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Décisions

Cass. com., 24 mai 2018, n° 17-27.969

COUR DE CASSATION

Arrêt

Autre

Nancy, du 20 sept. 2017

20 septembre 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 20 septembre 2017), rendu sur déféré, que M. A... s'est rendu caution, à concurrence de 10 %, du remboursement d'un prêt accordé le 12 juillet 2001 par la société Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne (la banque) à la société JT Arcades pour financer l'acquisition de la totalité des actions de la société Arca Gr ; que les sociétés JT Arcades et Arca Gr ayant été mises en liquidation judiciaire, la banque a assigné M. A... en exécution de son engagement ; que, se prévalant de divers manquements de la banque et de la société SOGEC, expert-comptable des sociétés JT Arcades et Arca Gr, M. A... et son co-associé, également caution, les ont assignées en paiement de dommages-intérêts ; que la société SOGEC a appelé en garantie son assureur, la société Covea Risks, aux droits de laquelle vient la société MMA IARD assurances mutuelles ; qu'au cours de l'instance d'appel, le conseiller de la mise en état a, sur la demande de M. A..., ordonné à la banque de verser aux débats, sous astreinte, l'étude de ses services internes, et notamment de son comité d'audit, sur la viabilité de l'opération d'acquisition des actions de la société Arca Gr aux 15 juin et 31 juillet 2001, ainsi que son analyse préalable à l'octroi d'un crédit souscrit par la société Arca Gr en juillet 2001 ; que la banque a formé un déféré-nullité contre cette décision, qui a été rejeté ;

Attendu que la banque, qui a formé un pourvoi immédiat, soutient que celui-ci est recevable en raison de l'excès de pouvoir commis par le juge de la mise en état en ordonnant la production de documents couverts par le secret bancaire, excès de pouvoir consacré par la cour d'appel ;

Mais attendu que le secret bancaire institué par l'article L. 511-33 du code monétaire et financier ne constitue pas nécessairement un empêchement légitime au sens de l'article 11 du code de procédure civile lorsque la demande de communication de documents est dirigée contre l'établissement de crédit non en sa qualité de tiers confident mais en celle de partie au procès intenté contre lui en vue de rechercher son éventuelle responsabilité dans la réalisation de l'opération contestée ; que l'arrêt retient que l'étude des services internes de la banque, comprenant son audit sur la viabilité de l'opération d'acquisition des actions de la société ArcaGr, concerne directement M. A... puisque ce dernier s'est rendu caution du prêt accordé par la banque à la holding JT Arcades, constituée pour l'opération de rachat de la totalité des actions de la société Arca Gr ; qu'il retient ensuite qu'il en est de même pour l'analyse faite par les services de la banque avant l'octroi, le même jour, d'un crédit à cette dernière société, qui était en lien direct avec l'endettement de la société JT Arcades et avait pour objet d'assurer la viabilité de l'opération d'acquisition des actions ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la production litigieuse, indispensable à l'exercice par M. A... de son droit à la preuve dans le procès qui l'opposait à la banque et dans lequel il recherchait la responsabilité de celle-ci pour avoir commis des fautes à l'occasion de l'octroi des crédits aux sociétés JT Arcades et Arca Gr, était proportionnée aux intérêts antinomiques en présence, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la communication des documents litigieux, nécessaire à la solution du litige, pouvait être exigée de la banque sans que celle-ci puisse invoquer les règles du secret bancaire ;

D'où il suit que le pourvoi immédiat formé contre cet arrêt, qui n'a pas consacré d'excès de pouvoir, n'est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi ;

Condamne la société Banque populaire Alsace-Lorraine- Champagne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. A... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit.