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Décisions

CA Besançon, 1re ch. civ. et com., 19 juin 2018, n° 16/02143

BESANÇON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

GMA (SCI)

Défendeur :

Jeannerot (ès qual.), Eurocooler (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mazarin

Conseillers :

Mme Uguen Laithier, Mme Chiaradia

Avocats :

Me Arnaud, Me Klein, Me Leonard, Me Aitali, Me Cavet

T. com. Besançon, du 12 oct. 2016, n° 20…

12 octobre 2016

Par jugement en date du 12 juin 2007, le tribunal de grande instance de Lure, statuant en matière commerciale dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte les 17 et 21 février 2006 à l'encontre de la SA ESAC Eurocooler, a, notamment :

- ordonné la cession de la SA ESAC Eurocooler à Y… et à la SA Veroso Investment agissant au nom d'une société déjà constituée, la SAS Eurocooler qui se substituera à eux,

- prononcé l'inaliénabilité des biens cédés durant une période de cinq ans à l'exception des stocks et des matériels devenus hors d'usage ou obsolètes, à compter de l'entrée en jouissance.

Par jugement rendu le 18 janvier 2011, le tribunal de commerce de Vesoul, sur requête présentée le 22 décembre 2010 par Y… et la SAS Eurocooler, a ordonné la mainlevée partielle de la clause d'inaliénabilité concernant la cession de quatre petites maisons appartenant à la SAS Eurocooler au profit de la SCI GMA moyennant le prix de 100.000 €.

Par jugement prononcé le 23 décembre 2013, le tribunal de commerce de Vesoul, qui avait ouvert le 10 juillet 2012 une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SAS Eurocooler, a, rejetant l'offre de cession de la SAS Cattin Filtration, mis fin à la période d'observation, prononcé la liquidation judiciaire de la SAS Eurocooler et désigné B… en qualité de liquidateur. Par une décision postérieure du 31 janvier 2014, il a arrêté le plan de cession totale des actifs de la SAS Eurocooler inscrite au registre du commerce et des sociétés de Vesoul sous le numéro 498 333 434 ci-après désignée sous le vocable la SAS Eurocooler (1) au profit de la société Beautelib à laquelle s'est substituée la SAS Eurocooler inscrite au registre du commerce et des sociétés de Vesoul sous le numéro 800 092 751 ci-après désignée SAS Eurocooler (2).

Par jugement rendu le 12 octobre 2016, le tribunal de commerce de Besançon saisi sur renvoi de la procédure par le tribunal de commerce de Vesoul lui-même saisi le 31 janvier 2014 à la requête de B… auquel a succédé Z… venant en lieu et place de A…, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Eurocooler (1), s'est déclaré matériellement et territorialement compétent et a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la SAS Eurocooler (2),

- débouté la SCI GMA de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- prononcé la nullité de l'acte de cession du 21 décembre 2010, réitéré par acte du 3 février 2011 et publié au service de la publicité foncière de Lure le 9 février 2011 volume 2011 P nº 430,

- ordonné la réintégration de la parcelle C nº 571 sise sur le territoire de Corbenay dans l'actif de la SAS Eurocooler (1),

- jugé que la SCI GMA supportera les frais de publication du jugement,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI GMA aux entiers dépens de l'instance,

- liquidé les dépens de son jugement à la somme de 93,60 €.

La SCI GMA a interjeté appel de ce jugement par déclarations parvenues au greffe de la cour respectivement le 25 octobre 2016 en intimant la SCP Z… et la SAS Eurocooler (1), procédure enregistrée sous le numéro RG 16/02143, et le 28 février 2017 en intimant la SAS Eurocooler (2), la SELARL Philippe Jeannerot et Associés et la SCP Guyon-X… ès qualités respectivement d'administrateur et de mandataire judiciaires de cette société, procédure enregistrée sous le numéro RG 17/00514, lesquelles ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 7 juillet 2017.

Dans ses écrits transmis le 17 mai 2017, la SCI GMA a sollicité l'infirmation de la décision entreprise et demandé à la cour de :

- à titre principal, surseoir à statuer en application de l'article 4 du code de procédure pénale,

- déclarer l'intervention de la SAS Eurocooler (2) irrecevable, subsidiairement prescrite (sic),

- subsidiairement sur le fond, dire qu'elle n'a commis aucune fraude,

- condamner la SAS Eurocooler (2) à lui payer 2.000 € au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile et 2.000 € par application de l'article 700 du même code,

- condamner Z… à lui verser 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SAS Eurocooler (2) et Z… aux entiers dépens.

