CA Paris, 18e ch. e, 15 janvier 2009, n° 07/01130
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Ajilon Sales et Marketing
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Froment
Conseillers :
M. Valantin, Mme Caron-Deglise
Avocats :
Me Viandier, Me Chomel de Varagnes
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
La société AJILON SALES ET MARKETING, entreprise employant plus de dix salariés, exerce une activité spécialisée dans la fourniture de prestations de services en matière de développement commercial et force de vente supplétive. Son siège social est situé à Villeurbanne et elle dispose de plusieurs établissements secondaires, dont un situé à Saint-Mandé.
La convention collective applicable est celle des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire.
Monsieur Raphaël S. a été embauché par la société DISTRICOM, aux droits de laquelle se trouve la société AJILON SALES ET MARKETING, par un contrat à effet au 2 avril 1999, en qualité de délégué commercial. Il a exercé en dernier lieu des fonctions de Chef des Ventes pour un salaire mensuel brut de 2.322,00 euros.
Suivant lettre remise en main propre contre décharge le 31 janvier 2005, Monsieur Raphaël S. a été convoqué à un entretien préalable prévu le 9 février 2005, avec mise à pied conservatoire.
Par lettre recommandée avec accusé réception du 16 février 2005, il a été licencié pour faute grave.
Contestant son licenciement, Monsieur Raphaël S. a saisi le Conseil de Prud'hommes de Créteil le 13 avril 2005 lequel, par un jugement du 7 décembre 2006, notifié les 9 et 13 janvier 2007, respectivement à l'employeur et au salarié, a condamné la société AJILON SALES ET MARKETING à payer à son salarié les sommes suivantes :
• 1.449,50 euros à titre de rappel de salaire durant la période de mise à pied • 150,00 euros au titre des congés payés afférents • 6.966,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis • 696,00 euros au titre des congés payés afférents • 3.599,00 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement • 1.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Monsieur Raphaël S. a relevé appel de cette décision le 5 février 2007.
Lors de l'audience du 23 octobre 2008, les parties ont développé oralement leurs écritures, visées le même jour par le greffier.
Monsieur Raphaël S. conclut à la confirmation de la décision attaquée en ses condamnations au titre du rappel de salaire durant la période de mise à pied, de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, et son infirmation pour le surplus. Il sollicite la condamnation de la société AJILON SALES ET MARKETING à lui payer les sommes suivantes :
• 15.000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif • 90.000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse • 13.932,00 euros à titre d'indemnité pour prêts de main d’oeuvre illicite
- 5.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile
La société AJILON SALES ET MARKETING forme appel incident sur l'existence d'une faute grave, cause selon elle du licenciement, et sollicite la condamnation de Monsieur Raphaël S. à lui verser la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le licenciement
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits, imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur. Il appartient à ce dernier, qui s'est placé sur le terrain disciplinaire, de prouver les faits fautifs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, et de démontrer en quoi ils rendaient immédiatement impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
En l'espèce, la lettre de licenciement est ainsi rédigée :
Nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave.
Nous vous rappelons que les raisons qui nous ont conduits à prendre cette mesure sont les suivantes :
1. Vos fonctions de Chef des Ventes impliquent notamment que vous assuriez la représentativité et la qualité du service de la société, que vous renforciez les relations commerciales avec les clients, que vous encadriez vos équipes et plus globalement que vous gériez vos missions au mieux des intérêts de la société.
Or, nous avons constaté un manque caractérisé d'implication sur le dossier Philips dont vous avez la charge notamment en ce qui concerne le relationnel client et l'accompagnement de vos équipes. En effet, vous avez mis en place de votre propre initiative, des actions sur les mois de décembre et janvier derniers pour lesquelles le client était défavorable. Nonobstant le refus exprès du client de modifier les matrices des rapports de notre activité, vous avez maintenu votre action sans en référer à votre hiérarchie, créant dès lors un trouble majeur dans la diffusion des informations à notre client.
De surcroît, vous vous êtes permis d'adopter vis-à-vis du client un ton impulsif et vexatoire lors de divers échanges de mails ayant conduit ce même client à refuser ouvertement de travailler avec vous, ne supportant plus votre mode de communication insultant et arrogant à son égard.
