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Décisions

Cass. com., 28 mars 2018, n° 16-24.150

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocats :

Me Bouthors, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Bastia, du 22 juin 2016

22 juin 2016


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 22 juin 2016), que M. Z... ayant été mis en liquidation judiciaire le 22 novembre 1996, le juge-commissaire, par une ordonnance du 2 avril 1999, a autorisé la cession de gré à gré à MM. A... et B... de biens dépendant de la communauté des époux Z... Y... ; que sur recours de M. Z..., cette décision a été confirmée par un jugement du 4 juin 1999 ; qu'un arrêt, devenu irrévocable, de la cour d'appel de Caen du 1er mars 2007 a constaté que la vente était parfaite et a enjoint à M. Z... de la régulariser devant notaire ; que M. Z... a signé l'acte de vente le 12 avril 2011 ; qu'entre-temps, Mme Y... ayant formé une tierce opposition à l'ordonnance du 2 avril 1999, un jugement du 19 septembre 2008 l'a accueillie et a rétracté cette ordonnance ; que MM. A... et B... ont assigné Mme Y..., qui n'avait pas déféré à la convocation du notaire, en régularisation de la vente sous astreinte et paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner à régulariser l'acte de vente alors, selon le moyen, que le principe de l'autorité de la chose jugée est général et absolu et s'attache même aux décisions erronées ; qu'en écartant le moyen tiré du caractère irrévocable du jugement rendu le 19 septembre 2008 par lequel le tribunal de commerce avait reçu la tierce opposition de Mme Y... contre l'ordonnance du juge commissaire du 2 avril 1999 et ordonné rétractation de cette ordonnance, au motif inopérant que Mme Y... ne pouvait exercer une tierce opposition contre ladite ordonnance, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, aujourd'hui devenu l'article 1355 du code civil ;

Mais attendu que l'ordonnance par laquelle le juge-commissaire autorise la vente d'un bien commun appartenant à un débiteur en liquidation judiciaire rend la vente parfaite dès que cette ordonnance acquiert force de chose jugée par l'épuisement des recours ouverts au débiteur ; qu'il en résulte que la décision accueillant la tierce opposition de son conjoint à l'ordonnance, cette décision, serait-elle devenue irrévocable à l'égard de celui-ci, n'est pas de nature à remettre en cause le caractère définitif de l'autorisation de la vente du bien ; qu'ayant énoncé que l'article 1413 du code civil permettait au liquidateur de faire procéder à la vente d'un bien commun, c'est exactement que la cour d'appel en a déduit que le jugement du 19 septembre 2008 était sans portée quant à l'autorisation de vente, qui était acquise, et ne faisait pas obstacle à l'injonction faite, en tant que de besoin, au conjoint de régulariser la vente ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme Y... fait aussi grief à l'arrêt de la condamner à des dommages-intérêts pour résistance abusive alors, selon le moyen :

1°/ que la défense à une action en justice ne constitue pas, sauf abus qu'il appartient au juge de caractériser, une faute ; que cette faute est personnelle et qu'un plaideur ne saurait être condamné en considération de décisions rendues dans des instances où il n'était pas lui-même partie ; qu'en énonçant que le comportement procédural abusif de Mme Y... était caractérisé par les procédures et décisions successives, quand il ressortait pourtant de ses propres constatations que Mme Y... n'était pas intervenue dans les procédures précédentes, dans lesquelles elle n'avait pas la qualité de partie, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, aujourd'hui devenu l'article 1240 du code civil ;

2°/ qu'en se bornant à affirmer que le comportement de Mme Y... était révélateur d'un esprit de chicane particulièrement poussé, sans indiquer sur quels éléments factuels elle fondait cette affirmation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, aujourd'hui devenu l'article 1240 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'il n'était pas interdit à la cour d'appel, pour caractériser l'abus du droit d'agir en justice de Mme Y..., de se référer aux multiples décisions de deux cours d'appel et de la Cour de cassation auxquelles, certes, elle n'était pas personnellement partie, mais dont il résultait que, la vente autorisée étant parfaite, Mme Y... ne disposait d'aucun moyen pour s'y opposer ;

Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel ne s'est pas bornée à la seule affirmation du premier juge, selon laquelle le comportement de Mme Y... était révélateur d'un esprit de chicane particulièrement poussé, mais a dit que ce comportement était caractérisé par les procédures et décisions successives ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.