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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 9 mai 2014, n° 12/15690

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

BERKEM DEVELOPPEMENT (SAS)

Défendeur :

PARTENIA (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme AIMAR

Conseillers :

Mme NEROT, Mme RENARD

Avocats :

Me MONTACIE, SCP ALCYACONSEIL JUDICIAIRE, SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, AARPI DS AVOCATS

Paris, du 26 juin 2012

26 juin 2012

La société CECIL était titulaire d'un brevet français  9400179 déposé le 5 janvier 1994 portant sur la protection des constructions contre les termites, grâce à un film de matière plastique auquel est incorporé un insecticide.

La société CECIL a exploité ce brevet en commercialisant un produit dénommé TERMIFILM qui est un film plastique de type polyéthylène imprégné dans la masse d'une substance insecticide présentant une action létale contre les termites.

La société PARTENIA, immatriculée au registre du commerce depuis le 31 janvier 2000 a pour activité la fabrication de pièces techniques à base de matières plastiques. Elle propose sur le marché des produits en polyéthylène et en polypropylène destiné à l'industrie, au bâtiment ou à l'agriculture et a commercialisé jusqu'en avril 2005 un film antitermites dénommé ERATERM.

Par arrêt en date du 1er mars 2005, confirmant un jugement du Tribunal de Grande Instance de RENNES en date du 15 décembre 2003, la Cour d'Appel de RENNES a condamné la société PARTENIA à payer à la société CECIL la somme de 80.000 euros à titre de dommages-intérêts pour contrefaçon et a prononcé une mesure d'interdiction sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision

Le brevet FR 9400179 a été transmis à la société V33 à la suite de la transmission universelle du patrimoine de la société CECIL intervenue 21 novembre 2008.

La société V33 SA a elle-même cédé le brevet FR 9400179 5 à la société BERKEM DEVELOPPEMENT, ci-après la société BERKEM, suivant acte en date du 27 novembre 2009. L'acte de cession a fait l'objet d'une inscription an Registre National des Brevets le 11 février 2010.

Ayant appris dans le courant de l'année 2010 que la société PARTENIA commercialisait des produits qu'elle estimait contrefaisants et notamment l'ERATERM ainsi qu'un produit appelé XTRN, la société BERKEM a fait réaliser une analyse chimique du film XTRN par son laboratoire, laquelle a révélé que le XTRN comporte dans la totalité de la masse

(face bleue et face noire) 0,50 % de PERMETHRINE, laquelle serait selon la société BERKEM la substance chimique qui assure l'action létale sur les termites, utilisée dans le TERMIFILM.

Autorisée par ordonnance sur requête du Président du Tribunal de Grande Instance de PARIS en date du 9 septembre 2010, la société BERKEM à fait procéder le 1er octobre 2010 à une saisie contrefaçon dans les locaux de la société PARTENIA.

C'est dans ce contexte que par acte d'huissier en date du 22 octobre 2010, la société BERKEM a fait assigner la société PARTENIA en contrefaçon de brevet.

Par jugement en date du 26 juin 2012, non assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de Grande Instance de PARIS a :

- dit que la société BERKEM est recevable à agir à l'encontre de la société PARTENIA sur le fondement du brevet FR 94 001 79 ;

- débouté la société PARTENIA de sa demande de nullité des opérations de saisie-contrefaçon réalisées le 1er octobre 2010 ;

- dit que la société BERKEM ne rapporte pas la preuve de la matérialité des actes de contrefaçon du brevet FR 94 001 79 par la société PARTENIA ;

En conséquence,

- débouté la société BERKEM de sa demande en contrefaçon du brevet FR 94 001 79 ;

- dit que la demande de nullité du brevet FR 94 001 79 est sans objet ;

- débouté la société PARTENIA de ses demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et fondée sur 1'article 32-1 du code de procédure civile ;

- condamné la société BERKEM à verser à la société PARTENIA la somme de 15.000 euros on application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société BERKEM DEVELOPPEMENT aux dépens.