La SCP Z… ès qualités a répliqué le 10 février 2017 pour demander à la cour de confirmer le jugement déféré et condamner l'appelante à lui payer 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec distraction au profit de la SCP Pion - Léonard - Viennot.

La SAS Eurocooler (2), la SCP Guyon-X… ès qualités de mandataire judiciaire et la SELARL Philippe Jeannerot & Associés ès qualités d'administrateur judiciaire ont transmis des écrits le 25 janvier 2017 puis la SAS Eurocooler (2) a été placée en liquidation judiciaire le 11 juillet 2017, la SCP Guyon-X… prise en la personne de X… ayant été nommé en qualité de liquidateur.

Par arrêt contradictoire prononcé le 21 novembre 2017, la cour a ordonné la disjonction des procédures numéros RG 16/02143 et 17/00514 et a :

- sur l'appel formé à l'encontre de la SAS Eurocooler (2), la SELARL Philippe Jeannerot et Associés et la SCP Guyon-X…, constaté l'interruption de la procédure numéro RG 17/00514 en précisant qu'elle ne pourra être reprise qu'après intervention volontaire ou forcée de la SCP Guyon-X… prise en la personne de X…, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Eurocooler inscrite au registre du commerce et des sociétés de Vesoul sous le numéro 800 092 751,

- sur l'appel formé à l'encontre de la SCP Z… et la SAS Eurocooler (1) dans le cadre de la procédure numéro RG 16/02143,

* révoqué l'ordonnance de clôture et ordonné la réouverture des débats

* invité les parties à faire toutes observations utiles sur la fin de non-recevoir relevée d'office par la cour quant à la demande de sursis à statuer formée par la SCI GMA et l'autorité de la chose jugée s'attachant au jugement rendu le 23 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Vesoul et son influence sur le périmètre exact de la levée partielle de la clause d'inaliénabilité opérée par le tribunal de commerce de Vesoul dans son jugement du 18 janvier 2011,

* sursis à statuer sur les dépens.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 28 avril 2018 la SCI GMA s'en remet à sagesse sur la recevabilité de sa demande de sursis à statuer, considère que les intimés ne peuvent pas se prévaloir du jugement rendu le 23 décembre 2014 par le tribunal de commerce de Vesoul car il est entaché de partialité et demande à la cour de juger qu'au vu du jugement rendu le 18 janvier 2011 par le tribunal de commerce de Vesoul, la propriété de la parcelle C.571, et par conséquent des aires de stationnement et des quatre maisons, ne peut être remise en cause.

Elle sollicite enfin qu'il lui donné acte (sic) 'de ce qu'elle conclura au fond suite à la décision qui sera prise par la cour sur les deux points procédurales sus-évoqués'.

La SCP Z… ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Eurocooler (1) a répliqué le 6 février 2018 en concluant à l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la SCI GMA à lui payer 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de son conseil.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2018.

Par exploit d'huissier signifié le 23 février 2018, la SCI GMA a repris l'instance nº RG 17/514 enregistrée sous le nouveau numéro RG 18/511 en faisant intervenir à la cause la SCP Guyon - X… prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS Eurocooler (2) pour, aux termes de ses derniers écrits transmis le 24 avril 2018, demander à la cour de :

- joindre les procédures RG 16/2143 et 18/511,

- déclarer la SAS Eurocooler (2) irrecevable en ses demandes pour défaut d'intérêt à agir,

- subsidiairement sur le fond, dire qu'elle n'a commis aucune fraude et débouter les SAS Eurocooler (1) et (2) de l'ensemble de leurs demandes,

- fixer au passif de la SAS Eurocooler (1) la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer au passif de la SAS Eurocooler (2) les sommes de 2.000 € au titre de l'article 32-1 et de 2.000 € au titre de l'article 700 du même code,

- condamner les intimés aux entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2018.

Bien que citée à personne morale, la SCP Guyon - X… ès qualités de mandataire liquidateur n'a pas constitué avocat et Me Aitali qui représentait la SAS Eurocooler (2) et la SELARL Philippe

Jeannerot & associés ès qualités d'administrateur judiciaire de celle-ci a déclaré ne plus intervenir, n'ayant pas eu de mandat de la part du liquidateur.

L'arrêt sera en conséquence réputé-contradictoire.

Motifs de la décision

- sur la jonction des instances,

La disjonction a été prononcée du fait de la mise en liquidation judiciaire de la SAS Eurocooler (2) et de l'interruption subséquente de la procédure dirigée contre cette société.

