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Décisions

Cass. com., 4 décembre 2012, n° 11-24.174

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Rennes, du 10 mai 2011

10 mai 2011

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'une société, créée de fait, a existé entre Mmes X..., Y..., Z..., A..., B... et C..., exerçant toutes la profession d'infirmière ; que Mme C..., qui s'en est retirée en décembre 2005, a demandé en justice la condamnation de Mmes X..., Y..., Z..., A... et B... au paiement de différentes sommes au titre de la répartition des bénéfices afférents aux années 2002 à 2005 ; que Mmes C..., Y..., Z..., A... et B... ont, par ailleurs, demandé la condamnation au paiement de différentes sommes de Mme D..., leur ancienne salariée, reconnue coupable de détournement de fonds à leur préjudice, ainsi que celle de Mme X..., bénéficiaire d'une partie des détournements ; qu'elles ont en outre formé diverses demandes à l'encontre de l'Association Bretagne gestion, aux droits de laquelle se trouve l'Association gestion comptabilité Finistère, qui avait été chargée d'une mission de révision comptable et d'établissement des déclarations fiscales de revenus ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour rejeter les demandes formées par Mme C... au titre de la répartition des résultats, l'arrêt, après avoir relevé que le règlement intérieur du 8 juin 2000 prévoyait une répartition des bénéfices en fonction des droits sociaux détenus, retient que si ce seul document, qui n'est pas signé, définit la répartition des bénéfices, encore faut-il qu'il corresponde à l'intention commune des parties ; qu'il ajoute que pour rechercher celle-ci, il convient de déterminer quelle est la manière dont elles ont entendu faire fonctionner leur association sur cette question ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des stipulations d'un acte de cession de droits sociaux signé le 8 juin 2000 par les infirmières parties au contrat de société que celles-ci avaient consenti à ce que leur part dans les résultats soit déterminée à proportion de leur part dans les droits sociaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche, qui est recevable :

Vu les articles 1853, 1854, 1871-1 et 1873 du code civil ;

Attendu que, lorsqu'en l'absence d'une réunion d'assemblée ou d'une consultation écrite, les décisions des associés résultent de leur consentement unanime, ce consentement doit être exprimé dans un acte ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt, après avoir relevé que l'examen des déclarations fiscales des associées relatives aux années 2000, 2001, 2002 et 2003 révèle une répartition des résultats ne correspondant pas pour chaque associée à sa part des droits sociaux mais variant d'année en année sur une base strictement égalitaire (ou : en fonction des journées de travail accomplies), retient que Mme C..., qui ne remet pas en cause la répartition des bénéfices des années 2000 et 2001, a apposé sa signature sur les déclarations de résultats des années 2002 et 2003, et qu'elle a ainsi signé des actes sous seing privé valant décision collective au sens des dispositions de l'article 1854 du code civil ; qu'il retient encore que si Mme C... n'a pas signé les déclarations fiscales de résultats des années 2004 et 2005, fondées sur le même principe de répartition que les précédentes, elle est demeurée liée par ses engagements antérieurs par lesquels elle avait accepté, pour les exercices précédents, une répartition sur une base différente de celle de la part de droits sociaux détenue par chacune des infirmières ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les déclarations fiscales ne constituent pas un acte au sens de l'article 1854 du code civil, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la cassation à intervenir du chef de l'arrêt rejetant la demande de Mme C... dirigée contre Mmes X..., Y..., Z..., A... et B... au titre de la répartition des résultats, atteint les autres dispositions de l'arrêt, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire, à l'exception de celle déclarant l'Association gestion comptabilité Finistère responsable à hauteur de 20 % du préjudice subi par Mmes Y..., Z..., A..., B... et C... au titre des détournements de fonds ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit que l'Association Gestion comptabilité Finistère est responsable à hauteur de 20 % du préjudice subi par Mmes Y..., Z..., A..., B... et C... au titre des détournements de fonds ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.