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Décisions

Cass. 1re civ., 20 mai 2009, n° 08-12.922

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bargue

Rapporteur :

M. Chauvin

Avocat général :

M. Pagès

Avocats :

SCP Boulloche, SCP Defrenois et Levis

Nancy, du 16 janv. 2008

16 janvier 2008

Attendu que, le 26 janvier 1995, la Caisse de crédit mutuel Semouse et Combeaute (le Crédit Mutuel) a consenti à M. X... un prêt cautionné par M. Y... ; que, le 23 octobre 2002, M. Y... a réglé au Crédit Mutuel une certaine somme au titre du solde du prêt demeuré impayé ; qu'un arrêt du 23 août 2005 a condamné solidairement M. X... et M. Y... à payer au Crédit Mutuel une certaine somme au titre de l'emprunt ; que, les 18 et 30 janvier 2006, le Crédit Mutuel a fait pratiquer deux saisies-attribution sur un compte ouvert au nom des époux X..., mariés sous le régime de la séparation des biens ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt attaqué de dire que la seconde saisie a emporté attribution au profit du Crédit Mutuel de la somme de 5 358,31 euros avec intérêts au taux de 9 % à compter du 1er avril 2006, alors, selon le moyen, que la remise de dette accordée à une caution ne libère pas le débiteur principal, sauf convention contraire ; que le juge, en présence d'un acte par lequel le créancier a accordé une remise de dette à une caution, doit rechercher si cette remise bénéficie également au débiteur ; qu'en l'espèce, par courrier du 6 septembre 2002, le Crédit Mutuel, créancier, a indiqué à M. Y..., caution, qu'en ramenant le taux d'intérêt du prêt à 6 %, la somme de 40 119,11 euros représenterait le solde du prêt de M. X... ; que, comme l'avait décidé le premier juge, la banque avait ainsi accepté la réduction du solde du prêt consenti à M. X... ; que, pour infirmer cette décision, la cour d'appel s'est bornée à retenir que le règlement effectué par la caution était intervenu dans le cadre d'un accord avec la banque et qu'en application de l'article 1287 du code civil, la remise accordée à la caution ne libérait pas le débiteur principal ; qu'en ne recherchant pas si, en dépit de ce principe, le Crédit Mutuel n'avait pas accepté une diminution de la dette du débiteur principal, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1287 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'un accord intervenu entre le Crédit Mutuel et M. Y... prévoyait, en faveur de ce dernier, une remise de 3 points sur le taux de l'emprunt sous condition du règlement de la somme de 40 119,11 euros en une seule mensualité et ayant retenu qu'en application de l'article 1287 du code civil la remise accordée à M. Y..., caution, n'avait pu profiter à M. X..., débiteur principal, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen relevé d'office, après avertissement donné aux parties dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles 1315 et 1538, alinéa 1er et 3, du code civil, ensemble l'article 620, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Attendu que, lorsque le créancier d'un époux marié sous le régime de la séparation des biens fait pratiquer une saisie sur un compte ouvert au nom des deux époux, il lui appartient d'identifier les fonds personnels de l'époux débiteur ;

Attendu que, pour valider la seconde saisie du Crédit Mutuel, l'arrêt attaqué, après avoir visé l'article 1415 du code civil applicable en régime de communauté, énonce qu'une saisie-attribution peut être pratiquée sur un compte bancaire ayant deux titulaires dont l'un des deux n'est pas débiteur, qu'il appartient alors à celui qui n'est tenu d'aucune solidarité avec le débiteur saisi d'établir que les sommes figurant au compte joint lui appartiennent et que Mme X... ne verse aux débats aucune pièce de nature à justifier que le compte, objet de la saisie, était alimenté par les revenus de chacun des époux ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombait au Crédit Mutuel de démontrer que les fonds déposés sur le compte ouvert au nom des époux X..., séparés de biens, étaient personnels à M. X..., son débiteur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les deux premiers textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que la saisie pratiquée le 30 janvier 2006 a emporté attribution au profit du Crédit Mutuel de la somme de 5 358,31 euros avec intérêts au taux de 9 % à compter du 1er avril 2006, l'arrêt rendu le 16 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour faire droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy autrement composée.