Lors de notre entretien vous n'avez d'ailleurs pas contesté la réalité des faits qui vous ont été à maintes reprises reprochés par votre manager des ventes.
Ainsi, non seulement vous ne reconnaissez pas la position de votre hiérarchie en prenant régulièrement des initiatives qu'il n'a pas pu valider, mais de surcroît, ce manquement manifeste a généré un manque total de visibilité des synthèses pour notre client et une crise majeure de notre relation commerciale.
1. Par ailleurs, le vendredi 4 février 05, vous avez une nouvelle fois pris l'initiative de déroger aux principes administratifs de fonctionnement en louant un véhicule afin de vous rendre en accompagnement terrain sur Vélizy (région IDF) alors même que vous ne pouviez ignorer que dans cette hypothèse sur la région IDF, vous auriez dû prendre les transports en commun. Cette attitude abusive a généré un surcoût financier vous étant directement imputable.
En outre, malgré un avertissement pour des faits identiques en novembre 2004, vous réitérez délibérément ces faits fautifs.
Nous ne pouvons que dénoncer une telle attitude incompatible avec les missions confiées à un Chef des Ventes, portant préjudice au fonctionnement interne et nuisant aux relations commerciales.
Votre conduite inadmissible constitue un manquement grave à vos obligations contractuelles.
Pour établir les griefs invoqués, la société AJILON SALES ET MARKETING produit en particulier aux débats :
• l'avertissement en date du 4 novembre 2004, faisant suite à des observations verbales et à des entretiens des 11 octobre et 4 novembre 2004, pour non-respect des procédures administratives internes de la société en matière de facturation des frais de téléphone, de repas, d'hôtel et de remboursement des frais de transport. • le contrat de prestations de services conclu entre DISTRICOM SA et PHILIPS ECLAIRAGE • les mails adressés par Monsieur S. à Monsieur M. les 11, 21 et 25 janvier 2005, le mail de Monsieur S. à Monsieur M., manager des ventes supérieur hiérarchique du salarié, en date du 10 janvier 2005, au sujet du dossier PHILIPS et les mails de Monsieur S. à Messieurs B. et A. les 7, 11, 14, 24 et 26 janvier 2005, 10, 21 et 22 septembre 2004, 13 décembre 2004 • Les mails de Monsieur Jean-François B. , directeur régional de la société PHILIPS ECLAIRAGE, à Monsieur Alain M. en date des 24 septembre et 12 octobre 2004 ainsi que son mail à Monsieur Raphaël S. en date du 13 décembre 2004 lui faisant connaître son désaccord sur ses initiatives de modification de la teneur des RQA et lui en expliquant les raisons. • Les attestations de Monsieur Alain M. en date des 27 mai 2005 et 28 février 2006 déclarant que PHILIPS ECLAIRAGE s'était plaint à plusieurs reprises des manquements de Monsieur S. sur le reporting car les documents remis par lui, entre septembre 2004 et janvier 2005, n'étaient pas conformes aux souhaits du client ce qui obligeait celui-ci à le retravailler. • Le mail de Mademoiselle Isabelle G., collaboratrice de Monsieur Raphaël S., en date du 26 janvier 2005, lui faisant part de son mécontentement face à son indisponibilité et à son absence de réponse à ses messages et lui demandant de se comporter en manager. • Les factures adressées par la société AJILON SALES ET MARKETING à la société PHILIPS ECLAIRAGE de février 2004 à janvier 2005
Monsieur Raphaël S., quant à lui, conteste la réalité des griefs invoqués comme le manque d'implication reproché. Il fait observer qu'à aucun moment son employeur ne lui a demandé de mettre un terme à ses actions vis-à-vis de la société PHILIPS ECLAIRAGE et soutient n'avoir jamais été destinataire des mails échangés entre plusieurs membres de la direction.