Par dernières écritures signifiées par voie électronique le 19 février 2014 , auxquelles il est expressément renvoyé, la société BERKEM demande à la Cour, sur le fondement des articles L 613-1 et L 615-1 et suivants du code de propriété intellectuelle ainsi que 15, 16,135 et 480 du Code de procédure civile :

- d' infirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 26 juin 2012 en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en contrefaçon du brevet FR  9400179 au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve de la matérialité des actes de contrefaçon par la société PARTENIA et la condamnée aux entiers dépens de l'instance outre le versement de 15.000 euros à la société PARTENIA en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

- de condamner la société PARTENIA à lui verser la somme de 595.786 euros en réparation de la commercialisation contrefaisante du produit XTRN, pendant la période du 03/12/2008 au 01/10/2010 ;

- de condamner la société PARTENIA à lui verser la somme de 27.081,21 euros par mois de poursuite de commercialisation du XTRN, du 1 er octobre 2010 jusqu'au prononcé de la décision à intervenir ;

- de faire interdiction à la société PARTENIA, sous astreinte de 3.000 euros par

infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, de réaliser tout acte de contrefaçon consistant notamment dans la fabrication, l'exposition, la vente de produit contrefaisant et la manifestation d'une offre ou suggestion de mise en 'uvre des enseignements du Brevet FR 9400179 ;

- d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux de son choix, aux frais avancés de la société PARTENIA sur simple présentation d'un devis pour un montant maximum de 8.000 euros HT par publication ;

- de débouter la société PARTENIA de l'intégralité de ses demandes ;

- de condamner la société PARTENIA à lui verser la somme de 40.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- de condamner la société PARTENIA aux entiers dépens, en ce compris notamment le constat d'huissier et le procès-verbal de saisie-contrefaçon, avec distraction au profit de ses conseils.

Par dernières écritures signifiées par voie électronique le 31 janvier 2014 , à 16h18, annulant et remplaçant celles signifiées le même jour à 11h42, comportant un total de 61 pages avec le bordereau de communication de pièces, et dont la  8 est vierge, auxquelles il est également expressément renvoyé, la société PARTENIA demande à la Cour, en ces termes :

à titre principal,

- de dire et juger la société BERKEM irrecevable à agir à son encontre sur le fondement du brevet FR 94 00179 par suite de la substitution du brevet européen au brevet français ;

- de prononcer la nullité de la saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010 effectuée au sein de ses locaux et de tout acte subséquent, faute de viser un brevet valable en France;

- de lui donner acte (sic) de ce que la société BERKEM ne forme plus aucune prétention à son égard à l'égard du produit ERATERM dans le cadre de son action en contrefaçon,;

en conséquence,

- de rejeter toutes les prétentions de la société BERKEM ;

à titre subsidiaire ,

- de prononcer la nullité de la saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010 effectuée au sein des locaux de la société PARTENIA et de tout acte subséquent, compte tenu des nombreuses irrégularités dont elle est affectée, à tout le moins (dire) que les échantillons présentés comme prélevés par l'huissier n'ayant pas été placés sous scellés ni dans des conditions de nature à garantir la provenance et l'intégrité, ne peuvent être considérés comme des moyens de preuve recevables ;

- de dire et juger que le brevet FR 94 00179 est nul pour défaut de nouveauté et d'activité inventive ;

- de dire et juger que la société BERKEM ne démontre pas la matérialité de la contrefaçon qu'elle invoque pour les revendications 1, 2 et 3 ;

- de dire et juger que la pièce n°12 de la société BERKEM est une preuve faite à soi-même et doit donc être écartée des débats ;

- de dire et juger que la pièce n°19 de la société BERKEM ne présente pas les garanties suffisantes pour établir avec certitude que les films analysés par le FCBA proviennent effectivement de la société PARTENIA et doit donc être écartée des débats;

- de dire et juger que la société BERKEM ne démontre pas que le produit XTRN est un film plastique dont est imprégné dans la masse de l'insecticide chimique ;

- de dire et juger qu'elle démontre elle-même que son produit XTRN ne comporte pas d'insecticide chimique ;

en conséquence à titre plus subsidiaire,

- de rejeter toutes les prétentions de la société BERKEM ;

- de dire et juger que la société BERKEM ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle invoque ;

