrastructures sur le marché de gros via des offres de cofinancement. Au 31 décembre 2017, la société compte 6,5 millions d’abonnés haut et très haut débit fixe dont 556 000 abonnés FttH. Free s’est fixé pour objectif d’obtenir une part de marché fixe de 25 % à long terme avec une augmentation de sa base d’abonnés FttH de 300 000 à 500 000 abonnés par an dès 2018. La société vise un potentiel de 9 millions de prises raccordables au FttH à fin 2018 et 20 millions de prises raccordables au FttH à fin 2022.1

La société Orange est le principal opérateur de gros et de détail présent sur les marchés du haut et du très haut débit fixes et mobiles. L’Autorité, dans ses dernières décisions d’analyse de marché, a désigné Orange comme opérateur exerçant une influence significative sur les marchés 3a, 3b et 4.2

Au 31 décembre 2017, Orange disposait d’un parc de clients mobiles de 31,8 millions de clients, ainsi que d’un parc d’abonnés fixes de 11,5 millions de clients, dont 2 millions d’abonnés au FttH.3

En ce qui concerne les déploiements FttH, Orange indique qu’elle « assure plus de 70 % des déploiements à fin novembre 2017 » en France et que « L’accélération du déploiement permet au Groupe de se fixer un objectif de 20 millions de logements raccordables au FTTH en Zone Très Dense (ZTD) et Zone Moyennement Dense (ZMD) dès 2021 au lieu de 2022. Dans les zones des Réseaux d’Initiative Publique (RIP), Orange couvre un total de 23 départements et a désormais l’ambition de déployer d’ici 2022 environ 30 % des infrastructures attribuées ou en cours d’attribution. »4

1.2         Les déploiements des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné (FttH)

1.2.1                  Contexte général

Les principaux opérateurs nationaux, à partir de 2006, ont fait le choix de la réalisation d’une infrastructure de boucle locale nouvelle en fibre optique jusqu’à l’abonné (Fiber to the Home – FttH), afin de répondre à la croissance constante des besoins en matière de débit fixe. Les pouvoirs publics ont ensuite, d’une part, adopté un cadre de mutualisation des réseaux FttH permettant de libérer l’investissement en faveur d’un déploiement efficace et, d’autre part, fixé des objectifs ambitieux en matière de déploiement du très haut débit sur le territoire5.

Le législateur a posé le principe de mutualisation de la partie terminale des réseaux FttH et confié à l’Arcep le soin d’en préciser les modalités. L’Arcep a ainsi précisé la possibilité d’accès sous forme passive à ces réseaux au niveau d’un point de mutualisation (PM) mais également la possibilité de cofinancer ces réseaux, en distinguant, au sein du territoire national, les zones très denses (plus de 17 % des locaux à raccorder), où la mutualisation a généralement lieu en pied d’immeuble, des zones moins denses (l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses), où une plus large mutualisation est prévue. Les opérateurs tiers peuvent en conséquence aujourd’hui accéder à la partie terminale de tout réseau FttH.

S’agissant des déploiements FttH, les opérateurs les accélèrent avec, au 31 décembre 2017, plus de 10 millions de locaux raccordables6, soit une hausse de plus de 30 % en un an. Orange reste moteur sur ces déploiements avec une grande majorité des lignes construites.7 L’extension des déploiements FttH s’accompagne d’une progression de la mutualisation effective sur ces réseaux, c’est-à-dire que plusieurs opérateurs commerciaux –à l’image de Free– sont présents sous forme passive au point de mutualisation (souscription aux offres d’accès de gros des opérateurs d’immeuble et installation des équipements actifs) et peuvent proposer des offres sur le réseau FttH aux consommateurs. Au 31 décembre 2017, 72 % des lignes FttH déployées sont utilisées par au moins 2 opérateurs commerciaux, soit une augmentation d’environ 17 % sur un an8.

Enfin, s’agissant du marché de détail, au 31 décembre 2017, avec 7 millions d’abonnés au très haut débit, un accès internet sur quatre est désormais à très haut débit et 3,3 millions d’abonnement sont en fibre optique de bout en bout. L’Arcep notait d’ailleurs que « tandis que le recul du nombre d’abonnements à haut débit (21,5 millions) s’intensifie encore au quatrième trimestre 2017 (-265 000 contre -160 000 un an auparavant), la croissance du nombre d’accès à très haut débit continue de progresser : 1,5 million d’accès supplémentaires au cours de l’année 2017, contre +1,2 million en 2016, soit, fin 2017, un nombre d’accès de 7 millions. La croissance du très haut débit provient majoritairement (à 75 %) de l’augmentation du nombre d’abonnements en fibre optique de bout en bout »9. Ainsi, la croissance annuelle du nombre d’abonnement au FttH en 2017 est de 51 % ce qui montre le dynamisme sur le marché de détail avec une appétence accrue des usagers pour la fibre et la migration des accès internet vers cette technologie.

Enfin, comme elle l’a rappelé dans son avis n° 2017-1293, « l’Arcep estime que l’objectif de 2022 de couverture en très haut débit pour tous doit être consacré et les réseaux en FttH encouragés, en ce qu’ils constituent la technologie la plus pérenne, à même de répondre pendant de longues années à l’augmentation des besoins en matière de débit et qu’ils peuvent accompagner la densification des réseaux mobiles ». À cet égard, l’infrastructure FttH a vocation à devenir l’infrastructure de référence de boucle locale fixe et, partant, le principal support de l’activité des opérateurs sur le marché du haut et du très haut débit fixe à terme.

1.2.2                  Périmètre de la zone dite « AMII »

 

Dans le cadre du programme national « très haut débit », le Gouvernement a lancé en août 2010 un appel à manifestations d’intentions d’investissement (« AMII »), en vue de recueillir les intentions  des opérateurs en matière de déploiements de réseaux à très haut débit, en dehors des zones très denses. Les résultats de cet appel ont conduit à ce qu’environ 57 % de la population, y compris les zones très denses, soient réputés comme ayant vocation à être couverts par l’initiative privée, soit environ 3 600 communes, pour des déploiements prévus sur dix ans. Aujourd’hui, la zone dite « AMII » en référence à cet appel représente plus de 13 millions de locaux. À ce jour, Orange prévoit de déployer près de 90 % des lignes de cette zone10. La demande de règlement de différend de la société Free ne concerne que cette zone AMII, où elle s’est engagée à co-investir sur les réseaux déployés par Orange.

1.2.3                  État des déploiements FttH dans la zone « AMII »

En zone AMII, au 31 décembre 2017, 4,2 millions de locaux sont raccordables (soit une croissance annuelle de prêt de 60 %) sur un total d’environ 13 millions de locaux et au moins 2 opérateurs sont présents sur 86 % des lignes déployées (croissance d’environ 100 %). Orange a déployé pratiquement 90 % des lignes déployées depuis début 201511.

Au-delà des 4,2 millions de locaux raccordables au FttH, une très large partie du déploiement de la zone AMII est déjà lancée. En effet, environ 3 millions de locaux supplémentaires sont programmés (leur PM de rattachement a d’ores et déjà été mis à disposition) et environ 6 millions des locaux supplémentaires ont fait l’objet de consultations préalables au déploiement, les travaux ayant été entamés pour une partie d’entre eux12.

Enfin, Orange et SFR ont récemment proposé au Gouvernement des engagements visant à finaliser leurs déploiements FttH au sein de la zone AMII13 en ayant rendu raccordables plus de 92 % des locaux d’ici fin 2020, et le complément raccordables sur demande.

1.3         Investissements d’Orange et de Free

Le déploiement des réseaux FttH représente des montants d’investissement importants pour les opérateurs qui déploient le réseau, comme Orange, mais également pour les opérateurs qui co- investissent dans ces réseaux, à l’image de Free.

Orange expliquait en 2017 que « La fibre est l’un des grands chantiers industriels en France. Orange investit des moyens très importants : sur le plan financier, 3 milliards d’euros nets y sont consacrés dans le cadre de son plan stratégique Essentiel 2020 sur la période 2015 – 2018 »14.

Lors de l’instruction, Free a transmis ses investissements consentis par zone de cofinancement15. Free a cofinancé les réseaux FttH déployés par Orange sur [SDA] communes représentant [SDA] zones de cofinancement et environ [SDA] de locaux, dont [SDA] de locaux programmés et [SDA] raccordables. Fin février 2018, Free indique avoir investi, sur ces zones, environ [SDA] pour un pourcentage de cofinancement en moyenne de [SDA].

1.4         Orange et Free sont des acteurs convergents fixes et mobiles

Le marché des services de communications électroniques est enfin marqué par un important mouvement de convergence entre le fixe et le mobile.

Le marché mobile métropolitain compte quatre opérateurs de réseau, désormais tous aussi présents sur le marché fixe : Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free Mobile (qui est, à l’instar de Free, une filiale du groupe Iliad). Tous les quatre commercialisent, à ce jour, des services voix, haut débit mobile et très haut débit mobile. Alors que le marché mobile était au départ porté par les services de voix (sur les réseaux 2G), les usages ont progressivement évolué vers les services de données en mobilité, donnant lieu à une consommation de trafic qui suit jusqu’à présent une croissance exponentielle.16 Cette croissance est portée par plusieurs facteurs qui seront amenés à s’amplifier, notamment :

‒ du côté de la demande, de nouveaux usages se développent. Les utilisateurs accèdent de   plus en plus fréquemment aux services sur internet en mobilité, en particulier avec la diffusion des smartphones, et consomment des quantités de données croissantes ;17

‒ du côté de l’offre, la pénétration des réseaux à très haut débit mobile s’accroît. Ils donnent accès, par l’amélioration de l’efficacité spectrale des récentes évolutions technologiques (LTE par exemple, permettant d’offrir des services 4G), à des débits croissants sur les bandes de fréquences disponibles.

Ces réseaux peuvent être décomposés en un site mobile (comprenant notamment les stations de bases, qui permettent de générer les ondes de radiocommunication, reliées aux antennes qui sont fixées sur des supports) et un lien en amont qui permet de collecter les flux mobiles et de raccorder les stations de base au reste du réseau. Au niveau technique, ces liens de collecte peuvent être construits sur différents types de supports (liens filaires en cuivre, liens radio, liens filaires en fibre optique). Dans le contexte de progression continue des volumes de données mobiles à acheminer, il existe un enjeu croissant pour les opérateurs à augmenter la capacité de ces liens de collecte, et pour ce faire à mobiliser les liens de leurs réseaux fixes pour écouler le trafic de leurs sites mobiles (ou « stations de base »).

2          Sur la compétence de l’Autorité et la recevabilité des demandes

Free a saisi la formation RDPI de l’Autorité de demandes relatives à la convention d’accès aux lignes FttH d’Orange signée entre la société Orange et la société Free le 19 septembre 201618 (ci-après : « le contrat d’accès »). Les demandes de Free concernent uniquement les lignes déployées par Orange en dehors des zones très denses (plus précisément en zone AMII19 ou zones moins denses d’initiative privée) et cofinancées par Free ; elles portent sur :

- la modification des dispositions contractuelles relatives à la durée des droits d’accès au réseau ;

- la modification des dispositions contractuelles relatives aux évolutions tarifaires et à la transparence des coûts ;

- l’insertion dans le contrat de la possibilité d’utiliser des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût d’accès aux lignes déployées.

2.1        Sur la compétence de l’Autorité

Sur le fondement des dispositions du I de l’article L. 36-8 du CPCE, l’Autorité peut être saisie pour se prononcer sur un différend « en cas de refus d’accès ou d’interconnexion, d’échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l’exécution d’une convention d’interconnexion ou d’accès à un réseau de communications électroniques (…). Sa décision est motivée et précise les conditions équitables, d’ordre technique et financier, dans lesquelles l’interconnexion ou l’accès doivent être assurés ».

De plus, selon l’article L. 34-8-3 du CPCE :

« […] L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point situé, sauf dans les cas définis par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, hors des limites de propriété privée et permettant le raccordement effectif d'opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d'accessibilité raisonnables. […]

« Il fait l'objet d'une convention entre les personnes concernées. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de l'accès. Elle est communiquée à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes à sa demande.

« Les différends relatifs à la conclusion ou à l’exécution de la convention prévue au présent article sont soumis à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes conformément à l’article L. 36-8. »

Le II de l’article L. 36-8 du même code précise que : « En cas d’échec des négociations commerciales, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut également être saisie des différends relatifs à la mise en œuvre des obligations des opérateurs prévues par le présent titre, (…) notamment ceux portant sur : (…) 2° bis la conclusion ou l’exécution (…) de la convention d’accès prévue à l’article L. 34-8-3. »

Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que l’Autorité est compétente pour connaitre d’un différend, en cas d’échec des négociations, portant sur la conclusion ou l’exécution d’une convention d’accès prévue à l’article L. 34-8-3 du CPCE.

En l’espèce, la société Free demande que soient modifiées les conditions d’exécution de l’offre d’accès à la partie terminale des lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique d’Orange en dehors des zones très denses. Un différend portant sur l’exécution d’un tel contrat conclu en application de l’article L. 34-8-3 du CPCE entre donc, selon cette société, dans le champ de compétence de l’Autorité.

Orange  soutient toutefois que  la demande  portant sur la durée  des  droits (demande 1) et que       la demande portant sur les évolutions tarifaires et la transparence des coûts (demande 2) sont irrecevables, en ce qu’elles ne portent pas sur l’évolution des conditions techniques ou tarifaires de l’accès aux lignes FttH d’Orange définies dans le contrat.20 Orange ne conteste en revanche pas la compétence de l’Autorité sur la demande relative à l’utilisation des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût (demande 3).

2.1.1                  Compétence de l’Autorité pour se prononcer sur la demande relative à la durée des droits

La première demande de Free porte sur la transmission d’un avenant permettant à Free de  disposer, « en contrepartie de son cofinancement dans les boucles locales optiques déployées par Orange sur fonds privés, à disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau […] ».

Orange soutient que la durée d’un contrat ne peut être qualifiée ni de condition technique ni de condition tarifaire.

Aux termes des articles L. 36-8 et L. 34-8-3 du CPCE, l’Autorité est compétente pour régler les différends nés des conventions d’accès au réseau FttH devant permettre l’accès au réseau, dans des conditions transparentes et non discriminatoires, et à des conditions économiques, techniques et d’accessibilité raisonnables. Dès lors qu’une clause litigieuse a un lien, même indirect, avec les conditions d’exécution de la prestation d’accès, l’Autorité est compétente pour se prononcer.21

En l’espèce, la clause relative à la durée des droits est directement liée aux modalités d’accès au réseau ; elle en constitue un élément structurant, en particulier dans le cadre d’un contrat de co- investissement sur le réseau FttH comme celui faisant l’objet de la demande.

En effet, la durée des droits d’usage vise à apporter à l’opérateur tiers des garanties quant aux conditions d’accès au réseau déployé en contrepartie de son cofinancement, pour lui permettre de rentabiliser son investissement. Les motifs de la décision n° 2010-1312 précisent ainsi que :

« En dehors des zones très denses, il apparaît nécessaire que l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers des modalités d’accès garantissant un accès pérenne dans des conditions non discriminatoires et permettant de monter dans l’échelle des investissements »22 (soulignement ajouté).

La circonstance invoquée par Orange que la durée des droits d’usage correspond à la durée du contrat d’accès, relevant selon Orange de la compétence du juge du contrat, ne saurait faire obstacle à la compétence de l’Arcep pour connaitre de la demande relative à la durée des droits d’usage, qui porte sur des éléments nécessaires, directement liés à la prestation d’accès, dont il appartient à l’Autorité de connaitre.

Par conséquent, l’Autorité est compétente pour se prononcer sur la demande de Free de bénéficier, en contrepartie de son cofinancement des lignes FttH d’Orange, d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau.

2.1.2                  Compétence de l’Autorité pour se prononcer sur les demandes relatives aux évolutions tarifaires et à la transparence des coûts

La société Free formule trois sous-demandes relatives aux évolutions tarifaires et à la transparence des coûts (demandes 2). Free demande tout d’abord à l’Autorité d’enjoindre à Orange d’insérer une définition explicite et transparente des principaux postes de coûts sous-jacents aux principaux tarifs du contrat, lui permettant de connaitre les liens entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau cofinancé, ainsi que la méthode retenue pour évaluer ces coûts (demande 2a). Free demande ensuite à l’Autorité d’enjoindre à Orange d’insérer une clause prévoyant la transmission à intervalles périodiques des grandes masses des dépenses réelles constatées pour la construction et l’exploitation du réseau cofinancé pour les trois segments de réseau (demande 2b). Free demande enfin à l’Autorité d’enjoindre à Orange de modifier les dispositions contractuelles relatives au principe de modification unilatérale de prix par Orange, au profit d’une clause de discussion réciproque et d’évolution tarifaire d’un commun accord (demande 2c).

Orange soutient que la demande 2 dans son ensemble est irrecevable car elle « n’est pas liée ni aux conditions tarifaires ni aux conditions techniques de l’accès aux lignes FttH d'Orange »23. Orange soutient plus particulièrement que les demandes 2a et 2b ne portent pas sur les tarifs, mais « sur les coûts supportés par Orange pour fournir la prestation d’accès »24. S’agissant de la demande 2c, Orange considère qu’elle ne porte pas sur des conditions tarifaires d’accès mais « sur les conditions dans lesquelles une modification tarifaire peut intervenir »25.

Aux termes des articles L. 36-8 et L. 34-8-3 du CPCE, l’Autorité est compétente pour régler les différends nés des conventions d’accès, dans la mesure où ils portent sur des clauses relatives aux modalités financières et techniques de l’accès. Dès lors qu’une clause litigieuse a un lien, même indirect, avec les conditions d’exécution de la prestation d’accès, l’Autorité est compétente pour se prononcer.

La convention d’accès prévue à l’article L. 34-8-3 du CPCE « détermine les conditions techniques et financières de l’accès » à une ligne à très haut débit en fibre optique, qui doivent être transparentes et non discriminatoires pour permettre le raccordement effectif d’opérateurs tiers à des conditions économiques, techniques et d’accessibilité raisonnables. L’Autorité dispose d’une compétence réglementaire en vertu de l’article L. 34-8-3 du CPCE pour préciser les modalités financières et techniques de l’accès à la partie terminale des réseaux en fibre optique. Dans ce cadre, l’Autorité a indiqué dans les motifs de sa décision n° 2010-1312 que « les conditions économiques raisonnables de raccordement au point de mutualisation se traduisent concrètement par un coût de déploiement raisonnable par logement ou local à usage professionnel équipé en fibre optique »26.

La décision n° 2009-1106 indique s’agissant des conditions financières de l’accès que :

« la tarification mise en œuvre par l’opérateur d’immeuble doit répondre à plusieurs objectifs :

« […] - encourager l’investissement des opérateurs, notamment à travers les schémas de cofinancement prévoyant un partage équitable des coûts entre opérateurs.

« Afin de répondre à ces objectifs, il convient, pour établir la tarification des offres d’accès, de prendre en compte les principes suivants, conformes aux objectifs fixés dans le II de l’article L. 32-1 du CPCE et aux pratiques usuelles de tarification mises en œuvre dans le cadre de la régulation

[…] :

- le principe de non-discrimination […]

- le principe d’objectivité […]

- le principe de pertinence […]

- le principe d’efficacité des investissements […] » (soulignements ajoutés).

Il est en outre également prévu que « L’opérateur d’immeuble établit et tient à jour des informations relatives aux coûts retraçant les investissements réalisés et présentant un degré de détail suffisant pour permettre le contrôle par l’Autorité du respect des obligations tarifaires qui lui incombent » (articles 4 de la décision de l’Autorité n° 2009-1106 et 10 de la décision de l’Autorité n° 2010-1312).

La réglementation de l’Autorité sur les modalités de l’accès au réseau FttH prévoit donc un lien entre les conditions tarifaires raisonnables d’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique et les coûts de déploiement de ces réseaux.

Ainsi, tant la définition du lien entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau cofinancé que l’insertion d’une clause prévoyant la transmission à intervalles périodiques des grandes masses des dépenses réelles constatées pour la construction et l’exploitation du réseau cofinancé pour les trois segments de réseau relèvent des modalités financières de l’accès à un réseau FttH, pour lesquelles l’Autorité est compétente pour se prononcer.

Par conséquent, l’Autorité est compétente pour se prononcer sur les demandes 2a et 2b de Free.

La demande 2c est relative à la modification des dispositions contractuelles portant sur le principe de modification unilatérale de prix par Orange, au profit d’une clause de discussion réciproque et d’évolution tarifaire d’un commun accord. Cette demande, qui porte sur une clause relative aux évolutions des tarifs de l’accès, porte donc sur les modalités financières de l’accès, dont il appartient à l’Autorité de connaître.

Par conséquent, l’Autorité est compétente pour se prononcer sur la demande 2c de Free.

2.1.3                  Compétence de l’Autorité pour se prononcer sur la demande relative au raccordement des stations de base mobiles

La demande 3 de Free est relative à l’insertion dans le contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, de la possibilité pour Free d’utiliser des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût d’accès aux lignes déployées.

La demande 3 de Free étant relative à la précision de conditions équitables, d’ordre technique et financier, dans lesquelles l’accès à un réseau de communications électroniques à très haut débit en fibre optique doit être assuré, l’Autorité est compétente pour en connaître, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par Orange.

L’Autorité est ainsi compétente pour se prononcer sur l’ensemble des demandes dont elle est saisie par Free.

2.2        Sur l’échec des négociations

Dans le cadre de l’appréciation de la recevabilité du différend dont elle est saisie, il revient à l’Autorité de s’assurer que la condition tenant à l’échec des négociations prévue à l’article L. 36-8 du CPCE est remplie, et ce, au regard des échanges intervenus entre les parties avant sa saisine.

Orange soutient que la condition tenant à l’échec des négociations avec la société Free n’est pas remplie, faute pour Free d’avoir négocié avec Orange, considérant que seule la société Free Infrastructure, qui n’est pas partie au différend, a négocié avec la société Orange sur les demandes objet du présent règlement de différend. Orange soutient en particulier que le courrier du 31 mars 201627 joint à la saisine de Free a été signé par la société Free Infrastructure, et porte sur un contrat distinct du contrat sur lequel porte le présent différend. Orange soutient en outre que les courriers du 2 novembre 201628 et du 21 juillet 201729, également joints à la saisine, s’inscrivent dans le prolongement du courrier initial du 31 mars 2016 et ce, même si la société Free en est cosignataire.

S’il doit être relevé que le courrier du 31 mars 201630 se réfère au « cofinancement en zone très dense » et ne porte donc pas directement sur le contrat n° 16000678 objet du présent différend31, l’Autorité note en revanche que les courriers du 2 novembre 2016 et du 21 juillet 2017 portent sur le contrat de cofinancement signé entre la société Free avec la société Orange pour la zone moins dense et faisant l’objet du présent différend.

La circonstance invoquée par Orange que les courriers du 2 novembre 2016 et du 21 juillet 2017 s’inscrivent dans le prolongement du courrier du 31 mars 2016 ne saurait rendre ces pièces étrangères à la saisine, dès lors que ces courriers portent bien sur la convention objet du présent règlement de différend et, au surplus, qu’ils ont été signés par Free.

De même, la circonstance que les courriers en cause ne portent pas exclusivement sur le contrat objet du présent différend ou que l’ensemble des parties signataires ne soient pas parties à la procédure ne saurait faire obstacle à la saisine de l’Autorité par Free. Enfin, la circonstance que la société Orange ait répondu à Free Infrastructure et non à Free dans l’un de ses courriers n’a pas d’incidence sur les éléments qui précèdent.

2.2.1                  Sur l’échec des négociations sur la demande 1

Par courrier du 2 novembre 2016, la société Free a notamment demandé à la société Orange de lui transmettre sous un mois un projet d’avenant au contrat de cofinancement en dehors de la zone très dense, répondant à sa demande de « […] disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau […] en contrepartie de notre cofinancement dans les boucles locales optiques déployées par Orange sur fonds privés […]. Il est entendu que la jouissance du droit d’accès est soumise au paiement, par le groupe Iliad, d’une quote-part des coûts d’investissements initiaux, des frais d’exploitation et de maintenance (dont location de génie civil) ainsi que de l’ensemble des réinvestissements qui seraient nécessaire pour maintenir le réseau en bon état de fonctionnement sur sa durée d’exploitation technique et commerciale. »

Par courrier en date du 19 décembre  201632, la société Orange, en réponse au courrier du 2 novembre 2016, a refusé de modifier la durée du droit d’accès au réseau, indiquant qu’« Orange n’est pas en mesure de définir, dès à présent, les conditions précises dans lesquelles, à une échéance de 20 ou 30 ans, pourra être défini le renouvellement des droits […] ».

Par courrier du 21 juillet 2017, Free a réitéré sa demande d’évolution contractuelle et ajoute qu’« il est entendu qu’Orange restera libre de sa décision de cesser l’exploitation technique et commerciale du réseau ».

Par courrier du 1er septembre 201733 la société Orange a de nouveau opposé un refus dans des termes similaires à ceux de son courrier en date du 19 décembre 2016 concernant les lignes cofinancées « en dehors de la zone très dense ».

Dans ces conditions, et compte tenu de l’ensemble des échanges intervenus entre les parties et rappelés ci-avant, l’Autorité considère que l’échec des négociations sur la demande 1 est avéré.

2.2.2                  Sur l’échec des négociations sur la demande 2

Orange soutient que certaines demandes de Free ont évolué au cours des négociations et que certains éléments de la saisine ne figuraient pas dans les échanges qui ont eu lieu au préalable.

Par courrier du 2 novembre 2016, la société Free a demandé à Orange « que toute évolution tarifaire des contrats de cofinancement ne soit possible que d’un commun accord entre les parties […]. Nous souhaitons qu’une telle évolution puisse être demandée par l’une ou l’autre des parties au contrat et que les deux parties soient tenues de négocier de bonne foi cette évolution tarifaire. Il est entendu, et nous souhaitons que cela soit explicitement mentionné dans le contrat, que les tarifs doivent permettre à Orange de recouvrer les coûts de réseau assortis d’une marge (ou prime de risque) raisonnable ».

