Cass. 3e civ., 12 juin 2014, n° 13-18.947
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 14 mars 2013), que le 21 août 2006, Mme X... a consenti à la société Pierre immobilier et location (PIL), dont le gérant est M. Y..., une promesse de vente portant sur un terrain, laquelle a été jugée caduque par une décision devenue irrévocable après déchéance d'un pourvoi formé par la société PIL ; qu'après la signature d'une nouvelle promesse de vente entre les parties, le 12 mars 2010, la société PIL a assigné en réitération de la vente Mme X..., qui en a invoqué la nullité pour vice du consentement ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société PIL fait grief à l'arrêt d'accueillir l'exception de nullité, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un acte de violence affectant le consentement du cocontractant, l'acte qui est de nature à faire impression sur une personne raisonnable et qui peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever, pour caractériser la violence morale ayant prétendument affecté le consentement de Mme X..., qu'avant la signature de la convention de vente du 12 mars 2010, la société PIL se comportait déjà comme un acquéreur en organisant des réunions sur le terrain de Mme X..., ce qui ne saurait caractériser une menace précise à l'encontre de Mme X... de nature à lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent, la cour d'appel a violé les articles 1109, 1111 et 1112 du code civil ;
2°/ qu'en caractérisant les faits de violence morale au vu de deux attestations émanant du frère de Mme X... et de la compagne d'un autre frère de Mme X..., lesquelles ne datent pas précisément les soi-disant faits de réunion sur le terrain objet de la vente, et sans aucun examen des éléments de preuve versés aux débats établissant que Mme X... avait pris l'initiative de relancer la vente et avait ainsi initié l'acte du 12 mars 2010, la cour d'appel a méconnu les exigences de motivation qui s'évincent de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le consentement doit être apprécié au moment de la signature de la convention ; qu'en se fondant sur le contenu de messages téléphoniques ou sur l'absence de désistement par la société Pierre immobilier et location de son pourvoi en cassation, soient des événements postérieurs à la signature de l'acte du 12 mars 2012, pour caractériser des actes de violence morale ayant vicié le consentement de Mme X..., la cour d'appel a violé les articles 1109, 1111 et 1112 du code civil ;
4°/ qu'en considérant que la société Pierre immobilier et location avait exercé une contrainte morale en refusant d'exécuter la condition de l'acte du 12 mars 2010 selon laquelle « il n'y aura pas de suite en Cour de cassation », après avoir constaté que la procédure en cassation avait abouti à une ordonnance de déchéance du 17 juin 2010 au visa de l'absence de dépôt d'un mémoire ampliatif de la part de la société Pierre immobilier et location, ce dont il se déduisait que la prétendue condition avait été réalisée, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ qu'il résultait des mentions de l'acte du 12 mars 2010 que le prix de vente convenu entre les parties était bien supérieur à celui convenu dans la précédente vente signée en 2006, ce qui expliquait que Mme X... ait donné son consentement à la vente ; qu'en faisant abstraction de cette circonstance pour considérer que le consentement de Mme X... avait été donné aux seules fins d'obtenir le désistement de la société Pierre immobilier et location de son pourvoi en cassation et en conclure que cette dernière avait exercé une violence sur Mme X... par le seul fait d'avoir maintenu son pourvoi en cassation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1109, 1111 et 1112 du code civil ;
6°/ que dans des conclusions restées sans réponse, la société Pierre Immobilier et location faisait valoir que les éléments du dossier et les explications livrées par la société Pierre immobilier et location établissaient de façon certaine que Mme X... avait confirmé durant les trois mois ayant suivi l'acte de 12 mars 2010 sa volonté de vendre les terrains litigieux à la société Pierre immobilier et location au prix spécifié à l'acte ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les attestations de M. Jean-François X... et de Mme Z... établissaient que le gérant de la société PIL se comportait déjà comme l'acquéreur du terrain avant la signature de la convention du 12 mars 2010, que ce comportement réitéré, corroboré par son attitude ultérieure, par des messages téléphoniques contenant des menaces explicites de poursuivre la procédure engagée devant la Cour de cassation alors qu'il avait déclaré y renoncer dans la convention du 12 mars 2010 et par le dépôt d'une plainte pour escroquerie, avait exercé une pression sur Mme X... pour l'inciter à vendre son terrain et que celle-ci avait dû suivre un traitement antidépresseur, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, souverainement retenu qu'étaient caractérisées les violences morales exercées sur Mme X... pour la contraindre à signer la promesse de vente du 12 mars 2010 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pierre immobilier et location aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Pierre immobilier et location à payer à Mme X..., la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Pierre immobilier et location ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille quatorze.