Il produit des mails, par ordre chronologique depuis 2003, adressés à ses supérieurs hiérarchiques et à ses interlocuteurs de la société PHILIPS ECLAIRAGE, dans lesquels il fait part de la nécessité de mettre en place un outil permettant à l'encadrement de mieux suivre les performances et des difficultés rencontrées. Il fournit également des mails de la société PHILIPS ECLAIRAGE et de sa direction le félicitant des résultats obtenus.
S'agissant du prétendu manquement aux règles de fonctionnement internes de la société, il rappelle qu'il avait été particulièrement affecté lors de la signification de l'avertissement du 4 novembre 2004, au point d'avoir été placé en arrêt de travail du 8 novembre au 3 décembre 2004 et d'avoir pris des RTT. Il souligne que, comme lors des faits qui avaient amené le premier avertissement, la direction de la société avait été informée des déplacements qu'il devait faire avec un de ses collaborateurs, Madame Isabelle G., le 27 janvier 2005. Celle-ci se trouvant, le 26 janvier 2005, dans trois lieux différents, il n'avait eu d'autre choix que de louer un véhicule. Il rappelle que l'employeur pouvant lui-même, aux termes du contrat de travail, réduire le remboursement des frais professionnels qui lui apparaîtraient anormaux.
S'il résulte de ce qui précède qu'une incontestable tension était apparue entre certains des directeurs régionaux de PHILIPS ECLAIRAGE, en particulier Monsieur Jean-François B. de la région France Nord et Monsieur Marc A., et Monsieur Raphaël S. au deuxième semestre 2004 et début 2005, la preuve n'est pas rapportée par l'employeur que celle-ci soit le fait exclusif du salarié, ni qu'il en soit à l'origine. Aucun manquement objectif précis et circonstancié n'est démontré, les directeurs régionaux marquant leur impatience de clients à obtenir des résultats et leur mécontentement des délais de réponse de l'équipe de Monsieur S. sans que les objectifs de celui-ci ne soient connus ni qu'aucun comparatif contractuel ne soit fourni aux débats.
Il convient sur ce point d'observer que, dès le 15 octobre 2003, Monsieur Raphaël S. avait adressé un mail à Monsieur Jean-François B. pour lui demander un véritable débat sur le reporting trimestriel, et pour attirer son attention sur le fait que son attitude agressive pouvait avoir des répercussions sur l'équipe. Ce mail, écrit en la forme du tutoiement, est suivi le 10 septembre 2004 d'un autre courrier électronique, en la forme du vouvoiement, par lequel Monsieur Raphaël S. propose, à la demande de l'équipe, de repenser les fichiers « afin de suivre de façon plus précise les performances de chacun dans le but de dynamiser et d'optimiser l'action de tous ». Les réponses à ces mails ne sont pas fournies, ni celle des supérieurs hiérarchiques alors même que Monsieur Alain M., supérieur direct de Monsieur Raphaël S. figurait en copie de tous les mails adressés par ce dernier aux clients, à l'exception de celui daté du 15 octobre 2003.
Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient la société AJILON SALES ET MARKETING, il ne peut être développé sérieusement que le salarié, de niveau cadre et habilité à prendre des initiatives, a eu un comportement contraire aux intérêts et à la bonne image de l'entreprise en agissant sans en aviser sa hiérarchie. Monsieur Alain M., supérieur hiérarchique immédiat de Monsieur Raphaël S. ne saurait seul en attester, son objectivité étant nécessairement discutable puisque la réalité de son information est démontrée.