Par ce même courrier du 2 novembre 2016, la société Free a demandé à Orange de pouvoir « connaitre les coûts du réseau que nous cofinançons et la marge (ou prime de risque) appliquée par Orange pour établir les tarifs que nous payons» et a demandé :

« […] que le contrat de cofinancement en zone AMII :

définisse explicitement les différends postes de coûts sous-jacents aux tarifs récurrents facturés […] Prévoit la transmission à intervalles périodique les grandes masses des coûts pertinents […]. »

Dans ce courrier, la société Free a indiqué, en note de bas de page au sujet de ces deux demandes, d’une part, « [comprendre] que les coûts recouvrés par l’intermédiaire des tarifs récurrents pourraient être les frais de location de génie civil, d’exploitation et de portage financier […] » et, d’autre part, que « les grandes masses de coûts pertinentes pourraient être notamment : les coûts d’investissement et de construction du réseau, le nombre de tranches non cofinancées, les coûts de portage financier attachés, les coûts de location du génie civil, les coûts d’exploitations et de maintenance, les coûts communs et commerciaux ».

Par un courrier en date du 19 décembre 2016, Orange a refusé de faire droit à ces demandes considérant qu’« une notification unilatérale par Orange de l'évolution de ses tarifs permet une application simultanée et uniforme, à l’ensemble des opérateurs utilisateurs co-contractants du réseau, des mêmes évolutions de tarifs. Orange rappelle par ailleurs que ses tarifs, y compris en cas de dépassement de plafond, respectent les principes d'objectivité, de pertinence, d'efficacité et de non-discrimination fixés par l’ARCEP conformément au cadre réglementaire en vigueur ».

Free a réitéré par un courrier en date du 21 juillet 2017 sa demande à ce que « le contrat prévoie la transmission à intervalles périodiques des grandes masses des dépenses réelles constatées pour la construction et l’exploitation du réseau cofinancé en distinguant investissement, exploitation,  location de génie civil, frais de portage financier, coûts internes et de sous-traitance, sur les différents segments de réseau », et ce, dans des termes quasiment identiques aux termes de la saisine.

Dans ce même courrier, Free demande également à « connaître les liens entre les principaux tarifs du contrat [1] et les coûts du réseau que nous cofinançons ; nous souhaitons que le contrat définisse, de manière explicite et transparente, les principaux postes de coûts [2] sous-jacents à ces tarifs, la part de chacun de ces postes de coûts dans leur formation, et la méthode retenue pour évaluer ces coûts (coûts constatés, coûts projetés sur la base d’hypothèses à expliciter, etc.) ».

Free pour cette demande précise en note de bas de page que ces tarifs pourraient être : « [1] Notamment : le tarif de cofinancement du segment entre le PM et le PBO, le prix de construction du CCF, le tarif récurrent par ligne active, le tarif récurrent de maintenance du CCF, les tarifs des liens entre le PM et le NRO » (soulignement ajouté) et indique, s’agissant de la définition des principaux postes de coûts, qu’il pourrait s’agir « [2] Par exemple : dépenses de sous-traitance, coût de pilotage internes, dépenses d’investissement (annuel et cumulé depuis le début du projet), dépenses d’exploitations, frais de portage financier de la part non cofinancée, location du génie civil » (soulignement ajouté).

Enfin, Free a réitéré, toujours dans ce même courrier, sa demande relative à l’insertion au contrat d’une clause de discussion s’agissant des évolutions tarifaires.

Par un courrier du 1er septembre 2017, Orange a refusé de faire droit à l’ensemble de ces demandes pour les mêmes raisons que celles invoquées dans son courrier du 19 décembre 2016.

Il apparaît donc que Free a demandé, à plusieurs reprises, à Orange des évolutions contractuelles dans des termes quasiment identiques à la demande 2 telle que formulée dans la saisine et qu’Orange a refusé de faire droit à ces demandes ou n’y a pas répondu.

Orange considère que la demande 2a figurant dans la saisine Free aurait évolué et serait différente des demandes formulées lors des négociations. Il souligne que le courrier du 2 novembre 2016 portait selon lui sur la connaissance du « nombre de tranches non cofinancées »34 ce qui n’est plus le cas dans le courrier du 21 juillet 2017. Mais la circonstance que Free n’ait pas repris l’intégralité de ses demandes telles qu’adressées à Orange lors des négociations est sans effet sur l’existence d’un échec des négociations sur la demande 2a dont est saisie l’Autorité.

De la même manière, l’argument d’Orange selon lequel les postes de coûts sont différents selon les courriers35 et dans la saisine36 de Free ne saurait prospérer dès lors que les postes de coûts indiqués par la société Free, qui ont effectivement pu évoluer à la marge, ne servent que d’exemples à l’appui de sa saisine.

Dans ces conditions, et compte tenu de l’ensemble des échanges intervenus entre les parties ayant porté sur chacune des demandes et rappelés ci-avant, l’Autorité considère que l’échec des négociations sur la demande 2 est avéré.

2.2.3                  Sur l’échec des négociations sur la demande 3

Par courrier du 2 novembre 2016, la société Free a demandé à la société Orange de « pouvoir utiliser des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût […]. Il est entendu que nous sommes prêts à prendre à notre charge une quote-part des éventuels coûts d’investissements incrémentaux notamment de pose d’un boitier, (de type PBO) dédié à l’extraction de la fibre concernée […] ».

Par courrier du 19 décembre 2016, la société Orange a notamment répondu à la société Free que « Conformément à la réglementation et au contrat d'accès aux lignes FTTH d’Orange en vigueur, […] le raccordement de stations de base mobiles n'a pas lieu de relever de ce Contrat. »

Par courrier du 1er septembre 2017, la société Free a réitéré sa demande sous des termes identiques à son courrier du 2 novembre 2016, en ajoutant la précision selon laquelle : « Nous ferons notre affaire du lien entre le boitier d’extraction (de type PBO) et l’antenne, tant pour la construction que l’exploitation ».

Par courrier du 1er septembre 2017, Orange a réitéré son refus dans des termes identiques à son précédent courrier.

Il résulte donc des réponses d’Orange du 19 décembre 2016 et du 21 juillet 2017 qu’Orange a opposé un refus à la demande 3 de Free, objet du présent litige.

Compte tenu de l’ensemble des échanges intervenus entre les parties et rappelés ci-avant, l’Autorité considère que l’échec des négociations sur chacune des trois demandes de la société Free est avéré et que les conclusions de la société Free sont recevables.

3          Sur les arguments d’Orange relatifs à la légalité du recours par l’Arcep à une consultation d’opérateurs tiers à la procédure

Orange fait valoir que la consultation des opérateurs Bouygues Telecom et SFR dans le cadre de l’instruction sous la forme d’un questionnaire et d’auditions est contraire aux dispositions de l’article L. 36-8 du CPCE et de l’article 12 du règlement intérieur de l’Autorité, et demande à ce que ces éléments soient écartés des débats37. Orange soutient, d’une part, que l’Arcep ne peut consulter directement  des  opérateurs  concurrents  à  l’une  des  parties  au  différend,  ceux-ci  ayant  un  avis « partial », et peut uniquement consulter des experts sur des domaines très précis et, d’autre part, que les consultations ne peuvent porter que sur des sujets techniques, économiques ou juridiques ce qui ne serait pas le cas en espèce. Orange considère en outre que les textes susmentionnés ne prévoient pas la possibilité pour les rapporteurs d’auditionner un tiers au différend, et notamment un tiers « partial », en étant assistés d’agents de l’Autorité.

Il ressort de l’article L. 36-8 du CPCE que l’Autorité peut procéder à des « consultations techniques économiques ou juridiques ou expertises respectant le secret de l’instruction du litige ». Par ailleurs, il ressort de l’article 12 du règlement intérieur de l’Autorité que « Le rapporteur ou son adjoint peut procéder en respectant le principe du contradictoire à toute mesure d’instruction qui lui paraîtrait utile […] » et que « [d]ûment autorisé à cet effet par la formation [RDPI] de l’Autorité, le rapporteur […] peut procéder à des consultations techniques économiques ou juridiques ou expertises en respectant le secret de l’instruction du litige ».

Dès lors, rien ne s’oppose à ce que les rapporteurs, considérant utile à l’instruction de bénéficier des éventuels éclairages d’opérateurs tiers, aient pu procéder à de telles consultations sur des points économiques, techniques et juridiques tels que ceux qui ont été abordés dans le cadre du questionnaire et des auditions organisées par les rapporteurs. En outre, et contrairement aux allégations d’Orange, rien n’interdit aux rapporteurs d’être assistés d’agents de l’Autorité dans le cadre d’auditions menées pour les besoins de l’instruction. Par ailleurs, la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction a approuvé et autorisé, conformément aux dispositions précitées, l’organisation de ces consultations38, qui se sont tenues dans le respect du secret de l’instruction39 et du principe du contradictoire40.

4          Analyse des demandes

Au préalable, Orange reproche à Free le caractère prospectif de ses demandes 1 et 2, considérant, d’abord, que Free part du postulat qu’Orange refuserait de « renouveler le contrat » et pourrait l’exclure dans 20 ans du réseau qu’il a cofinancé alors qu’Orange continuerait à l’utiliser41 et, ensuite, que « Free construit […] un raisonnement prospectif dans la perspective  d’un  différend  tarifaire futur » qui n’est pas encore intervenu.42

L’Arcep constate cependant que l’objet des demandes de Free porte bien sur la modification des clauses actuelles du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange et que c’est bien à la suite du refus d’Orange de faire droit aux demandes de Free visant à répondre à ses préoccupations actuelles, notamment à son besoin actuel de visibilité sur l’exécution du contrat (sur le besoin de visibilité, voir en particulier les parties 4.1.5a) et 4.2.3a)) et à remédier à la possible réalisation des situations envisagées que Free saisit l’Arcep en règlement de différends. Par conséquent, dès lors que l’échec des négociations est avéré pour chacune des demandes et que l’Autorité est compétente pour en connaitre, il lui revient donc de se prononcer sur leur bien-fondé.

4.1        Sur la demande 1 de Free de pouvoir en contrepartie de son cofinancement disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau

4.1.1                  Rappel de la demande de Free

Free demande à l’Arcep « d’enjoindre à Orange de proposer, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend, un avenant modifiant le contrat et ayant strictement pour objet de faire droit aux demandes ». La demande 1 formulée par Free est  la suivante :

« Nous demandons, en contrepartie de notre cofinancement dans les boucles locales optiques déployées par Orange sur fonds privés, à disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau.

« Il est entendu que la jouissance du droit d’accès est soumise au paiement, par le groupe Iliad, d’une quote-part des coûts d’investissements initiaux, des frais d’exploitation et de maintenance (dont location de génie civil) et des réinvestissements qui seraient nécessaires pour maintenir le réseau en bon état de fonctionnement sur sa durée d’exploitation technique et commerciale. Il est entendu qu’Orange restera libre de sa décision de cesser l’exploitation technique et commerciale du réseau. »43

4.1.2                  Rappel du cadre juridique applicable

La loi de modernisation de l’économie n° 2008-776 du 4 août 2008, a fixé le cadre juridique de la régulation de la partie terminale des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné, en instaurant un principe de mutualisation de la partie terminale des réseaux entre opérateurs. L’article L. 34-8-3 du CPCE dispose ainsi que :

« Toute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne […].

L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point […] permettant le raccordement effectif d’opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d’accessibilité raisonnables. […] Tout refus d'accès est motivé.

Il fait l'objet d'une convention entre les personnes concernées. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de l'accès […].

Pour réaliser les objectifs définis à l’article L. 32-1, et notamment en vue d’assurer la cohérence des déploiements et une couverture homogène des zones desservies, l’autorité peut préciser, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l’accès prévu au présent article. »

En application de ces dispositions, l’Arcep a précisé les modalités de l’accès aux lignes FttH dans trois décisions réglementaires :

- la décision n° 2009-1106 en date du 22 décembre 2009 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée ;

- la décision n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses ;

- la décision n° 2015-0776 en date du 2 juillet 2015 sur les processus techniques et opérationnels de la mutualisation des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique.

L’article 6 de la décision n° 2010-1312 impose à l’opérateur d’immeuble, conformément à l’article 2 de la décision n° 2009-1106, d’offrir aux autres opérateurs un accès passif aux lignes au niveau du point de mutualisation « dans des conditions raisonnables, objectives, transparentes et non discriminatoires ».

S’agissant des formes que doit prendre cet accès, l’article 8 de la décision n°2010-1312 précise que « L’opérateur d’immeuble offre, au niveau du point de mutualisation, un accès aux lignes permettant de participer au cofinancement de celles-ci, tant ab initio qu’a posteriori, ainsi qu’un accès passif à la ligne, en location. »

L’Arcep a également précisé les modalités de publication des offres d’accès à l’article 10 de la décision n° 2010-1312 qui prévoit que :

« Conformément à l’article 4 de la décision n° 2009-1106 de l’Autorité, l’opérateur d’immeuble publie, antérieurement à l’installation du point de mutualisation, des offres de cofinancement ab initio et a posteriori ainsi qu’une offre de location permettant un accès passif à la ligne ».

L’article 4 de la décision n° 2009-1106 prévoit que l’opérateur d’immeuble doit publier une offre d’accès précisant notamment « les conditions tarifaires ». À cet égard, l’Arcep a indiqué dans les motifs de sa décision que : « Les opérateurs tiers ont besoin, lors de l’élaboration de leurs plans d’affaires et de leurs stratégies techniques et commerciales, de disposer d'une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées par l’opérateur d’immeuble » (soulignement ajouté).

Dans les motifs de la décision n° 2010-1312, l’Autorité a précisé que la pérennité de l’accès faisait partie des modalités d’accès aux lignes FttH en dehors des zones très denses dans l’hypothèse du cofinancement :

« En dehors des zones très denses, il apparaît nécessaire que l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers des modalités d’accès garantissant un accès pérenne dans des conditions non discriminatoires et permettant de monter dans l’échelle des investissements » (soulignement ajouté).

L’Autorité a également indiqué que :

« Concernant les risques d’abus d’exploitation, le partage des coûts permet de réduire le risque de constitution d’une rente de monopole puisque les opérateurs cofinanceurs détiennent des droits d’usage pérennes payés au regard d’un partage objectif des coûts, qui leur permet de ne pas être dépendants, dans la durée, du prix des offres de location fixés par le  détenteur  de  l’infrastructure. Concernant les risques d’abus d’éviction sur le marché aval, les opérateurs bénéficiant, de manière pérenne, des mêmes droits d’usage de l’infrastructure que son propriétaire, les risques de discrimination s’en trouvent très sensiblement réduits »44 et que « l’opérateur d’immeuble propose une offre d’accès qui permette à tout moment aux opérateurs tiers de valoriser leurs droits d’usage de long terme dans leurs bilans, à l’instar du détenteur de l’infrastructure, afin que l’ensemble des opérateurs puisse bénéficier des mêmes avantages relatifs à la structure financière de leurs dépenses »45 (soulignement ajouté).

À cet égard, l’Autorité de la concurrence, dans son avis n° 10-A-18 relatif à la décision n° 2010-1312, a considéré que « La proposition de l’ARCEP d’instaurer le principe d’un droit d’usage pérenne, permettant aux opérateurs tiers de contribuer, ab initio ou a posteriori, de manière forfaitaire à l’investissement dans le réseau fibre, s’inscrit ainsi dans les orientations communautaires et la pratique sectorielle. L’Autorité de la concurrence ne peut qu’adhérer pleinement à cette proposition de nature à concilier l’investissement et la préservation de la concurrence. »46

Elle indique, dans le même sens, que : « l’Autorité de la concurrence soutient pleinement l’ARCEP dans sa volonté de promouvoir le partage du risque, en permettant au plus grand nombre d’opérateurs de prendre part à l’investissement. Le co-investissement, comme la mise à disposition de droits d’usage pérenne(s), permet à la fois de favoriser l’investissement et d’apporter des garanties aux opérateurs quant à leurs conditions d’accès au réseau »47.

4.1.3                  Sur les droits d’usage associés au cofinancement proposés par les opérateurs d’immeuble sur le territoire

Dans un premier temps, il convient d’examiner à titre illustratif les différentes modalités relatives aux droits d’usage des réseaux FttH qui sont proposées par les opérateurs d’immeuble, en application de ces dispositions réglementaires, dans leurs offres d’accès aux lignes FttH en zones très denses et en zones moins denses.

a) Durée des droits d’usage en zones très denses

Conditions contractuelles d’Orange

Orange propose deux droits réels différents selon les typologies de zones au sein des zones très denses48 :

‒ en poches de haute densité, y compris pour les immeubles de moins de 12 logements,

Orange accorde un « droit réel temporaire » dont la nature est différente selon que ce droit porte sur une « fibre dédiée »49 ou sur une « fibre partageable »50. Sur fibre dédiée, le droit réel temporaire consiste en un usufruit. Sur fibre partageable, le droit réel temporaire consiste en un « droit réel de jouissance spécifique »51. Dans les deux cas, « Pour un point de mutualisation donné, le terme de la cession du droit réel temporaire […] est fixé à 30 ans à compter de la date d’installation du PM »52 et « Au terme du droit réel temporaire, la pleine propriété du câblage FTTH objet du droit réel temporaire revient à Orange laquelle accorde automatiquement en retour à l’opérateur un droit de jouissance d’une durée de 15 ans, renouvelable une fois pour une durée identique, applicable aux câblages FTTH installés au jour du terme du droit réel temporaire ».53

L’offre d’Orange prévoit en outre qu’« À l’expiration du droit réel temporaire, le droit de jouissance sera valorisé d’un euro hors taxes par câblage FTTH sous réserve que cette valorisation corresponde à la valeur constatée sur le marché du prolongement des droits d’usage des câblages FTTH au moment de l’attribution du droit de jouissance. Néanmoins, le principe du renouvellement ou le prix devant lui être appliqué devront être adaptés d’un accord commun afin d’être en adéquation avec les pratiques et conditions de marché du prolongement des droits d’usage des câblages FTTH (tarifaires, juridiques,…) constatées au moment du renouvellement. Cette règle est également applicable pour déterminer le prix du renouvellement du droit de jouissance ».54

L’opérateur cofinanceur peut ainsi disposer, au regard des conditions prévues par l’offre d’Orange, d’un droit d’accès de 60 ans sur le réseau FttH déployé en zones très denses par Orange.

‒ en poches de basse densité55, Orange propose les mêmes conditions que pour les zones moins denses, qui seront détaillées en partie 4.1.5a) de la présente décision.

Conditions contractuelles de Free Infrastructure

Free infrastructure propose pour les zones très denses un droit d’usage consistant en un droit de jouissance, débutant au jour de la mise à disposition des lignes FttH par Free56 et durant jusqu’à l’« expiration d’une période ferme de trente (30) ans à compter du 1er janvier de l’année suivant l’année de la Date d’effet de la Mise à Disposition […] »57.

S’agissant du renouvellement du droit d’usage, l’offre de Free Infrastructure prévoit que :

« Le Droit d’Usage est tacitement renouvelé pour l’ensemble des Immeubles situés dans une Commune par période de trente (30) ans sauf dénonciation par l’OPERATEUR COMMERCIAL notifiée par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception envoyée au plus tard douze (12) mois avant la date d’expiration.

Le prix du renouvellement du Droit d’Usage est fixé à un (1) euros hors taxe par Immeuble. Le nombre de renouvellements est limité à deux (2) »58.

Free a indiqué dans ses réponses au premier questionnaire des rapporteurs que « En zone très dense, le tarif de 1€ ne peut pas être modifié unilatéralement par Free Infrastructure », que « le renouvellement est automatique sauf éventuelle renonciation par l’opérateur commercial audit renouvellement » et que le renouvellement du droit d’usage n’était pas soumis à la réalisation d’un audit. Free a également indiqué que ces conditions « offrent à l’opérateur commercial les moyens de pouvoir renouveler son droit d’usage pendant 90 ans (sauf si le réseau n’existe plus) »59, et sauf dérogation60.

Conditions contractuelles de SFR

SFR propose en contrepartie du cofinancement un droit d’usage de type « IRU » (pour « Indefeasible right of use » – droit d’usage irrévocable), non exclusif (pour les fibres partageables) et exclusif (pour les fibres dédiées) pour l’ensemble des zones très denses d’une durée initiale de 30 ans, renouvelable tacitement pour 1 € symbolique pour 2 périodes de 30 ans.61

b) Durée des droits d’usage en zones moins denses

L’Autorité développera plus précisément les droits associés au cofinancement en zones moins denses qu’Orange propose à Free dans son contrat d’accès en partie 4.1.5 de la présente décision.

S’agissant de Free Infrastructure, Free a indiqué dans ses réponses au premier questionnaire des rapporteurs que « La durée du droit d’usage cédé par Free Infrastructure est de 90 ans. Le droit initial d’une durée de 30 ans est renouvelé tacitement conformément aux stipulations de l’article 6.2 (sans que l’opérateur commercial n’ait même à demander, donc) pour 2 x 30 ans, pour l’euro symbolique, sauf si l’opérateur commercial s’y oppose. Free Infrastructure n’a pas la faculté contractuelle de s’opposer au renouvellement ou d’en réduire la durée » et que « le droit d’usage est renouvelé par périodes de 30 ans au prix de 1 € par Immeuble FTTH ».62

En zones moins denses d’initiative privée, SFR propose en contrepartie du cofinancement un droit d’usage de type « IRU », non exclusif d’une durée initiale de 20 ans, renouvelable tacitement pour 1 € symbolique pour une période de 20 ans.63

D’autres opérateurs d’immeuble, notamment en zone d’initiative publique (où les pratiques en la matière sont toutefois à l’heure actuelle hétérogènes), proposent, dans leurs offres d’accès aux lignes FttH, des durées initiales de droit d’usage égales à 20 ans, avec différentes modalités de prolongation de ce droit. Par exemple, l’offre d’accès de la filiale d’Axione, « Vaucluse numérique », propose, depuis juin 2017, un droit d’usage du réseau FttH d’une durée initiale de 20 ans, renouvelé « automatiquement et sans aucune formalité », à l’issue de cette durée initiale, « par période de cinq ans ».64 Les offres d’accès des filiales de SFR collectivités proposent les mêmes conditions que SFR en zone AMII, c’est-à-dire une durée initiale d’accès au réseau FttH de 20 ans renouvelée tacitement pour une durée de 20 ans (voir supra).65 Les offres d’accès des filiales d’Altitude infrastructure prévoient à ce jour que les droits d’usage sont accordés pour une durée de 20 ans, et qu’une prolongation est accordée au terme de cette première durée « si l’ensemble des caractéristiques techniques de l’Infrastructure FTTH à cette date le permet ». À cet effet, les offres d’accès prévoient que les parties se réunissent dix ans avant l’échéance des droits d’usage pour examiner les modalités de prolongation desdits droits.66 Enfin, les filiales de Covage ont choisi des stipulations similaires à celles d’Orange dans ses offres d’accès en zones moins denses.67

4.1.4                  Représentation schématique de la demande de Free

La demande de Free peut être schématisée comme suit :

IMG1.png

Représentation schématique réalisée à partir de la demande de Free et des stipulations du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange (Source : Arcep)

4.1.5                  Sur le fond

a) Les modalités du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, relatives aux droits d’usage accordés actuellement par Orange, ne sont pas compatibles avec le besoin de visibilité et de transparence de Free

En premier lieu, il apparaît que l’imprécision des stipulations contractuelles actuelles d’Orange rend difficilement prévisible pour Free la connaissance de la durée effective des droits d’usage.

Free indique qu’en « faisant le choix du cofinancement ab initio, donc de supporter un engagement financier irrévocable important et de supporter dans la durée une partie du risque économique et commercial du réseau, Free entend bénéficier d’un accès sécurisé et pérenne à ce réseau pour autant que celui-ci est exploité. »68

La restriction des droits d’usage à une durée initiale de 20 ans et l’absence de visibilité sur les conditions de renouvellement impliquent, selon Free, une « précarité »69 pour le cofinanceur qui, in fine, « prive Free d’une partie de l’intérêt de participer au cofinancement des déploiements, qui est de sécuriser des droits sur le long terme »70, et s’oppose à « l’objectif d’une concurrence effective et loyale »71 fondée, en l’espèce, « sur un accès pérenne et non précaire »72.

Selon Orange, « Free bénéficie d’ores et déjà d’un droit à la prolongation de son droit d’accès »73, c’est-à-dire « un droit d’accès d’une durée de 20 ans »74 et « d’un droit au renouvellement de son  droit d’accès »75, ce dernier étant conditionné aux caractéristiques techniques des lignes FttH à la date de renouvellement, « telles qu’auditées par Orange »76. En outre, Orange considère que le contrat « est sans ambiguïté sur le fait que le Renouvellement du Droit ne dépend pas du bon vouloir d'Orange »77 puisque celui-ci serait garanti dès lors que les caractéristiques techniques  le permettent, à la suite de l’audit réalisé par Orange, et qu’en conséquence le « renouvellement du droit est acquis pour Free »78.

L’Autorité constate, tout d’abord, que la durée effective des droits accordés par Orange peut être, dans certains cas, inférieure à 20 ans. Le contrat stipule en effet que la cession du « Droit Réel Temporaire » sur une ligne FttH est réalisée au fur et à mesure des mises à dispositions des points de branchement optique (PBO) et des prises terminales optiques (PTO), à compter de la date de mise à disposition du PM.79 Le contrat stipule également que « La cession du Droit Réel Temporaire pour un PM donné, toutes opérations de cession confondues (sur les Câblages de sites, Câblage Client Final), intervient pour une durée fixée à 20 ans à compter la date d'installation du PM. »80 Il résulte de ces stipulations, ainsi que l’explique Free dans ses écritures, que la durée effective des droits peut être, en pratique et dans certains cas, inférieure à 20 ans.81

L’Autorité relève, ensuite, que les conditions du renouvellement du droit d’accès prévues par le contrat sont imprécises.