- de dire et juger que la société BERKEM fait une appréciation arbitraire de son préjudice et que son évaluation ne peut être retenue ;

en conséquence, à titre infiniment subsidiaire,

- de rejeter l'ensemble des demandes de la société BERKEM,

- d' ordonner une mesure d'expertise pour tenir compte de la masse contrefaisante, de la marge brute de la société BERKEM et non de sa marge produit ;

à titre reconventionnel,

- de dire et juger l'action de la société BERKEM abusive en ce qu'elle a introduit(sic) avec légèreté sans analyse antérieure objective une saisie-contrefaçon puis une analyse chimique interne pour mettre en cause la responsabilité de PARTENIA, la déstabiliser et obtenir à moindre frais, la liste de ses clients et leurs conditions tarifaires ;

- de condamner la société BERKEM à lui restituer l'ensemble des éléments saisis et prélevés dans ses locaux, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- de dire et juger que BERKEM a détourné la mesure de saisie-contrefaçon de son objet;

- de condamner la société BERKEM au paiement d'une somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et instrumentalisation de la saisie-contrefaçon afin de recueillir des données stratégiques ;

- de condamner 'si bon semble à la Cour', la société BERKEM à une amende civile,

En tout état de cause ;

- de condamner la société BERKEM aux entiers frais et dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 40.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

- de condamner la société BERKEM aux entiers frais et dépens.

Motif de la décision

Sur la recevabilité des demandes de la société BERKEM tirée du défaut de droit à agir

Considérant que la société PARTENIA conclut à l'irrecevabilité à agir de la société BERKEM sur le fondement du brevet FR 9400179 qu'elle invoque à l'appui de son action en contrefaçon en faisant valoir que le brevet européen EP 0738108 dont la société BERKEM est également titulaire porte sur la même invention au sens de l'article L 614-13 du Code de la Propriété Intellectuelle et que celui-ci s'est donc substitué au brevet français à compter du 21 juillet 2006, date à laquelle la procédure d'opposition a été clôturée ;

Que faisant valoir que les inventeurs ne sont pas le mêmes dans les deux brevets et que ces derniers ne sont pas identiques, la société BERKEM conclut au contraire à la recevabilité de son action fondée sur le brevet FR 9400179 ;

Considérant ceci exposé que selon l'article L.614-13 du Code de la propriété intellectuelle,'Dans la mesure où un brevet français couvre une invention pour laquelle un brevet européen a été délivré au même inventeur ou à son ayant causeavec la même date de dépôt ou de priorité, le brevet français cesse de produire ses effets soit à la date à laquelle le délai prévu pour la formation de l'opposition au brevet européen est expiré sans qu'une opposition ait été formée, soit à la date à laquelle la procédure d'opposition est close, le brevet européen ayant été maintenu.'

Qu'en l'espèce, la société BERKEM fonde son action en contrefaçon sur le brevet FR 94 00179 déposé le 5 janvier 1994 auprès de l'INPI par la société CECIL, délivré le 30 septembre 1998, et dont elle est devenue titulaire ;

Que ce brevet porte sur un 'procédé pour la protection antitermites des constructions', dont la mise en oeuvre intervient lors de la construction de locaux ;

Qu'il est indiqué dans la description que l'invention consiste notamment à étendre une série de lès d'un film en matière plastique imprégnée d'un produit insecticide et que ces lès se chevauchent, en débordant même largement au niveau du sol ; que le film en matière plastique qui forme les lès peut être obtenu par extrusion de polymères, notamment le polyéthylène ou le polychlorure de vinyle, l'épaisseur étant comprise entre 50 µ et 300 µ ; que l'insecticide est intégré à la matière plastique lors de la fabrication du compound, le taux étant fonction de l'efficacité de la matière active utilisée ; que la fabrication du film se fait à partir de ce compound, par extrusion-soufflage à chaud ou par extrusion, l'une et l'autre extrusion étant avantageusement suivies d'un calandrage à chaud ; que les insecticides susceptibles d'être utilisés sont variables, et que l'on peut notamment avoir recours soit à des insecticides de la famille chimique des pyrethrinoïdes du type de ceux décrits dans le document ROUSSEL-UCLAF soit à des insecticides de la famille chimique des carbamates, comme par exemple le Benfuracarbe ;

