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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5-7, 30 juin 2009, n° 2008/22440

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

France Télécom (SA)

Défendeur :

Numericable (SAS), NC Numericable (SA), Arcep

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Fossier

Conseillers :

M. Remenieras, Mme Jourdier

Avocats :

Me Nauges, Me Georges Naim, Me Delannoy

CA Paris n° 2008/22440

29 juin 2009

NUMERICABLE, câblo-opérateur, a commercialisé dans le courant de l'été 2007 auprès des opérateurs de communications électroniques une offre de gros d'accès à son réseau de fibre optique. FRANCE TELECOM, qui a sollicité sans succès la communication de cette offre, a alors saisi le 18 juillet 2008 1'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) (ci-après l'Autorité) d'une demande de règlement de différend.

Le contexte dans lequel ce différend est intervenu est caractérisé, d'une part, par l’évolution du secteur du câble, et d'autre part, par le déploiement de la fibre optique.

S'agissant, en premier lieu, du secteur du câble, les offres de détail pour l'accès aux services Internet et à des services multimédias qui sont, pour l'essentiel, des offres de haut débit, reposent sur diverses technologies, dont la plus répandue est le DSL qui utilise la bande de fréquences hautes de la boucle locale de cuivre appartenant à FRANCE TÉLÉCOM et mise à la disposition des opérateurs alternatifs dans le cadre du dégroupage partiel ou total.

Cette technologie est concurrencée par le câble coaxial, initialement déployé par les câblo-opérateurs pour la diffusion de contenus télévisuels. Adaptés pour offrir aux abonnés un accès à haut débit à Internet, les réseaux de câble coaxiaux restent exploités en propre par chaque câblo-opérateur, des contraintes techniques ne permettant pas, en effet, un accès partagé - du type « dégroupage » - à ces réseaux dans des conditions économiques raisonnables.

Le déploiement de réseaux câblés, qui a débuté avec la loi no 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, s'est renforcé avec la loi no 84-743 du 1 er août 1984 relative à l'exploitation des services de radio-télévision mis à la disposition du public sur un réseau câblé (« le plan câble »). Ces lois ont permis l'aménagement en réseaux câblés d'une cinquantaine de grandes agglomérations. Cet aménagement a été opéré par l'Etat - en l'occurrence par la direction générale des télécommunications du ministère des PTT, devenue FRANCE TÉLÉCOM - auquel le monopole de l'installation des réseaux câblés et la propriété de ceux-ci ont été reconnus. Le plus souvent, ces réseaux ont été établis dans les infrastructures de génie civil dans lesquelles la boucle locale de cuivre a été développée.

L’installation des réseaux câblés s'est ensuite développée avec la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication qui a permis aux collectivités locales d'établir ou d'autoriser l'établissement de ces réseaux sur leur territoire et d'en confier l'exploitation à des opérateurs tiers. C’est dans ces conditions que plusieurs câblo-opérateurs sont intervenus pour l'établissement et ou l'exploitation des réseaux câblés.

Dans le courant des années 1990, FRANCE TÉLÉCOM s'est désengagée du secteur du câble en cédant aux autres câblo-opérateurs la propriété des câbles et équipements constituant son réseau. Cette entreprise a cependant conservé la propriété des infrastructures de génie civil - c'est à dire les fourreaux qui accueillent également la boucle locale de cuivre- en concédant aux câblo-opérateurs le droit d'usage de longue durée pour leur permettre le maintien des équipements de leurs réseaux. Ce processus de consolidation s'est achevé par la fusion des deux principaux câblo-opérateurs restants, NOOS et NUMERICABLE, qui détient aujourd'hui la quasi-totalité des réseaux câblés.

Ces réseaux reposent sur des infrastructures de génie civil qui relèvent de trois régimes juridiques distincts.

- les infrastructures du plan câble, propriété de FRANCE TÉLÉCOM, sur lesquelles, NUMERICABLE dispose de droits d'usage de longue durée au moyen de multiples conventions, Ces infrastructures sont celles réalisées dans les cinquante plus grandes villes de France ;

- les infrastructures « nouvelle donne » appartenant à des collectivités territoriales, réalisées par les câblo-opérateurs dans la cadre de délégations de service public et qui demeurent exploitées par NUMERICABLE ;

- les infrastructures « nouvelle donne » appartenant en pleine propriété à NUMERICABLE, construites et exploitées par cette entreprise dans le cadre de conventions d'occupation du domaine public conclues avec les collectivités territoriales.

S'agissant, en second lieu, du déploiement de la fibre optique, la saturation des capacités de la boucle locale de cuivre en raison de la demande croissante des consommateurs pour les services nécessitant de très hauts débits a conduit les opérateurs de télécommunications électroniques à envisager l'installation et l'exploitation de réseaux en fibre optique, qui permettent des débits de transmission très élevés et constants.

La commercialisation des offres de détail de très haut débit sur fibre est cependant subordonnée au déploiement de boucles locales de fibre qui restent à construire. Le développement du très haut débit pourrait être freiné par le coût considérable des investissements nécessaires - de l'ordre de plusieurs de milliards d'euros pour l'ensemble du territoire national- dont le coût de réalisation des infrastructures de génie civil représente plus des trois quarts. Les délais conséquents de construction des fourreaux qui incluent nécessairement les formalités administratives relatives à l'occupation du domaine public sont également un facteur dirimant. Ces éléments ont conduit ItARCEP, dans un rapport de juillet 2007 sur les réseaux câblés, à conclure que «la possibilité d'utiliser les infrastructures de génie civil existantes est un facteur essentiel de l'équation économique des opérateurs », dans la mesure en effet où les investissements nécessaires représentent un page coût considérable, de l'ordre de plusieurs dizaines de milliards d'euros à l’horizon des dix prochaines années

FRANCE TÉLÉCOM dispose d’une infrastructure de génie civil prépondérante avec 350000 kilomètres d'artères, dont une partie accueille les réseaux câblés de NUMERICABLE, c’est la raison pour laquelle, par une décision no 2008-0835 du 24 juillet 2008 portant sur la définition du marché pertinent de gros des offres d'accès aux infrastructures physiques constitutives de la boucle locale filaire, sur la désignation d'un opérateur exerçant une influence significative sur ce marché et sur les obligations imposées à cet opérateur sur ce marché, l’ARCEP a désigné FRANCE TÉLÉCOM comme opérateur puissant sur ce marché. Ainsi, cette entreprise est en conséquence tenue de faire droit aux demandes raisonnables d'accès, dans des conditions transparentes, non-discriminatoires et à des tarifs « reflétant les coûts correspondants, en respectant en particulier les principes d'efficacité, de non discrimination et de concurrence effective et loyale ».

NUMERICABLE a par ailleurs déployé de la fibre optique dans les infrastructures de génie civil sur lesquelles elle détient des droits de propriété ou d'usage.

En premier lieu, ce déploiement s'est opéré pour ses besoins propres dans le cadre de la modernisation de ses réseaux coaxiaux. NUMERICABLE est ainsi conduite à remplacer ses anciens réseaux par de la fibre optique jusqu'au dernier amplificateur, la partie terminale de son réseau restant en câble coaxial. Ces modalités de déploiement relèvent du choix technologique de NUMERICABLE pour la conservation du câble coaxial sur le segment terminal du réseau.

En second lieu, NUMERICABLE a également été conduite à déployer de la « fibre surnuméraire » dans la partie horizontale de ses réseaux dans le cadre de son offre de gros, en vue d'une mise à disposition auprès d'autres opérateurs. NUMERICABLE propose, au titre d'une option de cette offre de gros, de tirer de la fibre optique jusque dans les immeubles pour le compte des opérateurs.

C’est dans un tel contexte que FRANCE TÉLÉCOM a saisi l'ARCEP d'une demande de règlement de différend conformément aux dispositions des articles L.34-8 1 et L.36-8 1 du code des postes et des communications électroniques (CPCE).

L'opérateur historique demandait à l'Autorité :

- de constater les refus d'accès qui lui ont été opposés par NUMERICABLE et NC NUMERICABLE,

- de constater que les refus de ces entreprises de communiquer l'offre ou les offres d'accès à leur réseau qu'elles proposent aux opérateurs méconnaissent les dispositions de l'article D.99 -10 du CPCE,

- de leur enjoindre de communiquer les conditions techniques et tarifaires, ainsi que les informations concernant la disponibilité sur le territoire national de l'offre ou des offres d'accès à leur réseau proposées aux autres opérateurs dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.

FRANCE TÉLÉCOM soutenait que les annonces de ces deux opérateurs révélaient qu'ils étaient en mesure de proposer depuis le mois de juin 2007 à leurs clients une offre de gros de fibre sur une grande part du territoire métropolitain et précisait que l'étendue affichée du réseau lui permet de supposer que cette offre serait susceptible de répondre de manière complémentaire à ses propres besoins dans certaines zones géographiques. Elle reprochait à NUMERICABLE et NC NUMERICABLE d'avoir refusé sans motif, depuis le mois d’août 2007, de lui communiquer l'offre en question, en soulignant qu’en réponse aux multiples courriers qui leur avaient été envoyés en 2007 et 2008, ces opérateurs s'étaient bornés à lui demander d'exprimer ses besoins en ce qui concerne les modalités techniques ou tarifaires ainsi que sur le périmètre géographique.

De leur côté, NUMERICABLE et NCNUMERICABLE confirmaient que FRANCE TÉLÉCOM avait manifesté à plusieurs reprises le souhait de connaître les conditions techniques et tarifaires de leur offre, en indiquant toutefois qu'elle n'avait pas justifié un quelconque besoin d'accès. Elles lui avaient exposé les principes de cette offre au cours d'une réunion du 21 novembre 2007 et il avait alors été convenu que FRANCE TÉLÉCOM leur ferait parvenir une liste des zones géographiques susceptibles de l'intéresser ainsi que ses besoins d'accès dans ces zones. Dans un courrier du 4 février 2008, NUMERICABLE lui avait précisé à nouveau qu'en l'absence de demande spécifique et détaillée, la « faisabilité technique et juridique » de la demande ne pourrait pas être étudiée. FRANCE TÉLÉCOM s'était alors contentée de lui fournir une liste de villes qui démontrait l’absence de son besoin d'accès à son offre puisque la plupart correspondaient à celles qui figuraient au Plan Câble, le réseau câblé empruntant exactement les mêmes ouvrages que le réseau de FRANCE TÉLÉCOM et desservant les mêmes immeubles.

Par décision no 2008-1207 du 4 novembre 2008, l’Autorité :

- a déclaré irrecevable la demande de FRANCE TÉLÉCOM tendant à constater que les refus de NCNUMERICABLE et NUMERICABLE de communiquer leur offre d'accès méconnaissent les dispositions de l'article D.99-10, en observant que la procédure de règlement de différends ne vise pas à faire constater le non-respect d'une obligation réglementaire ;

- a décidé, pour le surplus, de rejeter les demandes de règlement de différend présentées par la société FRANCE TÉLÉCOM, en relevant ;

que l’Autorité doit apprécier si la communication des conditions techniques et tarifaires ainsi que des informations concernant la disponibilité géographique des offres d'accès au réseau de NUMERICABLE et NC NUMERICABLE remplit les conditions posées par l'article L.34-81 du CPCE, en particulier si elle est indispensable pour respecter les objectifs prévus à l'article L.32-1 du même code et «si la décision imposant une telle communication est notamment proportionnée» ;

  •  qu'il résulte des termes de Itarticle L.34-81 du CPCE que c'est l'Autorité qui apprécie dans quelle mesure les modalités de l'accès ou de l'interconnexion doivent être imposées, et si le caractère indispensable au regard des objectifs de la régulation est rempli ;
  •  que toutefois, lorsqu'elle statue sur le fondement de L.34-8 1 b), à la demande d'une partie, l'Autorité ne peut apprécier si le caractère indispensable au regard des objectifs de la régulation est ou non établi que «eu égard aux éléments fournis par la partie demanderesse, confrontés dans le cadre de la procédure contradictoire prévue à l'article L.36-8 du CPCE à l'argumentation de la partie défenderesse » ;
  •  qu'en conséquence, il appartient à FRANCE TELECOM de produire les éléments d'argumentation de nature à établir que les conditions techniques et tarifaires ainsi que les informations concernant la disponibilité géographique des offres d'accès au réseau de NUMERICABLE et NC NUMERICABLE doivent impérativement lui être communiquées pour que les objectifs posés à l’article L.32-1 puissent être atteints ;
  • que, compte tenu notamment de sa position particulière en ce qui concerne la détention des fourreaux de la boucle locale cuivre, FRANCE TÉLÉCOM ne démontre pas en quoi l'offre de gros de NUMERICABLE et NCNUMERICABLE lui est absolument nécessaire pour offrir des services très haut débit, ni a fortiori en quoi la communication de cette offre est indispensable au respect des objectifs de l'article L.32-l du CPCE ,
  • qu’au regard de ce qui précède, il convient de constater qu'aucun élément suffisant ne permet de démontrer le caractère indispensable pour respecter les objectifs définis à l'article L.32-l du CPCE de procéder à la communication d'informations sollicitée 
  • qu'au demeurant, même si la communication de ces informations s'avérait indispensable au respect des objectifs de l'article L.32-1 du CPCE, il n'en reste pas moins qu'il conviendra alors de mettre en évidence le caractère notamment proportionné des mesures que FRANCE TELECOM demande à l'Autorité d'imposer à NUMERICABLE et NCNUMERICABLE ;

Qu'à cet égard, l'injonction qui leur serait faite de communiquer à FRANCE TÉLÉCOM des informations concernant la disponibilité de leur offre sur l'ensemble du territoire national semble dépasser les besoins réels de FRANCE TÉLÉCOM au vu de ses propres déploiements et, par suite, apparaît disproportionnée ;

Qu'en tout état de cause, FRANCE TÉLÉCOM n'établit pas que l'équité commanderait de lui communiquer l'offre en question.

LA COUR

Vu le recours formé le 4 décembre 2008 par FRANCE TELECOM dans lequel elle demande à la cour d'annuler la décision de l'Autorité et, en conséquence, d'enjoindre à NUMERICABLE de lui communiquer les conditions techniques et tarifaires ainsi que les informations concernant la disponibilité sur le territoire national de l'offre ou des offres d'accès à son réseau et de la condamner à lui verser une indemnité de 30 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'exposé complet des moyens du recours, déposé le 2 janvier 2009 ;

Vu le mémoire récapitulatif de FRANCE TELECOM, déposé le 6 avril 2009 ;

Vu le mémoire en réponse au recours déposé le 18 février 2009 par NUMERICABLE et NCNUMERICABLE ;

Vu les observations écrites de l'Autorité, déposées le 5 mars 2009 ;

Vu les observations écrites du ministère public, mises à la disposition des parties à l’audience et tendant au rejet du recours ;

Ouï à l'audience publique du 12 mai 2009, en leurs observations orales, les conseils de la société FRANCE TELÉCOM et des sociétés NUMERICABLE et NC NUMERICABLE, qui ont été mis en mesure de répliquer, ainsi que celui de l'Autorité et le ministère public en ses observations ;

SUR CE,

Sur la procédure

En ce qui concerne la composition de la formation.

Considérant que FRANCE TÉLÉCOM poursuit l'annulation de la décision déférée qui a été prise dans des conditions irrégulières en raison de l'absence du Président de I'ARCEP lors du délibéré, une telle modification de la composition du collège ayant porté atteinte au principe de collégialité ainsi qu'à l'obligation d'opiner lors du délibéré

Mais considérant qu’il suffit de constater que les cinq membres du collège qui ont délibéré le 4 novembre 2008 faisaient partie du collège à l'audience du 23 octobre 2008 au cours de laquelle ont été entendus les rapporteurs ainsi que les représentants des entreprises concernées ;

Que, dès lors, aucune atteinte n'a été portée au principe d'invariabilité de la formation de jugement puisque n’ont participé au délibéré que des membres du collège devant lesquels l'affaire a été débattue,

Qu'au surplus, il est constant que le quorum concernant les délibérations de l'Autorité fixé par l'article L. 130 du CPCE a été respecté en l'espèce, puisque cinq des sept membres du collège ont participé au délibéré ;

Que le moyen sera écarté ;

En ce qui concerne la signature de la décision déférée

Considérant que la requérante prétend également que cette décision est irrégulière en ce qu'elle a été signée par un membre du collège en violation de l'article 6 du règlement de l’ARCEP qui impose la signature du Président de l'Autorité ou du membre du collège ayant assuré la présidence de cette formation ;

Mais considérant que l'article 6 du règlement intérieur de l'Autorité prévoit que les décisions de l'Autorité sont signées par le président ou, en cas d'absence ou d'empêchement, par le membre de l'Autorité ayant assuré la présidence du collège, l'article 2 de ce règlement auquel cet article renvoie expressément prévoyant, par ailleurs, « qu'en cas d'absence ou d'empêchement du président, la réunion se tient sous la présidence du membre présent le plus âgé » ;

Qu'en l’espèce, en l'absence du Président de l'Autorité lors du délibéré, il revenait à M. Bridoux, membre présent du collège le plus âgé de présider cette formation et, par suite, de signer la décision ;

Que le moyen ne peut qu'être rejeté ; sur les demandes de FRANCE TÉLÉCOM

Considérant que la requérante soutient, tout d'abord, qu'en refusant de faire droit à sa demande tendant à «constater que les refus de communication par ces entreprises de l'offre ou des offres d'accès à leur réseau qu'elles proposent aux opérateurs méconnaissent les dispositions de l'article D.99 -10 du code des postes et des communications électroniques (CPCE)», la décision déférée est entachée d'une erreur de droit puisque l’ARCEP n'a pas exercé les compétences qui lui sont dévolues par les articles L.34-8 1 et L.36-8 du CPCE ; qu'en effet, l'Autorité est appelée à statuer sur un règlement de différend ayant trait au droit d'accès et que l'article D.99-10 du CPCE-qui énonce que «Les conditions tarifaires des conventions d'interconnexion et d'accès respectent les principes d'objectivité et de transparence»-est précisément relatif au principe de transparence qui s'impose à l'ensemble des opérateurs dans le cadre du régime juridique de l'accès ; que l'objet même de ce principe de transparence est d'assurer a minima la communication, par les différents acteurs du marché et aux opérateurs qui en font la demande, des modalités des offres d'accès qu'ils commercialisent, de telle sorte que ces derniers puissent en négocier les conditions techniques et tarifaires ; que la mise en œuvre du droit d'accès implique ainsi que les conditions techniques et tarifaires d'une offre de gros annoncée par NUMERICABLE fassent l'objet d'une communication transparente à l' opérateur qui en fait la demande ; que cette nécessaire transparence est la première garantie de l'exercice effectif du droit d'accès que l'Autorité est chargée de mettre en œuvre ; que, dès lors, la violation du principe de transparence fixé par l'article D.99-10 du CPCE est un des moyens par lesquels l'Autorité peut constater l'existence du refus d'accès opposé par NUMERICABLE et, partant, exercer les compétences qui lui sont dévolues par l'article L.36-8 du CPCE pour trancher le litige qui oppose les deux opérateurs ;

Que FRANCE TÉLÉCOM prétend, ensuite, que la décision de I'ARCEP est entachée d’une erreur de droit dans la mesure où, en subordonnant la recevabilité de sa demande d’accès à l'offre de gros de NUMERICABLE à une démonstration de la violation des objectifs de la régulation visés à L.32-1 du CPCE, elle a méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'en statuant ainsi, l'Autorité s'est affranchie de l'obligation de motivation qui s'impose à elle en vertu de l'article L.36-8 1 du CPCE et, qu'au surplus, les articles L34-8 1 et L.36-8 du CPCE qui lui donnent compétence en cas de différend, pour imposer cet accès, ne peuvent conduire à rejeter une demande de règlement de différend sur le fondement du défaut de preuve retenu dans la décision déférée ; qu'en effet, l'analyse préalable du «caractère indispensable au respect des objectifs de la régulation» non seulement reviendrait à imposer un critère de recevabilité formelle de sa demande et, en outre si elle était runique élément d'appréciation du bien fondé d'un demande d'arbitrage, conduirait à ce que seuls les litiges concernant des opérateurs soumis à une régulation ex ante puissent faire l'objet d'une telle demande, ce qui n’a pas de sens; qu'affirmer qu'une demande est «indispensable aux objectifs de la régulation» suppose que le régulateur est intervenu afin d'imposer des obligations précises aux opérateurs concernés; qu'en effet, s'il appartenait à un opérateur tel que FRANCE TELECOM de démontrer le caractère indispensable de sa demande aux objectifs de la régulation, cela signifierait qu'il est capable d'identifier les objectifs sectoriels applicables : or le seul cas où un opérateur pourrait faire un tel exercice serait celui d'une régulation connue, donc d'une régulation ex ante, ce qui n'est pas le cas en l'espèce; qu'en tout état de cause, une demande d'arbitrage ne peut par principe s'inscrire dans le cadre d'une régulation ex ante et I'ARCEP a dénaturé les dispositions des articles L.34-8 1 et L.36-8 du CPCE qui lui confèrent le pouvoir de connaître de litiges portant sur les conditions d'accès ou d'interconnexion d'opérateurs ne faisant l'objet d'aucune régulation ex ante ;

Que la requérante soutient encore que la décision de I'ARCEP est également entachée d'une erreur de droit en ce que le refus opposé à sa demande viole les objectifs de la régulation visés à l'article L.32-1 du CPCE ; qu’ainsi :

- la décision fait obstacle à la préservation d'une concurrence loyale et effective entre les opérateurs, dès lors que NUMERICABLE se présente comme «l'opérateur leader» en matière de très haut débit et déclare ouvrir son réseau à tous les opérateurs à l'exception de FRANCE TÉLÉCOM ; qu'à cet égard, c'est à tort que I'ARCEP justifie le rejet de la saisine par le fait que FRANCE TÉLECOM « détient l'essentiel des fourreaux de la boucle locale de cuivre et peut y tirer de la fibre », alors que cette situation ne lui procure aucun avantage particulier puisque, par une décision no 08-0835 du 24 juillet 2008, I'ARCEP lui a imposé l'obligation de publier une offre d'accès à son « génie civil » garantissant des conditions de déploiement dans ses fourreaux de manière équivalente entre les opérateurs et, qu'au surplus, le raccordement effectif de clients en très haut débit impose aux opérateurs des délais et des investissements conséquents ; qu'en conséquence, la situation d'un opérateur tel que FRANCE TÉLÉCOM qui déploie de la fibre optique pour fournir des services de très haut débit ne peut être utilement comparée à celle d'un opérateur qui, dans la même zone, dispose de l'offre de gros de fibre optique de NUMERICABLE lui permettant directement de raccorder les clients d’un immeuble : ce dernier peut sans délai proposer aux clients des zones concernées par l’offre de gros de cet opérateur des services de très haut débit et arbitrer sur ses déploiements et investissements en fibre optique dans des conditions qui ne sont pas permises à FRANCE TÉLÉCOM ; que, dans ces conditions, elle n'est pas en mesure concurrencer les services très haut débit proposés par les opérateurs ayant recours à l'offre de gros de NUMERICABLE ;

- alors que l'Autorité doit veiller à l'absence de discrimination dans le traitement des opérateurs, NUMERICABLE, qui affirme ouvrir son réseau très haut débit à tous les opérateurs qui le souhaitent, s'en est cependant dispensé en ce qui concerne FRANCE TÉLÉCOM

Que FRANCE TELÉCOM fait enfin valoir que la décision entreprise est entachée d'une erreur manifeste d’appréciation •

- en premier lieu, en estimant qu'elle n'avait pas démontré que sa demande d'accéder à l'offre de gros de NUMERICABLE et aux informations concernant cette offre était réelle, proportionnée et justifiée en équité, l'Autorité n'a pas correctement apprécié les faits qui lui étaient soumis ; qu'en effet, FRANCE TÉLÉCOM qui, comme tout opérateur, doit, au moment où il envisage de réaliser des investissements, procéder à des arbitrages, a été conduite à s'interroger sur la possibilité de retenir l'offre de gros de NUMERICABLE comme solution alternative à ses équipements lorsqu'elle envisage d'ouvrir ses services dans des zones dans lesquelles aucun déploiement de réseau nétait à ce jour prévu ou ne pouvait être réalisé à court terme ; que cette solution lui permettrait de commercialiser rapidement une offre auprès de clients sans procéder, dans un premier temps, à des déploiements d'infrastructures en propre, ce qui implique qu'elle prenne connaissance des conditions techniques et tarifaires de l'offre de gros de NUMERICABLE ; que, dès lors, compte tenu de l'obstacle opposé à toute négociation par cette entreprise, du fait de son refus de communication qui lui a été opposé, l'Autorité n'était pas fondée lui faire grief de n'avoir fait état auprès de sa partenaire que de « besoins potentiels » ; qu'au surplus, les offres de gros de NUMERICABLE constituent un moyen indispensable à court terme lui permettant de concurrencer les offres de ses concurrents dans les zones où ceux-ci ont déjà accès à des prestations de NUMERICABLE : FRANCE TÉLÉCOM ne déploie ses réseaux que dans dix villes de province et dans une quinzaine de villes en Ile de France, alors que NUMERICABLE déclare déployer des réseaux de très haut débit dans environ 185 grandes villes ; que, dans ces conditions, la possibilité de commercialiser des offres de détail dans les immeubles ou dans les villes dans lesquelles elle n'a, à ce stade, pas déployé de fibre optique demeure subordonnée à courte terme à la conclusion d'un accord avec NUMERICABLE ;

- en second lieu, l'autorité a également commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle lui a imposé, en violation des dispositions de l'article L.36-8 1 du CPCE, des conditions inéquitables ; qu'en effet, « sauf à dénaturer l'appréciation de la proportionnalité qui doit conjuguer les intérêts légitimes des parties», l'Autorité ne pouvait s'appuyer sur la réalité des besoins exprimée par FRANCE TELECOM puisque sa demande avait précisément pour objet de lui permettre de connaître les conditions techniques et tarifaires pour négocier de la manière la plus spécifique à ses besoins ; qu'enfin, l'Autorité ne pouvait déclarer sa demande non proportionnée dès lors qu'elle ne visait qu'à obtenir une offre commercialisée à destination de tous les opérateurs, ce qui ne permettait pas d'exclure FRANCE TÉLÉCOM ;

Considérant, en droit, que l'article L.34-8 1 du CPCE sur le fondement duquel l’Autorité a été saisie par FRANCE TÉLÉCOM dispose :

« L’interconnexion ou l'accès font l'objet d'une convention de droit privé entre les parties concernées. Cette convention détermine, dans le respect des dispositions du présent code et des décisions prises pour son application, les conditions techniques et financières de l'interconnexion ou de l'accès. Elle est communiquée à [ l’Autorité] à sa demande. Lorsque cela est indispensable pour respecter les objectifs définis à l'article L. 32-1, l'Autorité peut imposer, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l'accès ou de l’interconnexion.

a) soit de sa propre initiative (...) ,

b) soit à la demande d'une des parties dans les conditions prévues à l'article L. 36-8.

Les décisions adoptées en application des a) et b) sont motivées et précisent les conditions équitables d'ordre technique et financier dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés. (...)» ;

Que l'article L.32-8 8ème alinéa du CPCE définit l'accès comme « toute mise à disposition de moyens, matériels ou logiciels, ou de services en vue de permettre au bénéficiaire de fournir des services de communications électroniques »;

Que les objectifs définis par les dispositions de l'article l’article L.32-1 du CPCE sont relatifs, notamment, à l’établissement d'une concurrence effective et loyale au bénéfice des consommateurs, à l'innovation, la compétitivité et l'investissement efficace dans les infrastructures, à l'interopérabilité et la sécurité des réseaux, à la neutralité technologique et à la non discrimination entre les opérateurs ;Que l'article L.36-81 du même code ajoute que « En cas de refus d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie du différend par l'une ou l'autre des parties. Sa décision est motivée et précise les conditions équitables, d'ordre technique et financier dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès spécial doivent être assurés » ;

Considérant, en l'espèce, en premier lieu, qu'il convient de rappeler que l’Autorité a, au préalable, et sans être critiquée sur ce point, exactement relevé, en ce qui concerne sa compétence :

- qu’ayant été saisie sur le fondement de l'article L.34 8-1 du CPCE, il convenait dapprécier si le litige relève de l'accès au sens de l'article L.32-8 8ème alinéa du même code ;

- qu'en l'occurrence, il est constant que l'offre de gros d'accès à des réseaux très haut débit proposée par NUMERICABLE et destinée à des opérateurs de communications électroniques fournisseurs d'accès très haut débit est une offre commerciale de vente en gros de fibre optique de boucle locale déployée dans des infrastructures physiques constituées par les fourreaux, ce qui permet de conclure que cette offre de gros relève du régime juridique de l'accès ;

- que, dès lors que le litige se rattache au champ d'application de l'article L.34 8-1 du CPCE, l'Autorité peut en être saisie dans les conditions de l'article L.36-8, il lui appartenait d'examiner si les différentes demandes de FRANCE TÉLÉCOM ont pour objet de lui demander («d'imposer, de manière objective, transparente, non discriminatoire et proportionnée, les modalités de l'accès» ;

Considérant, en deuxième lieu, que c'est à juste titre que l'Autorité a décidé que la demande de FRANCE TÉLÉCOM tendant à constater que le refus de communication qui lui est opposé méconnaît les dispositions de l'article D.99-10 du CPCE n'était pas recevable dans le cadre de la procédure de règlement de différend, qui tend à la fixation des conditions de l'interconnexion ou de l'accès ;

Qu'en effet, cette demande vise à faire constater par l'Autorité un manquement des deux entreprises concernées à leur obligations réglementaires, ce que l'Autorité ne peut faire que dans le cadre de la procédure, distincte, de sanction prévue par l'article L.36-11 du CPCE ;

Que s’il est vrai que l'appréciation par l'Autorité du respect de leurs obligations réglementaires par les parties au différend peut constituer un élément permettant de fonder sa décision dans le cadre de la procédure de règlement de différend sur la fixation des «conditions, d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion ou l'accès doivent être assurés», cette appréciation ne peut pour autant la conduire à procéder, dans le même temps, au constat du manquement d'une partie au différend à des obligations réglementaires fixées par le code des postes et des communications électroniques

Que le moyen n'est pas fondé ;

Considérant, en troisième lieu, que l'Autorité a rappelé à juste titre qu'elle doit apprécier si la communication sollicitée est indispensable pour respecter les objectifs prévus à l'article 32-1 du même code et si la décision imposant une telle communication est notamment proportionnée ;

Qu'en effet, l'article L.34-8 1 du CPCE subordonne l'usage par l'Autorité de ses pouvoirs exceptionnels restreignant la liberté contractuelle des opérateurs à la démonstration du caractère indispensable des mesures qu'elle peut imposer pour respecter les objectifs définis par l'article 32-1 du CPCE ;

Que, cependant, lorsque que comme au cas d'espèce, elle statue, à la demande d'une partie, sur le fondement du b) de l'article L.34-8 1 du CPCE, l'Autorité retient à bon droit, qu'elle ne peut porter une appréciation sur le caractère indispensable de la communication de son propre chef mais seulement au regard des éléments concrets fournis par la partie demanderesse et soumis au débat contradictoire ;

Qu'au surplus, contrairement à ce qu'affirme FRANCE TÉLÉCOM, lorsque le fournisseur d'accès n'est, comme au cas d'espèce, pas soumis à une régulation ex ante, soit parce qu'il ne détient aucune influence sur le marché pertinent en cause, soit parce qu'aucun marché pertinent n'a été identifié, l'appréciation du caractère indispensable des mesures que l'Autorité peut être appelée à prendre est particulièrement importante en raison de la liberté économique et par suite de la liberté contractuelle dont ce fournisseur doit jouir sur un marché concurrentiel ;

Que, dès lors, l'Autorité n'a pas subordonné la recevabilité de la demande d'accès formulée par FRANCE TÉLÉCOM à une démonstration de la violation des objectifs de la régulation ;

Que le moyen sera rejeté ;

Considérant, en quatrième lieu, que c'est par des appréciations pertinentes, que la cour fait siennes, que l'Autorité a constaté ensuite qu'aucun élément ne permet de démontrer le caractère indispensable, afin de respecter les objectifs de l'article L.32-1 du CPCE, de la communication par NUMERICABLE et NCNUMERICABLE à FRANCE TÉLÉCOM des informations techniques, tarifaires et géographiques concernant leur offre de gros, en relevant :

- que les principaux facteurs de déploiement des réseaux à très haut débit en fibre optique sont, d'une part, les conditions d'accès ou de construction du génie civil pour la partie horizontale des réseaux et, d'autre part, la possibilité d'accéder aux immeubles pour y déployer la partie verticale, éléments objectifs qui ne sont pas sérieusement critiqués par la requérante ;

- que, sur la partie verticale, NUMERICABLE a déclaré à l'Autorité qu'elle avait été conduite à modifier son offre de gros à la suite de l'entrée en vigueur de la loi no 2008-776 du 4 août 2008 qui a limité la facilité d'accès aux immeubles dont ces sociétés estimaient bénéficier antérieurement;

- que, s'agissant de la partie horizontale, FRANCE TÉLÉCOM détient l'essentiel des fourreaux de la boucle locale cuivre et peut y déployer de la fibre optique ;

- que NUMERICABLE et NC NUMERICABLE ont d'ailleurs reconnu utiliser le génie civil de FRANCE TÉLÉCOM pour fournir leurs offres de gros dans les villes du plan câble qui représentent la quasi-totalité des villes concernées par la demande de FRANCE TÉLÉCOM ;

- qu'à cet égard il convenait de rappeler que, par une décision 1102008-0835 de l'Autorité du 24 juillet 2008, cette entreprise a d'ailleurs été déclarée comme exerçant une influence significative sur le marché des infrastructures physiques constitutives de la boucle locale eu égard notamment à son patrimoine prépondérant de génie civil

- que, devant l'Autorité, FRANCE TELECOM a simplement déclaré quelle « est intéressée potentiellement » par l'offre de gros de NUMERICABLE dans la mesure où elle  « représente potentiellement une source d'optimisation des investissements des opérateurs» de sorte qu'elle ne démontre pas en quoi (...) la communication de cette offre est indispensable au respect des objectifs de l'article 32-1 du CPCE;

Que la cour observe, à cet égard, qu'il ressort du dossier que FRANCE TÉLÉCOM s'est bornée à fournir aux questions précises de l'Autorité - sur la manière dont elle envisageait d'utiliser l'offre de NUMERICABLE d'un point de vue géographique et d'un point de vue temporel, sur le délai dans lequel elle aurait besoin de l'offre, sur la liste d'éléments dont elle aura besoin pour évaluer l'intérêt de l'offre - des éléments de réponse très généraux et qui indiquent clairement qu'elle se réserve une marge d'appréciation sur l'opportunité de poursuivre les discussions avec NUMERICABLE une fois qu'elle aura été rendue destinataire de l'offre •

Qu'il s'agit en effet « d'optimiser les projets de déploiement de FRANCE TÉLÉCOM)), NUMERICABLE étant présent dans toutes les villes de pré-déploiement actuel de FRANCE TÉLÉCOM ;

Que l'offre de gros de NUMERICABLE « peut constituer un paramètre important dans les décisions d'extension de déploiement de FRANCE TELECOM» sans qu'il ne soit précisé en quoi ce paramètre est important autrement que par le fait que FRANCE TELECOM «a vocation à couvrir l'ensemble du territoire national»;