Les stipulations du contrat relatives au renouvellement du droit d’usage sont rédigées comme suit :

« Au terme de la durée initiale du Droit Réel Temporaire ou du droit de jouissance sur les Lignes FTTH composées d'un Câblage d'immeuble tiers, si l'ensemble des caractéristiques techniques des Câblages FTTH à cette date, telles qu’auditées par Orange, le permet, Orange accorde à l'Opérateur une prolongation de son droit pour une durée qui est objectivement déterminée au regard de la durée de vie technique résiduelle du Câblage FTTH dans son ensemble […]. »82

Le même article précise que : « L’éventuelle prolongation du droit de l’Opérateur fait l'objet d'une tarification assise sur l’ensemble des coûts à venir et afférents au Câblage FTTH, notamment les coûts liés à son exploitation, à sa maintenance et à sa mise à niveau éventuelle. À cet effet, les Parties conviennent de se réunir un an avant le terme des premiers droits accordés sur une Zone de cofinancement afin d’examiner les modalités d'une telle prolongation »83 (soulignement ajouté).

Compte tenu de ces éléments et dans la mesure où Orange ne décide de l’éventuelle prolongation des droits d’accès qu’à l’issue d’un audit « réalisé au plus tard avant le terme de la durée initiale »84 et où les parties « conviennent de se réunir un an avant le terme des premiers droits accordés » afin d’examiner les modalités de la prolongation de ces droits85, il apparaît que Free se trouve dans une situation d’incertitude sur le principe même du renouvellement de ses droits ainsi que sur les modalités de ce renouvellement pendant une longue période, pouvant être de 19 ans.

En particulier, l’Autorité relève que les modalités de réalisation de l’audit ne sont pas précisées par le contrat. À cet égard, Orange a indiqué au cours de l’instruction ne pas pouvoir déterminer dès aujourd’hui les modalités de mise en œuvre de l’audit permettant de déterminer objectivement la durée issue de la prolongation du droit initial et basée sur la durée de vie technique résiduelle86.

En outre, l’Autorité note que la rédaction du contrat actuel n’est pas aussi précise que celle de l’offre d’accès aux lignes FttH d’Orange pour les poches de haute densité des zones très denses présentée en partie 4.1.3a)de la présente décision, qui stipule qu’au terme du droit réel temporaire, un droit de jouissance « d’une durée de 15 ans, renouvelable » est accordé « automatiquement ».87 Orange explique ces différences par le fait que dans les poches de haute densité des zones très denses le droit est concédé au niveau de chaque immeuble, alors que dans les zones moins denses, le droit est concédé à la maille d’une zone, ce qui rend la durée de vie de l’infrastructure « plus difficile à définir » au-delà de la durée initiale de 20 ans.88 Orange explique également que la durée du droit en zones très denses « est indissociablement liée à la capacité de mettre un terme au droit en cas de dépose du câblage » existant en vertu d’une clause du contrat d’accès, tandis qu’en zones moins denses le droit étant concédé à la maille d’une zone, « il n’est évidemment pas possible de reproduire la clause de la zone très dense en indiquant que le droit s’arrêterait dès que le moindre élément du réseau serait détruit ou déposé »89. Toutefois, l’Autorité relève que les modalités contractuelles de dépose des lignes FttH par Orange sur le segment PM-PTO sont les mêmes en zones moins denses qu’en zones très denses, et que la dépose des lignes FttH entraine l’extinction du droit qui a été conféré à Free.90 L’Autorité considère donc que l’argument d’Orange relatif à la dépose des lignes FttH n’est pas pertinent.

Enfin, l’Autorité constate que les précisions apportées par Orange dans le cadre de l’instruction sur la circonstance que le renouvellement du droit serait « acquis pour Free » ne sont actuellement pas formalisées dans le contrat d’accès d’Orange dont les clauses actuelles rappelées ci-dessus évoquent notamment une « éventuelle prolongation » du droit d’usage.

Les stipulations contractuelles actuelles ne sont donc pas suffisamment précises pour considérer que la prolongation du droit d’accès est actuellement garantie pour Free.

Compte tenu de ce qui précède, l’Autorité considère que Free ne dispose pas d’une visibilité suffisante sur la durée effective des droits d’usage après la durée initiale alors que la prévisibilité à long terme est un facteur essentiel pour garantir un accès pérenne aux cofinanceurs du réseau FttH, d’autant que (comme vu précédemment) cette infrastructure a vocation à devenir l’infrastructure de référence de la boucle locale fixe et, partant, le principal support de l’activité de Free sur le marché du haut et du très haut débit dans le futur (cf. infra).

En second lieu, l’Autorité considère que le statut particulier de cofinanceur du réseau FttH  implique un besoin de visibilité et de transparence sur la durée des droits d’usage dès lors qu’il partage les risques de l’opérateur d’immeuble en étant solidaire sur les dépenses ultérieures, s’agissant notamment des dépenses récurrentes.

Comme développé en détail dans la partie 4.2.3b), Free s’est engagé, sur le long terme, à cofinancer les réseaux FttH déployés par Orange sur la grande majorité des zones AMII d’Orange. Cette démarche de Free procède d’une réelle stratégie d’investissement, dans la durée, Free ayant déjà investi [SDA] dans le déploiement des réseaux FttH d’Orange.

L’Autorité considère que le niveau significatif d’investissement consenti par Free dans le cofinancement du réseau FttH en zone AMII vient renforcer pour Free la nécessité d’avoir de la visibilité à long terme sur ses investissements et de bénéficier d’une transparence sur les investissements qui ont été faits dans le réseau FttH déployé par Orange et donc sur la durée des droits d’accès au réseau dans lequel il a co-investi.

L’Autorité estime donc qu’il est justifié de satisfaire les besoins de visibilité et de transparence sur la durée des droits d’usage pour Free, en tant qu’opérateur cofinançant significativement le réseau FttH d’Orange en zone AMII.

Or, l’Autorité estime, au regard de ce qui précède, que les droits d’accès d’une durée initiale de    20 ans associés aux conditions de leur renouvellement, telles que proposées par Orange dans le contrat d’accès, ne permettent pas de satisfaire les besoins de visibilité et de transparence sur la durée des droits d’usage pour Free.

b) Des modalités contractuelles prévoyant la fourniture d’un accès d’une durée définie, d’au moins 40 ans permettraient à Free de bénéficier d’un accès dans des conditions de visibilité et transparence adaptées

Comme indiqué par l’Autorité ci-avant (partie 4.1.2), l’accès pérenne prévu par le cadre symétrique répond aux besoins de transparence et de prévisibilité des cofinanceurs. Il revient donc à l’Autorité, dans le cadre de la présente décision, de préciser les conditions équitables et raisonnables dans lesquelles Orange doit accorder à Free un droit d’usage pérenne à ses lignes FttH en zones moins denses.

À titre liminaire, l’Autorité note que la demande de Free ne porte pas sur la nature du droit d’accès (qu’il s’agisse d’un droit réel temporaire ou d’un droit personnel).

Free a indiqué dans ses écritures qu’il considère qu’il n’y a pas d’obstacle juridique à concéder un droit d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau tandis qu’Orange considère que l’Autorité ne peut imposer à Orange de fournir à Free un droit d'accès aux lignes FttH d'Orange, d’une durée égale à celle de l'exploitation du réseau, qui serait un droit réel. Orange indique d’ailleurs que « Free se garde bien de faire référence à la nature des droits qui lui seraient octroyés et entretient un flou volontaire » et « qu’il serait en effet déraisonnable et disproportionné d'imposer à Orange de grever son droit de propriété d'un droit réel pour la durée de vie du réseau ».91 Orange ajoute en réponse au questionnaire des rapporteurs qu’il « doit disposer de la liberté d’accorder un droit uniquement personnel pour la période de renouvellement » et considère que Free « soutient vouloir disposer d’un droit pérenne de même nature que celui qui lui a été  accordé par Orange » initialement.92

Lors de l’audience, Free a indiqué ne pas avoir formulé de demande sur la nature du droit concédé par Orange.

Il ressort de ces éléments que la demande de Free ne porte pas sur la nature du droit d’accès qui sera déterminée contractuellement dans le respect de l’article L. 34-8-3 du CPCE et des objectifs de régulation.93

L’Autorité note que les parties s’entendent sur le fait que la durée de vie du réseau FttH sera très vraisemblablement supérieure à 20 ans

Free considère que la durée de vie du réseau sera supérieure à 20 ans, à l’instar de la boucle locale cuivre qui est déployée dans le même environnement physique et qui est encore exploitée.94 Orange, de son côté, « ne conteste pas que la fibre pourrait avoir une durée de vie supérieure à 20 ans »95. Selon Orange, « c'est précisément pour cette raison, que le contrat prévoit un renouvellement du  droit »96.

L’Arcep constate donc que les parties sont d’accord sur le fait que la durée de vie du réseau FttH sera très vraisemblablement supérieure à 20 ans.

À titre d'élément de comparaison, l’Autorité note d’ailleurs que la boucle locale cuivre est exploitée depuis les années 60 environ97. En 2020, il est raisonnable de penser que les offres sur boucle locale cuivre n’auront pas disparu. La migration des accès vers le nouveau réseau FttH se fera ensuite progressivement dans la prochaine décennie. Il en résulte que l’exploitation technique et commerciale de la boucle locale cuivre aura une durée de l’ordre de 60 ans. L’Autorité note par ailleurs que des réseaux en fibre optique déployés il y a de nombreuses années sont encore en activité ; c’est notamment le cas des dorsales optiques (« backbones ») internationales et transnationales qui ont été construites et exploitées à partir des années 1980.

Des contrats existants proposent des durées plus longues

L’Autorité relève que d’autres contrats existants (cf. partie 4.1.3) proposent, d’une part, des durées initiales plus longues que 20 ans et, d’autre part, des renouvellements successifs « automatiques ».

C’est d’ailleurs le cas d’Orange dans son offre d’accès en poche de haute densité des zones très denses.

Sur la capacité d’Orange à réévaluer les conditions tarifaires indépendamment du renouvellement du droit

La société Orange indique qu’elle « n’est pas en mesure d’estimer les coûts d’entretien de mise à niveau ou de renouvellement du réseau FttH qu’elle aura à supporter dans 20 ans » et que si elle « n’est pas en mesure de déterminer ce que pourrait être la facturation du renouvellement, elle est néanmoins en mesure de garantir par l’intermédiaire de cette clause qu’elle ne refacturera pas d’éléments qui auraient été couverts ou qui seront couverts par les tarifs non récurrents du cofinancement, ou les tarifs récurrents prévus par les articles 15 « maintenance » et 16 « remplacement et dépose »98. Par ailleurs, Orange indique que « L’augmentation de la durée de concession des droits réels temporaires agit mécaniquement sur le sommet de la courbe bombée des coefficients ex post ainsi que sur la trajectoire de décroissance. Cette augmentation de la durée de concession des droits réels temporaires vient  donc  renchérir  d’autant  le  cofinancement  a  posteriori »99.

Dans les conditions contractuelles actuelles, l’Autorité relève que le renouvellement des droits à 20 ans peut donner lieu à une tarification ad hoc de renouvellement ou à une adaptation de la tarification de l’accès au réseau FttH pour la période subséquente. Ces possibilités apparaissent néanmoins redondantes avec les facultés tarifaires permises par ailleurs par le contrat et ne justifient pas en elles-mêmes d’un besoin de prévoir une échéance des droits à 20 ans dans sa forme actuelle.

En premier lieu, le contrat prévoit que le cofinanceur est solidaire des coûts tout au long de la vie du réseau FttH.

Dans le cadre de sa demande, Free indique que la « jouissance du droit d’accès » donne lieu au paiement d’une quote-part d’un certain nombre coûts initiaux, frais d’exploitation et réinvestissements sur le réseau.

Free fait valoir que deux postes de coûts « sont déjà supportés par Free tout au long de la vie du contrat : l’exploitation et la maintenance »100.

L’Autorité constate que le contrat stipule qu’Orange assure la maintenance des lignes FttH en zones moins denses, le prix mensuel payé par Free dans le cadre du prix du cofinancement comprenant le prix de la maintenance des liens entre le nœud de raccordement optique (NRO) et la PTO101. Des conditions de remplacement et de dépose des liens entre le NRO et la PTO sont également prévues par le contrat et font partie des frais d’exploitation du réseau cofinancé102.

Par ailleurs, l’Autorité constate que le contrat prévoit actuellement que « L’éventuelle prolongation du droit de l’Opérateur fait l’objet d’une tarification assise sur l’ensemble des coûts à venir et afférents au Câblage FTTH, notamment les coûts liés à son exploitation, à sa maintenance et à sa mise à niveau éventuelle »103.

S’agissant de ces « coûts à venir », Free indique qu’en tant que cofinanceur, il est « d’ores et déjà solidaire des dépenses d’exploitation, de maintenance préventive et curative et des réinvestissements nécessaires pour conserver le réseau en bon état d’exploitation sur une longue période »104 et « qu’aucune dépense non couverte ne justifie un nouveau péage dans 20 ans ».105

Orange de son côté, a précisé au cours de l’instruction que :

- les investissements et réinvestissements réalisés durant la période initiale de 20 ans ne seront pas facturés sous forme d’un tarif non récurrent à l’échéance de la période initiale ;

- la tarification sera assise sur les coûts strictement à venir après la période initiale de 20 ans ;

- le prix du renouvellement ne pourra être assis que sur des éléments non facturés par ailleurs.106

L’Autorité relève qu’Orange,107 n’a pas indiqué dans le cadre de l’instruction quels seraient les éventuels nouveaux coûts d’exploitation ou de réinvestissements qui pourraient être révélés à échéance de la durée initiale du droit d’usage, lors de l’audit effectué par Orange, et que, comme l’indique Free, « l’exercice du droit d’accès au réseau FttH est soumis à la prise en charge par Free des frais d’exploitation et de maintenance via le paiement d’une redevance mensuelle »108.

En deuxième lieu, l’Autorité constate que le contrat prévoit la possibilité pour Orange de modifier ses conditions tarifaires pour répondre notamment aux évolutions de coûts qu’il pourrait connaître ou aux aléas de la vie du réseau FttH.109

Dès lors, l’Autorité estime que ces stipulations contractuelles actuelles permettent à Orange de faire évoluer ses tarifs pour tenir compte des coûts liés à son exploitation, à sa maintenance et à sa mise à niveau éventuelle (notamment lors d’une évolution des coûts de construction et d’exploitation de lignes FttH) permettant des ajustements des conditions tarifaires110 sans que ceux-ci n’aient nécessairement à intervenir à une date correspondant au renouvellement des droits d’usage. Le contrat prévoit également les cas de frais de dépose et de remplacement des lignes FttH pour lesquels le cofinanceur paye une part qui lui est imputable au titre du cofinancement.111 S’il n’est pas exclu qu’Orange puisse adapter les modalités de réévaluations des conditions tarifaires pour tenir compte d’une durée des droits plus longue que la durée actuelle prévue au contrat, celles-ci devraient toutefois être justifiées de manière transparente auprès de ses cofinanceurs (cf. partie 4.2.5 sur la demande 2c).

En troisième lieu, Orange n’a pas démontré en l’état la nécessité de modifier la courbe ex post dès lors que la durée des droits évolue.

Orange a indiqué que l’augmentation de la durée des droits d’usage remet « mécaniquement » en cause la courbe dite « ex post » servant à définir les tarifs de cofinancement a posteriori et que Free  omet délibérément d’évoquer le cofinancement a posteriori. Or la tarification du cofinancement a posteriori – à laquelle Free se retrouvera d’ailleurs nécessairement confronté quand il souhaitera souscrire de nouvelles tranches de cofinancement dans les zones où il est déjà présent ab initio – est justement liée directement à la durée de concession des droits réels temporaires, au moyen d’un coefficient ex post »112.

En effet, le contrat d’accès stipule que « En cas de cofinancement a posteriori, un coefficient ex post est appliqué sur les prix forfaitaires au nombre de Logements Couverts et de Logements  Raccordables. »113 Concrètement, le tarif non-récurrent de cofinancement a posteriori114 est déterminé par le produit du tarif non-récurrent ab initio et d’un coefficient dit « ex post », lui-même déterminé en fonction du délai entre la mise à disposition du PM et l’entrée en cofinancement, sur chaque composante du tarif ab initio (logement couvert ; logement raccordable).

Orange présente à l’appui de sa démonstration un graphique montrant différentes courbes de coefficients ex post en fonction de la durée d’application des droits réels temporaires, qui auraient été calculées en application du modèle tarifaire de l’Autorité, et conclut ensuite que l’augmentation de la durée de concession des droits réels temporaires agit mécaniquement « sur le sommet de la courbe bombée des coefficients ex post ainsi que sur la trajectoire de décroissance » et considère que si l’Autorité impose à Orange une durée plus longue, cela aurait pour effet d'augmenter considérablement le niveau des coefficients ex post.115

Orange a réaffirmé son analyse lors de l’audience entre les parties du 3 mai 2018.

L’Autorité considère qu’Orange n’a pas démontré l’existence de conséquences sur l’application du coefficient ex  post. En effet,  il ressort  du modèle tarifaire  publié  par l’Autorité116 que  le paramètre « durée des droits accordés » y est sans incidence sur le niveau de la courbe ex post117. L’Autorité constate d’ailleurs qu’Orange elle-même utilise une courbe de coefficient ex post identique pour ses offres d’accès à ses réseaux de fibre optique mutualisée FttH en zones très denses et en dehors des zones très denses, alors même que la durée initiale des droits accordés est différente (respectivement 30 ans et 20 ans)118. En l’absence de démonstration circonstanciée, il n’apparaît  pas que la courbe ex post doive nécessairement être modifiée en cas d’évolution de la durée des droits accordés aux opérateurs commerciaux.

Sur l’adéquation à la demande de Free et la proportionnalité pour Orange d’une durée de droits définie, d’au moins 40 ans

L’Autorité retient qu’une durée de droits définie, d’au moins 40 ans, et cohérente avec l’évaluation de Free de la durée de vie minimum d’un réseau FttH, satisferait à la demande de ce dernier.

En effet, dans ses dernières écritures, Free indique que « La seule demande équivalente à celle que nous avons formulée, serait de remplacer dans notre demande les mots « à disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale à la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau » par « à disposer d’un droit d’accès au réseau d’une durée égale 60 ans ». En effet, la durée d’exploitation technique et commerciale d’un réseau de boucle locale filaire est vraisemblablement de l’ordre de 60 ans. C’est notamment la durée de vie technico-économique du réseau de boucle locale cuivre, qui fait référence. Bien évidemment, avec cette durée longue, pouvant être considérée comme équivalente à la durée de vie technico-économique du réseau, il est nécessaire que les cofinanceurs cofinancent effectivement une quote-part de toutes les dépenses, et qu’Orange puisse décider seule, le cas échéant, avant ce terme de 60 ans, de l’extinction technique et commerciale du réseau. Les droits seraient alors accordés pour 60 ans, sauf si Orange décide, seule et sans rien nous devoir, de mettre préalablement un terme à l’exploitation technique et commerciale du réseau. »119.

Lors de l’audience du 3 mai 2018, Free est venu préciser ces éléments en indiquant que, selon lui, une durée cohérente avec la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau FttH d’Orange serait comprise entre 40 et 60 ans, dès lors qu'il n'existait pas à sa connaissance de réseau dont la « durée de vie » ait été inférieure à une durée comprise entre 40 et 60 ans.

Il ressort de l’examen par l’Autorité de la demande de Free, que le besoin de Free de disposer de la visibilité adéquate au regard des investissements consentis et cohérente avec ce qui peut être observé par ailleurs se traduit par une demande à bénéficier d’un droit d’une durée définie à l’issue de négociations de bonne foi d’au moins 40 ans (sauf si Orange décide de mettre un terme à l’exploitation technique et commerciale de son réseau à une date antérieure, ce que ne conteste pas Free).

L’Autorité souligne que, comme vu précédemment, Orange n’a jamais contesté le fait que la durée d’exploitation technique et commerciale du réseau pourrait  vraisemblablement  être supérieure à  20 ans mais a indiqué ne pas connaître pour autant et dès à présent la durée du renouvellement des droits. Or, l’Autorité note qu’Orange propose des droits d’accès pouvant atteindre 60 ans en zones très denses (durée initiale de 30 ans renouvelable 2 fois par période de 15 ans).

D’autres opérateurs de gros proposent par ailleurs en zones moins denses des droits à renouvellement « automatique » pour des durées totales s’échelonnant de 40 à 60 ans.

Compte tenu de ces éléments, et dans la mesure où les conditions tarifaires et financières actuellement prévues dans le contrat d’accès entre Free et Orange pour les zones moins denses ne font pas obstacle à une durée des droits supérieure à 20 ans, demander à Orange de faire évoluer cette durée des droits pour qu’elle permette à Free de disposer de la visibilité adéquate au regard des investissements consentis et cohérente avec ce qui peut être observé par ailleurs sur le marché, n’apparait pas disproportionné. À cet égard, l’Autorité invite les parties à négocier de bonne foi une durée des droits définie d’au moins 40 ans, durée qui pourrait être supérieure à 40 ans.

4.1.6           Conclusion générale de la demande 1 de Free

Au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, et au vu en particulier de l’article L. 34-8-3 du CPCE, des décisions réglementaires prises en son application et des objectifs de régulation mentionnés à l’article L. 32-1 du CPCE, notamment les objectifs de « développement de l’investissement, de l’innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques » et « d’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale », l’Autorité estime qu’il est justifié et raisonnable qu’Orange propose à Free, à l’issue de négociations menées de bonne foi, un droit d’accès d’une durée définie et d’au moins 40 ans, dans des conditions transparentes et prévisibles, lui permettant de disposer de la visibilité adéquate au regard des investissements consentis et cohérente avec ce qui peut être observé par ailleurs sur le marché. Cette durée définie, d’au moins 40 ans, s’entend sous réserve de la décision d’Orange de poursuivre l’exploitation technique et commerciale de son réseau FttH en zones moins denses jusqu’à cette date.

L’Autorité estime néanmoins que si Free doit bénéficier d’un droit d’accès au réseau FttH d’Orange qu’il cofinance pour une durée définie, d’au moins 40 ans, il revient à Orange d’en organiser les modalités, à l’issue de négociations menées de bonne foi avec Free, par exemple en l’accordant sur une seule période, ou en aménageant cette durée, par exemple en accordant automatiquement à l’issue d’une première période initiale de 20 ans un droit de jouissance, en une ou plusieurs périodes, dont il lui revient de déterminer la nature.

L’Autorité considère qu’une phase de négociations, de bonne foi, peut être nécessaire pour déterminer les nouvelles conditions contractuelles encadrant la durée du droit d’accès au réseau FttH d’Orange précisée dans la présente décision. Pour permettre ces ajustements, l’Autorité estime qu’il est justifié de laisser à Orange un délai de 4 mois pour proposer un avenant au contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange faisant bénéficier Free d’un droit d’accès au réseau FttH d’Orange en zones moins denses d’une durée d’au moins 40 ans. Afin que les négociations se déroulent dans de bonnes conditions entre les parties, Orange les initiera par l’envoi d’un projet d’avenant initial dans un délai raisonnable d’un mois à compter de la notification de la présente décision.

4.2        Sur la demande 2 de Free relatives aux évolutions tarifaires et à la transparence des coûts

Free demande à l’Arcep d’enjoindre à Orange de proposer dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend, un avenant modifiant le contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange et ayant pour objet de faire droit à trois sous-demandes concernant les conditions tarifaires de l’accès à savoir :

2a) « à connaître les liens entre les principaux tarifs du contrat[*] et les coûts du réseau que nous cofinançons ; nous souhaitons que le contrat définisse, de manière explicite et transparente, les principaux postes de coûts[**] sous-jacents à ces tarifs et la méthode retenue pour évaluer ces coûts (coûts constatés, coûts moyens projetés dans la durée sur la base d’hypothèses à expliciter, etc.) »

2b) « que le contrat de cofinancement prévoie la transmission à intervalles périodiques des grandes masses des dépenses réelles constatées pour la construction et l’exploitation du réseau cofinancé et pour les trois segments de réseaux (NRO-PM exclu ; PM inclus-PBO inclus ; CCF) en distinguant a minima investissement, exploitation et maintenance, location  de génie civil, frais de portage financier[120] et le cas échéant les principaux autres grands postes de coûts. »

2c) « que le principe de modification unilatérale de prix par Orange soit supprimé au profit d’une clause de discussion réciproque et qu’une évolution tarifaire ne puisse être possible que d’un commun accord entre les parties, suite à une négociation de bonne foi, permettant un recouvrement des coûts et une marge raisonnable. »121

[*] Notamment : le tarif de cofinancement du segment entre le PM et le PBO, le prix de construction du CCF, le tarif récurrent par ligne active, le tarif récurrent de maintenance du CCF, les tarifs des liens entre le PM et le NRO. »

[**] Par exemple pour le tarif récurrent attaché au lien entre le PM  – PBO, les principaux postes de coûts pourraient  être : les dépenses d’exploitation et de maintenance, la location du génie civil et les frais de portage financier de la part non cofinancée. »

Free indique que ses demandes sont justifiées et raisonnables en ce que le contrat actuel ne permet pas de lui donner les éléments de visibilité nécessaires à ses besoins d’anticipation et d’appréciation des évolutions tarifaires mises en œuvre par Orange.122

Orange soutient que « Free, avec cette demande 2, souhaite ni plus ni moins qu'introduire dans le Contrat un principe tarifaire d'orientation/corrélation des tarifs aux coûts, de transparence des coûts supportés par Orange au profit de Free et enfin le contrôle par Free des tarifs d'Orange au regard des coûts supportés par Orange, à l’instar du régulateur […]. Une telle transparence porterait atteinte à la protection du secret des affaires, principe auquel est tenu l’ARCEP. »123

4.2.1                  Sur le contexte : les dispositions du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange relatives au cofinancement et aux conditions tarifaires

À titre liminaire, l’Arcep rappelle que le contrat d’accès prévoit trois prestations d’accès distinguant trois segments de réseaux de la desserte optique (segment de réseau reliant le nœud de raccordement optique (NRO) à la prise terminale optique (PTO)) :

‒ une prestation d’accès au segment de transport optique, entre le NRO et point de mutualisation (PM) ;124

‒ une prestation d’accès au segment de distribution optique, entre le PM et le point de branchement optique (PBO) ;125

‒ une prestation d’accès au segment de raccordement final entre le PBO et la PTO.126

Sur le segment PM-PBO, le contrat d’accès conclu entre Free et Orange prévoit trois formes d’accès :

‒ le cofinancement ab initio, composé de deux tarifs principaux :

o   le tarif initial ci-après dénommé tarif « non-récurrent » ; et

o   le tarif récurrent mensuel. Ce tarif récurrent mensuel correspond à un prix mensuel applicable au nombre de lignes FttH affectées à l’opérateur commercial (c’est-à-dire avec un client final).

