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Décisions

Cass. com., 16 février 1999, n° 97-16.701

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Rennes, du 26 mars 1997

26 mars 1997

Attendu, selon l'arrêt déféré (Rennes, 26 mars 1997), que, le 12 août 1994, la société SélacoBail a conclu avec la société Cat Avion un contrat de location portant sur un aéronef et contenant une clause de résiliation en cas de défaut de paiement des loyers ; que, le même jour, la société Sélaco Bail a conclu avec la société Agénoria un contrat par lequel celle-ci s'engageait à poursuivre le contrat de location en cas de défaillance de la société Cat Avion ; que cette dernière n'ayant pas acquitté les loyers dus le 19 novembre 1994, la société SélacoBail a, le 27 décembre 1994, résilié le contrat la liant à la société Cat Avion et en a informé, le même jour, la société Agénoria, qui, le 9 janvier 1995, faisait connaître à la société SélacoBail que la poursuite du contrat ne pouvait prendre effet qu'à compter du 19 février 1995 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Agénoria reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à ordonner à la société Sélaco Bail la production de la copie du carnet de vol de l'aéronef, alors, selon le pourvoi, que, dans ses conclusions, la société Agéniora avait demandé à ce qu'il soit ordonné à la société Selaco Bail de produire le carnet de vol de l'avion loué, indiquant que cette production permettrait de savoir très exactement le nombre d'heures de vols effectué et d'établir ainsi si l'avion se trouvait bien sur l'aéroport de Montpellier, à sa disposition, comme le prétendait la société Selaco Bail ; qu'en se prononçant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 11, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que si l'article 11 du nouveau Code de procédure civile dispose que lorsqu'une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d'astreinte, il s'agit d'une simple faculté dont l'exercice est laissé à son pouvoir discrétionnaire ; que le moyen est sans fondement ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Agénoria reproche encore à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui l'avait condamnée à payer à la société Sélaco Bail la somme principale de 300 000 francs alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il ressortait de l'acte du 12 août 1994, par lequel la société Agéniora s'était engagée à poursuivre le contrat de location conclu le même jour entre les sociétés Selaco Bail et Cat Aviation, que cette dernière était "en cours de cession au profit de la société Agénoria" ; qu'ainsi que l'a relevé la cour d'appel, le plan de reprise de la société Cat Aviation n'a pas abouti ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y avait été invitée, si les parties n'avaient pas entendu lier l'exécution de l'acte du 12 août 1994 à la reprise de la société Cat Aviation par la société Agéniora, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'il appartient à celui qui se prétend libéré d'une obligation de prouver le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en relevant, pour accueillir la demande en paiement formée par la société Selaco Bail, que la société Agéniora ne rapportait pas la preuve que l'avion n'ait pas été mis à sa disposition, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et partant, violé les dispositions de l'article 1315 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève que "l'obligation d'Agénoria à l'égard de SélacoBail ne dépendait pas de la réalisation d'un plan de cession, le contrat la liant à Sélaco Bail ne se référant en aucun cas à une telle condition" ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que, dès le 9 février 1995, un huissier de justice avait constaté, à l'aéroport de Montpellier, la mise de l'aéronef à la disposition de la société Agénoria, l'arrêt retient que cette dernière, qui s'est "dérobée" à ses obligations, est mal fondée à reprocher à la société Sélaco Bail "une quelconque faute pour la mise à la disposition de l'appareil" ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, l'arrêt n'a pas inversé la charge de la preuve dès lors que la société Agénoria se bornait à alléguer, sans justifier d'aucune mise en demeure à l'encontre de la société Sélaco Bail, que l'aéronef n'était pas à sa disposition le 3 avril 1995 ;

D'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision et que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Agenoria aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Agénoria à payer à la société Sélaco Bail la somme de 15 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize février mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.