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Décisions

CA Chambéry, 2e ch., 12 octobre 2017, n° 16/01836

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

SAMSE (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Thomassin

Conseillers :

M. Madinier, M. Balay

JEX Bonneville, du 28 juill. 2016, n° 16…

28 juillet 2016

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 21 juillet 2009, aujourd'hui définitif, le tribunal d'instance de Bonneville a condamné les époux Stéphane B. et Alexandra M. à payer la société SAMSE la somme de 7 534,01 euros outre intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2008 et à supporter les dépens comprenant la somme de 4,34 euros au titre de la mise en demeure.

Dans le cadre de l'exécution de cette condamnation, maître Franck R., huissier, a procédé, suivant procès-verbal du 26 janvier 2016 et en présence de deux témoins, d'un serrurier et d'un déménageur, à l'immobilisation avec enlèvement de quatre véhicules :

- un véhicule de marque Renegade 800 R avec treuil de couleur jaune,

- une moto Yamaha Enduro immatriculée AM-464WM,

- une moto Kawasaki Z 1000 immatriculée BE-770-ZW,

- une moto Gilera 50 immatriculée AE-749.

Par acte du 27 janvier 2016, l'huissier a délivré aux époux Stéphane B. et Alexandra M. un commandement après enlèvement d'un véhicule d'avoir à payer à la société SAMSE la somme de 6 727,08 euros en principal, intérêts et frais.

Par acte d'huissier du 26 février 2016, les époux Stéphane B. et Alexandra M. ont fait assigner la société SAMSE devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bonneville poursuivant l'annulation du procès-verbal d'immobilisation avec enlèvement et du commandement après enlèvement, de l'ensemble des procédures d'exécution et l'allocation des sommes de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts et de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 28 juillet 2016, le juge de l'exécution a :

- rejeté la demande d'annulation de la mesure de saisie par immobilisation avec enlèvement des véhicules,

- rejeté la demande de dommages et intérêts des époux B.,

- rejeté la demande d'amende civile de la société SAMSE,

- condamné, in solidum, les époux B. à payer à la société SAMSE la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Les époux Stéphane B. et Alexandra M. ont interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 12 août 2016.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 avril 2017, les époux B. demandent à la cour :

- de dire que leur dette à l'égard de la société SAMSE est éteinte,

- d'annuler le procès-verbal d'immobilisation,

- de dire que les motocyclettes Yamaha Enduro immatriculée AM-464WM et Kawasaki Z 1000 immatriculée BE-770-ZW étaient insaisissables,

- d'ordonner la restitution de tous les biens saisis,

- de condamner la société SAMSE à leur payer les sommes de :

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel,

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- 3 000 euros pour procédure abusive.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 janvier 2017, la société SAMSE demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner les époux Stéphane B. et Alexandra M. à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et 1 000 euros d'amende civile, outre les dépens.

La clôture de l'instruction est intervenue le 10 avril 2016.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la régularité de la procédure de saisie des véhicules pratiquée les 26 et 27 janvier 2015

' sur la dette des époux Stéphane B. et Alexandra M.

En application des dispositions de l'article 1353 du Code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait ayant éteint son obligation.

Les époux B. arguent de versements de 4 716,25 euros et de 688,70 euros ainsi que la saisie vente de leur mobilier qui auraient dû solder leur dette sans produire de justificatif particulier alors que la preuve de ces règlements leur incombe, mais la société SAMSE produit un historique du compte des époux B. au 27 avril 2015 faisant état de paiement de divers acomptes pour un montant total de 4 716,25 euros correspondant à la somme invoquée par les débiteurs sauf à relever que la somme de 688,70 euros ne constitue pas un versement supplémentaire mais la totalisation des onze derniers versements portés à l'historique du compte, de sortes que cette dernière somme est incluse dans celle de 4 716,25 euros.

Le commandement après enlèvement d'un véhicule signifié le 27 janvier 2016 fait expressément état d'acomptes à déduire pour un total de 4716,25 euros.

