Cass. com., 10 juillet 2012, n° 11-20.060
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Mandel
Avocat général :
M. Mollard
Avocats :
SCP Bénabent, SCP Coutard et Munier-Apaire
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 février 2011), que par contrat du 2 novembre 2005, la société TDF a confié à la société Unilog Management, aujourd'hui dénommée Logica Business Consulting (société Logica), la réalisation d'un projet informatique qui devait être achevé en août 2006 ; que par lettre du 30 janvier 2006, la société TDF a résilié unilatéralement le contrat, avec un préavis de 30 jours, et a proposé à la société Unilog de lui régler certaines de ses charges réelles ; que les négociations sur les conséquences financières de la résiliation ayant échoué, la société Logica a fait assigner la société TDF en paiement d'une certaine somme ; que cette dernière a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que la société Logica fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, qu'en l'espèce, les parties étaient expressément convenues dans l'article 20 du contrat conclu le 2 novembre 2005, que la résiliation du contrat pouvait intervenir à tout moment à la condition de respecter un préavis de 30 jours et de payer les prestations réalisées par le cocontractant et/ou ses sous-traitants en fonction des charges réelles réalisées, et il est constant que la société TDF ayant délibérément choisi, dans sa lettre du 30 janvier 2006, d'écarter la procédure de résiliation pour faute et décidé de procéder à la résiliation sans faute du contrat en respectant simplement un préavis de 30 jours et en proposant de régler les charges réelles engagées sur le projet, la cour d'appel ne pouvait débouter la société Logica de ses demandes en paiement à ce titre, sans violer, ensemble, l'article 20 du contrat et l'article 1134 du code civil ;
2°/ que selon l'article 20 du contrat conclu le 2 novembre 2005, les parties étaient aussi convenues d'une résiliation anticipée par une partie, en cas de manquement par l'autre partie à l'une de ses obligations, non réparé dans un délai de 30 jours suivant mise en demeure d'avoir à y remédier adressée par lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il est constant, d'une part, que la société TDF avait délibérément choisi d'écarter la procédure de résiliation pour faute et de procéder à la résiliation en respectant simplement un préavis de 30 jours, sans mise en demeure préalable de la société Logica de remédier à ses éventuels manquements, et d'autre part, que la cour d'appel constate que la société TDF reconnaissait elle-même, dans sa lettre du 30 janvier 2006 que, répondant à sa demande de lui remettre "une proposition visant à atteindre l'objectif d'une mise en production à l'été 2006", la société Logica s'était exécutée le 24 janvier suivant mais que la société TDF avait néanmoins décidé de rompre le contrat, la cour d'appel ne pouvait juger que la résiliation unilatérale et anticipée du contrat était justifiée par les griefs invoqués par la société TDF, sans méconnaître la convention des parties et violer les articles 1134 et 1184 du code civil ;
3°/ que, seule la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls ; qu'en l'espèce, en l'état d'un contrat conclu le 2 novembre 2005, avec un objectif d'une mise en production à l'été 2006, la cour d'appel ne pouvait dire qu'était justifiée la résiliation unilatérale et anticipée par la société TDF intervenue le 30 novembre 2005, au prétexte que la phase de conception n'était pas achevée, qu'Unilog devait informer TDF des négociations sur les difficultés rencontrées avec Oracle et que des difficultés perduraient entre elles, dès lors qu'elle constatait que TDF était elle-même à l'origine des retards reprochés à son cocontractant et d'un défaut de collaboration, que, ce faisant, elle n'a pas caractérisé l'existence d'un manquement suffisamment grave imputable à l'exposante de nature à justifier la résiliation unilatérale ; que l'arrêt est entaché d'un défaut de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève que, selon les termes de la lettre du 30 janvier 2006, la société TDF a décidé, sans ambiguïté, de mettre fin au contrat sans se placer dans le cadre d'une résiliation sans faute ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des conclusions de la société Logica devant la cour d'appel, qu'elle ait prétendu que la société TDF avait mis fin au contrat sans respecter les stipulations contractuelles prévues en cas de résiliation pour faute ; que le moyen pris de cette circonstance est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
Et attendu, enfin, qu'ayant relevé que l'article 20 autorisait chacune des parties à résilier le contrat pour faute, ce dont il résultait que les parties avaient écarté l'appréciation judiciaire de la gravité de leur comportement, la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante ;
D'où il suit que le moyen qui est irrecevable en sa deuxième branche et manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident éventuel :
REJETTE le pourvoi.