La SCP Guyon-X… ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Eurocooler (2) ayant été régulièrement mise en cause, il convient d'ordonner à nouveau la jonction des deux instances qui sont relatives à l'appel du même jugement.

- sur la demande de sursis à statuer :

La SCI GMA a été déboutée de cette demande par les premiers juges qui ont relevé qu'aucun élément versé au débat ne permettait de constater la réalité d'une plainte pénale pouvant justifier un sursis à statuer.

A hauteur de cour il est indiqué que la plainte pénale déposé par B… contre Y… aurait été classé sans suite.

Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté cette demande.

- sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la SAS Eurocooler (2),

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont caractérisé l'intérêt à agir de cette société et, par suite, la recevabilité de son intervention volontaire.

Il convient de relever qu'à hauteur de cour, suite à sa mise en liquidation judiciaire, la SAS Eurocooler (2) ne formule plus aucune demande.

- au fond :

Le tribunal de commerce de Besançon a prononcé la nullité de l'acte de cession du 21 décembre 2010, réitéré par acte du 3 février 2011 et publié au service de la publicité foncière de Lure le 9 février 2011 volume 2011 P nº 430 au motif que la demande de levée partielle de l'interdiction d'aliéner ne mentionnait que 4 petites maisons à usage d'habitation sans parking et que, parfaitement éclairé sur l'assiette immobilière exacte de la parcelle, le tribunal n'aurait pas autorisé cette levée partielle de l'interdiction d'aliéner.

Or, saisi à la requête du procureur de la république près le tribunal de grande instance de Vesoul en interprétation de sa décision du 18 janvier 2011, le tribunal de commerce de Vesoul a, par jugement rendu le 23 décembre 2014 au visa de l'article 461 du code de procédure civile, 'dit que la disposition suivante du-dit jugement 'ordonne la mainlevée partielle de la clause d'inaliénabilité concernant la cession de quatre petites maisons ci-dessus désignées appartenant à la SAS Eurocooler au profit de la SCI GMA moyennant le prix de 100.000 €' doit s'interpréter de la façon suivante : 'ordonne la mainlevée partielle de la clause d'inaliénabilité concernant la cession de quatre petites maisons ci-dessus désignées appartenant à la SAS Eurocooler au profit de la SCI GMA moyennant le prix de 100.000 € à l'exclusion de tout autre terrain que celui affecté aux constructions ; qu'au cas où la parcelle comprendrait des terrains à une autre affectation que celle des maisons sus-dites, il n'en serait pas donné mainlevée'.

La SCI GMA estime que Z… ès qualités ne 'saurait invoquer le jugement du 23 décembre 2014 du tribunal de commerce de Vesoul au motif qu'il serait empreint de partialité.

Mais ce jugement interprétatif est définitif dès lors que l'appel interjeté contre lui le 29 décembre 2014 par Y… et la SCI GMA a été déclaré irrecevable par arrêt de cette cour rendu le 3 juin 2015 lui-même passé en force de chose jugée suite à l'irrecevabilité du pourvoi en cassation formé contre lui.

Il s'ensuit que l'acte de cession du 21 décembre 2010, réitéré par acte du 3 février 2011 et publié au service de la publicité foncière de Lure le 9 février 2011 en tant qu'il porte non seulement sur les quatre petites maisons mais aussi sur une parcelle de terrain ayant une autre affectation que celle des-dites maisons a été passé en violation de l'interdiction d'aliéner prononcée par jugement du tribunal de grande instance de Lure en date du 12 juin 2007 de sorte que, conformément aux dispositions de l'article L. 642-10 du code de commerce, c'est à bon droit que B… ès qualités en a demandé la nullité en saisissant le tribunal de commerce de Vesoul par exploit d'huissier délivré le 31 janvier 2014, soit moins trois ans après sa publication, lequel tribunal a renvoyé la procédure devant le tribunal de commerce de Besançon à la demande de Y….

Le jugement déféré mérite en conséquence confirmation en toutes ses dispositions.

La SCI GMA qui succombe en son recours sera condamnée aux dépens d'appel et les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé-contradictoire, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi,

Ordonne la jonction des procédures numéros RG 16/2143 et 18/511 sous le numéro 16/02143.

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 octobre 2016 par le tribunal de commerce de Besançon.

Rejette les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SCI GMA aux dépens d'appel et accorde à la SCP Pion - Léonard - Viennot, avocat, le droit prévu à l'article 699 du même code.

Ordonne la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière de Lure aux frais de la liquidation judiciaire de la SAS Eurocooler inscrite au registre du commerce et des sociétés de Vesoul sous le numéro 498 333 434.