‒ le cofinancement a posteriori, composé lui aussi de deux tarifs principaux :

o   un tarif non-récurrent relié au tarif non-récurrent ab initio ; et

o   le tarif récurrent mensuel.

‒ la location passive, composée d’un tarif récurrent mensuel.

La présente demande de Free concerne uniquement l’accès aux lignes FttH d’Orange ayant pris la forme d’un cofinancement.127

L’opérateur commercial qui souscrit à l’offre de cofinancement ab initio ou a posteriori acquiert en contrepartie du cofinancement des droits d’usage d’une durée fixée, en l’état du contrat d’accès actuel, à 20 ans à compter de la date d’installation du PM, renouvelable dans les conditions actuellement prévues par le contrat (cf. supra).

Sur le segment NRO-PM, à l’instar de la prestation d’accès PM-PBO en cofinancement, le tarif comporte deux composantes : un tarif non-récurrent et un tarif récurrent mensuel par fibres optiques passives commandées. Ici, les tarifs sont fonction du nombre de fibres optiques passives commandées et de la longueur du lien NRO-PM.

Sur le segment PBO-PTO, Orange prévoit des modalités tarifaires prenant la forme d’un tarif initial à la date de mise à disposition d’une ligne FttH puis de droits de suite, correspondant à des montants de restitutions128 concernant ce segment.

Il est entendu que les obligations issues du cadre symétrique, c’est-à-dire, l’article L. 34-8-3 du CPCE et notamment les décisions n° 2009-1106 et n° 2010-1312 susvisées, s’appliquent pour l’ensemble de ces prestations. Dès lors, le raisonnement, dans les développements qui suivent, est commun.

4.2.2                  Rappel du cadre juridique applicable à l’ensemble des demandes de Free relatives aux évolutions tarifaires et à la transparence des coûts

L’article L. 34-8-3 du CPCE dispose que :

« Toute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d’accès à ladite ligne et aux moyens qui y sont associés émanant d'opérateurs, en vue de fournir des services de communications électroniques à cet utilisateur final.

L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point […] permettant le raccordement effectif d’opérateurs tiers à des conditions économiques techniques et d’accessibilité raisonnables. […]

Il fait l’objet d’une convention entre les personnes concernées. »

L’Autorité a notamment précisé les modalités de l’accès aux lignes FttH pour l’ensemble du territoire dans sa décision n° 2009-1106, dont l’article 2 dispose que :

« L’opérateur d’immeuble offre aux autres opérateurs l’accès aux lignes au point de mutualisation, sous forme passive, dans des conditions raisonnables et non discriminatoires. »

L’article 8 de la décision n° 2010-1312 relatif à la forme de l’accès précise en outre que :

« L’opérateur d’immeuble offre, au niveau du point de mutualisation, un accès aux lignes permettant de participer au cofinancement de celles-ci, tant ab initio qu’a posteriori, ainsi qu’un accès passif à la ligne, en location.

L’offre de cofinancement ab initio permet à l’opérateur d’immeuble d’identifier, antérieurement à la construction du point de mutualisation, les demandes d’hébergements d’équipements passifs et actifs.

Les offres d’accès a posteriori peuvent prévoir des conditions tarifaires tenant compte du risque encouru dans les conditions précisées à l’article 9 de la présente décision. »

Les obligations tarifaires applicables sont ainsi complétées par l’article 9 de la décision n° 2010-1312 pour les territoires situés en zones moins denses129 :

« Conformément à l’article 3 de la décision n° 2009-1106 de l’Autorité, les conditions tarifaires doivent être raisonnables et respecter les principes de non-discrimination, d’objectivité, de pertinence et d’efficacité.

Les conditions tarifaires de l’accès au point de mutualisation doivent correspondre à une prise en charge d’une part équitable des coûts d’installation des lignes et des ressources associées.

Le taux de rémunération du capital utilisé pour la détermination des conditions tarifaires tient compte du risque encouru et confère une prime à l’opérateur d’immeuble. »

S’agissant du partage du financement ab initio, l’Arcep a précisé dans la décision n° 2009-1106 que :

« Dans ce cadre et en application de l’article L. 34-8-3 du CPCE, il est raisonnable de prévoir que chaque opérateur paye une part équitable des coûts ayant vocation à être partagés par l’ensemble des opérateurs, et, en revanche, assume les coûts imputables à ses choix et modalités de déploiement propres, dans le respect des principes définis précédemment ».130 S’agissant du cofinancement a posteriori, l’Autorité indique dès 2009 que la contribution des opérateurs au partage des coûts doit être déterminée « en utilisant un taux de rémunération du capital qui tienne compte du risque encouru et confère une prime à l’opérateur d’immeuble ».131

Les motifs de la décision n° 2009-1106 indiquent que la tarification des offres d’accès doit être établie en respectant les principes suivants, ainsi définis :

« - le principe de non-discrimination : un traitement discriminatoire d’opérateurs se trouvant dans des situations similaires aurait pour conséquence d’affaiblir la dynamique concurrentielle sur le marché de détail, en favorisant artificiellement une situation ou un choix stratégique ;

- le principe d’objectivité : la tarification mise en œuvre par l’opérateur doit pouvoir être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables ;

- le principe de pertinence : les coûts doivent être supportés par les opérateurs qui les induisent ou ont usage des infrastructures ou prestations correspondantes ; ainsi, l’opérateur d’immeuble ne doit pas supporter de coûts induits par la pose de fibres supplémentaires  pour  d’autres opérateurs ; en outre, ce principe appelle une cohérence entre partage des coûts et partage des revenus ultérieurs éventuels liés à l’accueil d’opérateurs se raccordant ultérieurement à l’immeuble ;

- le principe d’efficacité des investissements : les coûts pris en compte doivent correspondre à ceux encourus par un opérateur efficace ; il convient donc que l’opérateur d’immeuble ne fasse pas supporter de coûts indus ou excessifs aux opérateurs tiers […] ».

L’article 4 de la décision n° 2009-1106 impose la publication d’une offre d’accès ainsi que l’obligation d’établir et de tenir à jour « des informations relatives aux coûts retraçant les investissements réalisés et présentant un degré de détail suffisant pour permettre le contrôle par l’Autorité du respect des dispositions de l’article 3 » ; cette obligation est reprise dans les mêmes termes à l’article 10 de la décision n° 2010-1312.

4.2.3                  Sur les demandes de Free concernant la transmission de liens entre les tarifs et les coûts et d’éléments relatifs aux coûts

S’agissant des demandes 2a et 2b de Free, telles qu’exposées ci-avant (partie 4.2), Free demande à l’Autorité d’enjoindre à Orange de proposer un avenant à son contrat d’accès pour satisfaire à une « demande de transparence, par laquelle nous demandons à Orange de faire un lien contractuel entre les différents postes de coûts et les tarifs d’une part, et de nous transmettre annuellement les grandes masses de coût du projet [et qui] permettrait de satisfaire, au moins en partie, notre besoin de prévisibilité à moyen terme ».132

S’agissant du lien contractuel entre coûts et tarifs, Free précise dans sa saisine que « Nous ne demandons pas une définition complètement détaillée du lien entre coûts et tarifs, mais des définitions qui respectent les principes généraux du cadre réglementaire FttH, notamment l’objectivité et la transparence. Ces définitions devraient être assez précises pour que l’opérateur cofinanceur ait une vision claire et relativement complète des coûts recouvrés par chacun des principaux tarifs, et des méthodes d’évaluation des coûts. Il peut en effet pour chaque coût s’agir soit d’un coût constaté, par exemple en année N-1, soit d’un coût anticipé sur les N prochaines années »  et fournit des exemples de définitions souhaitées.133

S’agissant de la transmission des grandes masses de coûts, Free a précisé sa demande, dans le cadre de l’instruction : « […] nous demandons uniquement une quinzaine de chiffres :

- Capex par segment de réseau NRO – PM, PM – PBO, CCF ;

- Opex par segment de réseau NRO – PM, PM – PBO, CCF ;

- Au sein des Opex, détail des coûts d’exploitation, de génie civil, de frais financier ».134

Dans sa réponse au premier questionnaire des rapporteurs, Free a ensuite indiqué que : « Sur le FTTH, il existe trois prestations distinctes et relativement séparables, de cofinancement de la boucle locale PM-PBO, de construction ou d’achat (en mode OI) du raccordement final PBO-PTO, et de location (ou de construction en propre) de la collecte NRO-PM.

Même si au cas d’espèce il existe une forte similitude, la logique de notre demande n’est pas de disposer d’une segmentation par niveau de réseau, mais d’une segmentation par prestation unitaire, ceci afin d’être en mesure de faire un lien entre coûts et tarifs de cette prestation unitaire […]. Prenons comme exemple le raccordement final. L’information que nous demandons à Orange est la suivante :

IMG2.png

[…] le seul niveau de désagrégation que nous demandons est celui de l’opex du segment PM-PBO séparé en génie civil, exploitation, et frais de portage financier de la « masse manquante ».135

Free a également eu l’occasion de préciser ce qu’il entendait par « frais de portage financier »136 en indiquant notamment, d’une part, que « La construction d’un réseau FttH, comme la construction de tout réseau télécom, suppose un investissement initial significatif suivi de dépenses de fonctionnement moindres. Les réseaux FttH sont commercialisés par tranches de 5%. L’intégralité des tranches n’est ni utilisée, ni commercialisée au premier jour. Il peut exister un déficit de financement initial, que nous pouvons appeler « masse manquante ». Nous ne savons pas comment sont construits les tarifs d’Orange, mais nous imaginons que le portage financier de cette « masse manquante » est un des postes de coûts sous-jacents aux tarifs récurrents. Nous notons d’ailleurs que les tarifs récurrents proposés par Orange sont décroissants avec le taux de cofinancement, et donc avec la diminution de la masse manquante (annexe tarifaire contrat Orange, page 9, pièce  2-5  de  la  saisine) »137 et, d’autre part, que « la connaissance du montant en valeur absolue de la masse manquante est l’information la plus structurante. »138 En effet, selon Free « […] Si les paramètres du calcul de ces frais de portage financier sont des données internes non accessibles aux tiers, le résultat du calcul des frais de portage financier devrait être communiqué par Orange. Si les principaux paramètres sont publics (taux réglementaire du capital, taux directeur BCE, …) la seule connaissance de la masse manquante suffit. »139

Dès lors, les éléments demandés par Free peuvent être représentés schématiquement comme suit, sur un périmètre global correspondant à la zone déployée par Orange en zone AMII :

IMG3.png

La demande de Free porte sur une décomposition reprenant l’intégralité des coûts du réseau qu’il cofinance, et demande, outre ce qui est présenté ci-dessus, la transmission « le cas échéant, [d]es principaux autres grands postes de coûts. »140

a) Le cadre de régulation du FttH implique une visibilité des opérateurs cofinanceurs sur l’évolution des tarifs

L’Arcep a indiqué, dans les motifs de la décision n° 2009-1106, que la tarification de l’opérateur d’infrastructure doit « encourager l’investissement des opérateurs, notamment à travers les schémas de cofinancement prévoyant un partage équitable des coûts entre opérateurs »141 et notamment  qu’« [i]l convient que les conditions tarifaires mises en place […] incitent les opérateurs à investir et a minima ne les en dissuadent pas […] le schéma proposé [du cofinancement] favorise l’investissement dans le fibrage des immeubles, en encourageant un partage des coûts et donc du risque »142 (soulignements ajoutés).

Pour favoriser l’investissement des opérateurs alternatifs dans les réseaux FttH en mutualisant la partie terminale du réseau, le cadre réglementaire promeut ainsi le cofinancement, particularité de la régulation du FttH.

L’Arcep a également précisé que cette incitation à venir cofinancer se traduit par une nécessité de visibilité pour les opérateurs cofinanceurs, comme l’indique la décision précédemment citée : « Pour s’engager dans des projets d’investissement ou de co-investissement aussi importants, les opérateurs ont besoin d’une certaine visibilité sur les coûts qu’ils encourront  et  sur  les  recettes  qu’ils percevront »143 (soulignement ajouté).

Dès lors, au regard de l’objectif d’inciter les opérateurs à investir en cofinancement dans les réseaux FttH et à « construire des plans d’affaires précis »144, il apparait justifié que les opérateurs cofinanceurs puissent bénéficier d’une visibilité adéquate sur leurs investissements.

Ce besoin de visibilité renforcée est d’autant plus nécessaire que, s’il est exact que tout opérateur est libre d’investir dans le réseau FttH d’Orange, il n’en demeure pas moins que la boucle locale optique mutualisée revêt, selon l’Autorité de la concurrence, le caractère de « monopole naturel » dans les zones moins denses145 et que les conditions de prévisibilité entourant le processus de fixation des tarifs du cofinancement du FttH constituent des facteurs favorisant une concurrence effective et loyale entre les opérateurs, au même titre que le niveau tarifaire proposé.

L’Arcep a notamment pu rappeler que « La détention et l’exploitation du réseau mutualisé, qui n’est pas réplicable, sur un marché dont les prestations sont indispensables à la fourniture sur un marché de détail aval sont susceptibles de générer des comportements anticoncurrentiels et  économiquement sous-optimaux. D’une part, le détenteur de cette portion non réplicable peut se livrer à des abus d’exploitation, notamment en pratiquant un prix d’accès à son infrastructure bien supérieur au prix d’équilibre afin de se réserver une rente de monopole dont les ressources peuvent distordre la concurrence sur d’autres marchés. […] D’autre part, le détenteur de cette portion non réplicable peut se livrer à des abus d’éviction sur le marché aval en favorisant sa propre entreprise ou sa filiale dans la fourniture de la prestation amont […] ».146 Ces éléments renforcent le besoin de visibilité des cofinanceurs, permettant notamment de satisfaire l’objectif de l'exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale, prévu par les dispositions de l’article L. 32-1 du CPCE.

L’Arcep considère qu’apporter une visibilité raisonnable à l’opérateur cofinanceur du réseau FttH sur les tarifs dont il s’acquitte et aura à s’acquitter participe au maintien de la confiance et à l’incitation à l’investissement dans un réseau FttH qui a vocation à devenir progressivement l’infrastructure de référence de boucle locale fixe et, partant, le principal support de l’activité des opérateurs sur le marché du haut et du très haut débit à moyen et long termes, tout en permettant de donner davantage d’autonomie aux opérateurs qui participent au développement d’une concurrence pérenne au bénéfice des utilisateurs finals, et répond ainsi aux objectifs de l’article L. 32-1 du CPCE.

b) Les conditions du contrat d’accès ne permettent pas à Free d’obtenir la visibilité nécessaire lui permettant d’anticiper et d’apprécier des évolutions tarifaires pouvant l’impacter

S’agissant de la situation spécifique de cofinanceur de Free au regard de son engagement contractuel vis-à-vis d’Orange, l’Autorité relève premièrement, au regard des stipulations du contrat d’accès, que Free a pris un engagement de longue durée puisque qu’il a conclu un « engagement de cofinancement sur une Zone de cofinancement par l’Opérateur […] pour une durée de 20 ans à compter de la date d'envoi de l'information d’intention de déploiement. »147

Il ressort des stipulations du contrat d’accès qu’en zones moins denses, Free a notamment la faculté de résilier son engagement de cofinancement, sur une zone de cofinancement, en cas de hausses de prix exceptionnelles tout au long de la durée de cet engagement, la résiliation prenant effet au jour de la hausse de prix.148

En cas de désaccord sur l’application d’une évolution exceptionnelle du tarif récurrent, le contrat stipule que le cofinanceur qui refuse de s’acquitter du nouveau tarif récurrent résilie alors les droits acquis sur les lignes FttH au titre du cofinancement. Dès lors, si Free refusait de s’acquitter du tarif récurrent il perdrait irrémédiablement le bénéfice de son investissement initial sur ces lignes et encourrait de surcroît des coûts échoués importants.

En cas de désaccord sur l’application d’une évolution exceptionnelle du tarif non-récurrent, la résiliation de l’engagement de Free aurait pour conséquence d’entraîner notamment l’arrêt des mises à disposition d’accès au PM et des PBO installés après la date d’effet de la résiliation sur la zone de cofinancement concernée.149 En vertu de ces stipulations contractuelles, le cofinanceur renonce également à la possibilité de modifier son taux de cofinancement sur la zone concernée.

Deuxièmement, l’Autorité note que la démarche de cofinancement de Free relève d’une stratégie d’investissement conséquente dans le réseau FttH en zone AMII.

Dans sa réponse au premier questionnaire des rapporteurs, Free précise qu’à fin février 2018, il était engagé à cofinancer sur [SDA] zones déployées par Orange en zone AMII regroupant [SDA] communes150. Or la zone AMII151 couvre aujourd’hui environ 3 600 communes (y compris les communes déployées par SFR). Dès lors, Free s’est d’ores et déjà engagé à cofinancer sur la très large majorité de la zone AMII.

De plus, l’Arcep note que le niveau de risque financier pris par Free est en pratique important vu que celui-ci a engagé un investissement initial conséquent dans le réseau FttH mutualisé déployé par Orange, qui s’élève aujourd’hui selon Free à [SDA] et qui pourrait représenter à terme, en 2030, près de [SDA] quand les dépenses récurrentes devraient s’élever à terme à environ [SDA] par an.152 Par conséquent, même de faibles modifications des tarifs sont susceptibles d’avoir un impact financier significatif sur Free, et, comme précédemment mentionné, ses coûts échoués en cas de sortie du contrat seraient très importants.

Troisièmement, le contrat d’accès fait état d’une répercussion des évolutions de coûts sur les tarifs, l’article 1.10 des Conditions Particulières indiquant notamment que « […] Si les coûts évoluent à la hausse, les prix forfaitaires du cofinancement ab initio applicables au nombre de Logements Couverts et au nombre de Logements Raccordables et le plafond de réévaluation du prix mensuel applicable au nombre de Lignes FTTH de la Zone de Cofinancement affectées à l'Opérateur peuvent être réévalués annuellement […]. Dans le cas d'une évolution exceptionnelle des coûts, Orange peut procéder à une augmentation des tarifs de cofinancement au-delà de la variation tarifaire résultant de l'application de l'alinéa précédent. […] En cas d’évolution des coûts à la baisse, Orange peut répercuter tout ou partie des baisses de coûts constatées sur les tarifs. Toute évolution à la hausse ou à la baisse des tarifs forfaitaires du cofinancement ab initio se traduit par la création de nouveaux tarifs […]. ».153

Or il ressort de l’instruction que Free, qui cofinance pourtant de manière conséquente le réseau FttH d’Orange en zones moins denses, ne dispose aujourd’hui d’aucune information fournie par Orange relative aux grandes masses de coûts sous-jacents-aux tarifs et au lien entre coûts et tarifs de son réseau. Si Free a connaissance, comme tout opérateur, du modèle générique de tarification FttH en zones moins denses proposé par l’Arcep en octobre 2015 à la suite de deux consultations publiques et du document d’accompagnement du modèle154, il indique seulement avoir connaissance, s’agissant de la tarification mise en œuvre par Orange, du fait que ce dernier a indiqué utiliser un modèle de même nature que celui de l’Autorité.155

Au regard de l’ensemble des éléments exposés ci-avant, l’Arcep estime que les informations actuellement à disposition de Free ne sont pas suffisantes pour lui permettre, en tant qu’opérateur cofinanceur et au regard de son engagement significatif dans le cofinancement du réseau FttH déployé par Orange en zones moins denses, d’obtenir la visibilité nécessaire lui permettant, d’anticiper et d’apprécier des évolutions tarifaires pouvant, le cas échéant, l’impacter fortement.

c) Obtenir de la visibilité sur les tarifs et leurs évolutions suppose une transparence sur les liens et les grandes masses de coûts sous-jacents aux tarifs

Orange soutient que « [l]’article L. 34-8-3 du CPCE impose simplement une obligation de tarif raisonnable afin que la prime de risque qui peut être réclamée par l'opérateur qui déploie le réseau ne soit pas disproportionnée et non une obligation d'orientation vers les coûts »156 et que le principe d’objectivité n’a ni pour effet ni pour objet d’imposer à l'opérateur fournissant une prestation d'accès, une obligation de « cohérence des tarifs vers les coûts ».157

De son côté Free indique dans sa saisine que son objectif « n’est pas de contester les tarifs instantanés du contrat ou d’exiger une stabilité tarifaire ad vitam æternam [mais] d’obtenir une relative symétrie de l’information […] afin d’être en mesure de discuter de manière équitable et équilibrée des évolutions tarifaires futures ».158

Comme précédemment indiqué (partie 4.2.2), l’accès de Free au réseau FttH d’Orange est régi par l’article L. 34-8-3 du CPCE et les décisions de l’Arcep prises en son application.

En particulier, le cadre symétrique de l’accès aux lignes FttH prévoit que les conditions tarifaires de l’accès au point de mutualisation doivent être raisonnables159 et correspondre à une prise en charge d’une part équitable des coûts tout en tenant compte du risque encouru et en conférant une prime à l’opérateur d’immeuble.160

Comme rappelé précédemment, l’Arcep a précisé dans les motifs de sa décision n° 2009-1106 que parmi les principes tarifaires de l’accès figurait le principe d’objectivité selon lequel « la tarification mise en œuvre par l’opérateur doit pouvoir être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables ».

Il est en outre également prévu que « L’opérateur d’immeuble établit et tient à jour des informations relatives aux coûts retraçant les investissements réalisés et présentant un degré de détail suffisant pour permettre le contrôle par l’Autorité du respect des obligations tarifaires qui lui incombent »161.

Le cadre réglementaire précisant les modalités de l’accès au réseau FttH a donc bien établi un lien entre les tarifs d’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique et les coûts de déploiement de ces réseaux.

Par ailleurs, ainsi qu’exposé précédemment en partie b), le contrat d’accès d’Orange lui-même prévoit qu’une variation des coûts puisse donner lieu à une évolution des tarifs.

Partant, dans la mesure où, en l’espèce, le contrat d’accès fait état d’une possible répercussion des évolutions de coûts sur les tarifs, permettre au cofinanceur d’obtenir de la visibilité sur les tarifs et leurs évolutions suppose de disposer de transparence sur les liens entre coûts et tarifs et sur les grandes masses de coûts sous-jacents aux tarifs.

Or, comme indiqué précédemment, le contrat d’accès ne donne actuellement aucune information relative aux grandes masses de coûts sous-jacents aux tarifs et aux liens entre coûts et tarifs du réseau FttH d’Orange que Free cofinance.

Compte tenu des investissements consentis par Free qui s’est engagé auprès d’Orange et partage des risques particulièrement importants, du besoin de visibilité de Free, cofinanceur du réseau  FttH qui a vocation à devenir l’infrastructure de référence de boucle locale fixe, et du fait que le contrat d’accès prévoit que les évolutions des coûts peuvent se répercuter sur les tarifs, l’Autorité estime justifié que Free puisse disposer d’éléments de coûts lui permettant d’anticiper raisonnablement l’évolution des tarifs. Étant donné que la transmission d’éléments de coûts sans l’indication par Orange des liens entre les coûts et les tarifs existants rendrait inopérante le mécanisme de transmission des coûts, il convient que Free puisse également avoir connaissance des liens établis par Orange entre les coûts et ses principaux tarifs. S’agissant de ces liens, sans être détaillés, il convient que ceux-ci soient néanmoins suffisamment clairs pour permettre de répondre au besoin de visibilité requis et que soient notamment précisés quel coût entre dans la formation de quel tarif et les méthodes utilisées pour définir les coûts sous-jacents aux principaux tarifs (coûts moyens constatés, coûts projetés sur la base d’hypothèses à expliciter ou toute autre méthode pertinente utilisée).

Au cas d’espèce, Free demande que lui soient transmises les masses de dépenses constatées sous- jacentes aux tarifs correspondant aux trois segments de réseau en distinguant coûts d’investissement, d’une part, et coûts d’exploitation, d’autre part, et en distinguant, ensuite, au sein des coûts d’exploitation pour le segment PM-PBO, le détail des coûts d’exploitation et maintenance, les coûts de génie civil, et les frais de portage financier (étant précisé que ces derniers pourraient être complétés ou remplacés par tout agrégat plus pertinent intervenant dans la formation des tarifs, tel que le « montant en valeur absolue de la masse manquante »162).

L’Arcep constate que Free demande un niveau de détail de coûts limité, correspondant aux différentes prestations du contrat d’accès et, s’agissant de la prestation d’accès au segment PM-PBO, aux trois composantes du tarif correspondant sachant que, sur ce segment, le contrat d’Orange fait lui-même apparaître cette désagrégation, ces trois composantes possédant des dynamiques de coûts bien différenciées. L’Arcep considère donc que les éléments demandés par Free constituent un minimum nécessaire pour répondre à son besoin de visibilité et d’anticipation des évolutions tarifaires et ne présentent pas de caractère superflu. Dès lors, les éléments demandés sont justifiés.

