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Décisions

CA Lyon, 3e ch. civ. A, 14 mai 2009, n° 08/05390

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sofisol Holding (EURL)

Défendeur :

Dubois (ès qual.), Transmontagne résidences (Sté), M Vacances (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvet

Conseillers :

M. Santelli, Mme Clozel-Truche

Avoués :

SCP Laffly-Wicky, SCP Aguiraud-Nouvellet, SCP Dutrievoz

Avocats :

Me Cagnol, Me Redon

T. com. Lyon, du 10 juill. 2008, n ° 200…

10 juillet 2008

LES FAITS, LA PROCÉDURE ET LE JUGEMENT ENTREPRIS

Par jugement en date du 10 juillet 2007 le Tribunal de Commerce de LYON a ouvert la procédure de redressement judiciaire de la société TRANSMONTAGNE RÉSIDENCES en désignant comme administrateur la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ et comme mandataire judiciaire Maître DUBOIS.

Par jugement en date du 16 octobre 2007 le Tribunal a :

- arrêté un plan de cession partielle concernant la reprise de l'activité de résidences de tourisme classées exploitée par la société TRANSMONTAGNE RÉSIDENCES au profit de la société SOFISOL HOLDING, qui ne reprenait pas les baux, avec faculté de se substituer toutes filiales dont elle détiendrait la majorité des parts, le prix de 372.760 euros TTC étant ventilé entre les éléments du fonds de commerce pour 221.000 euros et les locaux pour 151.760 euros

- maintenu la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ en qualité d'administrateur pour passer les actes nécessaires à la réalisation de la cession

- converti la procédure en liquidation judiciaire et désigné Maître DUBOIS comme liquidateur judiciaire.

Ce jugement a fait l'objet de 6 tierces oppositions, qui ont été déclarées irrecevables par jugement rendu le 6 décembre 2007.

La société SOFISOL a décidé de se substituer 14 filiales pour l'acquisition des éléments d'actifs dépendant de chacune des résidences et notamment la SARL DOMAINE DE L'ARSELLE et la SARL CLOT DE LA CHALP. Les actes de cession ont été passés le 5 février 2008.

Par déclaration au greffe en date du 7 mai 2008 L'EURL SOFISOL HOLDING a saisi le Tribunal de commerce de Lyon au visa de l'article L 642-6 du Code de Commerce aux fins de voir modifier le plan de cession arrêté à son profit le 16 octobre 2007.

Elle a exposé que si le plan de cession prévoyait la possibilité de se substituer une de ses filiales dans la gestion des résidences reprises, certains propriétaires avaient entendu confier la gestion de leurs appartements à une autre entité, notamment pour le domaine de L'ARSELLE la société M VACANCES et pour le CLOS DE LA CHALPE la société LE CLOS DE LA CHALPE.

Elle a ajouté que ces deux sociétés avec lesquelles elle a passé des conventions ne sont pas ses filiales et ne peuvent se substituer à elle pour la cession des biens pour lesquels elle a versé des sommes.

Elle a donc demandé que le plan de cession soit modifié en ce que :

- il soit prévu la possibilité de se substituer les sociétés M VACANCES et LE CLOS DE LA CHALPE

- soit ordonnée la restitution des sommes consignées entre les mains de Maître BAULAND au titre de l'acquisition des locaux d'accueil des résidences de L'ARSELLE et du CLOS DE LA CHALPE

- soit exclu du périmètre de la cession le bail afférent à la centrale de réservation de MODANE et ordonné le licenciement du personnel y affecté.

Par jugement en date du 10 juillet 2008 le Tribunal a rejeté toutes les demandes de L'EURL SOFISOL HOLDING.

Par déclaration remise au greffe le 24 juillet 2008 L'EURL SOFISOL HOLDING a interjeté appel de ce jugement en intimant Maître DUBOIS ès qualités de liquidateur judiciaire, la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ ès qualités d’administrateur, Madame Ghislaine X... ès qualités de contrôleur et Monsieur le Procureur Général.

Par conclusions déposées le 3 septembre 2008 la société M VACANCES est intervenue volontairement à l'instance.

Ghislaine X... contrôleur n'a pas constitué avoué. Elle a été citée à la requête de l'appelante par exploit du 11 décembre 2008 déposé à l'étude de l'huissier instrumentaire. Le contrôleur a aussi a été convoqué par le greffe à l'audience de plaidoirie par lettre recommandé dont l'avis de réception a été signé le 5 mars 2009. Il sera donc statué par arrêt réputé contradictoire.

Par ordonnance en date du 18 février 2009 le conseiller de la mise en état a constaté le désistement de l'appel dirigé contre la SELARL BAULAND GLADEL MARTINEZ.

LES PRÉTENTIONS ET LES MOYENS DES PARTIES

Par conclusions récapitulatives déposées le 2 février 2009 L'EURL SOFISOL HOLDING demande à la Cour

- d'infirmer le jugement entrepris

- de dire qu'elle aura la possibilité de se substituer dans la reprise des résidences de L'ARSELLE la société M VACANCES et du CLOS DE LA CHALPE la société LE CLOS DE LA CHALPE II

- d'ordonner le reversement par Maître DUBOIS ès qualités de liquidateur des sommes de

* 50.000 euros correspondant aux termes de la promesse de vente des locaux de la résidence LE CLOS DE LA CHALPE

* 35.880 euros correspondant aux termes de la promesse de vente des locaux de la résidence de L'ARSELLE.

D'abord L'EURL SOFISOL HOLDING soutient que son appel est recevable au regard des dispositions de l'article L. 661-6 III du Code de Commerce alors que le rejet de ses prétentions a pour effet de mettre à sa charge d'autres engagements que ceux qu'elle avait souscrits dans le plan qu'elle avait proposé qui comprenait pour 50.000 et 35.880 euros des sommes à reverser aux promoteurs des deux résidences L'ARSELLE ET LE CLOS DE LA CHALPE au titre du prix de locaux d'accueil finalement acquis par des tiers en l'espèce les sociétés M VACANCES et LE CLOS DE LA CHALPE II.

Ensuite au fond L'EURL SOFISOL expose que le prix de 372.760 euros qu'elle a proposé et payé correspondait au prix de cession des locaux d'accueil de diverses résidences et qu'il est ventilé par résidence ;

qu'en raison de l'opposition de certains propriétaires elle n'a pu reprendre la gestion des appartement des résidences L'ARSELLE ET LE CLOS DE LA CHALPE et a passé des accords avec des sociétés M VACANCES et LE CLOS DE LA CHALPE qui ont accepté de se substituer à elle dans les conditions prévues à l'offre de reprise acceptée par le Tribunal qui n'avait accepté la substitution que par des filiales;

que sa demande de restitution de fonds ne modifie pas le produit du plan de cession alors que Maître DUBOIS n'aura pas à acquitter aux promoteurs les sommes qui leur ont été directement versées par les sociétés M VACANCES et le CLOS DE LA CHALPE.

Par conclusions déposées le 29 octobre 2008 Maître DUBOIS ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TRANSMONTAGNE RÉSIDENCES demande à la Cour :

- à titre principal de déclarer l'appel irrecevable

- en toute hypothèse de confirmer le jugement entrepris et de condamner la SARL SOFISOL HOLDING à lui payer une indemnité de procédure de 1.500 euros.

D'abord Maître DUBOIS soutient qu'en application des dispositions de l'article L 661-6 du Code de Commerce le cessionnaire a qualité pour interjeter appel seulement si des charges nouvelles lui sont imposées ; que dans ces conditions le droit d'appel lui est refusé lorsque le jugement entrepris refuse de modifier un plan de cession.

Au fond le liquidateur ajoute que l'action du cessionnaire tend à obtenir une modification du prix de cession ce que proscrit l'article L 621-29 alinéa 3 du Code de Commerce ; que le prix de cession est indivisible. Il souligne que le cessionnaire était expressément informé que de nouveaux baux devaient être conclus par SOFISOL avec les copropriétaires alors que les baux précédemment consentis étaient résiliés.

Par conclusions déposées le 31 décembre 2008 Ministère Public conclut à l'irrecevabilité de l'appel en application des dispositions de l'article L 661-6 du Code de Commerce.

Par conclusions déposées le 3 novembre 2008 la société M VACANCES demande à la Cour

- de déclarer son intervention recevable et bien fondée

- d'infirmer le jugement rendu le 2 mai 2008

- d'ordonner la modification du plan de cession partielle de la société TRANSMONTAGNE RÉSIDENCES arrêté le 16 octobre 2007 en autorisant la société SOFISOL à se substituer M VACANCES pour l'acquisition de la branche d'activité de tourisme DOMAINE DE L'ARSELLE dans les conditions prévues dans son offre de reprise telle qu'acceptée le 16 octobre 2007 par le Tribunal de Commerce de LYON.