Qu'il est ajouté qu'il est évident que des brèches doivent être nécessairement pratiquées dans le film formé par les lès, notamment en vue du passage des canalisations d'alimentations (eau, gaz, électricité) et des canalisations d'évacuation, que pour reconstituer le caractère continu de la barrière de protection formée par le film plastique, il y a lieu de traiter ces brèches lors de leur rebouchage en incorporant au substrat qui constitue le remblai de recouvrement, des granulés de matière plastique insecticide, avantageusement à raison de 1 volume de granulés pour 9 volumes de substrat, et que les brèches doivent être comblées avec ce mélange sur 10 cm au moins ; que les granulés utilisés ont préférablement des dimensions de l'ordre de 2,5 mm de diamètre sur une longueur de 4 mm et que leur composition chimique est similaire à celle du film qui constitue les lès ;

Que ce brevet FR 94 00179, ayant comme inventeurs Messieurs MARTINET Pascal, MARCOTTE Guy et HOFMANN Paul, comporte trois revendications qui sont ainsi rédigées:

1. Procédé pour la protection antitermites des constructions, caractérisé en ce qu'il consiste à étendre, préalablement à l'érection de l'édifice, sur la totalité de la surface constructible découverte par les travaux de terrassement, un film de matière plastique qui est imprégné dans la masse d'un composé insecticide.

2. Procédé suivant la revendication 1, caractérisé en ce que le film est constitué par une série de lès chevauchants qui débordent largement au niveau du sol.

3. Procédé suivant l'une ou l'autre des revendications 1 et 2, caractérisé en ce que les brèches nécessaires au passage des canalisations d'alimentation ou d'évacuation sont comblées avec un substrat renfermant des granulés de substance insecticide .

Considérant que ce brevet a servi de base et de priorité à l'invention revendiquée dans le cadre de la procédure internationale et européenne ;

Que le 28 décembre 1994, la société CECIL, revendiquant la priorité du 5 janvier 1994 du brevet FR 94 00179, a en effet déposé une demande PCT ayant pour titre 'Procédé et matériaux pour la protection anti-termites des constructions' qui été publiée le 13 juillet 1995 sous le numéro WO 95/18532 en visant pour le brevet européen plusieurs pays et notamment la France ;

Que le 20 août 1998, l'Office européen des brevets a informé la société CECIL de sa décision de délivrer le brevet européen sous le numéro EP 0 738 108, notamment pour la France. Ce brevet européen a été publié le 30 septembre 1998 ;

Qu'à la suite d'une opposition formée par un tiers, le brevet a été maintenu le 28 juillet 2006 sous une forme modifiée ;

Considérant que les revendications du brevet EP 0 738 108 B2 dont les inventeurs désignés sont Messieurs MARTINET Pascal, MARCOTTE Guy et LIEUX Olivier, sont ainsi rédigées :

1. Procédé pour la protection anti-termite des constructions, caractérisé en ce qu'il consiste à étendre, préalablement à l'érection de l'édifice, sur la totalité de la surface constructible découverte par les travaux de terrassement, y compris dans les tranchées des fondations, un film de matière plastique qui est imprégné dans la masse d'un composé insecticide, l'ensemble étant capable de diffuser lentement l'insecticide à une concentration de 0,5% à 2% d'insecticide.

2. Procédé pour la protection anti-termites des constructions, caractérisé en ce qu'il consiste à étendre, préalablement à l'érection de l'édifice, sur la totalité de la surface constructible découverte par les travaux de terrassement, y compris dans les tranchées des fondations, un film de matière plastique qui est imprégné dans la masse d'un composé insecticide, à une concentration de 1% d'insecticide, l'ensemble étant capable de diffuser lentement l'insecticide.

3. Procédé suivant la revendication 1 ou 2 caractérisé en ce que le film est constitué par une série de lès chevauchants qui débordent largement au niveau du sol.

4. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 3 caractérisé en ce que la matière plastique est choisie parmi les polyoléfines comme le polyéthylène ou le polypropylène, le chlorure de polyvinyle et (co)polymères analogues.

5. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 4 caractérisé en ce que l'insecticide est un termicide choisi parmi les pyrethrinoïdes comme la perméthrine, et les carbamates comme le benfuracarbe, les organohalogénès ou les organophosphorés et analogues.

6. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 5 caractérisé en ce que la matière plastique est à base de polyéthylène et l'insecticide est la perméthrine.

7. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 6 caractérisé en ce que l'on utilise un film de polyéthylène chargé d'environ 0,5 à 2%, de préférence environ 1% de perméthrine.

8. Procédé selon l'une quelconque des revendications 1 à 7 caractérisé en ce que, de plus, on remblaie le site de la construction par un mélange de substrat de remblai normal ou de granulés ou matières de géométries analogues de matière plastique imprégnée d'insecticide, au niveau des zones où le film est, soit volontairement perforé, soit risque d'être perforé ou interrompu accidentellement.

9. Procédé selon la revendication 8 caractérisé en ce que lesdits granulés ou matières ont la même composition que le film lui-même, et éventuellement proviennent de fragments, déchets ou résidus ou rebuts de sa fabrication.

10. Application des procédés selon l'une quelconque des revendications 1 à 9 aux constructions nouvelles et/ou aux traitements de renouvellement curatifs et/ou préventifs à la protection de zones par barrières verticales profondes.

Qu'il résulte de ces éléments, d'une part que les inventeurs du brevet français ne sont pas les mêmes que les inventeurs du brevet européen, même si la société CECIL était titulaire des deux titres, et d'autre part que le brevet français comporte trois revendications alors que le brevet européen, qui prévoit des dosages, en comporte dix et a donc une portée plus étroite ;

Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que la portée du brevet européen n'était donc pas la même que celle du brevet français et qu'en conséquence il n'y avait pas substitution de ce brevet européen au brevet français ;

Que la fin de non recevoir doit en conséquence être rejetée et la société BERKEM déclarée recevable à agir en contrefaçon sur le fondement du brevet FR 9400179 dont elle est titulaire ;

Sur la nullité de la saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010

Considérant que pour solliciter, à titre principal, la nullité des opérations de saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010, la société PARTENIA invoque le défaut de titre justifiant l'accès à la mesure de saisie-contrefaçon, le défaut de motivation pertinente de la requête pour le produit XTRN, le défaut de respect des droits de la défense, ainsi que le défaut de saisie réelle dans des conditions autorisées et dans des conditions garantissant l'intégralité, des échantillons saisis ;

Que toutefois, le premier argument ne peut prospérer compte tenu des motifs ci-dessus exposés et le défaut de motivation pertinente de la requête, à le supposé fondé, relevait de la procédure spéciale de rétractation instaurée par le code de procédure civile ;

Que par ailleurs le saisi, dûment représenté, a disposé d'un délai de 5 minutes entre la signification de l'ordonnance autorisant la saisie-contrefaçon et le début des opérations, soit d'un délai raisonnable et suffisant pour exercer ses droits, ce qu'il n'a pas manqué de faire au demeurant ;

Qu'enfin il n'est pas démontré en quoi la saisie d'un seul échantillon au lieu des deux autorisés, ce qui au demeurant est contredit par les termes du procès-verbal ,constituerait 'un manquement grave de l'huissier à l'ordonnance' dès lors que cette opération est plutôt favorable au saisi, étant ajouté que le surplus des griefs concernent la preuve de la contrefaçon alléguée;

Considérant que dès lors que la société PARTENIA doit être déboutée de sa demande de nullité de la saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010 et le jugement confirmé de ce chef ;

Sur la demande de nullité du brevet FR 9400179

Considérant qu'à titre subsidiaire la société PARTENIA poursuit la nullité du brevet FR 9400179 pour insuffisance de description, défaut d'activité inventive et défaut de nouveauté ;

