Cass. 2e civ., 9 janvier 2020, n° 18-23.975
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pireyre
Avocats :
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Gouz-Fitoussi
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2018), que l'Etat, puis l'Établissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée (l'EPA Marne) ont autorisé la Société d'exploitation du practice de Villiers-sur-Marne (la société SEPV) à occuper des terrains pour une durée déterminée pour y exploiter un club de golf ; qu'un tribunal de grande instance a, notamment, ordonné l'expulsion de la société SEPV et de tous occupants de son chef sous le bénéfice de l'exécution provisoire ; qu'en exécution de cette décision, l'EPA Marne a fait délivrer à la société SEPV un commandement d'avoir à quitter les lieux dans le délai d'un mois ; que cette dernière a saisi un juge de l'exécution à fin, notamment, d'obtenir l'arrêt de la procédure d'expulsion pour un délai de six mois ; que l'EPA Marne a fait procéder à l'expulsion de la société SEPV ; que le juge de l'exécution ayant débouté la société SEPV de ses demandes, celle-ci a interjeté appel ; que le gérant de la société, M. J..., est intervenu volontairement en cause d'appel ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième et troisième branches du second moyen, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'EPA Marne fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'intervention volontaire de M. J... et, en conséquence, de le condamner à verser à M. J... la somme de 1 500 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors selon le moyen, que sont irrecevables les interventions volontaires en cause d'appel qui ont pour objet de demander des condamnations personnelles non soumises aux premiers juges ; qu'il ressort des pièces de la procédure que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil était exclusivement saisi de demandes de la société SEPV tendant à l'annulation du procès-verbal d'expulsion et au paiement de sommes à titre de dommages et intérêts en réparation de la destruction de bâtiments modulaires, de l'irrégularité de la procédure et de frais irrépétibles ; qu'aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées le 19 septembre 2018, M. J... intervenait volontairement en cause d'appel pour solliciter la condamnation de l'EPA MARNE à lui payer des dommages-intérêts en vue d'obtenir réparation des préjudices qu'il aurait personnellement subis du fait de la procédure d'expulsion en cause, au titre du coût de son déménagement, de la destruction de ses meubles et de son préjudice moral ; qu'en déclarant recevable l'intervention volontaire de M. J..., au motif erroné que les demandes qu'il formait procédaient directement de la demande originaire et tendaient aux mêmes fins, quand cette intervention volontaire en cause d'appel avait pour objet de demander des condamnations personnelles non soumises au premier juge, la cour d'appel a violé l'article 554 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'appréciation de l'intérêt à agir de l'intervenant volontaire et du lien suffisant qui doit exister entre ses demandes et les prétentions originaires relève du pouvoir souverain des juges du fond ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Attendu que l'EPA Marne fait grief à l'arrêt de prononcer l'annulation de la procédure d'expulsion et de le condamner à verser à la société SEPV la somme de 136 330 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel et à M. J... la somme de 1 500 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et de le condamner à verser à la société SEPV et à M. J... chacun la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors selon le moyen, que les dispositions de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution ne s'appliquent pas à la personne qui habite des lieux dont l'usage en tant que logement est interdit ; qu'en affirmant que la procédure d'expulsion diligentée à l'encontre de la société SEPV devait être annulée car l'EPA MARNE n'avait pas respecté le délai de deux mois à compter du commandement d'avoir à quitter les lieux délivré le 4 janvier 2017 à cette société, au motif que M. J... avait établi avoir son domicile dans les locaux objets de la procédure d'expulsion, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait des articles 1 et 4 de la convention d'occupation précaire du 24 novembre 2014, au titre de laquelle la société SEPV occupait les lieux, que le terrain objet de cette convention avait été mis à la disposition de cette société pour être exclusivement destiné à une activité de practice de golf, aucune autre utilisation n'étant autorisée sous peine de révocation immédiate, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
Mais attendu que l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa version issue de la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, énonce que si l'expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7 du même code ;
Qu'ayant retenu que M. J... établissait qu'il avait son domicile dans les locaux de la société SEPV, qui avait été expulsée, faisant ainsi ressortir qu'il habitait effectivement les lieux, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.