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Décisions

Cass. com., 19 mai 1998, n° 95-19.098

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Leclercq

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

Me Copper-Royer, SCP Nicolay et de Lanouvelle

Montpellier, du 12 juill. 1995

12 juillet 1995

Sur les deux moyens réunis, chacun étant pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 juillet 1995), que M. X..., associé de la société RGS Languedoc-Roussillon, en cours de formation, a fait parvenir à la banque Dupuy de Parseval les sommes de 100 000 francs et 500 000 francs, en précisant que la première était destinée à constituer le capital social de la société, et la seconde à l'acquisition par elle d'un fonds de commerce ; que peu après, et avant l'immatriculation de la société RGS au registre du commerce, son gérant désigné, M. Y..., a donné l'ordre à la banque de payer par le débit du compte de la société le montant d'une lettre de change tirée par un tiers pour un montant de 750 000 francs sur une EURL RGS ; que la banque a exécuté cet ordre ; qu'ultérieurement M. X..., devenu gérant de la société RGS, a demandé à la banque de réinscrire au crédit du compte de la société les sommes de 100 000 et 500 000 francs, qui avaient été utilisées pour le paiement de la lettre de change ;

Attendu que la banque Dupuy de Parseval fait grief à l'arrêt de sa condamnation à restitution des sommes litigieuses, alors, selon le pourvoi, d'une part, que c'est M. Jean-Paul Y..., devenu ultérieurement le gérant de la société RGS, qui a ouvert le compte courant au nom de cette SARL à la banque Dupuy de Parseval ; que c'est un associé de la même société qui a versé la somme de 100 000 francs en précisant son affectation spéciale ; que M. Jean-Paul Y... a donné l'ordre de payer la traite de 750 000 francs au nom de l'EURL RGS ; que la banque Dupuy de Parseval ne pouvait se soustraire aux instructions du propre gérant de la SARL et qu'en la rendant responsable du transfert de fonds comprenant la somme de 100 000 francs, la cour d'appel de Montpellier a violé les articles 1382 et suivants du Code Civil ; alors, d'autre part, que la cour d'appel devait à tout le moins s'expliquer sur l'élément déterminant que constituait l'identité du donneur d'ordre, la société RGS ou ses représentants, dans les instructions fournies à la banque ; qu'en s'abstenant de toute constatation ou recherche sur ce point la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et suivants du Code civil ; alors, en outre, qu'elle n'a pas satisfait davantage aux prescriptions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, au surplus, que l'acceptation de la traite de 750 000 francs tirée par l'EURL RGS et l'ordre écrit donné par le gérant Y... de la payer ont eu pour effet d'annuler l'affectation spéciale réservée à l'origine à la somme de 500 000 francs versée au compte ; qu'en ne s'attachant pas à cet ordre écrit et en ne recherchant pas s'il n'avait pas modifié l'affectation originaire des fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et suivants du Code civil ; alors, encore, que, dans ses conclusions, la banque Dupuy de Parseval invoquait le moyen tiré de la modification de l'affectation d'origine et de l'interdiction d'ingérence du banquier qui ne saurait se faire juge de l'opportunité des opérations effectuées par le titulaire du compte ; que la cour d'appel n'a pas répondu à ces écritures ni satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que le représentant légal de la société RGS a donné des ordres précis de paiement de la traite de 750 000 francs auxquels la banque Dupuy de Parseval ne pouvait se soustraire ; qu'en se conformant à des instructions écrites, la banque n'a commis aucune faute et qu'en retenant sa responsabilité la cour d'appel a violé les articles 1382 et suivants du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que, retenant, à bon droit, que les fonds représentant le capital social sont indisponibles jusqu'à l'immatriculation de la société, la cour d'appel n'avait pas à rechercher si le gérant pouvait en disposer ;

Attendu, en second lieu, que retenant que l'autre somme versée par M. X... était conventionnellement indisponible pour toute autre affectation que celle prévue lors de son versement, la cour d'appel a pu retenir que la banque avait engagé sa responsabilité en la laissant utiliser à d'autres fins, et ce sans avoir à procéder aux recherches prétendument omises ;

D'où il suit que les moyens ne sont fondés en aucune de leurs branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.