Qu'elle laisse toutefois sans réponse l'argument de la société BERKEM selon lequel le moyen de nullité se heurte au principe de l'autorité de la chose jugée dès lors que la Cour d'Appel de RENNES, confirmant un jugement du Tribunal de Grande Instance de RENNES du 15 décembre 2003 a, par arrêt en date du 1er mars 2005, dans un litige opposant la société CECIL à la société PARTENIA, rejeté la demande de nullité du brevet FR 9400179 déposé à l'INPI le 5 janvier 1994 par la société CECIL pour défaut d'activité inventive et défaut de nouveauté ;

Que la demande formée par le présent litige par la société PARTENIA se heurte donc à la fois au principe de l'autorité de la chose jugée et au principe de concentration des moyens et doit en conséquence être, non pas rejetée, mais déclarée irrecevable ;

Sur la contrefaçon

Considérant qu'aux termes de l'article L.613-3 du Code de la Propriété Intellectuelle, 'Sont interdites, à défaut de consentement du propriétaire du brevet :

a) La fabrication, l'offre, la mise dans le commerce, l'utilisation ou bien l'importation ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet ' ;

Que se fondant sur ces dispositions, la société BERKEM reproche en l'espèce à la société PARTENIA, aux termes de ses dernières écritures, la commercialisation d'un produit XTRN à compter du 3 décembre 2008, ce qui rend donc hors de propos les explications de la société intimée sur un autre produit dénommé ERATERM ;

Que selon l'appelante, le film XTRN commercialisé par la société PARTENIA est un film à poser entre le sol et l'édifice qui assurerait une triple fonction, soit une fonction anti-termites, une fonction d'étanchéité, et une fonction anti-radon, et ce film est composé de deux couches thermocollées, la face bleue (qui doit être posée face au sol) qui assurerait la fonction anti-termites, et la face noire qui assurerait la fonction anti-radon et la fonction d'étanchéité ;

Qu'elle ajoute que l'association de la fonction anti-radon avec la fonction anti-termite sur une seule et même barrière de protection est 'très surprenante' pour des raisons climatiques et que cette association au sein d'un même produit ne présente pas d'intérêt, 'sauf à ce que la fonction anti-radon ne vise justement à masquer la contrefaçon du procédé anti-termite' ;

Qu'elle poursuit en indiquant que les tests techniques réalisés par elle et par le laboratoire FCBA, lequel aurait procédé aux analyses chimiques sur les échantillons prélevés lors de la saisie-contrefaçon, démontrent que le XTRN 'est en réalité une contrefaçon du Brevet FR 9400179', sur lequel a été collé un film d'étanchéité anti-radon ;

Qu'elle verse ainsi aux débats, à l'appui de ses prétentions, outre le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010, un compte rendu d'analyse du (pièce 12) et un rapport d'essais  402/10/1163E du 24 novembre 2010 (pièce 19) ;

Qu'il y a lieu d'indiquer au préalable que la portée de ces pièces est soumise à l'appréciation de la cour et qu'il n'y a donc pas lieu de les écarter des débats comme le sollicite la société PARTENIA qui en conteste la valeur probante ;

Considérant qu'il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010 que l'huissier, après avoir contacté téléphoniquement Monsieur OMET, dirigeant de la société PARTENIA, s'est rendu sur les lieux de stockage et a relevé la présence de produits ERATERM et XTRN ;

Qu'il indique avoir prélevé un échantillon de ces rouleaux sans contrepartie financière réclamée avec un 2éme prélèvement de produit XTRN sur un autre lieu de stockage à la demande de Monsieur OMET, sans toutefois mentionner dans le procès-verbal avoir placé sous un ou sous plusieurs scellés lesdits échantillons ;

Qu'il résulte du procès-verbal de dépôt du 22 octobre 2010 qu'un scellé  1 constitué d'un CD contenant les documents comptables, un scellé  2 contenant un prélèvement de film plastique ERATERM ainsi que 'deux enveloppes XTERN'ont été remises au greffe du Tribunal de Grande Instance de PARIS ;

Que le laboratoire FCBA a procédé à la demande de la société BERKEM, dans son rapport établi le 24 novembre 2010 (pièce  19) à la description de la substance soumise à essais, qu'il a réceptionnée le 15 octobre 2010, sans en tirer de conclusions, et surtout en indiquant qu'aux dires du demandeur, le prélèvement et la date du prélèvement ne sont pas précisés ;

