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Décisions

Cass. soc., 8 juin 1999, n° 96-43.933

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gélineau-Larrivet

Rapporteur :

M. Chagny

Avocat général :

M. de Caigny

Avocats :

SCP Gatineau, Me Capron

Paris, du 5 juin 1996

5 juin 1996

Attendu que la société Princifarm, dont l'objet était la fabrication de médicaments, a été mise en redressement judiciaire le 11 mai 1994 ; que, par lettre recommandée en date du 29 août 1994, l'Agence du médicament a mis en demeure ladite société soit de mettre en conformité avec les exigences des bonnes pratiques de fabrication la zone de production des médicaments stériles, soit de cesser l'utilisation de cette zone ; que le tribunal de commerce a arrêté le plan de cession de la société Princifarm aux sociétés Nouvelle Princifarm et Galien par un jugement rendu le 14 septembre 1994 ; que, faisant valoir que la mise en demeure de l'Agence du médicament n'avait pas été portée à leur connaissance avant l'adoption du plan de cession, les cessionnaires ont arrêté la fabrication des médicaments et refusé de payer le prix de la cession ; que la résolution du plan de cession a été prononcée le 23 novembre 1994 ; que Mlle X... et vingt autres salariés de l'entreprise ont demandé à la formation de référé du conseil de prud'hommes de fixer au passif de la société Nouvelle Princifarm, elle-même mise en redressement judiciaire, diverses provisions sur des créances de nature salariale relatives aux mois d'octobre et novembre 1994 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Pharminov, qui vient aux droits de la société Nouvelle Princifarm et MM. Y... et Z..., ès qualités, respectivement d'administrateur au redressement judiciaire et de représentant des créanciers de la société Nouvelle Princifarm, reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir fait droit aux demandes des salariés, alors, selon le moyen, d'une part, que le jugement prononçant la résolution du plan de cession annule rétroactivement la cession et produit un effet erga omnes ; qu'en retenant, pour déclarer la résolution du plan de cession inopposable aux salariés, que ceux-ci n'étaient pas parties individuellement à la décision ordonnant la résolution du plan de cession, la cour d'appel a violé les articles 80 et 89 de la loi du 25 janvier 1985, 1384 du Code civil et L. 122-12 du Code du travail ; alors, d'autre part, et en tout état de cause, que les contrats de travail repris par le cessionnaire en vertu du plan de cession sont dans la dépendance du plan qui a prévu leur poursuite par le cessionnaire ; qu'en cas de résolution du plan de cession, la reprise des contrats de travail par le cessionnaire doit suivre le même sort que le plan de cession et doit, par conséquent, être réputée ne jamais être intervenue ; qu'en jugeant malgré la résolution du plan de cession, que le cessionnaire était l'employeur des salariés entre la date du plan de cession et celle de la résolution, la cour d'appel a violé les articles 80 et 89 de la loi du 25 janvier 1985, 1384 du Code civil et L. 122-12 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a fait ressortir que la société Nouvelle Princifarm avait effectivement pris possession des biens et droits compris dans la cession dès l'adoption du plan de cession par le tribunal de commerce et qu'elle avait aussitôt entrepris de poursuivre I'activité du cédant, d'où résultait le transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité avait été poursuivie, peu important que les actes de cession aient été signés ultérieurement ;

Attendu, ensuite, qu'elle a relevé que l'activité de l'entreprise avait été arrêtée et que les biens et droits compris dans la cession avaient fait retour au cédant au jour de la résolution du plan de cession ;

Et attendu, enfin, que dès lors que les modifications de la situation juridique de l'employeur étaient intervenues dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, la cour d'appel a pu, par application de l'article L. 122-12-1 du Code du travail, déduire de ses constatations et énonciations que la société Nouvelle Princifarm était tenue, à l'égard des salariés, des obligations nées entre les dates desdites modifications ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen, premièrement, que la mise en demeure de mettre le site de production en conformité avait été adressée à la société Princifarm le 29 août 1994 et précisait à cette dernière qu'à défaut de mise en conformité dans le délai de quinze jours, la société Princifarm devait cesser toute utilisation du site ; qu'en retenant que cette lettre n'était pas un refus d'agrément et que le site n'était pas réellement fermé, sans rechercher si, à la date de la reprise de la societé Princifarm par la société Nouvelle Princifarm, intervenue le 14 septembre 1994, cette dernière n'avait pas été dans l'obligation de fermer le site en raison du défaut de mise en conformité dans le délai imparti par la mise en demeure et du retrait consécutif de l'autorisation de fabriquer les médicaments, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 351-25 et R. 351-50 du Code du travail ; alors. deuxièmement, que le recours au chômage partiel est autorisé en cas de suspension ou de réduction temporaire d'activité imputable notamment à toute circonstance de caractère exceptionnel ; qu'en l'espèce, il appartenait uniquement à la cour d'appel de rechercher si la société Nouvelle Princifarm avait eu à faire face à une réduction ou suspension temporaire d'activité ouvrant droit au bénéfice du chômage partiel ; qu'elle n'avait pas à s'interroger sur la question de savoir si le refus du cessionnaire d'exécuter les engagements pris dans le plan de cession était ou non abusif, ce refus n'étant nullement à l'origine du recours au chômage partiel, qu'en retenant la mauvaise foi de la société Nouvelle Princifarm dans l'exécution de la décision, arrêtant le plan de cession, quand il lui appartenait seulement de rechercher si le cessionnaire ne s'était pas trouvé, au moment de la reprise, dans une situation ouvrant droit au chômage partiel, la cour d'appel a retenu un motif inopérant et ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 351-25 et R. 351-50 du Code du travail et 1383 du Code civil ; alors, troisièmement, qu'en tout état de cause, la cour d'appel ne pouvait retenir l'exécution de mauvaise foi du plan de cession par la société Nouvelle Princifarm sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions d'appel de cette dernière, si le défaut de conformité aux normes de fabrication ne lui avait pas été caché au moment de la formulation de son offre de reprise ; qu'en retenant l'exécution de mauvaise foi du plan de cession par la société Nouvelle Princifarm sans rechercher si l'inexécution par cette dernière de ses engagements n'était pas justifiée par la rétention d'une information déterminante de son consentement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1109 du Code civil ; et alors, quatrièmement, que l'absence de consultation des représentants du personnel par l'employeur préalablement à la demande de chômage partiel ne saurait remettre en cause le recours au chômage partiel, ni justifier la condamnation de l'employeur au paiement de la partie des salaires non couverte par les indemnités de chômage partiel ; que le fait, pour l'employeur, d'omettre de consulter une institution représentative du personnel ne peut constituer qu'un délit d'entrave au fonctionnement régulier de l'institution en cause ;

qu'en se fondant, pour décider que la société Nouvelle Princifarm était tenue au paiement de la part non payée des salaires d'octobre et novembre 1994 sur le fait que les salariés n'avaient pas été consultés sur le projet de chômage partiel, la cour d'appel a violé les articles L. 620-2 et L. 421-5 du Code du travail ;

Mais attendu que, pour déterminer si l'employeur doit mettre en oeuvre la procédure de chômage partiel, il convient de se placer à la date à laquelle l'employeur a décidé de réduire l'horaire ; que, procédant à cette recherche, la cour d'appel a constaté, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les troisième et quatrième branches du moyen, qu'en dépit de la lettre de l'Agence du médicament, le site de fabrication des médicaments n'avait pas été réellement fermé et qu'il en résultait que le cessionnaire avait exécuté avec mauvaise foi à l'égard des salariés les engagements du plan de cession ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.