Orange n’ayant pas fourni lors de l’instruction d’éléments sur la décomposition demandée par Free, dans le cas où les liens coûts-tarifs définis par Orange feraient appel à d’autres postes de coûts, il conviendrait par cohérence qu’Orange les transmette également, afin d’apporter la visibilité nécessaire à Free.

d) Les informations demandées, transmissibles à Free, peuvent être produites par Orange sans engendrer de contraintes disproportionnées

Sur le lien entre les principaux tarifs du contrat d’accès et les coûts du réseau que Free cofinance

En premier lieu, l’Autorité rappelle qu’à la demande de nombreux acteurs (opérateurs ou collectivités territoriales), elle a publié en octobre 2015 un modèle générique de tarification FttH, à la suite de deux consultations publiques. Ce modèle vise à répondre au besoin des acteurs « d’obtenir une visibilité accrue sur les mécanismes de détermination des tarifs des offres de gros en zones moins denses, notamment afin de fiabiliser l’établissement de leurs plans d’affaires. D’une part, cette visibilité concourra à sécuriser les opérateurs d’immeuble […]. D’autre part, cette visibilité favorisera la commercialisation des réseaux en donnant des garanties de long terme sur le caractère  raisonnable et équitable des conditions d’accès aux réseaux pour tous les opérateurs»163. Elle a précisé que « Ce modèle a ainsi vocation à servir de support aux négociations tarifaires entre les différents acteurs du marché de gros par l’introduction d’une méthodologie de référence. Si le choix par un opérateur d’un autre modèle de tarification, mieux adapté à sa situation spécifique, est possible, il doit pouvoir être dûment justifié au regard des principes de tarification posés par le cadre réglementaire et rappelés ci-avant »164 (soulignements ajoutés). Ainsi, dans ce document, l’Autorité a déjà précisé que les opérateurs d’infrastructure devraient disposer d’un modèle de tarification, ce qu’Orange ne peut ignorer, et a d’ailleurs mis en place en pratique.

L’Autorité rappelle par ailleurs qu’Orange, dans sa réponse à la consultation publique s’étant tenue du 16 mai au 11 juillet 2014 sur le Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique en dehors des zones très denses, a indiqué qu’elle « établit aujourd’hui ses tarifs sur la base d’un modèle spécifique mais qui est également un modèle en flux de trésorerie »165 et à ce titre qu’elle « constate avec satisfaction la cohérence des principes de sa grille tarifaire actuelle avec ceux développés dans le modèle en consultation, mais considère néanmoins que des aménagements doivent être apportés à ce modèle, compte tenu notamment de l’évolution récente et attendue du marché »166. Free, qui cite notamment la réponse d’Orange dans ses écritures, estime dès lors que sa demande d’obtenir le lien entre les coûts et les tarifs ne viserait qu’« un travail d’écriture contractuel, sans changement du modèle de tarification qui existe déjà, ni de la structure tarifaire actuelle, ni des tarifs. »167

Comme précisé supra (cf. 4.2.3), Free s’en tient à demander des éléments très généraux s’agissant du lien entre coûts et tarifs. Free ne demande ni des formules détaillées ni à connaitre les valeurs de tous les paramètres utilisés le cas échéant pour la modélisation.168

L’Autorité considère que la demande de Free qu’Orange définisse contractuellement les liens entre coûts et tarifs présente un degré de détail inférieur à celui qu’implique la production d’un modèle similaire au modèle générique de tarification FttH susmentionné proposé par l’Arcep. En effet, le modèle publié par l’Arcep détaille les valeurs des paramètres (notamment, les différentes primes de risques appliquées, le taux de churn choisi, le taux de rendement interne retenu), explicite la sensibilité des tarifs aux différents paramètres, et décrit les étapes de calculs et les principes de modélisation avec un degré de précision supérieur à la demande de Free. Par ailleurs et à titre de comparaison, dans le cas du dégroupage de la boucle locale cuivre, des principes de tarification, de comptabilisation et de valorisation des coûts ont été publiés de manière plus détaillée que les éléments demandés par Free.

Au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, l’Autorité n’a pas identifié de difficulté matérielle particulière pour Orange de fournir les informations demandées par Free visant à ce que  le contrat d’accès définisse le lien entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau que Free cofinance.

En second lieu, Orange indique que l’Arcep « rejettera la demande 2 de Free dans sa globalité », la transparence demandée étant, à ses yeux, contraire à la protection de son secret des affaires : « Si l'Arcep faisait droit à une telle demande, Free et, par effet de ricochet, les autres opérateurs FttH qui sont tour à tour opérateur d’infrastructures et/ou opérateur commercial, auraient une vue sur l’ensemble des coûts des uns et des autres. Une telle transparence porterait atteinte à la protection du secret des affaires, principe auquel est tenu l’Arcep ».169

L’Autorité considère qu’au vu de son caractère très général, la demande de Free d’obtenir les liens entre les coûts et les tarifs du contrat ne contient pas d’élément pouvant relever de la protection du secret des affaires d’Orange. En effet, cette demande de Free n’implique pas de transmettre d’éléments précis relatifs à un secret des procédés, ni d’informations économiques et financières détaillées qui pourraient en particulier révéler le niveau d’activité d’Orange à ce jour, ni des éléments précis tenant à la stratégie commerciale ou industrielle (comme le serait par exemple la décomposition détaillée des coûts170).

Sur la transmission à intervalles périodiques des grandes masses de dépenses réelles constatées pour la construction et l’exploitation du réseau sous-jacentes aux tarifs

À titre liminaire, l’Arcep souligne que la demande de Free n’est pas une demande de publicité : Free demande à ce que les grandes masses de dépenses lui soient transmises, en tant que cofinanceur.

En premier lieu, et dès lors qu’en application des dispositions de l’article 10 de la décision n° 2010- 1312, « L’opérateur d’immeuble établit et tient à jour les informations relatives aux coûts […] présentant un degré de détail suffisant pour permettre le contrôle par l’Autorité du respect des obligations tarifaires qui lui incombent » (soulignement ajouté), Orange doit déjà être en mesure de fournir des informations pour répondre à des demandes de ce type émanant du régulateur. L’Autorité rappelle d’ailleurs que le principe d’objectivité prévu par la décision n° 2009-1106 et rappelé précédemment vise à ce que la tarification mise en œuvre par l’opérateur puisse être justifiée à partir d’éléments de coûts clairs et opposables.

En second lieu, dans ses écritures, Free fait valoir que sa demande est « compatible »171 avec le secret des affaires en indiquant qu’« Orange n’a pas de réel concurrent en zone AMII »172, qu’« il serait absurde pour le groupe Iliad de déployer un deuxième réseau » sur des zones où Free est déjà irrévocablement engagé à cofinancer le réseau d’Orange et que le niveau de détail des coûts demandé est « extrêmement sommaire » et « du même ordre de grandeur » que le niveau de détail que les publications imposées à Orange dans le cadre du dégroupage cuivre en application du dernier alinéa de l’article D. 312 du CPCE, et que « cette publication n’a jamais été considérée comme portant atteinte aux règles du droit de la concurrence ou au secret des affaires ».173

Orange considère pour sa part que les éléments demandés par Free sont contraires à la protection du secret des affaires et que « l’obligation de transparence qui s’impose à chaque opérateur d’infrastructures, ne s’applique qu’à l’égard de l’ARCEP ».174 Orange estime que « la mission du régulateur est une mission exclusive »175 et que la Cour de Cassation et le Conseil d’État ont considéré que « les coûts d’un opérateur ne pouvaient être transmis qu’au seul régulateur et non aux opérateurs concurrents » et qu’« [i]l s’agit d’une interdiction de principe pour laquelle la loi ne prévoit pas d’exception devant le régulateur ».176 Orange considère à cet égard que « la Cour de Cassation a eu l’occasion de sanctuariser ce principe à deux reprises »177, d’une part, dans un arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2017 dans lequel la Cour a décidé que « [les articles D. 311 et D. 314 du CPCE] n’ont pas pour objet ou pour effet de contraindre les [opérateurs réputés exercer une influence significative] à communiquer leurs comptes réglementaires à leurs concurrents » et que « la loi a entendu limiter [l’accès aux comptes réglementaires de la société Orange] pour préserver leur confidentialité et prévenir tout risque d’atteinte au secret des affaires »178, raisonnement qu’Orange transpose aux coûts de déploiement des réseaux FttH régis par le cadre symétrique179, et, d’autre part, dans un arrêt du 15 octobre 2015180. Orange s’appuie également sur l’arrêt du Conseil d’État du 21 avril 2017 qui aurait, selon Orange, « rappelé avec force que les coûts d’Orange étaient couverts par le secret des affaires et qu’ils ne pouvaient être transmis à un tiers, y compris lorsqu’il existe une concurrence marginale ».181

L’Autorité constate toutefois que les arrêts cités par Orange, dont il ressort que « la loi a entendu limiter l’accès aux comptes réglementaires d’Orange et en préserver la confidentialité, ce dont il se déduit nécessairement que leur publicité présenterait un risque d’atteinte au secret des affaires (…) » (soulignement ajouté) et que les « documents litigieux relatifs au détail des coûts ayant permis à Orange de déterminer les prix de ses offres de gros, étaient protégés par le secret industriel et commercial (…) » (soulignement ajouté), ne peuvent être regardés comme emportant un principe de non communication de certains éléments de coûts à caractère général et sous forme agrégée en matière de réseau FttH à un cofinanceur, comme ce que demande Free en l’espèce.

Par ailleurs, l’Arcep estime que la compétence de l’Autorité pour contrôler le respect des obligations tarifaires des opérateurs d’infrastructure sur le fondement de l’article 4 de la décision n° 2009-1106 et de l’article 10 de la décision n° 2010-1312 n’exclut pas de fournir à l’opérateur commercial cofinanceur, tel que Free, compte tenu de son statut spécifique, un niveau de transparence adéquat sur les modalités tarifaires de l’accès.

Orange n’a d’ailleurs pas fourni d’éléments dans le cadre de l’instruction sur les conséquences concrètes, à l’égard de ses concurrents, de la transmission des éléments demandés par Free et s’est borné à indiquer à l’audience faire l’objet de contentieux relatifs à des demandes de communication d’informations de la part de ses concurrents et que faire droit à la demande de Free créerait un précédent.

Lors de l’audience du 3 mai 2018, Free a apporté des précisions sur sa demande de transmission périodique des coûts :

- pour ce qui concerne les coûts d’exploitation du réseau (ou OPEX), une transmission à court terme ;

- pour ce qui concerne les coûts d’investissement (ou CAPEX), Free a indiqué lors de l’audience pouvoir se contenter d’une transmission de ces coûts en 2020, date à laquelle il considère que les déploiements en zone AMII seront vraisemblablement terminés.

Concernant les coûts d’exploitation, l’Autorité considère que la connaissance de ces coûts, au niveau d’agrégation demandé en l’espèce, sur l’ensemble de la zone AMII, ne dévoile pas d’élément sur la stratégie de déploiement FttH d’Orange et n’a pas d’incidence sur la décision des opérateurs d’investir dans le déploiement d’un tel réseau ; elle n’est pas de nature à dévoiler des éléments stratégiques relatifs au niveau d’activité d’Orange, à sa stratégie financière, industrielle ou commerciale que ce soit sur la zone concernée par la demande ou en dehors de cette zone, et que ce soit sur le marché de gros FttH ou sur d’autres marchés.

Concernant les coûts d’investissement (ou CAPEX), pour lesquels Free a indiqué à l’audience ne pas demander une transmission avant 2020, l’Autorité note qu’à cet horizon les déploiements FttH seront engagés sur l’ensemble de la zone concernée par la demande et largement en voie d’achèvement.

L’Autorité note à cet égard qu’Orange, mais également SFR, ont réitéré leurs ambitions de déploiement sur la zone AMII, cette fois, dans le cadre de propositions d’engagements juridiquement opposables adressées au Gouvernement début 2018 en application de l’article L. 33-13 du CPCE et dont l’Arcep a été saisie pour avis. Ces propositions, rendues publiques182, font état de l’engagement des opérateurs Orange et SFR de finaliser à plus de 90 % leurs déploiements FttH d’ici fin 2020. Orange propose notamment « que 100 % des logements et des locaux professionnels de son périmètre de déploiement de la fibre jusqu’au domicile de l’abonné (FTTH) sur la zone AMII d’Orange soient ouverts dès 2020 à la commercialisation d’offres FTTH » et qu’à cette date « la part de prises raccordables sur demande n’excèdera pas 8 % du total ».183 SFR propose, pour sa part, de déployer « d’ici fin 2020, 100 % des logements et locaux professionnels des communes représentant 1,4 million de logements qui lui sont aujourd’hui impartis, dont a minima 92 % raccordables (les 8 % restants seront raccordables à la demande d’ici 2020 également) »184.

L’Autorité relève également que les données de coûts demandées par Free sont agrégées sur l’ensemble de la zone AMII, sur laquelle il cofinance pour accéder au réseau FttH d’Orange, sans sous-segmentation géographique ni par typologie de dépenses, et sans décomposition sur des typologies de territoire. Elle souligne enfin que dans le cas du dégroupage de la boucle locale cuivre, des éléments de valorisation des coûts ont été publiés de manière plus détaillée que ceux demandés par Free.

Il résulte de ce qui précède que la transmission de grandes masses de coûts, dont les modalités sont précisées ci-après, est raisonnable et ne porte pas atteinte au secret des affaires.

Il convient enfin d’apporter des précisions sur les modalités de transmission des coûts.

S’agissant de la période concernée, il ressort de l’instruction qu’Orange opère une péréquation de ses tarifs sur la zone AMII185, dans laquelle les déploiements s’opèrent sur plusieurs années. Dès lors, et dans la mesure où la demande de Free porte sur une connaissance des coûts de déploiement de l’intégralité de la zone AMII, l’Arcep considère que les coûts d’investissement à transmettre devront être ceux courant depuis le début des déploiements. Ainsi, lors de la première transmission à Free des coûts d’investissements, Orange devra également lui communiquer la chronique des investissements passés.

S’agissant du délai de transmission des coûts, en l’absence de précisions apportées lors de l’instruction, il conviendra qu’ils soient transmis annuellement, dans un délai cohérent avec ceux des autres productions comptables d’Orange.

4.2.4         Conclusion générale des demandes 2a et 2b de Free

En conclusion, il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent, de l’application du cadre réglementaire et des objectifs visés à l’article L. 32-1 du CPCE, en particulier de « développement de l’investissement », d’« exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective  et  loyale », d’« aménagement et l’intérêt des territoires » et de « diversité de la concurrence dans les territoires », que la demande de Free de « connaitre les liens entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau » cofinancé, d’obtenir périodiquement la chronique des coûts d’investissement au terme d’un délai de trois ans, et, dès à présent, les coûts d’exploitation, est justifiée et raisonnable. Elle permet en effet à Free d’obtenir les éléments de visibilité qu’implique la particularité de son statut de cofinanceur du réseau FttH, qui a vocation à devenir l’infrastructure de référence de boucle locale fixe et ce, sur une partie conséquente de la zone AMII, sans toutefois imposer à Orange une charge trop lourde dans la transmission des éléments demandés ni dévoiler d’éléments relevant de la protection du secret des affaires.

La chronique des dépenses d’investissement retraçant les coûts annuels des déploiements d’Orange en zone AMII devra être transmise pour la première fois à l’issue d’un délai de trois ans à compter de la notification de la présente décision, puis annuellement. Les dépenses d’exploitation 2017 devront quant à elles être transmises en 2018, puis annuellement. Ces éléments devront être transmis dans un délai cohérent avec ceux des autres productions comptables d’Orange. Les liens entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau cofinancé devront être transmis dès la signature de l’avenant au contrat d’accès, dès lors qu’Orange dispose déjà d’un modèle de tarification (cf. partie 4.2.3d))

Pour répondre à la demande de Free de « connaitre les liens entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau » cofinancé, Orange pourrait par exemple, préciser tous les postes de coûts pertinents retenus pour former chacun des tarifs supportés par Free ainsi que le périmètre géographique et temporel utilisé pour définir ces coûts.

L’Autorité précise qu’il apparaitrait raisonnable que le contrat prévoie, en cas de modifications des liens par Orange, l’indication claire et transparente des raisons de ces modifications.

L’Autorité considère qu’une phase de négociations peut être nécessaire pour déterminer les nouvelles conditions contractuelles encadrant la transmission par Orange à Free du lien entre les coûts et les tarifs du contrat d’accès et des grandes masses de coûts telle que précisée dans la présente décision. Pour permettre ces ajustements, l’Autorité estime qu’il est justifié de laisser à Orange un délai de 4 mois pour proposer un avenant au contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange. Afin que les négociations se déroulent dans de bonnes conditions entre les parties, Orange les initiera par l’envoi d’un projet d’avenant initial dans un délai raisonnable d’un mois à compter de la notification de la présente décision.

4.2.5                  Analyse de l’Autorité sur la demande de suppression du principe de modification unilatérale de prix par Orange (demande 2c)

S’agissant de la demande 2c, Free demande à l’Arcep d’enjoindre à Orange de modifier son contrat d’accès afin que « le principe de modification unilatérale de prix par Orange soit supprimé au profit d’une clause de discussion réciproque et qu’une évolution tarifaire ne puisse être possible que d’un commun accord entre les parties, suite à une négociation de bonne foi, permettant un recouvrement des coûts et une marge raisonnable ».186

Free soutient que ce principe de modification unilatérale des tarifs permet à Orange de « contourner les clauses de protection des opérateurs cofinanceurs »187 et ajoute qu’il « est captif de l’offre d’Orange sur la zone AMII représentant près d’un tiers des lignes FttH » puisqu’« en pratique, quelle que soit la hausse de prix imposée par Orange, Free devra l’accepter. Un refus entrainerait trop de pertes, en termes financiers et de nombre d’abonnés, pour être envisageable ».188

Free indique en outre que « [l]’absence de faculté de modification unilatérale des tarifs, au profit d’une renégociation de bonne foi sur la base des éléments de coûts transmis à intervalle périodique, nous semble un moyen raisonnable et proportionné aux enjeux de protection dans la durée des opérateurs cofinanceurs contre les velléités de hausse tarifaire d’Orange, et notamment des hausses qui n’auraient pas de fondements techniques ou économiques.»189

La demande 2c de Free a donc pour objectif de se prémunir contre une évolution tarifaire indue d’Orange.

Orange de son côté indique dans ses premières observations en défense que la demande n’est pas raisonnable en ce qu’elle ferait obstacle à la mise en œuvre de ses obligations de non-discrimination, notamment tarifaires, découlant du cadre symétrique, et que « La demande de Free de supprimer le caractère unilatéral de la modification tarifaire reviendrait à faire dépendre une évolution tarifaire de l'accord de chacun des opérateurs commerciaux ayant contractualisé avec Orange ».190

En premier lieu, sur cette demande, l’Autorité considère que le principe qu’Orange puisse faire évoluer ses tarifs est légitime, par exemple dans les cas envisagés dans le document d’accompagnement du modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses de l’Autorité191, qui concrétisent notamment le partage du risque entre l’opérateur primo-investisseur et les opérateurs co-investisseurs.

En second lieu, et conformément au cadre législatif et réglementaire (rappelé ci-avant, partie 4.2.2), la société Orange doit, en tant qu’opérateur d’infrastructure « établissant ou ayant établi » une ligne FttH, donner accès à cette ligne aux opérateurs commerciaux à des conditions raisonnables, tant au moment de l’élaboration, de la publication que de la modification des conditions tarifaires de son offre d’accès192.

L’Autorité relève que l’article 5 des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange prévoit que la modification des conditions tarifaires d’accès fait partie des cas faisant l’objet d’un préavis minimum de trois mois193.

Compte tenu de ce qui précède et, comme indiqué en partie 4.2.4, dès lors qu’il apparaît justifié et raisonnable de faire droit aux demandes 2a et 2b de Free afin de lui apporter la visibilité nécessaire à sa situation spécifique de cofinanceur du réseau FttH sur une partie conséquente de la zone AMII, Free devrait disposer désormais d’éléments lui permettant d’apprécier le caractère raisonnable des évolutions tarifaires, et, le cas échéant, de s’en prévaloir, sans qu’il soit justifié de faire droit à sa demande d’insertion d’une clause de discussion réciproque .

Ainsi, et sans qu’il ne soit nécessaire de se prononcer sur les autres arguments des parties, il ressort de ce qui précède que la demande de Free, visant à ce que le principe de modification unilatérale de prix par Orange soit supprimé au profit d’une clause de discussion réciproque et qu’une évolution tarifaire ne puisse être possible que d’un commun accord entre les parties, n’apparaît pas justifiée et doit, à ce titre, être rejetée.

En revanche, l’Autorité considère qu’il serait légitime, compte tenu de la situation spécifique de Free en tant que cofinanceur du réseau FttH et du besoin de visibilité qui en découle (cf. partie 4.2.3b)), qu’Orange expose de façon claire et transparente les raisons des modifications tarifaires unilatérales auxquelles il entend procéder.

4.3        Sur la demande de Free de pouvoir utiliser des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût d’accès aux lignes déployées

Free demande à l’Arcep « d’enjoindre à Orange de proposer, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision de règlement de différend, un avenant modifiant le contrat et ayant strictement pour objet de faire droit aux demandes ». La demande 3 formulée par Free est  la suivante :

« Nous demandons à pouvoir utiliser des fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles sans surcoût d’accès aux lignes déployées.

Il est entendu que nous sommes prêts à prendre à notre charge une quote-part des éventuels coûts d’investissements incrémentaux, notamment de pose d’un boitier (de type PBO) dédié à l’extraction de la fibre concernée. Nous ferons notre affaire du lien optique entre le boitier d’extraction et l’antenne, tant pour la construction que l’exploitation ».194

4.3.1                  Sur le contexte

a) Contexte

Comme présenté dans la partie 1.4 du contexte général, le marché mobile métropolitain présente un certain nombre de spécificités : il s’agit d’un marché convergent, dans le contexte de progression continue des volumes de données mobiles à acheminer, où il existe un enjeu croissant pour les opérateurs à augmenter la capacité de ces liens de collecte, et partant à mobiliser les liens de leurs réseaux fixes pour écouler le trafic de leurs sites mobiles (ou « stations de base »).

b) Présentation des règles d’ingénierie afférentes au déploiement FttH d’Orange

Il convient de préciser préalablement que les informations exposées ci-dessous proviennent des spécifications techniques d’accès aux services (STAS) annexées au contrat d’accès d’Orange et des éléments apportés par les parties dans le cadre de l’instruction195.

La boucle locale optique mutualisée déployée par Orange se décompose en 3 segments de réseau : NRO-PM, PM-PBO et PBO-PTO.

Tout d’abord, s’agissant du segment PM-PBO, celui-ci constitue le segment de distribution optique.

La zone arrière desservie par un point de mutualisation (PM) d’Orange est en moyenne de l’ordre de 360 locaux.196 Le réseau de distribution (aval du PM) est dimensionné pour amener au PM au moins une fibre par local programmé. La desserte des locaux s’effectue par l’intermédiaire de points de branchement optique (PBO) qui permettent le raccordement final des locaux raccordables en aval, suivant le type d’habitat. Ces PBO peuvent être situés en immeuble, en chambre, sur façade ou sur poteau.

Orange utilise généralement des PM en armoire de rue qui ont pour fonction le brassage des fibres optiques entre les opérateurs commerciaux lors des changements d’affectation de clients (aussi appelé « churn »).

Il ressort de l’extrait des STAS de la saisine de Free et des réponses d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs197 qu’Orange prévoit pour les PM dit « PMZ 360 » une « capacité totale gérable » de 576 fibres optiques distribuées au niveau du PM et une capacité initiale installée de [SDA] fibres.198

Orange indique que « les règles d’ingénierie d’Orange visent ainsi, sur les [SDA] FO utiles maximales mobilisables aux PBO, un nombre moyen de FO utiles aux PBO de [SDA], soit un taux de surdimensionnement bien moindre que le taux de 60 % évoqué par Free ».

Ensuite, s’agissant du segment NRO-PM, celui-ci constitue le segment de transport optique.

Les opérateurs commerciaux peuvent choisir d’amener directement leurs propres câbles optiques de réseau amont jusqu’aux PM. Ils peuvent aussi utiliser un lien NRO-PM proposé par Orange dans le cadre de ses obligations réglementaires lorsque le PM est inférieur à 1 000 lignes (dite « offre de raccordement distant mutualisé »). Dans le cadre de cette offre, Orange propose de relier les PM à un NRO de rattachement par un faisceau de 36 fibres optiques minimum destiné à la collecte des équipements hébergés au PM.

Enfin, le segment PBO-PTO199 constitue le segment du raccordement final. Le raccordement final a pour finalité la mise en continuité optique du câblage FttH de la PTO au PM et l’accès aux services de l’opérateur commercial par le client final lorsque l’opérateur commercial a effectivement adducté le PM (soit par ses propres moyens soit par l’offre de raccordement distant mutualisé). Orange propose deux modalités pour la construction du lien PBO-PTO :

- un contrat de sous-traitance aux opérateurs commerciaux lorsque ceux-ci souhaitent réaliser la construction ;

- la réalisation de la construction du lien directement par Orange. Dans les deux cas, Orange est le propriétaire de la fibre.

La maintenance des 3 segments, lorsque l’offre NRO-PM existe, relève, quant à elle, de la responsabilité contractuelle d’Orange.200 Toutefois, Orange, pour les liens optiques de raccordements finals, peut autoriser l’opérateur commercial à prendre en charge une partie des opérations de maintenance.201

4.3.2         Rappel du cadre juridique applicable

L’article L. 34-8-3 du CPCE dispose que : « Toute personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou exploitant une ligne de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne […]. L’accès est fourni dans des conditions transparentes et non discriminatoires en un point situé, sauf dans les cas définis par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, hors des limites de la propriété privée et permettant le raccordement effectif d’opérateurs tiers, à des conditions économiques, techniques et d’accessibilité raisonnables. […] Tout refus d’accès est motivé. »

Ces dispositions, précisées par les décisions réglementaires de l’Arcep susvisées, concernent donc des réseaux en fibre optique ayant pour objet le raccordement d’un « utilisateur final ».

La demande 3 de Free porte sur le raccordement des stations de base mobiles par les fibres surnuméraires des réseaux à très haut débit en fibre optique déployés en cofinancement en vue de desservir un utilisateur final, sans surcoût d’accès.