Il convient au surplus de noter que, par un mail du 16 novembre 2004, versé aux débats par le salarié, une salariée marketing de PHILIPS ECLAIRAGE, Madame Anne-Marie V., remercie Monsieur Raphaël S. de la fiabilité et de la clarté de son travail d'estimation des implantations de magasins à venir. Monsieur Jean-François B. lui-même, dans un mail daté du 4 novembre 2004 à Monsieur Raphaël S., félicite ce dernier et son équipe, au nom du directeur éclairage grand public France PHILIPS, du mois d'octobre record, « formidable résultat qui vient récompenser des mois d'effort de la part de chacun d'entre vous. » Monsieur Marc A. adresse également un mail de félicitations à Monsieur Raphaël S. le 25 octobre 2004 en précisant que « de réunion en réunion, les échanges sont plus riches d'informations, les données des reporting sont de plus en plus précises et quantifiables. »
Par ailleurs, le grief d'utilisation d'un ton impulsif et agressif et d'un mode de communication insultant envers la clientèle n'est pas avéré puisqu'aucun des mails produits par l'employeur n'établit la réalité de ces faits, le langage utilisé pour bref et direct qu'il soit ne pouvant être considéré comme tel. Au surplus le mail de Monsieur Marc A., en date du 26 janvier 2005, par lequel celui-ci
se plaint d'un « commentaire' que le client qu(il) représente n'accepte pas ces propos insultants », constitue une réponse à un envoi électronique de Monsieur Raphaël S., dont les précédents échanges ne sont pas communiqués, rédigé comme suit : « c'est ça Qui est impliqué ou l’est pas dans la mission » Le contexte de l’envoi n’étant pas connu, ni la teneur des propos de l’interlocuteur. La preuve d'une attitude fautive du salarié n'est donc pas rapportée.
La société AJILON SALES ET MARKETING ne démontre pas davantage le refus de la société PHILIPS ECLAIRAGE de travailler avec Monsieur Raphaël S. de sorte que le manquement grave du salarié à ses missions de Chef des ventes et, en particulier, à son obligation de renforcer les relations commerciales de la société qui l'emploie, n'est pas avéré. Aucune attestation ni pièce probante n'est produite dans ce sens.
Le grief de violation délibéré des règles de fonctionnement de la société en matière de déplacement professionnel n'est pas davantage établi puisque, d'une part, les règles de la procédure applicables dans l'entreprise ne sont pas versées aux débats et que, en tout état de cause, à supposer qu'elles aient été intégralement rappelées lors de l'avertissement du 4 novembre 2004, il apparaît à l'évidence en l'espèce que le 26 janvier 2005, Monsieur Raphaël S. devait de déplacer en banlieue parisienne pour les besoins de la société et pour rechercher l'une de ses collaboratrices, Mademoiselle Isabelle G., et ne pouvait utiliser les transports en commun sans importantes pertes de temps. Si la société AJILON SALES ET MARKETING avait alors estimé ne pas devoir rembourser le salarié des frais engagés, il lui était possible de le faire sans aller jusqu'à la sanction extrême que constitue le licenciement, en l'espèce nullement justifié.
Il résulte de ce qui précède qu'aucune faute du salarié n'est démontrée par la société AJILON SALES ET MARKETING qui ne rapporte pas davantage la preuve certaine d'une mésentente, d'une mésintelligence, d'une incompatibilité de caractère ou d'une impossibilité de collaboration de nature à nuire au fonctionnement normal de l'entreprise. Dans ces conditions, le licenciement de Monsieur Raphaël S. est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Compte tenu de l'ancienneté du salarié, comme de son âge et des éléments fournis sur sa situation personnelle, la société AJILON SALES ET MARKETING doit être condamnée à lui verser une indemnité de licenciement de 21.000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la somme de 7.000 euros à titre de dommages-intérêts pour réparation du préjudice subi par lui par Monsieur Raphaël S. du fait des circonstances particulièrement brutales et vexatoires de son licenciement.
La société AJILON SALES ET MARKETING doit également être condamnée à payer à Monsieur Raphaël S. la somme de 4.411,80 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'article 3.2 de l'avenant cadre de la convention collective applicable prévoyant un calcul sur la base de 3/10ème de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à 5ans puis 4/10ème de mois. La décision attaquée doit être infirmée dur ce point en ce qu'elle avait retenu la somme de 3.599,00 euros.
La décision attaquée doit par ailleurs être confirmée en ce qu'elle a condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 1.449,50 euros à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied, outre celle de 150,00 euros au titre des congés payés afférents, ainsi que 6.966,00 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis et celle de 696,60 euros au titre des congés payés afférents. La décision attaquée doit en conséquence être confirmée sur ces points.
Il convient au surplus de condamner la société AJILON SALES ET MARKETING à payer aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Monsieur Raphaël S., dans la limite de six mois.