S'agissant de la saisie des meubles pratiquée le 29 novembre 2012, la société SAMSE précise qu'aucun des meubles inventoriés n'a finalement été enlevés, ce que ne peuvent ignorer les époux B. puisque ces meubles sont toujours à leur domicile, à l'exception d'un Quad immatriculé AQ 320 QC qui ne l'a été que le 26 janvier 2016 et qui n'a pas encore été vendu.

La société SAMSE produit également le détail du calcul des intérêts pour un montant de 1 294,50 euros arrêtés au 27 janvier 2016, le détail des frais d'exécution pour un montant de 2 522,07 euros y compris les frais de la saisie des véhicules, justifiant ainsi du total de sa créance au jour de la mesure d'exécution pratiquée le 26 janvier 2016 d'un montant total de 6 727,08 euros.

' sur la régularité du procès-verbal d'immobilisation du 26 janvier 2016

L'article R 223-8 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que le procès-verbal d'immobilisation contient notamment, à peine de nullité, la date et l'heure de l'immobilisation du véhicule et l'indication du lieu où il a été immobilisé et, le cas échéant, de celui où il a été transporté pour être mis en dépôt.

Les époux Stéphane B. et Alexandra M. déplorent à juste titre le défaut d'indication de l'heure à laquelle a été dressé le procès-verbal d'immobilisation avec enlèvement, mais il s'agit là d'un vice de forme affectant un acte de procédure dont la nullité ne peut être prononcée, en application des dispositions de l'article 114 du code de procédure civile, que si celui qui l'invoque prouve le grief que lui cause cette irrégularité.

A titre de grief, ils invoquent l'impossibilité de vérifier que la saisie s'est déroulée entre 6 heures et 21 heures, conformément aux dispositions de l'article L 141-1 du code des procédures civiles d'exécution, mais le procès-verbal d'immobilisation fait état de deux témoins en présence desquels il a été dressé, or la société SAMSE produit une attestation de l'un de ces témoins ainsi que deux autres établies par le serrurier et le transporteur ayant secondé l'huissier pour l'exécution de l'enlèvement qui, tous les trois, relatent que les opérations de saisie ont débuté à 10 heures 30.

Il apparaît, en outre, que les véhicules enlevés ont bien été mis en dépôt à l'adresse indiquée sur le procès-verbal d'immobilisation, [...] à 74930 à Reignier dans les locaux de la S. Type-Top ; les époux B. s'emparent d'une ambiguïté de rédaction dans un courrier de l'huissier à leur conseil, mais monsieur M., gérant de la S. Type-Top qui a procédé au transport des véhicules enlevés atteste, qu'ils ont tous été placés en dépôt dans son hangar.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a retenu la parfaite validité du procès-verbal d'immobilisation avec enlèvement.

' sur la lettre d'information du débiteur

Il résulte des dispositions de l'article R 223-9 du code des procédures civiles d'exécution que si le véhicule a été immobilisé en l'absence du débiteur, l'huissier de justice en informe ce dernier le jour même de l'immobilisation, par lettre simple adressée ou déposée au lieu où il demeure.

Les époux B. contestent avoir reçu cette lettre, mais la société SAMSE produit le double de la lettre simple laissée par maître Franck R. dans la boîte aux lettres des époux B., ainsi qu'un courrier de l'huissier du 20 mai 2016 confirmant avoir déposé l'avis prévu par les dispositions précitées et relatant que monsieur Stéphane B. est venu à son étude le 26 janvier 2016 au soir, jour même du procès-verbal d'immobilisation avec enlèvement, faire un esclandre en présence d'un clerc de l'étude, ce qui induit qu'il avait nécessairement pris connaissance de l'avis laissé dans sa boîte aux lettres ou, en tous les cas, que la prétendue absence de la lettre ne lui a causé aucun grief.

Les époux Stéphane B. et Alexandra M. seront, en conséquence, déboutés de leur demande d'annulation de la procédure de saisie des véhicules pratiquée les 26 et 27 janvier 2016.

Sur la saisissabilité des véhicules

Les époux Stéphane B. et Alexandra M. demandent, pour la première fois en cause d'appel, la restitution de la moto Yamaha Enduro immatriculée AM-464WM qui appartiendrait à madame R. et celle de la moto Kawasaki Z 1000 immatriculée BE-770-ZW que monsieur Stéphane B. utiliserait quotidiennement pour se rendre à son travail.

