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Décisions

Cass. 2e civ., 7 avril 2016, n° 15-17.398

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

Mme Martinel

Avocat général :

M. Mucchielli

Avocats :

SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Gatineau et Fattaccini

Lyon, du 15 janv. 2015

15 janvier 2015

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un jugement du 8 juin 1990, M. et Mme X... ont été condamnés à payer au Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises, société aux droits de laquelle se trouve la société Créances Conseil, « la somme de 64 053, 24 euros arrêtée au 20 juin 1989 outre intérêts » ; que saisi d'une contestation d'une saisie-attribution par les époux X..., un juge de l'exécution s'est déclaré incompétent pour statuer sur leur demande tendant à obtenir que leur créance porte intérêts au taux légal à compter de ce jugement ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que la société Créances Conseil fait grief à l'arrêt de dire que les époux X... sont redevables de la somme de 64 053, 24 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 1990 et que la société Créances conseil devra signifier aux débiteurs un décompte actualisé de la créance en principal et intérêts au taux légal, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge de l'exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; que la décision qui ajoute au jugement ayant prononcé une condamnation « avec intérêts » qu'il s'agit des « intérêts légaux » modifie tout autant ce jugement que la décision qui précise qu'il s'agit des « intérêts conventionnels » ; qu'en jugeant dès lors que, dans le silence du jugement du 8 juin 1990 sur la nature du taux d'intérêt applicable, seule la précision selon laquelle il s'agirait du « taux d'intérêt légal » (et non du taux d'intérêt conventionnel) permettrait de ne pas modifier le jugement, la cour d'appel a violé les articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

2°/ que le juge qui ordonne l'exécution d'un contrat de cautionnement par lequel la caution a garanti le remboursement du capital d'un prêt et des intérêts conventionnels afférents doit condamner la caution à prendre en charge ces intérêts conventionnels et ne peut y substituer le taux d'intérêt légal ; qu'en jugeant pourtant que, dans le silence du jugement du 8 juin 1990 ayant condamné les cautions sur la nature du taux d'intérêt applicable, il fallait considérer que le taux d'intérêt applicable était le taux d'intérêt légal, et non le taux d'intérêt conventionnel, par application de l'article 1153-1 du code civil, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble l'article 1134 du code civil par refus d'application ;

Mais attendu, d'abord, que si le juge de l'exécution ne peut, sous prétexte d'interpréter la décision dont l'exécution est poursuivie, en modifier les dispositions précises, il lui appartient d'en fixer le sens ;

Et attendu, ensuite, que la cour d'appel a retenu, à bon droit, que seul le jugement du tribunal de grande instance constituait le titre exécutoire qui servait de fondement aux poursuites et qu'elle n'était pas tenue par le taux d'intérêt conventionnel fixé dans le contrat de cautionnement ;

D'où il suit que le moyen, pris en ses deux premières branches, n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour réformer ce jugement et accueillir la demande des époux X..., l'arrêt se borne à fixer le sens de la décision dont l'exécution est poursuivie ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen par lequel la banque soutenait que M. et Mme X... avaient acquiescé à l'application du taux conventionnel, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société Créances conseil demande la cassation du chef de dispositif accordant des délais aux époux X... par voie de conséquence de la cassation prononcée sur le premier moyen ;

Mais attendu que ce chef de dispositif n'est pas la suite, ni l'application ni l'exécution du chef de dispositif ayant fixé le taux d'intérêt de la créance au taux légal et qu'il ne s'y rattache pas par un lien de dépendance nécessaire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé le taux d'intérêt au taux légal et dit que la société Créances conseil devait signifier un nouveau décompte aux époux X..., l'arrêt rendu le 15 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens.