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Décisions

Cass. com., 7 novembre 2018, n° 17-24.233

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

Me Rémy-Corlay, SCP Yves et Blaise Capron

Poitiers, du 4 juill. 2017

4 juillet 2017

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 4 juillet 2017) et les productions, que, le 24 juillet 2012, la société LG Agri Viti a été mise en redressement judiciaire, la procédure étant étendue à d'autres sociétés par un jugement du 18 septembre 2012 ; que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Touraine et du Poitou (la banque) a déclaré des créances, à titre privilégié, au titre de prêts ; que cette déclaration a été contestée par le liquidateur concernant, en particulier, la validité des nantissements garantissant certains prêts ; qu'un jugement du 18 juin 2013 a arrêté le plan de cession partielle des actifs des sociétés débitrices ; que le 16 juillet 2013, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire, la société Frédéric Blanc - MJO étant désignée en qualité de liquidateur ; que le 6 novembre 2013, la banque a assigné le liquidateur en paiement d'une somme de 100 000 euros, correspondant au solde de la somme de 232 000 euros qui, selon elle, lui était due en exécution du jugement du 18 juin 2013 ; que, statuant sur la contestation formée par le liquidateur, un arrêt du 11 août 2015 a admis les créances de la banque à titre chirographaire ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de constater que sa créance a été admise au passif à titre simplement chirographaire, de la déclarer irrecevable à agir en paiement d'une créance antérieure au jugement d'ouverture, de décider que l'accord constaté par le jugement du 18 juin 2013 avait pour seul objet d'affecter le prix de cession aux différents biens grevés d'une sûreté pour l'exercice du droit de préférence des créanciers privilégiés et ne pouvait avoir eu pour effet d'attribuer une part de ce prix à un créancier dont le privilège se trouvait alors contesté, et de la condamner à restituer au liquidateur "des sociétés Lg Agri Viti et autres" la somme de 100 000 euros perçue le 4 novembre 2014 alors, selon le moyen : 1°/ que le jugement qui arrête le plan de cession en rend les dispositions applicables à tous, y compris au juge ; que l'autorité de la chose jugée s'attache aux jugements qui n'ont fait l'objet d'aucun recours, quels que soient les vices dont ils sont affectés ; que le dispositif du jugement rendu, le 18 juin 2013, par le tribunal de commerce de Poitiers, lequel arrête le plan de cession partielle des fonds exploités par les sociétés LG Agri Viti et autres, « dit que [...] l'échéancier de paiement au Crédit agricole rester [a] annex[é] à la présente décision pour être exécut[é] suivant [sa] forme et [sa] teneur » ; que cet échéancier prévoit un « paiement pour solde de tout compte » de 232 110 euros aux lieu et place des 624 568 euros primitivement dus à la CRCAM de la Touraine et du Poitou ; qu'en énonçant « que le jugement adoptant le plan de cession [du 18 juin 2013] ne peut concerner que le transfert des sûretés valablement inscrites et admises en tant que telles à la procédure collective, [et qu']il n'est revêtu de l'autorité de la chose jugée que sur la répartition du prix de cession sans préjudice de la question du transfert des sûretés, en particulier, comme c'est le cas concernant la créance du Crédit agricole, lorsque la validité de leur inscription est contestée », la cour d'appel a violé l'article L. 642-5, alinéa 3, du code de commerce, ensemble les articles 1351 ancien et 1355 actuel du code civil et 480 du code de procédure civile ; 2°/ que le dispositif de l'arrêt rendu, le 11 août 2015 par la cour d'appel de Poitiers, « prononce l'admission des créances [...] déclarées par la CRCAM de la Touraine et du Poitou au passif des sociétés du groupe LG Agri Viti et autres, à titre chirographaire, mais sans préjudice de l'éventuel droit de préférence invoqué par ladite caisse sur la quote-part du prix de cession affectée par le jugement du tribunal de commerce de Poitiers du 18 juin 2013 ayant arrêté la cession partielle des éléments d'actif desdites sociétés, en application des dispositions combinées des articles L. 631-22, alinéa 1er, et L. 642-12, alinéa 1er, du code de commerce » ; qu'en énonçant qu'« il est constant que par arrêt postérieur du 11 août 2015 la cour d'appel de Poitiers a admis la créance contestée du Crédit agricole seulement à titre chirographaire, [que] cette décision est également revêtue de l'autorité de la chose jugée, [et qu']il [le Crédit agricole] ne peut dès lors se prévaloir d'un privilège pour obtenir un paiement préférentiel », quand le dispositif de l'arrêt du 11 août 2015 réserve expressément le droit de préférence dont la CRCAM de la Touraine et du Poitou pourrait être titulaire en exécution du jugement rendu le 18 juin 2013 par le tribunal de commerce de Poitiers, la cour d'appel a violé l'article 480 du code de procédure civile, ensemble les articles 1351 ancien et 1355 actuel du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé qu'il résulte de l'article L. 642-12, alinéa 4, du code de commerce que le jugement arrêtant le plan de cession ne peut concerner que le transfert des sûretés valablement inscrites et admises à la procédure collective, et qu'un tel jugement n'est revêtu de l'autorité de la chose jugée que sur la répartition du prix de cession, sans préjudice de la question du transfert des sûretés, en particulier lorsque la validité de leur inscription est contestée, l'arrêt relève qu'un arrêt du 11 août 2015, revêtu de l'autorité de la chose jugée, a admis la créance, contestée, de la banque seulement à titre chirographaire ; que de ces énonciations et constatations, la cour d'appel, qui n'a méconnu ni l'autorité de la chose jugée s'attachant au jugement du 18 juin 2013 arrêtant le plan de cession ni celle qui s'attache à l'arrêt du 11 août 2015, a déduit à bon droit que la banque ne pouvait se prévaloir d'un privilège pour obtenir un paiement préférentiel, de sorte que devait être rejetée sa demande en paiement formée contre le liquidateur ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.