Free précise que sa demande se place sur le fondement de l'équité et non en application du cadre réglementaire symétrique ex ante relatif à l’accès aux lignes FttH. En effet, Free estime, tout comme Orange, que le cadre symétrique impose seulement l’accès aux fibres « permettant de desservir un utilisateur final » et qu’Orange n’a donc pas d’obligation en ce qui concerne le raccordement des éléments de réseaux en fibre optique en application des dispositions de l’article L. 34-8-3202.

Par ailleurs, l’article L. 34-8, I du CPCE prévoit que :

« L’interconnexion ou l’accès font l’objet d'une convention de droit privé entre les parties concernées. […]

Pour réaliser les objectifs définis à l'article L. 32-1, l’Autorité peut imposer, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l’accès ou de l’interconnexion : […] à la  demande  d’une  des  parties,  dans  les  conditions  prévues  à  l’article L. 36-8.

Les décisions adoptées en application des a et b sont motivées et précisent les conditions équitables d'ordre technique et financier dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés. »

Il appartient ainsi à l’Autorité saisie d’un règlement de différends en application de l’article L. 36-8 du CPCE d’examiner, au regard des objectifs d’ordre public économique dont elle a la charge mentionnés à l’article L. 32-1 du CPCE, s’il est équitable de faire droit à la demande 3 de la société Free.

En effet, comme l’a jugé la Cour d’appel de Paris, l’Autorité doit « exercer sa mission au regard des objectifs de la régulation […] définis à l’article L. 32-1 du CPCE, en se fondant, au-delà de la situation particulière d’un opérateur, […] sur des conditions touchant à l’ordre public économique »203. Il revient alors « à une entreprise qui souhaite que les conditions techniques et tarifaires soient appréciées en équité de se prévaloir d’éléments précis de nature à établir le bien-fondé de ses prétentions […] »204. Le caractère équitable doit ainsi être apprécié par l’Autorité en prenant en compte les objectifs mentionnés à l’article L. 32-1 du CPCE, notamment :

« II.- 3° Le développement de l’investissement, de l’innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques ;

4° L’aménagement et l’intérêt des territoires et la diversité de la concurrence dans les territoires

[…] ;

III.- […] 1° L’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques […] ; ».

Enfin et sans préjudice des objectifs du II et III de l’article L. 32-1, l’Autorité, dans le cadre de l’article L.32-1, IV, du CPCE, veille :

« 2° à la promotion des investissements et de l'innovation dans les infrastructures améliorées et de nouvelle génération, en tenant compte, lorsqu'ils fixent des obligations en matière d'accès, du risque assumé par les entreprises qui investissent, et à autoriser des modalités de coopération entre les investisseurs et les personnes recherchant un accès, afin de diversifier le risque d'investissement dans le respect de la concurrence sur le marché et du principe de non- discrimination ; » ;

4° à la promotion, lorsque cela est approprié, d'une concurrence fondée sur les infrastructures ; ».

4.3.3         Sur le fond

a) Appréciation sur la notion de fibres surnuméraires

L’Autorité relève que l’existence de fibres surnuméraires n’est pas contestée par Orange mais que leur périmètre et leur définition ont fait l’objet d’échanges entre les parties.

Free indique qu’« Orange ne conteste pas que le réseau FttH compte un nombre de fibres distribuées supérieur au nombre de locaux desservis. Les fibres surnuméraires constituent l’écart entre ces deux nombres. L’existence de ces fibres surnuméraires est liée d’une part à la nécessaire prise en compte de l’évolution de l’habitat sur la zone et d’autre part à la modularité des câbles et des points de branchement »205 (soulignements ajoutés).

Ainsi, « Free demande à utiliser des fibres surnuméraires du réseau FttH qu’elle cofinance (quand et là où elles existent) »206.

Orange indique, quant à lui, que les fibres que Free appelle « surnuméraires » sont de 2 types :

- les fibres « surnuméraires » en prévision du raccordement des futurs locaux (logements et locaux à usage professionnel) ou pour d’éventuelles réparations207 ;

- les fibres « supplémentaires » dédiées à des services autres que le FttH, par exemple, et comme l’indique Orange, les fibres utilisées par Orange pour son offre dit « FttE ».208

Pour Orange, cette dernière catégorie ne relève pas des règles de dimensionnement du réseau FttH et ne rentre donc pas dans le périmètre de son offre de mutualisation FttH209.

Il ressort des écritures de Free que la demande 3 porte sur les fibres déployées par Orange en surplus du nombre de logements ou locaux à usage professionnel desservis existant à un instant donné mais uniquement si elles existent. Il convient de relever que Free ne demande pas à ce qu’Orange déploie de nouvelles fibres optiques spécialement pour le raccordement des stations de base mobiles (voir partie c)).

Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la question de la catégorisation opérée par Orange entre ses fibres, les fibres qualifiées de « surnuméraires » par l’Autorité dans la suite de la présente décision sont celles qui sont déployées dans le cadre du réseau FttH cofinancé par Free et qui sont en nombre supérieur au nombre de locaux desservis. .

b) Enjeux du raccordement des stations de base mobiles grâce à la boucle locale optique mutualisée

Free dans le cadre de sa demande, explique qu’il « fournit des liaisons de backhaul optique de BTS à Free Mobile, société sœur également filiale du groupe Iliad ».210

Free fait valoir que sa demande est justifiée, car compte tenu de la croissance exponentielle de la consommation de données mobiles, notamment des services de données à très haut débit, le dimensionnement des liens de collecte pour les réseaux mobiles doit être suffisant pour proposer une offre très haut débit mobile « attractive et concurrentielle »211.

Free soutient à cet égard que « seule la fibre permet dans la durée de fournir les débits, la latence et la capillarité nécessaires dès aujourd’hui pour les macro cells 4G et demain les small cells 5G »212 et que déployer des stations de base correspondantes nécessite un lien de collecte suffisamment dimensionné, ce que ne permettent pas le raccordement cuivre (dont les débits ne dépassent pas quelques dizaines de mégabits) ou les raccordements en faisceau hertziens.213

Free souligne également que la transition du cuivre vers la fibre nécessite que la boucle locale optique satisfasse « l’ensemble des usages historiquement satisfaits par la boucle locale cuivre, dont le raccordement des antennes mobiles »214.

Free indique ainsi avoir à ce jour raccordé en fibre optique [SDA] des antennes de Free Mobile et souhaite atteindre, à terme un taux de raccordement optique de ses stations de base [SDA].215 Par ailleurs, Free indique qu’il serait « inefficace » de « construire […] une deuxième boucle locale fibre en parallèle de la boucle locale FttH que nous cofinançons »216. Free considère d’ailleurs que « l’intérêt économique de la convergence des infrastructures fixe et mobile est évident compte tenu de l’existence d’économies d’échelle et d’envergure »217.

Orange explique de son côté avoir « fait le choix, dès le début du déploiement de la technologie 4G, de raccorder la quasi-totalité de ses antennes mobiles avec des liens en fibre optique dédiés »218 et considère que « les conditions techniques et opérationnelles d’utilisation des fibres optiques de son réseau de boucle locale optique mutualisée en aval d’un point de mutualisation ne sont pas suffisantes pour garantir le niveau de qualité de service attendu pour le raccordement de ses antennes mobiles »219. Orange précise en outre qu’il propose des offres de gros activées, dont la souscription par un opérateur tiers suppose le cas échéant le déploiement de raccordements dédiés en fibre optique, qui permettent aujourd'hui à un opérateur tiers de raccorder ses antennes mobiles dans les mêmes conditions qu’Orange.220

Free soutient qu’il ne demande pas « à disposer de conditions de qualité de service améliorées, avec des débits garantis ou de GTI ou GTR. En cas de chute d’un lien de fibre optique, la sécurisation du réseau de collecte sera assurée par des boucles de faisceaux hertziens du réseau macro cell »221. Par ailleurs, Free indique que « les choix techniques et industriels d’Orange  ne sauraient  s’imposer à  Free »222. En outre, Free indique que les offres d’accès activées d’Orange suscitées « ne sont pas substituables à de la fibre optique noire en ce qu’elles ne permettent pas le même niveau de différenciation technique que les offres passives »223.

À titre liminaire, et contrairement à ce que soutient Orange224, l’Autorité relève que la demande de Free à pouvoir raccorder des stations de base mobiles vise bien à satisfaire ses propres besoins. En effet, Free entend fournir des prestations de raccordement à Free Mobile, filiale du groupe Iliad.

En premier lieu, et comme l’a confirmé la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 29 juin 2017, qui a validé la légalité la décision de règlement de différend de l’Arcep n° 2015-0971, les liaisons filaires fibres sont des solutions technologiques adaptées au besoin croissant de bande passante, notamment au regard du caractère pérenne qu’elles présentent, pour raccorder des stations de base mobiles, notamment 4G : « Compte tenu de la croissance de la demande et des débits proposés grâce à la technologie 4G, qui permet des offres couplées téléphonie, Internet et télévision, les opérateurs ont de plus en plus intérêt à recourir à la fibre optique pour établir des liens pérennes et permettant d’écouler des débits supérieurs »225. Ce dernier support permet, au vu de la demande et des débits proposés, d’établir des liens pérennes permettant d’écouler des débits supérieurs.

Le besoin exprimé par Free dans sa demande s’inscrit d’ailleurs plus largement dans le contexte d’une exigence de généralisation de la couverture 4G sur tout le territoire.226 En effet, la transition vers les réseaux à très haut débit et la couverture de l’ensemble du territoire national par ces  réseaux constituent un enjeu majeur pour le secteur afin de satisfaire les besoins des utilisateurs finals. Compte tenu de l’investissement de Free dans les réseaux de nouvelle génération en fibre optique jusqu’à l’abonné, l’Autorité estime que le raccordement des stations de base mobiles  de Free Mobile par le réseau FttH cofinancé par Free contribue au respect des objectifs mentionnés aux 3° du II, au 1° du III et au 2° du IV, de l’article L. 32-1 du CPCE relatifs au « développement de l'investissement, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques », à « l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de communications électroniques », à « la promotion des investissements et de l'innovation dans les infrastructures améliorées et de nouvelle génération », et  à la prise en compte, s’agissant des obligations d’accès, « du risque assumé par les entreprises qui investissent »227.

Le recours de Free à la fibre optique dans le but de raccorder les stations de base de Free Mobile peut ainsi contribuer, à terme, à la satisfaction des besoins de connectivité des territoires et des utilisateurs de ces territoires.

En deuxième lieu, pour assurer une concurrence effective et loyale entre les opérateurs au bénéfice des utilisateurs, il convient que, lorsqu’ils exercent leur liberté de choix technologiques, les opérateurs puissent mobiliser les solutions technologiques les plus efficaces pour répondre à leurs besoins. Free estime que le recours au réseau FttH est efficace pour raccorder ses stations de bases mobiles. À l’inverse, Orange indique qu’il a eu recours à d’autres modalités pour raccorder en fibre optique ses propres stations de base et qu’il propose par ailleurs des offres permettant le raccordement par les opérateurs mobiles de leurs stations de base.

À titre liminaire, l’Autorité considère que les choix techniques d’Orange, opérateur fixe et mobile de longue date, qui a eu la possibilité de raccorder très tôt ses stations de base mobiles via des fibres tirées depuis ses NRA ou ses NRO228, ne sauraient contraindre Free sur ses choix techniques, dès lors qu’ils répondent à une logique d’efficacité, pour le raccordement de stations de base mobiles.

L’Autorité estime tout d’abord, comme le souligne Free, qu’une offre activée telle que celle proposée par Orange aux opérateurs afin de raccorder, avec un lien en fibre optique dédiée, leurs stations de base mobiles, n’apporte pas la même souplesse qu’une offre passive. Dans sa décision d’analyse des marchés pertinents de gros des accès de haute qualité, l’Autorité indique à cet égard que « L’utilisation d’un accès passif permet en effet à l’opérateur tiers de disposer d’un certain contrôle sur les conditions de transmission du signal à destination du client final. Dans ce cas, il dispose, par rapport à une offre d’accès de haute qualité, d’une plus grande capacité d’innovation et de différenciation, essentielle sur des marchés à évolution technologique rapide comme les marchés du haut et du très haut débit. Par ailleurs, ces configurations autorisent une plus grande indépendance industrielle et commerciale des opérateurs. »229.

Ensuite, l’Autorité estime que raccorder les stations de base mobiles de Free Mobile en fibre optique sans utiliser le réseau FttH, et donc sans tirer profit de la capillarité de ce dernier, impliquerait pour Free de les raccorder en tirant de nouveaux câbles de fibre optique depuis un point de présence tel que le NRO, ce qui reviendrait à dupliquer tout ou partie de la boucle locale optique mutualisée en cours de déploiement. L’Arcep considère, comme le soutient Free230, qu’une telle approche serait inefficace économiquement. En effet, les points de flexibilité du réseau de desserte optique (où les fibres surnuméraires mobilisables sont en attente) sont, en première hypothèse et selon toutes probabilités, plus proches des stations de base mobiles que ne le sont les NRO231. Dans sa décision    n °2017-1570232, l’Arcep décompte pour la zone AMII, au terme des déploiements FttH, 37 700 PM et au total plus d’un million de PBO déployés,233 à comparer aux 1 836 NRO existants. Il ressort de ces éléments que les stations de base mobiles de Free Mobile seront, en probabilité, généralement plus proches d’un PBO que d’un NRO, ce que Free a pu constater de manière empirique pour 6  communes (Yerres, Brest, Caen, Laval, Alençon et Plaisir) : en moyenne, « [l]es sites mobiles [sont] 5 fois plus proches des PM que des NRO (1,5 km contre 300 m en moyenne) et surtout plus de 50 fois plus proches des [points de concentration du réseau cuivre] que des NRO »234, ce que n’a pas contesté Orange par ailleurs.

Enfin, l’Autorité considère qu’il revient à Free de choisir les solutions techniques qu’il souhaite mobiliser dans le raccordement des stations mobiles de Free Mobile. En l’occurrence l’utilisation de la boucle locale FttH apparaît comme un choix raisonnable et efficace pour raccorder les stations de base de Free Mobile au moment où Free envisage leur raccordement en fibre optique. Arrivé plus tard sur le marché mobile, Free est confronté à d’autres choix techniques que ceux auxquels ont été confrontés les opérateurs présents sur le marché mobile depuis plus longtemps. La circonstance invoquée par Orange que le réseau FttH n’est pas adapté selon lui pour la fourniture d’offre à qualité de service renforcée permettant le raccordement d’antennes mobiles ou que son système d’information ne prévoie pas à l’heure actuelle le raccordement des stations de base mobiles, ne saurait constituer, en soi, des raisons de refuser la demande de Free.

En troisième lieu, la demande de Free porte sur le réseau FttH d’Orange qu’il cofinance235. Au regard du niveau important des investissements consentis, il apparaît légitime que Free puisse réutiliser ses investissements pour d’autres usages, dès lors que cela est techniquement possible. D’une  part, cette réutilisation contribue à maximiser l’utilité des investissements consentis, et donc à renforcer les incitations à l’investissement ; d’autre part, en permettant d’éviter un second investissement redondant, elle favorise l’investissement efficace ; ces deux conditions s’inscrivent dans les objectifs qu’il revient à l’Autorité de poursuivre de « développement de l'investissement » et de « promotion des investissements et de l'innovation dans les infrastructures améliorées et de nouvelle génération ».

De même, l’optimisation des ressources support au déploiement des réseaux FttH, qu’elles soient humaines (main d’œuvre) ou techniques (génie civil, production de fibres optiques) oblige les acteurs à la rationalité et à l’efficience opérationnelle. L’Autorité estime que l’utilisation des fibres optiques surnuméraires pour raccorder les stations de base va dans ce sens.

L’Autorité note que, dans le cadre du dégroupage, Orange et Free ont ainsi utilisé au maximum les fonctionnalités de la boucle cuivre pour raccorder d’autres éléments que les seuls utilisateurs finals236. Aujourd’hui, ce sont les réseaux FttH qui sont en cours de déploiement, et à l’instar du dégroupage, l’Autorité estime que la poursuite de synergies entre les déploiements fixes et mobiles est légitime et efficace économiquement pour des réseaux et marchés fixe et mobile de plus en plus convergents.

Il résulte de ce qui précède que la fibre optique est à ce jour une technologie adaptée pour satisfaire les besoins de débit actuels et à venir pour les offres à très haut débit mobile et que la demande de Free de pouvoir raccorder les stations de base mobiles de Free Mobile via les fibres optiques du réseau FttH d’Orange qu’il cofinance est cohérente avec les besoins à venir exprimés par Free dans ses écritures en matière de débit.

Il apparaît en outre globalement, économiquement et techniquement plus efficace d’utiliser les fibres existantes sur le réseau FttH d’Orange pour le raccordement des stations de bases mobiles que de déployer une nouvelle fibre optique depuis un NRO.

c) Appréciation sur les contraintes que ferait peser sur Orange la demande de Free

Free indique qu’il ne demande pas « d’engagement de résultat »237 à Orange en matière « d’existence » de fibres optiques surnuméraires utilisables. Par ailleurs, Free entend prendre à sa charge « une quote-part des éventuels coûts d’investissement incrémentaux, notamment de pose d’un boitier (de type PBO) dédié à l’extraction de la fibre concernée » et indique « Nous ferons notre affaire du lien optique entre le boitier d’extraction et l’antenne, tant pour la construction que l’exploitation »238.

Orange soutient que « les disponibilités à date de fibres surnuméraires ne sont pas réparties de façon homogène sur l'ensemble du réseau, […] une portion significative des PBO installés aujourd'hui sont dimensionnés à la fois pour des raisons techniques et économiques pour correspondre au strict besoin pour les futurs raccordements FttH des locaux à proximité »239.

Orange a par ailleurs confirmé dans le cadre de l’instruction qu’il est possible techniquement d’utiliser des fibres surnuméraires à partir des PBO mais souligne que le réseau FttH n'a pas été dimensionné pour raccorder les antennes mobiles ou, éventuellement, des éléments de réseau distants.240 À cet égard, Orange indique que la demande de Free mettrait en péril dans certaines zones le respect par Orange de l’obligation de complétude prévue par le cadre symétrique FttH et remettrait en cause la dynamique de déploiements de réseau FttH engagée sur tout le territoire241.

En premier lieu, l’Autorité constate qu’il existe des fibres surnuméraires déployées sur le réseau FttH d’Orange notamment au niveau des PM et des PBO, ce que ne conteste pas Orange. Les sites mobiles représentent en outre une faible densité de lignes. À date, le ratio en ordre de grandeur entre le nombre de stations de base mobiles – tout opérateur confondu – à raccorder en fibre optique en zone AMII et le nombre de fibres optiques surnuméraires (en prenant un taux de fibres surnuméraires de 15 %242) est très faible243. Orange devrait donc pouvoir dans la plupart des cas satisfaire la demande de raccorder des stations de base mobiles avec des fibres surnuméraires.

Au demeurant, l’Autorité constate également que la demande de Free est de pouvoir accéder aux fibres surnuméraires existantes du réseau FttH d’Orange, et non d’imposer à Orange de rendre disponibles des fibres surnuméraires à chaque PBO en vue du raccordement des stations de base mobiles. Dès lors, la demande de Free n’oblige pas Orange à rendre des fibres optiques surnuméraires disponibles. Orange pourra ainsi, après étude des besoins liés au raccordement des logements et locaux à usage professionnel, et dans le respect de l’obligation de complétude des déploiements, indiquer si des fibres surnuméraires sont disponibles pour raccorder les stations de base mobiles.

En deuxième lieu, Free, dans sa demande, indique qu’il « fera son affaire » de la construction et l’exploitation du lien optique jusqu’à la station de base mobile. Orange n’aura donc pas à mobiliser ses propres ressources pour le déploiement.

En troisième lieu, Free, dans sa demande, indique, dans l’hypothèse où des coûts spécifiques surviendraient pour raccorder les stations de base mobiles, être « prêt à prendre à [sa] charge une quote-part des éventuels coûts d’investissements incrémentaux »244.

En quatrième lieu, Free indique qu’il ne lui paraît pas déraisonnable qu’Orange ait la faculté de subordonner l’utilisation des fibres surnuméraires pour le raccordement de stations de base mobiles « à un volume maximal de fibre surnuméraire utilisable par Free. Ce volume maximal pourrait être (par exemple) de 3 % du nombre de fibres cofinancées »245.

Dès lors, au regard de ce qui précède, l’Autorité considère qu’Orange peut donner accès à des fibres surnuméraires sans remettre en cause sa dynamique de déploiement, dans les cas où elles sont disponibles et qu’elles n’obèrent pas la capacité de raccorder un utilisateur final et le respect de l’obligation de complétude par Orange.

d) Appréciation de la tarification de l’accès aux fibres optiques pour relier des BTS

Free demande que l’accès aux fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles soit possible « sans surcoût d’accès aux lignes déployées »246.

L’Autorité estime qu’il reviendra à Orange d’établir les conditions tarifaires pour l’accès aux fibres surnuméraires pour raccorder les stations de base mobiles. Au regard des objectifs prévus à l’article L. 32-1 du CPCE, il apparait équitable que ces conditions soient établies à l’issue de négociations menées  de  bonne  foi, au regard de  critères objectifs, permettant à Orange de recouvrer a minima ses coûts tout en permettant l’effectivité de l’accès et en tenant compte du fait que Free cofinance le réseau FttH.

L’Autorité estime également que la tarification de l’usage de fibres surnuméraires pour le raccordement des stations de base mobiles devrait être établie par Orange dans une cohérence d’ensemble avec la tarification du cofinancement FttH et ses principes.

Ainsi, les niveaux tarifaires d’Orange pour l’accès aux fibres surnuméraires pour raccorder les  stations de bases mobiles devraient au minimum être égaux à ce qui est proposé dans le cadre d’un accès pour le raccordement d’un utilisateur final. Orange devrait par ailleurs prendre en compte la rémunération relative à l’accès aux fibres surnuméraires pour raccorder des stations de base mobiles dans le cadre de ses hypothèses de recettes du réseau FttH, de la même manière que pour toute autre fibre du réseau.

L’instruction n’a pas mis en évidence d’éléments objectifs justifiant que la tarification récurrente due à Orange pour l’usage d’une ligne raccordée à une station de base mobile soit substantiellement différente de celle d’une ligne raccordée à un utilisateur final.

Dans le même temps, dans l’hypothèse, évoquée par Free dans sa demande, où des surcoûts spécifiques interviendraient dans la mise en œuvre opérationnelle de l’accès aux fibres surnuméraires, l’Autorité estime justifié et équitable que Free paye à Orange ces surcoûts spécifiques.

4.3.4         Conclusion générale de la demande 3 de Free

Compte tenu de ce qui précède, et au regard notamment des objectifs de « développement de l'investissement, de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des communications électroniques », d’« aménagement et l'intérêt des territoires et la diversité de la concurrence dans les territoires » et à la « promotion des investissements et de l'innovation dans les infrastructures améliorées et de nouvelle génération », l’Autorité considère, dans les circonstances de l’espèce, qu’il est équitable qu’Orange permette à Free de raccorder les stations de base mobiles de Free Mobile via les fibres optiques surnuméraires du réseau FttH déployé par Orange et cofinancé par Free, dans la limite de leur disponibilité et, le cas échéant, d’un volume à définir, dans des conditions tarifaires négociées de bonne foi, au regard de critères objectifs permettant à Orange  de recouvrer au moins ses coûts, et tenant compte du fait que Free cofinance le réseau FttH.

L’Autorité considère qu’une phase de négociations peut être nécessaire pour déterminer les nouvelles conditions contractuelles encadrant le raccordement de stations de base mobiles par le réseau FttH d’Orange tel que précisé dans la présente décision. Pour permettre ces ajustements, l’Autorité estime qu’il est justifié de laisser à la société Orange, d’une part, un délai de 4 mois à compter de la notification de la présente décision pour proposer à Free un projet d’avenant initial et, d’autre part, à l’issue d’une négociation menée de bonne foi et au plus tard dans un délai de 3 mois à compter de la transmission du projet d’avenant initial, un avenant au contrat d’accès mettant en œuvre la présente décision.

5     Sur la confiance légitime

La société Orange fait valoir qu’une décision de l’Arcep qui ferait droit aux demandes de Free remettrait en cause « la confiance légitime dans la régulation FttH, et en tout état de cause rétroactivement les investissements consentis par Orange en la matière ». Selon Orange, l’Arcep a  mis en place un cadre symétrique détaillé « permettant de libérer l’investissement des opérateurs », pour lequel le régulateur aurait donné des assurances sur le fait qu’il ne serait pas remis en cause, notamment dans son projet de décision d’analyse du « marché 3a ».247

L’Autorité rappelle que, suivant une jurisprudence constante des juridictions de l’Union européenne, « le principe de confiance légitime, opposable aux autorités de l’Union européennes et nationales lorsqu’elles mettent en œuvre le droit de l’Union, leur impose de respecter la confiance des parties lorsqu’elles ont fait naître dans leur chef des espérances fondées du fait d’assurances précises qu’elles leur auraient fournies »248.

Or, au cas présent, rien ne permettait à la société Orange d’espérer que, compte tenu de ce que le projet de décision d’analyse du « marché 3a »249 de l’Arcep a considéré que l’obligation de faire droit aux demandes raisonnables d’accès à la boucle locale optique issue du cadre symétrique répondait aux besoins de la période d’émergence de la boucle locale optique et qu’il n’était pas nécessaire d’imposer à Orange une obligation spécifique au titre de son influence significative sur le marché des offres d’accès aux infrastructures constitutives de la boucle locale filaire, l’Arcep ne puisse se prononcer, au regard des circonstances de l’espèce et pour des motifs d’ordre public économique, sur une demande de règlement de différend portant sur des questions spécifiques en lien avec les conditions d’exécution de la prestation d’accès au réseau FttH.

De plus, la circonstance que le cadre symétrique ne prévoit pas explicitement les conditions d’accès aux réseaux FttH précisées par la présente décision n’empêche pas l’Autorité de préciser de façon motivée les conditions équitables, d’ordre technique et financier, dans lesquelles l’accès aux lignes FttH d’Orange doit être assuré au regard d’une situation particulière.