Sur la demande au titre du prêt de main d'oeuvre illicite
Aux termes de l'article L 8241-1 du Code du Travail, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d'oeuvre est interdite, sauf opérations dans le cadre du travail temporaire. Caractérise ainsi le prêt de main d'oeuvre illicite la convention passée entre deux sociétés dont le seul objet est la mise à disposition de salariés prévoyant le transfert du lien de subordination, l'obligation pour l'utilisateur de payer les prestations étant calculé uniquement en fonction du prix de la main d'oeuvre sans aucun apport de technique ou de savoir-faire propre à la société fournissant la main d'oeuvre. A l'inverse, le contrat d'entreprise, appelé également contrat de sous-traitance, est une convention par laquelle un employeur offre à son co-contractant un travail ou un service réalisé par son propre personnel qui reste placé sous sa direction et sous sa responsabilité et a pour objet la réalisation d'une tâche objective, définie avec précision, habituellement rémunérée de façon forfaitaire.
En l'espèce, Monsieur Raphaël S. soutient que l'exécution de son contrat de travail dans le cadre du contrat de prestations de services conclu entre la société AJILON SALES ET MARKETING et la société PHILIPS ECLAIRAGE constitue un prêt de main d'oeuvre illicite puisque, en particulier, la première facture sa prestation en fonction du nombre de collaborateurs affectés, lui-même dispose de badges au nom de la société PHILIPS, l'équipe de terrain dispose d'adresse e-mail de type MA [email protected] et la direction de la société PHILIPS décide des lieux d'intervention des collaborateurs AJILON dont elle contrôle le travail réalisé.
Cependant, il résulte des pièces produites par les parties et, notamment, du contrat de prestation de services du 29 juin 2001, que la société DISTRICOM aux droits de laquelle se trouve la société AJIOLN SALES ET MARKETING apporte son savoir-faire, concrétisé d'une part par ses méthodes et d'autre part par l'intervention de son personnel qualifié d'attachés commerciaux et de son encadrement, organisant totalement la prestation et exerçant le lien de subordination. Le prix des prestations est annuel et forfaitaire, avec facturation mensuelle comme l'attestent les factures versées aux débats. L'information montante et descendante entre l'équipe de terrain et la société PHILIPS est elle-même centralisée par le Chef des Ventes de la société AJILON SALES ET MARKETING, ainsi qu'il ressort de la fiche internet communiquée par Monsieur Raphaël S. lui-même et des modalités d'exécution de son contrat de travail. Sur ce point en effet, la lecture des nombreux mails échangés entre lui et ses supérieurs hiérarchiques et en particulier Monsieur Alain M., démontre qu'il rendait compte quotidiennement à la société AJILON SALES ET MARKETING.
Dans ces conditions, et en l'absence de tous autres éléments de preuve contraire, Monsieur Raphaël S. doit être débouté de sa demande au titre du prêt de main d'oeuvre prétendument illicite.
Sur les demandes au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :
Compte tenu des circonstances de l'espèce, comme des situations respectives des parties, il est contraire à l'équité que Monsieur Raphaël S. conserve la charge de ses frais irrépétibles. En conséquence, la société AJILON SALES ET MARKETING doit être condamnée à lui verser la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, en plus de la somme déjà allouée en première instance.
La société AJILON SALES ET MARKETING, qui succombe et doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ne peut quant à elle prétendre à une indemnité au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS :
Confirme la décision attaquée en ce qu'elle a condamné la société AJILON SALES ET MARKETING à payer à Monsieur Raphaël S. les sommes suivantes :
• 1.449,50 euros au titre du rappel de salaires pendant la période de mise à pied • 150,00 euros au titre des congés payés afférents • 6.966,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis • 696,00 euros au titre des congés payés afférents • 1.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Infirme la décision attaquée pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
Condamne en outre la société AJILON SALES ET MARKETING à payer à Monsieur Raphaël S. les sommes suivantes :
• 4.411,80 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement • 21.000,00 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse • 7.000,00 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif • La condamne à payer aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois
La condamne à payer à Monsieur Raphaël S. la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles d'appel
Rejette toute autre demande
Condamne la société AJILON SALES ET MARKETING aux dépens de première instance et d'appel.