Livv
Décisions

Cass. com., 21 juin 2016, n° 14-26.370

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Rapporteur :

M. Contamine

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

SCP Jean-Philippe Caston, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Paris, du 11 sept. 2014

11 septembre 2014

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... était associé avec son épouse, Claude Y..., au sein de la société à responsabilité limitée Institut de développement personnel dans l'entreprise (la société IDPE) ; qu'après le décès de Claude Y..., le tribunal de commerce, saisi par ses héritiers (les consorts Y...), a prononcé la dissolution de la société IDPE ; que M. Z..., désigné liquidateur, a procédé ès qualités aux opérations de liquidation comprenant la cession d'un immeuble ; qu'il a assigné M. X... et les consorts Y... pour demander l'approbation des comptes de la liquidation de la société IDPE, la clôture de sa liquidation et le quitus pour l'exercice de son mandat de liquidateur amiable ; que M. X... a formé contre M. Z..., pris en son nom personnel, une action personnelle et une action sociale en responsabilité, en paiement de dommages-intérêts ; que les deux procédures ont été jointes ; que la société Z...-Perdereau-Manière et la société FHB se sont succédé comme liquidateur de la société IDPE ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande formée à l'encontre de M. Z... à titre personnel alors, selon le moyen :

1°/ que la responsabilité du liquidateur n'est pas subordonnée à la démonstration d'une faute de ce mandataire séparable de ses fonctions ; qu'en rejetant l'action exercée à titre personnel par M. X... à l'encontre de M. Z..., en sa qualité de liquidateur amiable de la société IDPE, motif pris de la nécessité de l'établissement par M. X... de la faute personnelle du liquidateur à son égard, détachable de ses fonctions, et de l'absence de caractérisation d'une telle faute, la cour d'appel a violé l'article L. 237-12 du code de commerce, ensemble l'article 1382 du code civil ;

2°/ qu'à l'égard d'un associé, le liquidateur répond, en sa qualité de mandataire, des fautes qui cause un préjudice à cet associé ; qui plus est, en considérant que le préjudice individuel distinct du préjudice social n'était pas établi, sans rechercher si le préjudice personnel de M. X... ne représentait pas une fraction du préjudice subi par la société IDPE, égale à la fraction du capital social de cette société détenu par lui, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 237-12 du code de commerce et 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que M. X... n'établissait aucun préjudice personnel distinct du préjudice collectif subi par la société et qu'il se bornait à réclamer une quote-part du préjudice qu'il invoquait pour celle-ci, à proportion de ce qu'il estimait être sa participation dans la structure, ce dont elle a déduit qu'il ne justifiait pas que le préjudice allégué par lui n'était pas le corollaire du préjudice social qu'il invoquait pour la société IDPE, la cour d'appel a, abstraction faite des motifs, erronés mais surabondants, critiqués par la première branche, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :

Vu l'article L. 223-22 du code de commerce ;

Attendu que pour dire recevable l'action en responsabilité ut singuli engagée par M. X... pour le compte de la société IDPE, l'arrêt retient qu'à l'époque où il l'a exercée contre M. Z..., celui-ci avait la qualité de liquidateur amiable et en tant que tel représentait la société ; qu'il énonce, d'abord, que l'action ut singuli vise à protéger le patrimoine social contre l'inaction du dirigeant notamment au regard de sa propre turpitude et que le législateur a entendu rendre cette action effective en réputant non écrites les clauses contraires et en prévoyant que le quitus donné par une assemblée ne peut faire obstacle à une action ultérieure en responsabilité ; qu'il ajoute que les dispositions de la loi sur les sociétés visent à s'appliquer aux dirigeants au sens large, notion qui recouvre tous les mandataires sociaux, et donc le liquidateur, lequel se substitue aux organes de direction, puisqu'ils sont investis des mêmes pouvoirs même si leur mission a un but déterminé ; qu'il retient, enfin, que le contre-pouvoir constitué par l'action ut singuli repose justement sur l'abus des pouvoirs remis au liquidateur comme à tous les dirigeants ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions de l'article L. 223-22 du code de commerce n'autorisent les associés à exercer l'action sociale en responsabilité qu'à l'encontre des gérants, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare recevable l'action sociale en responsabilité engagée par M. X... à l'encontre de M. Z... et rejette la demande de dommages-intérêts formée pour le compte de la société Institut de développement personnel dans l'entreprise, l'arrêt rendu le 11 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.