Que l'appelante présente ce document comme étant le rapport d'analyse des échantillons de films saisis par l'huissier lors des opérations de saisie-contrefaçon et adressés par lui au laboratoire selon courrier du 11 octobre 2010 alors qu'il a été dit que l'huissier n'a pas mentionné dans son procès-verbal avoir adressé les échantillons prélevés pour analyse au FCBA ni avoir placé sous scellés le produit XTERN ;

Que le compte-rendu d'analyse du film XTRN (pièce  12) émane du propre Laboratoire Contrôle Qualité de la société BERKEM sans autre indication ; qu'il n'est ni daté ni signé mais comporte le nom d'une technicienne CQ Violaine MIGNON, et indique sur une page, les caractéristiques du film XTRN et les résultats de l'analyse selon lesquels' Le film contient en moyenne 0,5% de perméthrine, ce qui est ramené à la couche active correspond à 1% de perméthrine dans le film, dose équivalente au termifilm' ;

Qu'il y a lieu de relevé cependant que la société BERKEM a procédé elle-même à cette analyse de produits, et dans des conditions qui ne garantissent pas l'objectivité et l'indépendance des résultats observés ;

Que par ailleurs rien ne permet d'établir avec certitude que les films analysés par le FCBA proviennent de la société PARTENIA et même qu'ils ont un lien avec ceux objets de la saisie-contrefaçon du 1er octobre 2010 ;

Qu'en effet la provenance des échantillons soumis à l'analyse unilatérale du FCBA n'étant pas précisée, les analyses effectuées ne présentent aucune garantie quant à l'origine des produits analysés ;

Considérant dans ces conditions que c'est à bon droit que le Tribunal a dit que la société BERKEM ne rapporte donc pas la preuve, par les éléments susvisés, de la matérialité des faits de contrefaçon allégués des revendications 1 à 3 du brevet FR 9400179 qu'elle oppose ;

Qu'enfin elle n'établit pas plus 'indépendamment de la saisie-contrefaçon' que le produit XTRN de la société PARTENIA est un film plastique qui est imprégné dans la masse d'un composé insecticide c'est à dire, au vu de la description du brevet (soit des insecticides de la famille chimique des pyrethrinoïdes du type de ceux décrits dans le document ROUSSEL-UCLAF, soit des insecticides de la famille chimique des carbamates, comme par exemple le Benfuracarbe ), d'une substance active chimique ayant la propriété de tuer les termites, dès lors que les analyses effectuées par la société PARTENIA, certes non contradictoires mais qui ne sont contredites par aucun autre élément probant contraire, établissent que le produit en cause ne contient pas de composé insecticide chimique ;

Considérant dans ces conditions que la société BERKEM doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes, et condamnée à restituer à la société PARTENIA l'ensemble des éléments saisis et prélevés dans ses locaux dans les conditions fixées au dispositif de la présente décision ;

Qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, le surplus des demandes devenant sans objet ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

Considérant que l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol ;

Que faute pour l'intimée de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou d'une légèreté blâmable de la part de la société BERKEM, qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits, ses demandes tendant à voir condamner cette dernière au paiement tant d'une amende civile que de dommages-intérêts pour procédure abusive seront rejetées ;

Sur les autres demandes

Considérant que la société BERKEM, partie perdante, supportera la charge des entiers dépens ;

Qu'en outre, il serait inéquitable de laisser à la société PARTENIA la charge de la totalité des frais irrépétibles et il convient de lui allouer la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties le 26 juin 2012.

Y ajoutant,

Dit n'y a voir lieu à rejeter des débats les pièces  12 à 19 de la société BERKEM

DEVELOPPEMENT.

Déclare irrecevable la demande subsidiaire en nullité du brevet FR 9400179.

Condamne la société BERKEM DEVELOPPEMENT à restituer à la société PARTENIA l'ensemble des éléments saisis et prélevés dans ses locaux, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification de la présente décision.

Condamne la société BERKEM DEVELOPPEMENT à payer à la société PARTENIA la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne la société BERKEM DEVELOPPEMENT aux entiers dépens.