D'abord la société M VACANCES, qui invoque un protocole d'accord conclu avec la société SOFISOL le 21 décembre 2007 la substituant dans l'acquisition de la branche d'activité tourisme du domaine de L'ARSELLE, soutient qu'elle a intérêt à intervenir à l'instance.

Au fond elle expose qu'en raison de l'opposition des copropriétaires, elle a pris en charge la gestion de la résidence avec effet rétroactif au 17 octobre 2007, et repris les contrats de travail des salariés affectés à la résidence de l'ARSELLE.

Elle ajoute que la substitution demandée ne préjudicie pas à la procédure alors que le cessionnaire reste garant de l'exécution du plan.

Une ordonnance en date du 3 mars 2009 clôture la procédure.

SUR CE LA COUR

Attendu tout d'abord la société M VACANCES, qui a conclu le 21 décembre 2007 avec la société SOFISOL un protocole d'accord en vue de devenir le gestionnaire unique de la résidence de tourisme du Domaine de L'ARSELLE, justifie de son intérêt à intervenir à l’instance ; qu'il convient de déclarer recevable l' intervention volontaire de la société M VACANCES;

Attendu ensuite que s'il résulte de l'article L 661-6 III du Code de Commerce issu de la loi 2005-845 du 25 juillet 2005 applicable à la procédure collective ouverte le 10 juillet 2007, qui est libellé dans les mêmes termes que l'article L 623-6 III précédemment en vigueur sur la question, que les jugements modifiant le plan de cession ne sont susceptibles que d'un appel soit du ministère public soit du cessionnaire et dans les limites mentionnées à l'alinéa II de cet article, aucune disposition légale n'interdit au cessionnaire qui a demandé la modification du plan de cession d'interjeter appel du jugement rejetant cette demande (Cassation Commerciale 3 mai 2006);

Qu'est donc recevable l'appel interjeté le 24 juillet 2008 par la société SOFISOL à l'encontre du jugement rendu le 10 juillet 2008 qui a rejeté ses demandes de modification du plan de cession adopté à son profit le 16 octobre 2007 ;

Mais attendu qu'il sera observé que les actes de cession partielle d'entreprise ont été passés le 5 février 2008 par l'administrateur au profit des SARL DOMAINE DE L'ARSELLE et CLOT DE LA CHALP, filiales de la société SOFISOL au titre de l'activité de gestionnaire des résidences de L'ARSELLE et du CLOT DE LA CHALPE ;

Que le cessionnaire était parfaitement informé de ce que les baux commerciaux afférents aux résidences hôtelières n'étaient pas poursuivis alors qu'il exposait dans son offre qu'il entendait les renégocier après résiliation ; qu'ainsi ce cessionnaire ne s'est pas vu imposer notamment au titre des locaux d'accueil des résidences susvisées des charges autres que les engagements qu'il avait souscrits au cours de la préparation du plan;

Que l'article L 642-6 du Code de Commerce proscrit la modification du prix tel qu'il a été fixé dans le jugement arrêtant le plan de cession ; que le prix de cession offert par la société SOFISOL dont l'offre a été retenue par le jugement du 16 octobre 2007 était fixé à 372.760 euros;

Qu'ainsi le Tribunal a à juste titre rejeté les demandes de modification présentées par la société SOFISOL tendant à se substituer la société M VACANCES et la société LE CLOT DE LA CHALP II et à obtenir la restitution de sommes correspondant à la valeur de rachat des locaux d'accueil du domaine de L'ARSELLE et du CLOT DE LA CHALPE ;

Que le jugement entrepris n'est pas critiqué en ce qu'il a rejeté les demandes de modification du plan de cession tendant voir exclure du périmètre de la cession le bail afférent à la centrale de MODANE et être autorisé à licencier le personnel y affecté ;

Que les premiers juges ont donc à juste titre débouté la société SOFISOL HOLDING de toutes ses demandes ;

Qu'en conséquence il y a lieu de confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions le jugement et de condamner la société SOFISOL aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Déclare recevables l'intervention volontaire de la société M VACANCES et l'appel interjeté par la société SOFISOL HOLDING ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 juillet 2008 par le Tribunal de Commerce de LYON ;

Y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de Maître DUBOIS ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TRANSMONTAGNE ;

Condamne la société SOFISOL HOLDING aux dépens et accorde contre elle à la SCP AGUIRAUD NOUVELLET et à la SCP DUTRIEVOZ Avoués le droit de recouvrement direct prévu par l'article 699 du Code de Procédure Civile.