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Décisions

Cass. 3e civ., 1 octobre 2020, n° 19-16.561

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Buk Lament-Robillot

Saint-Denis de la Réunion, du 15 février…

15 février 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 15 février 2019), la société civile immobilière Nefertari (la SCI Nefertari) a consenti à la société immobilière du département de la Réunion (la SIDR) une promesse synallagmatique de vente, sous conditions suspensives, d'une parcelle de terrain sur laquelle était édifié un immeuble non achevé.

2. Un avenant a prorogé la date de réalisation des conditions suspensives et de signature de l'acte authentique de vente au 30 avril 2010.

3. Après deux mises en demeure de réaliser la vente, les 22 novembre 2013 et 12 mai 2015, demeurées infructueuses, la SCI Nefertari a assigné la SIDR en résolution de la vente qu'elle considérait parfaite en raison de la réalisation des conditions suspensives et en paiement de dommages-intérêts.

4. La SIDR lui a opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La SCI Nefertari fait grief à l'arrêt de déclarer l'action en résolution de la vente prescrite et de rejeter ses demandes, alors « que la prescription d'une action en responsabilité contractuelle ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en fixant pour point de départ du délai de prescription le délai fixé par le compromis pour la réitération de la vente par acte authentique, sans rechercher si à cette date, la SCI Nerfertari savait que la SIDR abandonnait définitivement le projet et qu'en conséquence, son dommage était réalisé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2224 du code civil :

6. Aux termes de ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

7. En matière de promesse de vente, sauf stipulation contraire, l'expiration du délai fixé pour la réitération de la vente par acte authentique ouvre le droit, pour chacune des parties, soit d'agir en exécution forcée de la vente, soit d'en demander la résolution et l'indemnisation de son préjudice.

8. Le fait justifiant l'exercice de cette action ne peut consister que dans la connaissance, par la partie titulaire de ce droit, du refus de son cocontractant d'exécuter son obligation principale de signer l'acte authentique de vente.

9. Pour déclarer l'action prescrite, l'arrêt retient que, dès le 1er mai 2010, lendemain de la date fixée pour la signature de l'acte authentique de vente, la SCI Nefertari savait que la promesse n'avait pas été réitérée et qu'elle pouvait exercer son action.

10. En se déterminant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser la connaissance à cette date, par la SCI Nefertari, du refus de la SIDR de réaliser la vente, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;

Condamne la société immobilière du département de la Réunion aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille vingt.