Ils justifient de l'appartenance de la moto Yamaha Enduro immatriculée AM-464WM à madame R. par une attestation de monsieur Thomas R. des plus ambiguë puisque ce dernier relate dans un premier temps avoir vendu la moto litigieuse à madame Richin D. pour exposer par la suite qu'après son déménagement il a entreposé sa moto dans le garage de son ami, Stéphane B. chez qui elle a été saisie, de sortes que ce document, seul élément produit au soutien de cette demande de restitution, n'établit pas qui est propriétaire de la moto litigieuse.

Il convient, en outre, de relever que ce serait au tiers propriétaire de la moto Yamaha Enduro immatriculée AM-464WM d'en demander la restitution, les époux B. n'ayant pas qualité pour le faire.

Cette demande sera en conséquence rejetée.

Monsieur Stéphane B. ne produit aucun justificatif de ce qu'il utiliserait quotidiennement la moto Kawasaki Z 1000 immatriculée BE-770-ZW pour se rendre à son travail, alors qu'il forme cette demande pour la première fois en appel près d'une année après son enlèvement.

Il sera, en conséquence, débouté de cette demande.

Sur les demandes de dommages et intérêts

L'allocation de dommages et intérêts suppose la preuve par les requérants d'une faute et d'un préjudice causé par la dite faute.

' sur le préjudice matériel

Les époux B. sollicitent l'allocation de la somme de 1 000 euros en raison des dégradations causées par l'ouverture forcée du portail et du portillon lors de la saisie, mais maître Franck R., huissier ayant procédé aux opérations de saisie explique dans un courrier au conseil des époux B. qu'il a laissé les lieux dans l'état dans lequel il les avait trouvés, sauf à avoir changé le barillet de la serrure forcée par le serrurier, monsieur Stéphane B. ayant récupéré les nouvelles clefs.

Les époux Stéphane B. et Alexandra M. ne justifient au demeurant pas que les dégradations dont ils se plaignent ont été perpétrées lors des opérations de saisie ; le serrurier dont ils produisent une 'attestation' (pièce 9) évoquant même des dégradations consécutives à un vandalisme.

Ils seront, en conséquence, déboutés de cette demande.

Les époux B. n'invoquent plus de dégradations des véhicules saisis qui ne sont, au surplus, pas démontrées par les pièces qu'ils produisent.

' sur le préjudice moral

Il ne peut être retenu de préjudice moral causé par le choc causé par les opérations de saisie alors qu'il est établi que la procédure d'exécution était légitime dans la mesure où les époux B. ont une dette ancienne, résultant d'une décision de justice définitive et que les opérations de saisie se sont déroulées normalement, à une heure légale, en présence des témoins et professionnels nécessaires.

En l'absence de faute de la société SAMSE, les époux B. seront donc déboutés de cette demande.

' sur les dommages et intérêts pour procédure abusive

La procédure d'exécution étant légitimée par l'existence d'une créance impayée depuis plus de six ans et la procédure de contestation ayant été initiée par les époux B., ces derniers seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts de 3 000 euros pour procédure abusive.

Sur les demandes annexes

Il n'est pas justifié que les époux B. aient commis un abus de droit en soumettant à un juge leur contestation de la mesure d'exécution pratiquée à leur encontre et ce même si la créance est ancienne.

Le jugement déféré sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'amende civile.

Les époux Stéphane B. et Alexandra M., succombant, seront condamnés à payer à la société SAMSE la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils supporteront les dépens exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Déboute, en conséquence, les époux Stéphane B. et Alexandra M. de l'ensemble de leurs demandes.

Y ajoutant,

Déboute les époux Stéphane B. et Alexandra M. de leurs demandes de restitution des motocyclettes Yamaha Enduro immatriculée AM-464WM et Kawasaki Z 1000 immatriculée BE-770-ZW.

Déboute les époux Stéphane B. et Alexandra M. de leurs demandes de dommages et intérêts de 1 000 et 3 000 euros.

Condamne, in solidum, les époux Stéphane B. et Alexandra M. à payer à la société SAMSE la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne, in solidum, les époux Stéphane B. et Alexandra M. à supporter les dépens exposés en appel.