Il incombe en effet à l’Autorité, en application des dispositions de l’article L. 36-8 du CPCE, de trancher le litige né entre deux opérateurs sur les conditions dans lesquelles l’accès est assuré, sans qu’il n’y ait d’incompatibilité avec l’exercice, par l’Autorité, de sa compétence sur le fondement des dispositions de l’article L. 36-6 ou de l’article L. 37-1 et suivants du CPCE250.

Décide :

Article 1. La société Orange doit, à compter de la notification de la présente décision, transmettre  à la société Free, d’une part, dans un délai de 1 mois, un premier projet d’avenant et, d’autre part, à l’issue d’une négociation menée de bonne foi et au plus tard dans un délai de 4 mois à compter de la notification de la présente décision, un avenant au contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange en zones moins denses d’initiative privée faisant bénéficier Free, en contrepartie de son cofinancement, d’un droit d’accès au réseau FttH d’Orange dans ces zones d’une durée définie, d’au moins 40 ans, sous réserve de la décision d’Orange de poursuivre l’exploitation technique et commerciale de son réseau FttH en zones moins denses jusqu’à cette date, dans des conditions transparentes et prévisibles, lui permettant de disposer de la visibilité adéquate au regard des investissements consentis et cohérente avec ce qui peut être observé par ailleurs sur le marché.

Article 2. La société Orange doit, à compter de la notification de la présente décision, transmettre  à la société Free, d’une part, dans un délai de 1 mois, un premier projet d’avenant et, d’autre part, à l’issue d’une négociation menée de bonne foi et au plus tard dans un délai de 4 mois à compter de la notification de la présente décision, un avenant au contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange en zones moins denses d’initiative privée :

- prévoyant la définition de manière explicite et transparente des liens entre les principaux tarifs du contrat (notamment le tarif de cofinancement du segment entre le point de mutualisation et le point de branchement optique, le prix de construction du raccordement final, le tarif récurrent par ligne active, le tarif récurrent de maintenance du raccordement final, les tarifs des liens entre le point de mutualisation et le nœud de raccordement optique) et les coûts du  réseau  cofinancé ;

- prévoyant la transmission par la société Orange à la société Free des dépenses constatées, de façon agrégée, sous-jacentes aux tarifs correspondant à chacun des trois segments de réseau (du nœud de raccordement optique au point de mutualisation exclu ; du point de mutualisation inclus au point de branchement optique inclus ; raccordement final), en distinguant au minimum coût d’investissement, d’une part, et coût récurrent, d’autre part ; et en distinguant au sein du coût récurrent, pour le segment point de mutualisation – point de branchement optique (PM-PBO), exploitation et maintenance, location de génie civil, frais de portage financier et, le cas échéant, les principaux grands autres postes de coûts ;

- prévoyant que les éléments visés à l’alinéa précédent seront transmis annuellement par la société Orange à la société Free dans un délai cohérent avec ceux des autres productions comptables d’Orange. Ces éléments devront être transmis à Free dès 2018, à l’exception de la chronique des coûts d’investissement qui devra être transmise pour la première fois dans un délai de 3 ans à compter de la notification de la présente décision, puis annuellement.

Article 3. La société Orange doit, à compter de la notification de la présente décision, transmettre  à la société Free, d’une part, dans un délai de 4 mois, un projet d’avenant initial et, d’autre part, à l’issue d’une négociation menée de bonne foi et au plus tard dans un délai de 7 mois à compter de la notification de la présente décision, un avenant au contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange en zones moins denses d’initiative privée précisant les conditions techniques et financières d’accès aux fibres surnuméraires du réseau cofinancé par Free pour le raccordement par Free des stations de base mobiles de Free Mobile, au regard de critères objectifs permettant à Orange de recouvrer au moins ses coûts, et tenant compte du fait que Free cofinance le réseau FttH.

Les conditions techniques pourront prévoir que l’accès soit conditionné à la disponibilité de fibres surnuméraires, ainsi qu’un plafond maximal de fibres surnuméraires accessibles au regard du nombre de fibres cofinancées par Free.

Article 4. Le surplus des demandes de la société Free est rejeté.

Article 5. La directrice des affaires juridiques de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est chargée de notifier la présente  décision aux sociétés Free et Orange. Elle sera rendue publique sous réserve des secrets protégés par la loi.

NOTES :

1 Communiqué de presse du 13 mars 2018 : http://www.iliad.fr/finances/2018/CP_130318.pdf

2 Décision n° 2017-1347 de l’Arcep en date du 14 décembre 2017 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d'accès local en position déterminée, sur la désignation d’un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché (marché 3a), disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/17-1347.pdf

Décision n° 2017-1348 de l’Arcep en date du 14 décembre 2017 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d'accès central en position déterminée à destination du marché de masse, sur la désignation d’un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché (marché 3b), disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/17-1348.pdf

Décision n° 2017-1349 de l’Arcep en date du 14 décembre 2017 portant sur la définition des marchés pertinents de gros des accès de haute qualité, la désignation d’opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre (marché 4), disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/17-1349.pdf

3 Présentation des résultats financiers d’Orange 2017, 21 février 2018, page 28, disponible ici : https://www.orange.com/fr/content/download/46099/1357466/version/2/file/FY17%20Presentation%20-%20FR%20-%20vDef.pdf

4 Ibid

5 Le Gouvernement a fixé un objectif de « très haut débit pour tous » à fin 2022.

6 C’est-à-dire des locaux pour lesquels le réseau FttH a été déployé à proximité immédiate, avec pour conséquence que leurs occupants soient alors en mesure de demander leur raccordement et souscrire des offres de services sur le réseau FttH.

7 Ibid.

8  https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/le-marche-du-haut-et-tres-haut-debit-fixe-deploiements/

9 Services fixes haut et très haut débit : abonnement et déploiements – 4ème trimestre 2017, disponible ici : https://www.arcep.fr/fileadmin/reprise/observatoire/HD-THD-2017/Observatoire_HD_THD_T4_2017.pdf

10 https://www.arcep.fr/uploads/tx_gsavis/17-1293.pdf

11  https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/le-marche-du-haut-et-tres-haut-debit-fixe-deploiements/

12 Source Arcep

13  http://francethd.fr/documents_reference/engagement/engag_L33-13_Orange_pour_publication.pdf

14 Communiqué de presse d’Orange du 20 mars 2017, disponible ici : https://www.orange.com/fr/content/download/41692/1285878/version/1/file/CP%20Paris%20fibre%2020%20mars%2020 17_.pdf

15 Réponses de Free au premier questionnaire des rapporteurs (tableur – pièce 24)

16 Les chiffres de l’Observatoire de l’Arcep sur la consommation de trafic de données par carte SIM montrent une croissance de plus de 68 % entre 2014-2015, 100 % entre 2015-2016, et 117 % entre 2016-2017, disponible ici : https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/indicateurs-dactivite-des-operateurs-de-communications-electroniques/

17 Comme le montre l’évolution de la consommation moyenne de données par usager qui a bondi de 97 % annuellement entre 2014 et 2017, disponible ici : https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/indicateurs-dactivite-des-operateurs-de- communications-electroniques/

18 Saisine de Free, pièce 2 (Contrat n° 16000678). Voir également réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, pièce 9

19 Saisine de Free, page 5 : « Le présent différend porte sur le contrat d’accès aux lignes FttH déployées par Orange en zone AMII où les déploiements sont intégralement réalisés, financés et possédés par des opérateurs privés indépendamment de toute intervention de collectivités publiques »

20 Premières observations en défense d’Orange, pages 14 et 15

21 Décision n° 2010-1232 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 16 novembre 2010 se prononçant sur une demande de règlement de différend opposant les sociétés Bouygues Telecom et France Télécom

22 Décision n° 2010-1312 de l’Arcep en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses, motifs, page 30

23 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 10

24 Premières observations en défense d’Orange, page 16 25 Ibid.

26 Décision n° 2010-1312, motifs, page 17

27 Saisine de Free, pièce 3

28 Saisine de Free, pièce 4

29 Saisine de Free, pièce 6

30 Saisine de Free, pièce 3

31 Saisine de Free, page 5 et réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, Q5

32 Saisine de Free, pièce 5

33 Saisine de Free, pièce 7

34 Premières observations en défense d’Orange, p.18.

35 Premières observations en défense d’Orange. La société Orange indique en particulier que les négociations du courrier du 21 juillet 2017 portaient sur la connaissance « des coûts par segments de réseau, mais aussi de la ventilation de ces différents coûts entre « pilotage interne » et « dépense de sous-traitance ».

36 Premières observations en défense d’Orange, p. 18 : Orange cite : « La Saisine, p.14, note de bas de page n° 2 ».

37 Troisièmes observations en défense d’Orange, page 11

38 Délibérations du collège devant la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction de l’Autorité du 13 et du 21 février 2018

39 Les rapporteurs n’ont notamment pas divulgué le nom des parties au présent règlement de différend, ni transmis aux tiers consultés les demandes de Free, ou tout autre élément du dossier

40 Les réponses écrites et les procès-verbaux des auditions de Bouygues Telecom et SFR ont été transmis aux parties les 5 et 9 avril 2018, leur permettant de produire des observations en réponse à ces éléments

41 Premières observations en défense d’Orange, pages 22 à 24

42 Premières observations en défense d’Orange, page 31

43 Saisine de Free, page 14

44 Décision n°2010-1312, motifs page 31

45 Décision n° 2010-1312, motifs page 32

46 Avis n° 10-A-18 du 27 septembre 2010 de l’Autorité de la concurrence relatif à un projet de décision de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes portant sur le déploiement de la fibre optique en dehors des zones très denses, point 39, page 10

47 Avis n° 10-A-18 de l’Autorité de la concurrence, point 74, page 17

48 Offre d’accès en zone très dense à la partie terminale des lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique d’Orange, disponible ici :

https://www.orange.com/fr/content/download/3467/31505/version/12/file/Offre%20cablage%20FTTH%20ZTD%201%20ja nvier%202018.pdf

49 D’après la définition donné à l’article 2 de l’offre d’accès en zone très dense d’Orange : « fibre dédiée : désigne une ligne FTTH utilisée de manière exclusive par un opérateur en vue de fournir effectivement des services de communications électroniques à un client final. »

50 D’après la définition donné à l’article 2 de l’offre d’accès en zone très dense d’Orange : « fibre partageable : désigne une ligne FTTH utilisée de manière non exclusive par un opérateur en vue de fournir effectivement des services de communications électroniques à un client final. »

51 Article 4.4.1 de l’offre d’accès en zone très dense d’Orange 52 Article 4.4.1 de l’offre d’accès en zone très dense d’Orange 53 Ibid.

54 Ibid.

55 L'Autorité a publié, le 14 juin 2011, une recommandation relative aux modalités de déploiement et de mutualisation des réseaux FttH dans les zones très denses, en particulier pour les petits immeubles de moins de 12 logements, qu’elle a complétée par une recommandation du 21 janvier 2014. Sur la base d’un constat de forte hétérogénéité des zones très denses, l’Autorité a recommandé d’y distinguer des poches de basse densité, dans lesquelles, une remontée du point de mutualisation en amont dans le réseau semble souhaitable, afin de garantir le caractère raisonnable des conditions techniques et économiques de l'accès ainsi que la cohérence et la complétude des déploiements. La recommandation du 14 juin 2011 : disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/20110614-Recommandation-petits-immeubles- ZTD-post-consultation.pdf. La recommandation du 21 janvier 2014 : disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/recomd-FttH-immeubles-moins-12-log-ZTD-janv2014.pdf

56 Ou le jour de l’entrée en vigueur du contrat passé entre Free infrastructure et l’opérateur commercial lorsque le déploiement y est antérieur, voir article 5 des Conditions Particulières Zone Très Dense de l’Offre d’accès aux lignes à très haut débit déployées par Free infrastructure du 17 juillet 2017, disponible ici : https://www.iliad.fr/documentation/FreeInfrastructureOffreAccesFTTHJuillet2017.pdf

57 Ou, si elle arrive en en premier, à l’échéance de la « dépose du Câblage d’Immeuble par Free Infrastructure sur demande du Gestionnaire de l’immeuble », voir article 5 des Conditions Particulières Zone Très Dense de l’Offre d’accès aux lignes à très haut débit déployées par Free infrastructure du 17 juillet 2017

58 Article 5 des Conditions Particulières Zone Très Dense de l’Offre d’accès aux lignes à très haut débit déployées par Free infrastructure du 17 juillet 2017.

59 Réponses de Free au premier questionnaire des rapporteurs, Q10

60 L’article 5 des Conditions Particulières Zone Très Dense de l’Offre d’accès aux lignes à très haut débit déployées par Free infrastructure du 17 juillet 2017 stipule que par dérogation, le droit d’usage est tacitement renouvelé par période de 15  ans, avec un nombre de renouvellement stipulé dans la convention sans pouvoir être supérieur à deux, « lorsque [l’opérateur commercial] est lui-même opérateur d’immeuble en zone très dense et qu’en contrepartie de l’offre de cofinancement des lignes FTTH qu’il déploie, la durée des droits cédés, y compris les éventuels renouvellements stipulés dans l’offre de cofinancement, est inférieure à 90% de la durée, y compris les éventuels renouvellements stipulés aux paragraphes ci-dessus, du Droit d’Usage ». Free a indiqué dans sa réponse Q10 au premier questionnaire des rapporteurs, que : « Ayant refusé de faire droit à la demande de Free de disposer de droits équivalents, Orange bénéficie de droits d’usage limité à 60 ans »

61 Article 9 du contrat d’accès aux lignes FTTH SFR en Zone Très Dense, V3.1 Juillet 2017, disponible ici : http://www.sfr.com/sites/default/files/nous-connaitre/contrat-acces-ftth-sfr-ztd-v31_juillet_2017.pdf:                                                                                                   

« L’Opérateur Commercial ayant participé au Co-investissement ab initio de la fibre optique déployée par SFR dans un Immeubles FTTH desservi par un PMI bénéfice des droits d’usage irrévocables […] pour une première durée de 30 (trente) ans à compter de l’Avis de Mise à Disposition du PMI considéré. »

« A l’issue de cette première durée de 30 (trente) ans, les droits d’usage irrévocables seront tacitement renouvelés pour une nouvelle période de 30 (trente) ans en contrepartie du versement d’un euro symbolique. Il en ira de même à l’issue de cette seconde période de 30 (trente) ans »

62 Réponses de Free au premier questionnaire des rapporteurs, Q10 et Article 6 Article 5 des Conditions Particulières Hors Zone Très Dense de l’Offre d’accès aux lignes à très haut débit déployées par Free infrastructure du 17 juillet 2017

63 Article 6.6.3 du contrat d’accès aux Lignes FTTH de SFR déployées en dehors des Zones Très Denses, disponible ici : http://www.sfr.com/sites/default/files/documents_n3/contrat-ftth-sfr-zmd-v2_1-20170501.pdf :

« L’Opérateur ayant participé au Co-investissement ab initio des Lignes déployées par SFR dans la Zone de Co-investissement bénéficie du droit d’usage irrévocable cité ci-avant pour une première durée de 20 (vingt) ans à compter de la date d’effet de la première mise à disposition de Logements Raccordables émis par SFR pour la Zone de Co-investissement considérée.

Dans l’hypothèse où l’Opérateur viendrait à s’engager au titre du Co-investissement postérieurement à cette date, la durée des droits d’usage irrévocables correspondra au temps restant à courir entre la date de signature effective de l’Acte d’Engagement et l’échéance précitée de 20 (vingt) ans. Cette disposition est expressément prévue pour que l’ensemble des droits d’usage octroyés aux Opérateurs Commerciaux sur les Lignes FTTH arrive à échéance en même temps.

À l’issue de cette première durée de 20 (vingt) ans, les droits d’usage irrévocables seront tacitement renouvelés pour une nouvelle période de 20 (vingt) ans en contrepartie du versement par l’Opérateur d’un euro symbolique. »

64 Article 9.1 des Conditions particulières de l’offre FttH passive proposée par « Vaucluse numérique » (Axione), disponible ici :

http://www.vaucluse-numerique.fr/files/Editeur/VaucluseNum/Documentation/Contrat%20FTTH%20Passif%20VN.pdf

65 Exemple de l’offre d’accès de SFR collectivité relative au projet de réseau d’initiative publique de l’Oise, disponible ici : http://www.oise-numerique.fr/documents_a_telecharger.php.

66 Les offres d’accès des lignes FttH exploitées par les filiales d’Altitude infrastructure sont disponibles ici : http://www.altitudeinfrastructure.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=167&Itemid=89&lang=fr

67 Exemple des conventions d’accès aux lignes FttH des réseaux d’initiative publique de Seine-et-Marne et d’Essonne, disponible ici : https://www.covage.com/wp-content/uploads/2017/11/Semafibre-77-Offre-de-co-investissement-FTTH-Annexes-SMTHD-02-2016_Partie1.pdf

https://www.covage.com/actualites/offre-de-co-investissement-ftth-essonne-numerique-thd/

68 Saisine de Free, page 20

69 Saisine de Free, page 19

70 Saisine de Free, page 20

71 Ibid., page 27

72 Ibid., page 27

73 Premières observations en défense d’Orange, page 25

74 Ibid., page 25

75 Ibid., page 25

76 Ibid., page 25

77 Ibid., page 27. Voir également deuxièmes observations d’Orange, page 15

78 Ibid., page 26. Voir également deuxièmes observations d’Orange, page 15 : « Free bénéficie automatiquement d’un droit  à renouvellement »

79 Article 1 « nature et durée des droits relatifs aux lignes FttH » de l’Annexe ZMD 3 « droits associés au cofinancement en dehors de la Zone Très Dense » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

80 Ibid.

81 Saisine de Free, page 21

82 Article 3 « conditions de renouvellement du droit » de l’Annexe ZMD 3 « droits associés au cofinancement en dehors de la Zone Très Dense » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

83 Ibid.

84 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q16

85 Article 3 « conditions de renouvellement du droit » de l’Annexe ZMD 3 « droits associés au cofinancement en dehors de la Zone Très Dense » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

86 Réponse d’Orange au second questionnaire des rapporteurs, Q4

87 « Au terme du droit réel temporaire, la pleine propriété du câblage FTTH objet du droit réel temporaire revient à Orange laquelle accorde automatiquement en retour à l’opérateur un droit de jouissance d’une durée de 15 ans, renouvelable une fois pour une durée identique, applicable aux câblages FTTH installés au jour du terme du droit réel temporaire » (article 4.4.1.1 de l’offre d’accès  en zone très dense d’Orange)

88 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q13. Orange a réitéré cet argument au cours de l’audience du 3 mai 2018

89 Ibid.

90 Ces modalités sont prévues à l’article 16 « remplacement et dépose » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2, qui est applicable à la fois en zones moins denses et en zones très denses (à noter : l’article 16.3 prévoit bien des modalités particulières pour le remplacement et la dépose des Liens NRO-PM en zone moins dense, en renvoyant aux Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense, dont l’article 6.2 prévoit également que la dépose des lignes FttH entraine l’extinction du droit d’accès : « Lorsqu’Orange décide de procéder à la dépose d’un lien NRO-PM […] L’Opérateur est informé de l’extinction du droit qui lui a été conféré sur le lien NRO-PM  déposé »)

91 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 21

92 Réponse d’Orange au second questionnaire des rapporteurs, Q8

93 L’Autorité rappelle que la Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 19 janvier 2012, se prononçant sur la décision de règlement de différend n° 2010-1232 de l’Arcep, a estimé que « […] la Loi ne se prononce pas sur la nature du droit d’accès et que ce droit obéît à un régime juridique particulier déterminé contractuellement par les parties dans le respect de l’article L 34-8-3 du CPCE et des objectifs de la régulation (non-discrimination, efficacité de l’investissement, effectivité de la concurrence) ». Cette position a été confirmée par la Cour de cassation (Cass. Com. 16 avr. 2013, n° 12-14.445) qui a estimé que la Cour d’appel a légalement justifié sa décision, et notamment qu’elle n’était pas tenue d’examiner la nature du droit d’usage pérenne

94 Saisine de Free, page 22

95 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 20

96 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 20

97 Loi n° 69-1160 du 24 décembre 1969 de finances rectificative pour 1969, disponible ici : https://www.senat.fr/rap/r95- 260/r95-26010.html

98 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q14

99 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 24

100 Saisine de Free, page 24

101 Cf. article 1.8 « principes tarifaires » et article 4 « principes tarifaires relatifs à la maintenance » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

102 Cf. article 16 « remplacement et dépose » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange. Free dispose de la possibilité refuser les frais liés au remplacement d’un lien ; ce refus entraînant la résiliation de son engagement et l’extinction de son droit pour ce lien (cf. art. 21.1.6 des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange et article 6 Conditions Particulières en dehors de la Zone Très dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2)

103 Article 3 « conditions de renouvellement du droit » de l’Annexe ZMD 3 « droits associés au cofinancement en dehors de la Zone Très Dense » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

104 Saisine de Free, page 24

105 Saisine de Free, page 24. Free affirme également à cet égard que « dès lors que nous payons notre quote-part des coûts d’investissements initiaux, des frais d’exploitation et de maintenance et des frais de remplacement de câbles ou réinvestissements nécessaires, il n’existe aucune dépense « non affectée » dont nous ne supportons pas une quote-part. » Réponse de Free aux éléments apportés par Bouygues Telecom et SFR, page 5

106 Réponses d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q14 et Q16 et au second questionnaire des rapporteurs, Q9

107 Premier questionnaire des rapporteurs, Q14 et second questionnaire des rapporteurs, Q4

108 Saisine de Free, page 24

109 Le Contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, Saisine de Free, pièce 2, stipule notamment à l’article 1.10 des Conditions particulières en dehors de la zone très dense que :

« Le prix mensuel applicable au nombre de Lignes FTTH de la Zone de cofinancement affectées à l'Opérateur peut être réévalué annuellement dans la limite d'un plafond. […] Si les coûts évoluent à la hausse, les prix forfaitaires du cofinancement ab initio applicables au nombre de Logements Couverts et au nombre de Logements Raccordables et le plafond de réévaluation du prix mensuel applicable au nombre de Lignes FTTH de la Zone de Cofinancement affectées à l'Opérateur peuvent être réévalués annuellement dans la limite de 75 % de la dernière variation annuelle de l'indice des salaires mensuels de base par activité - Télécommunications - NAF rév. 2 - Niveau A38 - Poste JB - Base 100 2ème trim 2005, ou tout indice de substitution mis en place par l'INSEE […] Dans le cas d'une évolution exceptionnelle des coûts, Orange peut procéder à une augmentation des tarifs de cofinancement au-delà de la variation tarifaire résultant de l'application de l'alinéa précédent. […] En cas d'évolution des coûts à la baisse, Orange peut répercuter tout ou partie des baisses de coûts constatées sur les tarifs » (soulignements ajoutés)

110 Article 15.5 des Conditions Générales et article 1.10 des Conditions Particulières en dehors de la zone très dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange

111 Article 16.2 des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange

112 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 22 ; Pour appuyer ses propos, Orange indique que « le modèle tarifaire du FttH en zone moins dense de l’ARCEP permet en pratique d'évaluer les coefficients ex post applicables en fonction de la durée écoulée entre la date d'installation du PM et la date de cofinancement a posteriori par l’opérateur tiers. Il ressort de ce modèle que la durée de concession du droit réel temporaire est un facteur déterminant de la définition du niveau des coefficients ex post » (deuxièmes observations en défense d’Orange, page 24)

113 Article 1.8 « Principes tarifaires » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d'Orange, saisine de Free, pièce 2

114 Une description des tarifs du contrat d’accès est développée en partie 4.2.1.

115 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 24

116 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/doc-model-tarif-acces-ftth- oct2015.pdf

Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 22

Excel publié : https://www.arcep.fr/index.php?id=8571&tx_gsactualite_pi1%5Buid%5D=1784&tx_gsactualite_pi1%5Bannee%5D=&tx_gs actualite_pi1%5Btheme%5D=&tx_gsactualite_pi1%5Bmotscle%5D=&tx_gsactualite_pi1%5BbackID%5D=26&cHash=a32900 2e955883477fe864abe8431b85

117 Le calcul du coefficient ex post au sein de ce modèle utilise une durée d’« horizon économique du projet », qui est un paramètre distinct de la durée des droits tant dans son principe (cf. document  d’accompagnement  du modèle  publié, page 5) que dans les valeurs renseignées à titre illustratif dans le modèle publié (respectivement 25 ans vs 20 ans, onglets hypothèses cellules C6 et C41)

118 Le coefficient ex post est le même dans les offres d’accès d’Orange en zones très denses et en dehors des zones très denses :

https://www.orange.com/fr/content/download/3467/31505/version/12/file/Offre%20cablage%20FTTH%20ZTD%201%20ja nvier%202018.pdf, page 91

https://www.orange.com/fr/content/download/3468/31507/version/11/file/offre%20cablage%20FTTH%20horsZTD%20du%201%20janvier%202018.pdf, page 72

119 Observations de Free sur les réponses aux questionnaires adressés aux sociétés Bouygues Telecom et SFR ainsi que sur les procès-verbaux de leurs audition, page 5

120 Sur ce point, voir les précisions apportées dans la réponse de Free au second questionnaire des rapporteurs, Q10. Par « frais de portage financier », Free fait référence à une « masse manquante » et indique à ce titre : « En matière de « frais de portage financier », l’incertitude est double, à la fois sur le niveau absolu de la masse manquante et sur la manière dont Orange établit, constate ou calcule, le coût associé ayant vocation, le cas échéant, à être répercuté sur les tarifs […] la connaissance du montant en valeur absolue de la masse manquante est l’information la plus structurante. »

121 Saisine de Free, page 14

122 Saisine de Free, page 48 : « Free ne dispose d’aucune information sur les coûts de réseau et est donc privée de toute capacité d’anticipation financière. Le FttH est l’un des principaux postes de dépense pour le groupe Iliad au cours de la prochaine décennie, et la zone AMII Orange représente [SDA] (les dépenses ZTD étant désormais en grande partie passées). Un minimum de visibilité sur l’économie du réseau cofinancé et un minimum de lien contractuel entre coûts de ce réseau et tarifs que nous acquittons nous sont indispensables pour anticiper les évolutions probables et notre économie future. Avoir accès aux grandes masses de coûts de réseau mutualisé en zone AMII permettrait de résorber une partie du déficit de visibilité de notre direction financière par rapport à celle d’Orange. »