Que FRANCE TÉLÉCOM répond par ailleurs « qu'à moyen et plus long terme, [elle] est intéressée potentiellement dans toutes les villes où NUMERICABLE est déployée », « chaque ville où NUMERICABLE est présente [représentant potentiellement une source d'optimisation des investissements des opérateurs» ;

Considérant que FRANCE TÉLÉCOM maintient vainement, au soutien de son recours, que la propriété des infrastructures de génie civil ne lui confère pas d'avantage concurrentiel particulier par rapport aux opérateurs alternatifs en ce qui concerne le déploiement de la fibre optique, alors qu'il ne peut être sérieusement contesté que les opérateurs qui répondent à son offre de génie civil subissent les contraintes résultant des formalités et des délais de négociation afférents à cette offre et, de surcroît, ignorent la configuration du réseau de FRANCE TÉLECOM, ce qui les prive de la capacité d'anticipation dont bénéficie cet opérateur ;

Qu'en outre, même en admettant, s'agissant de la «partie verticale», que NUMERICABLE ait pu bénéficier d'une certaine avance en ce qui concerne l'installation de la fibre optique jusqu'au domicile de l’utilisateur final, FRANCE TÉLÉCOM bénéficie comme les autres opérateurs, des dispositions de l'article L.34-8-3 du CPCE, introduit par la loi no 2008-776 du 4 août 2008 pour commercialiser ses offres de détail, qui impose au premier opérateur ayant posé la fibre optique jusqu'au domicile de l'utilisateur final de «faire droit aux demandes raisonnables d'accès à ladite ligne émanant d'opérateurs, en vue de fournir des services de communications électroniques à cet utilisateur final » ;

Qu'au surplus, afin de faciliter le raccordement des logements individuels en fibre optique, cette loi a interdit aux propriétaires des immeubles de s'opposer au raccordement au réseau très haut débit sauf « motif sérieux et légitime » et impose par ailleurs une étude par l'assemblée générale des copropriétaires de toute proposition d'un opérateur de communications électroniques de raccordement des logements au sein d'une copropriété ;

Que, lorsque l'assemblée générale des copropriétaires a approuvé la proposition de l'opérateur, l'article L.33-6 du CPCE prévoit que les conditions d'installation, de gestion, d'entretien et de remplacement de la fibre optique établies par l'opérateur à l'intérieur d'un immeuble devront faire l'objet d'une convention entre cet opérateur et le syndicat de copropriétaires ;

Que cela signifie que la disposition par NUMERICABLE d'un réseau de câbles coaxiaux au sein d'immeubles en copropriété ne lui confère pas d'avantage particulier puisque elle doit, comme FRANCE TELECOM, obtenir l'accord de l'assemblée générale des copropriétaires et négocier la convention prévue par l'article L.33-6 avant de pouvoir raccorder l'utilisateur final ;

Qu'il est constant également que, comme l'a relevé l'Autorité, NUMERICABLE, qui jusqu'à l'adoption de la loi du 4 août 2008 faisait une offre de gros comportant une première option en fibre optique jusqu'à l'immeuble puis prenait ses dispositions pour le raccordement de l'utilisateur final ainsi qu'une seconde option en vertu de laquelle NUMERICABLE assurait le raccordement en fibre optique jusqu'à l'utilisateur final (partie terminale du réseau), a renoncé à cette seconde option, ce qui la prive ainsi de l'avantage qu'elle pouvait détenir du fait de l'accès à l'utilisateur final via les câbles coaxiaux déjà installés ,

Considérant, en dernier lieu, que c'est également par des appréciation pertinentes, que la cour fait siennes, que l'Autorité a, en tout état de cause, même en supposant que la communication par NUMERICABLE des informations sollicitées s'avérerait indispensable au regard des objectifs de l'article L.32-1 du CPCE, relevé que l'injonction qui serait faite à NUMERICABLE et NCNUMERICABLE de communiquer à FRANCE TELECOM des informations sur la disponibilité de leur offre sur l'ensemble du territoire national semble dépasser les besoins réels de FRANCE TELECOM au vu de ses propres déploiements et, par suite, apparaît disproportionnée ;

Qu'en effet, la demande de l'opérateur historique qui portait sur la disponibilité de l’offre de gros de NUMERICABLE « dans toutes les villes où [elle] est déployée » concernait ainsi la quasi-totalité des villes du plan câble au sein desquelles elle est propriétaire des infrastructures de génie civil et a déjà procédé à un <pré-déploiement» ;

Qu'en conséquence, eu égard au caractère général de la demande d'accès de FRANCE TÉLÉCOM et à l'absence de précision sur les villes visées et sur les intentions de contracter de cet opérateur, le refus de faire droit à sa demande n'est en rien disproportionné par rapport à ses besoins ;

Considérant, enfin, que pas plus que devant l’Autorité , FRANCE TELECOM ne procède à la production, qui lui incombe, d'éléments permettant d'établir que l'équité commanderait de lui communiquer les offres en question ;

Que le recours sera rejeté ;

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société FRANCE TÉLÉCOM à verser à la société NUMERICABLE et à la société NCNUMERICABLE la somme de 15 000 euros chacune au titre de leurs frais irrépétibles,

Condamne la société FRANCE TÉLÉCOM aux dépens.