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Décisions

Cass. 1re civ., 5 septembre 2018, n° 17-13.837

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Avocats :

SCP Odent et Poulet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Aix-en-Provence, du 27 oct. 2016

27 octobre 2016

 

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Tenergie développement (la société Tenergie) a conclu le 8 novembre 2013 avec diverses sociétés du groupe Upsolar, un contrat de fourniture de modules solaires, comportant une clause attributive de compétence au profit des juridictions françaises ; qu'à cette convention étaient annexées les polices d'assurance souscrites par les sociétés Upsolar, conformément à l'article 7.2 du contrat, auprès des sociétés RSUI indemnity company (la société RSUI), International Insurance Company of Hannover et PowerGuard Specialty Insurance Services LLC, couvrant notamment les défauts de puissance des modules ; qu'un différend ayant opposé les parties à propos de l'exécution du contrat, la société Tenergie a assigné ses cocontractantes devant le tribunal de commerce par application de la clause attributive de compétence puis a appelé en cause les trois assureurs ; que la société RSUI a soulevé l'incompétence de la juridiction étatique, en invoquant la clause d'arbitrage stipulée au contrat d'assurance ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Vu l'article 48 du code de procédure civile ;

Attendu qu'après avoir énoncé que toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite, à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée, l'arrêt, pour dire la juridiction française compétente, retient que la société RSUI ne rapporte pas la preuve que la clause compromissoire a été portée à la connaissance et acceptée par la société Tenergie, ou que celle-ci était reportée dans les annexes du contrat ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions de l'article 48 du code de procédure civile relatives aux clauses attributives de compétence sont inapplicables aux clauses compromissoires, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur les troisième et quatrième branches du moyen :

Vu l'article 1448, alinéa 1, du code de procédure civile ;

Attendu que, lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci se déclare incompétente, sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable ;

Attendu que, pour déclarer la juridiction étatique compétente, l'arrêt retient que les termes précis de l'article 17 du contrat d'assurance démontrent que la clause d'arbitrage ne peut s'appliquer qu'entre assuré et assureur, à l'exclusion d'un tiers au contrat quand bien même celui-ci peut en être bénéficiaire en cas de sinistre ; qu'il ajoute que la société RSUI ne peut se prévaloir de la notion « d'ensemble contractuel » puisqu'elle n'est pas impliquée dans le contrat principal de fourniture de modules ;

Qu'en statuant ainsi, sans constater que la convention d'arbitrage dont se prévalait la société RSUI était manifestement nulle ou inapplicable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la cinquième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.