123 Premières observations en défense d’Orange, page 32

124 Article 4 « Lien NRO-PM » des Conditions d’Accès aux Lignes FTTH d’Orange Annexe ZMD 1 – prix en dehors de la Zone Très Dense, saisine de Free, pièce 2

125 Article 1 « Offre de cofinancement » des Conditions d’Accès aux Lignes FTTH d’Orange Annexe ZMD 1 – prix en dehors de la Zone Très Dense, saisine de Free, pièce 2

126 Article 5 « Câblage Client Final » des Conditions d’Accès aux Lignes FTTH d’Orange Annexe ZMD 1 – prix en dehors de la Zone Très Dense, saisine de Free, pièce 2

127 Saisine de Free, page 9 « la location à la ligne FttH […] n’est pas concernée par la présente demande de règlement de différend »

128 Article 5 « Câblage Client Final » des Conditions d’Accès aux Lignes FTTH d’Orange Annexe ZMD 1 – prix en dehors de la Zone Très Dense, saisine de Free, pièce 2

129 L’article 3 de la décision n° 2009-1106 précise les obligations tarifaires applicables à l’ensemble du territoire

130 Décision n° 2009-1106, page 29

131 Décision n° 2009-1106, page 30

132 Saisine de Free, page 38

133 Saisine de Free, pages 41 et 42

134 Observations en réplique de Free, page 27

135 Réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, Q19

136 Saisine de Free, page 14

137 Réponse de Free au second questionnaire des rapporteurs, Q10

138 Ibid.

139 Ibid

140 Saisine de Free, page 14

141 Décision n° 2009-1106, motifs, page 27

142 Décision n° 2009-1106, motifs, page 29

143 Décision n° 2009-1106, motifs, page 28

144 Décision n 2009-1106, motifs, page 28

145 Avis n° 10-A-18 du 27 septembre 2010 relatif à un projet de décision de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes portant sur le déploiement de la fibre optique en dehors des zones très denses [projet de décision n° 2010-1312], page 8 : « Dans les zones concernées, désignées « zones moins denses » par l’ARCEP, cette situation présente plusieurs caractéristiques : / - la boucle locale en fibre optique revêt le caractère d’un monopole naturel, c’est-à- dire qu’un opérateur qui installerait un réseau fibre aurait peu de chance de voir un réseau concurrent s’installer […] ». L’ADLC notait à cet égard que « Cette situation n’est cependant pas absolue : il peut exister une concurrence technologique ; les incitations des acteurs à déployer peuvent évoluer ; des stratégies d’éviction peuvent motiver des investissements non rentables à court terme, etc. »

146 Décision n° 2010-1312, motifs, pages 30 et 31

147 Article 1.3 « date d’effet et durée des engagements de cofinancement » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d'Orange, saisine de Free, pièce 2

148 Article 21.3 « résiliation pour hausse des prix » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2. Voir également l’article 1.10 « modalités spécifiques d’évolutions tarifaires » des Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

À noter qu’en vertu de l’article 21.1.2 « résiliation d’un engagement ou d’un Accord Local au-delà de la 5° année » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2, Free peut également résilier son engagement de cofinancement pour convenance au-delà de la 5e année dans le respect d’un préavis de trois mois

149 Article 21.3 « résiliation pour hausse des prix » des Conditions Générales du contrat du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

150 Réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, Q8

151 Pour une définition de la zone AMII voir, avis n° 2017-1293 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 23 octobre 2017 rendu à la demande du Sénat et portant sur la couverture numérique des territoires, Annexe 2, pages 21 à 26

152 Réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, Q8 [SDA]

153 Article 1.10 « modalités spécifiques d’évolutions tarifaires », Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

154 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement

Orange avait indiqué, à l’occasion d’une consultation publique utiliser un modèle de tarification similaire à celui de l’Autorité, ce qu’elle n’a pas démenti dans le cadre de la procédure d’instruction. Voir sur ce point la réponse d’Orange à la consultation publique du 16 mai au 11 juillet 2014 sur le Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonnée en dehors des zones très denses, page 2 et mentionnée infra

Il doit être par ailleurs relevé qu’Orange n’a pas souhaité dans le cadre de l’instruction transmettre son modèle de tarification (réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs Q20)

155 « Nous comprenons qu’Orange dispose d’ores et déjà d’un modèle de tarification, faisant le lien entre coûts et tarifs et que sa structure est relativement proche de celle mis en consultation publique par l’Arcep, moyennant quelques divergences (effets de cohorte exposé par Orange dans ses réponses à la consultation). » Saisine de Free, page 43

156 Deuxièmes observations en défense d’Orange, pages 31 et 32

157 Premières observations en défense d’Orange, page 34

158 Saisine Free, page 33

159 Sur le caractère raisonnable, l’Autorité a notamment indiqué dans les motifs de la décision n° 2010-1312, que « les conditions économiques raisonnables se traduisent concrètement par un coût de déploiement raisonnable par logement ou local à usage professionnel équipé en fibre optique », page 17

160 Voir sur ce point la Décision n° 2010-1312, article 9 et la Décision n° 2009-1106, article 3

161 Articles 4 de la Décision de l’Autorité n° 2009-1106 et 10 de la Décision de l’Autorité n° 2010-1312

162 Réponse de Free au second questionnaire des rapporteurs, Q10

163 Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 9

164 Ibid., page 11

165 Réponse d’Orange à la consultation publique du 16 mai au 11 juillet 2014 sur le Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonnée en dehors des zones très denses, page 5

166 Ibid., page2

167 Saisine de Free, page 43

168 À titre d’exemple, le modèle générique de tarification publié par l’Arcep fait pour sa part appel à de nombreux paramètres au-delà des coûts supportés par l’opérateur d’infrastructure, avec notamment, des hypothèses sur l’évolution du taux de pénétration, la prime de risque, etc.

169 Premières observations en défense d’Orange, page 33

170 CE 21 avril 2017, Soc. FM Projet, n° 394606

171 Observations en réplique de Free, page 26

172 Saisine de Free, page 44

173 Saisine de Free page 44 et observations en réplique de Free, page 27

174 Premières observations en défense d’Orange, page 37 : « Le cadre réglementaire symétrique propre au FttH ne déroge pas à ce principe, la décision n°2009-1106 précise dans son article [4] : « L'opérateur d'immeuble établit et tient à jour des informations relatives aux coûts retraçant les investissements réalisés et présentant un degré de détail suffisant pour permettre le contrôle par l'Autorité du respect des dispositions de l'article 3 » (soulignement ajouté) ».

175 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 35

176 Réponses d’Orange au second questionnaire des rapporteurs, Q13

177 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 35 et réponses d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q25

178 Cass. Com, 27 sept.2017, n° 16-13.542, non publié au bulletin. Orange cite également cet arrêt dans ses deuxièmes observations en défense, page 30. Selon cet arrêt : « Mais attendu, en premier lieu, que si les articles D. 311 et D. 314 du CPCE permettent à l'ARCEP de demander aux opérateurs réputés exercer une influence significative de justifier intégralement leurs tarifs, ces dispositions n’ont pas pour objet ou pour effet de contraindre ces opérateurs à communiquer leurs comptes réglementaires à leurs concurrents ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a retenu que ces dispositions ne pouvaient être invoquées par la société SFR pour obtenir un accès aux comptes réglementaires de la société Orange, que la loi a entendu limiter pour préserver leur confidentialité et prévenir tout risque d'atteinte au secret des affaires ».

179 Premières observations en défense d’Orange, pages 37-38 : « à plus forte raison, lorsque la prestation d'accès n'est pas soumise à une obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts mais simplement à une obligation de tarif raisonnable, comme c'est le cas dans le cadre de la régulation symétrique du FttH, l’ARCEP ne peut pas imposer à Orange de transmettre ses coûts à l’un de ses principaux concurrents sans violer le secret des affaires. »

180 Civ. 2ème, 15 octobre 2015, pourvoi n° Y 14-25.515, deuxièmes observations en défense d’Orange, page 35 et pièce 1. Dans ses réponses au premier questionnaire des rapporteurs, Q9, Orange explique que «Dans une autre affaire opposant Orange à la société British Telecom, la Cour de Cassation a d’ailleurs rejeté le pourvoi formé par British Telecom contre un arrêt de la cour d’appel de Paris qui avait rejeté sa demande d’expertise concernant les coûts supportés par Orange visant à établir son supposé préjudice (Civ 2ème, 15 octobre 2015, pourvoi n° Y 14-25.515) »

181 Réponses d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q25. Orange cite l’extrait suivant de l’arrêt du Conseil d’État du 21 avril 2017 : « Au demeurant, la circonstance qu’une entreprise exerce son activité sur un marché en situation de monopole ou de quasi-monopole n’est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce que le secret en matière industrielle et commerciale soit opposée à une demande de communication de documents administratifs relatifs à cette activité. […] le tribunal administratif de Paris n’a pas entaché son jugement d’inexacte qualification juridique des faits en jugeant que les documents litigieux, relatifs au détail des coûts ayant permis à la société Orange de déterminer les prix de ses offres de gros, étaient protégés par le secret industriel et commercial. » (Conseil d’État, 10ème - 9ème chambres réunies, 21/04/2017, n°394606)

182  http://francethd.fr/actualites/publication-proposition-engagement-transmises-operateurs-orange-sfr.html

183 Proposition d’engagement d’Orange en date du 20 février 2018, page2, disponible ici : http://francethd.fr/documents_reference/engagement/engag_L33-13_Orange_pour_publication.pdf

184 Proposition d’engagement de SFR en date du 15 mars 2018, page 2, disponible ici : http://francethd.fr/documents_reference/engagement/engag_L33-13_SFR_pour_publication.pdf

185 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q21 : « […] Les tarifs de souscription de tranches et de récurrents mensuels pour les zones de cofinancement de type A ont alors été supprimés, et remplacés par des tarifs  péréqués valables désormais pour toute la zone AMII FttH d’Orange. Compte tenu du fait que des prises plus chères à construire ont été prises en compte dans l’assiette de calcul, les tarifs péréqués sont légèrement plus élevés que les tarifs de les zones de cofinancement de type A. »

186 Saisine de Free, page 14

187 Saisine de Free, page 45. Page 30 de sa saisine, Free fait particulièrement référence à l’Article 1.10 « modalités spécifiques d’évolutions tarifaires » des conditions d’Accès aux Lignes FTTH d’Orange, Conditions Particulières en dehors de la Zone Très Dense, saisine de Free, pièce 2

188 Saisine de Free, pages 34 et 35

189 Saisine de Free, page 43

190 Premières observations en défense d’Orange, page 40

191 Par exemple, ajustement des tarifs en fonction de la réalisation ou non d’hypothèses, Modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique en dehors des zones très denses, document d’accompagnement, page 16, disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/doc-model-tarif-acces-ftth-oct2015.pdf

192 Décision n° 2009-1106, motifs, page 28

193 Article 5 « modification du Contrat » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2

194 Saisine de Free, page 14

195 Notamment saisine de Free, page 57 et réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q27

196 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q27 : « En ZMD AMII Orange, le dimensionnement est de 36 fibres optiques sur le segment PEP-PM pour un PM 2*28U standard (selon la dénomination du Comité d’experts Fibre) couvrant 360 logements en moyenne ». Toutefois, dans la liste des STAS d’Orange, il est fait mention d’autres tailles de PM, notamment des PM de 700 ou de 1000 locaux (contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, Annexe 6 « Liste Des Spécifications Techniques d'Accès au Service », réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, pièce 9)

197 Saisine de Free, page 57 et réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q27

198 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q27 : « Lors du déploiement initial du réseau FttH d’Orange, le dimensionnement des câbles de distribution PM-PA est limité à [SDA] micromodules utiles de 6 FO (soit [SDA] FO utiles) raccordés aux 4 têtes de distribution 144 FO du PM sur une capacité totale gérable de 96 micromodules de 6 FO soit 576 FO »

199 Point de terminaison optique (PTO), à l’intérieur du local de l’abonné

200 Article 15 « Maintenance » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2 : « cette prestation de maintenance est exécutée par Orange aussi longtemps qu’Orange […] conserve la qualité d’opérateur d’immeuble »

201 Article 15 « Maintenance » des Conditions Générales du contrat d’accès aux lignes FttH d’Orange, saisine de Free, pièce 2: « Orange autorise l’opérateur commercial, si ce dernier le souhaite, et sous sa responsabilité, à effectuer des opérations de maintenance uniquement sur le câblage client final, dans le respect des STAS et des modalités décrites aux conditions spécifiques. En tout état de cause, l’opérateur reste redevable du prix de la maintenance sur le câblage client final »

202 Observations en réplique de Free, page 31 et premières observations en défense d’Orange, page 42

203 Cour d’appel de Paris, 24 février 2011, Mobius contre LRN, RG n° 2010/16143

204 Ibid.

205 Observations en réplique de Free, page 34

206 Observations en réplique de Free, page 36

207 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q27 : « On entend par fibres surnuméraires l’ensemble des capacités de fibres optiques disponibles – compte tenu de la granularité du dimensionnement des câbles de fibre optique et des équipements de réseau – en plus des stricts besoins en raccordement FttH des logements et locaux à usage professionnel existants au moment de la conception du réseau. Les fibres surnuméraires apportent souplesse et évolutivité au réseau FttH. Elles sont ainsi mobilisables à tout moment dans le réseau pour le raccordement FttH ultérieur d’un logement ou local à usage professionnel nouvellement construit, ou pour la maintenance en cas de défaut d’une des fibres existantes. » (soulignement ajouté)

208 Réponse d’Orange au premier questionnaire des rapporteurs, Q27 : « Orange peut être amenée à déployer des capacités de fibres optiques supplémentaires en sus des capacités strictement nécessaires aux besoins de son réseau FttH. Il ne s’agit pas le cas échéant de fibres surnuméraires qui relèvent directement de l’application des règles d’ingénierie définies par Orange pour garantir à moindre coût un réseau solide et flexible, comme cela a été évoqué dans la question précédente, mais de capacités de fibres optiques supplémentaires dédiées à des services autres que le FttH. C’est le cas pour répondre aux besoins de raccordements point-à-point en fibre optique pour les entreprises dans le cadre de l’offre FttE d’Orange. Les capacités de fibres optiques supplémentaires déployées au titre du FttE ne relèvent pas des règles de dimensionnement du réseau FttH exposées précédemment, et ne rentrent donc pas dans le périmètre de l’offre de mutualisation FttH d’Orange. » (soulignement ajouté)

209 Ibid.

210 Observations en réplique de Free, page 31

211 Saisine de Free, pages 51 et 52

212 Saisine de Free, page 52

213 Saisine de Free, page 52

214 Saisine de Free, pages 59 et 60

215 Saisine de Free, page 52

216 Saisine de Free, page 50. Voir également saisine de Free, pages 54-55, où Free indique qu’il serait « plus efficace de collecter en fibre optique le flux des antennes mobiles à partir des points de flexibilité existants du réseau FttH déployé à proximité, notamment les PM et dans la mesure du possible les PBO ». Au soutien de sa démonstration, Free donne un exemple d’application du gain de distance entre le raccordement des stations de base mobiles au PBO et au PM plutôt qu’au NRO et conclut qu’« en imposant aux opérateurs le déploiement de lignes optiques en parallèle du réseau existant pour raccorder leurs éléments de réseau typiquement entre le NRA et l’antenne, Orange leur fait supporter des coûts de backhaul optique beaucoup plus élevés que ce qu’aurait nécessité leur branchement sur le réseau mutualisé FttH déjà cofinancé par Free et déployé à proximité »

217 Saisine de Free, page 54

218 Premières observations en défense d’Orange, page 43

219 Premières observations en défense d’Orange, page 44

220 Premières observations en défense d’Orange, page 45 : « Orange tient à préciser qu'elle propose aujourd'hui deux offres de gros spécialement conçues pour permettre à un opérateur tiers de raccorder ses antennes mobiles, notamment en fibre optique : l’offre Accès Intégrés Réseaux Capillaires Opérateurs Mobiles (AIRCOM) et l'offre « Core Ethernet Mobile 2 (CEM 2) […] »

221 Saisine de Free, page 58

222 Observations en réplique de Free, page 32

223 Observations en réplique de Free, page 32

224 Premières observations en défense d’Orange, page 43

225 Arrêt du 29 juin 2017 de la Cour d’Appel de Paris, 2015/17204

226 À titre d’illustration, dans une consultation publique récente sur les conditions de réattribution de fréquences mobiles, la généralisation de la 4G sur tous les sites mobiles constitue une des exigences fortes envisagées. (Consultation publique de l’Arcep du 5 avril au 18 mai 2018 portant sur les modalités et les conditions d’attribution des fréquences des bandes   900 MHz, 1 800 MHz et 2,1 GHz dont les autorisations d’utilisation arriveront à échéance entre 2021 et 2024, page 10.)

227 La Cour d’appel de Paris a jugé en ce sens que « l’ARCEP a justement et par une motivation que la cour a précédemment validée, considéré que la sur-tarification, telle qu’elle était proposée, n’était pas conforme aux objectifs de régulation en ce qu’elle est, d’une part, de nature à limiter l’incitation de la société Free à investir pour remplacer les paires de cuivre dégroupées reliant ses sites mobile au nœud de raccordement d’Orange par des fibres optiques, alors que la transition vers les réseaux à très haut débit et la couverture de l’ensemble du territoire national par de tels réseaux constituent un enjeu majeur pour le secteur, d’autre part, qu’elle imposerait aux sociétés Free un coût supplémentaire pour raccorder le réseau  de boucle locale filaire optique dans lequel elles ont investi, ce qui est contraire à l’objectif de favoriser le développement de investissement efficace, notamment, dans les structures améliorées et de nouvelle génération, mais aussi au principe de neutralité technologique. […] » (soulignement ajouté) (Cour d’Appel de Paris, 29 juin 2017, RG 2015/17204)

228 Delphine Ernotte, le 21 juin 2012 au magazine ITesperesso.fr, citée dans les observations en réplique de Free, page 32 : « en 2012, 97 % de ses sites mobiles étaient raccordés en fibre optique »

229 Décision n° 2017-1349 de l’Arcep en date du 14 décembre 2017 portant sur la définition des marchés pertinents de gros des accès de haute qualité, la désignation d’opérateurs exerçant une influence significative sur ces marchés et les obligations imposées à ce titre, page 20

230 Voir notamment réplique de Free, page 32 : « Par ailleurs, le groupe Iliad co-investit des sommes considérables dans la boucle locale optique déployée par Orange en zone AMII. Si Free cofinance le déploiement d’une boucle locale optique ayant vocation à remplacer la boucle locale cuivre, ce n’est pas pour devoir louer à Orange, en parallèle, des liaisons activées de boucle locale optique pour desservir ses BTS. »

231 Pour illustrer, en prenant l’hypothèse d’une zone arrière où 1 NRO d’environ 1 000 lignes possède 3 PM de rattachement d’environ 333 lignes, et 165 PBO d’environ 6 lignes répartis uniformément dans le territoire (en faisant abstraction, dans ce schéma, de la densité de l’habitat). La probabilité qu’une station de base mobile dans cette zone soit le plus proche voisin d’un PBO est alors proche de 1

232 Décision n° 2017-1570 de l’Autorité du 21 décembre 2017 fixant un encadrement tarifaire de l’accès à la boucle locale cuivre pour les années 2018 à 2020, page 15. Il est important de noter que la modélisation ascendante d’un réseau de boucle locale optique mutualisée développée par l’Arcep n’est pas basée sur les déploiements réels des opérateurs existants, dans la mesure où elle cherche à optimiser le coût du réseau pour un opérateur d’infrastructure générique. Il a donc été effectué un certain nombre d’hypothèses de modélisation qui peuvent s’écarter de la réalité. L’Autorité a aussi dû faire des choix de modélisation simplificateurs dans le cadre d’un équilibre entre simplicité du modèle et robustesse des résultats

233 En prenant des PM moyens de 300 lignes et des PBO de 9 lignes

234 Saisine de Free, page 55. Free indique que « Le réseau cuivre compte un peu plus de 2 000 PC, dont la localisation figure une relativement bonne approximation de celle des PBO fibre »

235 Saisine de Free, page 50

236 L’Autorité a d’ailleurs noté dans sa décision de règlement de différend n° 2015-0971-RDPI qu’Orange et Free présentaient un profil similaire en matière de stratégie, à des temporalités différentes : « L’Autorité note d’ailleurs que la stratégie de Free a également été celle d’Orange. Ces deux opérateurs présentent en effet un profil similaire, puisqu’à l’instar d’Orange et comme le relève cette dernière, Free a d’abord exercé son activité sur le marché fixe avant d’entrer sur  le marché mobile et a cherché, dans ce cadre, à réutiliser ses investissements dans la collecte inter NRA, au service de son réseau mobile » (page 30)

237 Réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, « Synthèse des réponses aux questions Q28 et Q29 »

238 Saisine de Free, page 14

239 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 39

240 Deuxièmes observations en défense d’Orange, page 40 : « Orange tient à rappeler une nouvelle fois le risque réel que ferait peser le fait de permettre le raccordement en FttH des antennes mobiles, dans la mesure où cela aurait pour effet d'ouvrir une brèche en rendant de facto également légitime le raccordement sur le réseau FttH d'Orange, et par ricochet les autres opérateurs d'infrastructures, de tout élément de réseau distant ou site sans adresse, alors que ce réseau FttH n'a pas du tout été dimensionné pour ces usages dont la volumétrie n'est pas connue »

241 Premières observations en défense d’Orange, page 46

242 Recueil de Spécifications techniques sur les réseaux en fibre optique jusque l’abonné en dehors des zones très denses du comité d’experts fibre optique V1.1 (16/10/2013), page 16, disponible ici : https://www.arcep.fr/fileadmin/uploads/tx_gspublication/CE_recueil_specification_ZMD_V1_1_-_publique.pdf:    « Le dimensionnement de la desserte […] prévoit une surcapacité d’au moins 15 % présente (fibres distribuées) dans les câbles de desserte optique »

243 Approximation du ratio sur l’ensemble de la zone AMII : sur le périmètre des communes correspondant à l’AMII de 2011, environ 20 000 antennes sont déployées par les 4 opérateurs à date (y compris 2G/3G), et environ 13 millions [minorant] de locaux (logements et locaux à usage professionnel) sont décomptés selon la méthodologie de décompte des locaux des services de l’Arcep. Par ailleurs, les spécifications techniques du comité d’experts fibre préconisent les règles suivantes concernant le surdimensionnement du réseau : « La capacité d’un PM est obtenue en procédant de la manière suivante    […] : / - décompte des besoins liés au réseau de desserte optique ; / - évaluation des besoins complémentaires […] ; / - Le dimensionnement de la desserte […] prévoit une surcapacité d’au moins 15 % présente (fibres distribuées) dans les câbles de desserte optique » (page 16). Ainsi en ordre de grandeur, en prenant en compte 15% de l’ensemble des locaux de la zone AMII, il devrait exister environ 1,95 million de fibres surnuméraires en moyenne en  zone AMII. En comparaison  des 20 000 antennes déployées par les opérateurs mobiles, il apparait que le ratio entre le nombre de d’antennes à raccorder en fibre optique en zone AMII et le nombre de fibres optiques surnuméraires est d’environ 1 %.

244 Saisine de Free, page 14

245 Réponse de Free au premier questionnaire des rapporteurs, « Synthèse des réponses aux questions Q28 et Q29 ». Free a réitéré son affirmation lors de l’audience du 3 mai 2018

246 Saisine de Free, page 14

247 Orange appuie sa démonstration sur un extrait du projet d’analyse de marché 3a de fourniture en gros d'accès local en position déterminée : marché pertinent du haut et du très haut débit fixe publié le 27 juillet 2017 (disponible ici : https://www.arcep.fr/uploads/tx_gspublication/adm-hd-thd-fixe-3a-consult-juil2017.pdf), qui indique : « Au cours du cycle précédent, l’Autorité a considéré que l’obligation de faire droit aux demandes raisonnables d’accès à la boucle locale  optique issue du cadre symétrique répondait aux besoins en cette période d’émergence de la boucle locale optique et qu’il n’était pas nécessaire d’imposer à Orange une obligation spécifique au titre de son influence significative sur le marché des offres d’accès aux infrastructures constitutives de la boucle locale filaire. […] cette analyse reste d’actualité concernant l’obligation d’accès sur le segment des services à destination de la clientèle résidentielle […] » (soulignement ajouté), et sur le fait que la Commission européenne avait souligné dans ses Observations rendues sur ce projet de décision conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/21/CE que : « Pour ce qui est de la régulation des réseaux FttH, l’ARCEP n’a pas l’intention de modifier la régulation symétrique destinée principalement au segment résidentiel du marché de détail du haut débit », Premières observations en défense d’Orange, page 20

248 Voir, en dernier lieu, CJUE, arrêt du 14 juin 2017, Santogal M-Comércioe Reparação de Automóveis, C-26/16, point 76 et jurisprudence citée, rappelé par l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 29 juin 2017

249 L’Arcep a depuis adopté la décision d’analyse du « marché 3a » en décembre 2017 (décision n° 2017-1347 de l’Arcep en date du 14 décembre 2017 portant sur la définition du marché pertinent de fourniture en gros d'accès local en position déterminée, sur la désignation d’un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché)

250 Comme l’Autorité l’a rappelé dans sa décision n° 2006-0406 se prononçant sur un différend opposant les sociétés Afone et SFR : « Les deux mécanismes [règlement de différend et analyse de marché] sont autonomes et ne s’excluent nullement […] Les fondements juridiques des deux procédures sont distincts, l’objet du règlement de litige est différent de celui de l’analyse des marchés et leurs effets ne sont pas identiques. Aucune priorité, ni aucune subordination ne saurait être accordée à l’une plutôt qu’à l’autre ».