Cass. com., 29 avril 2003, n° 00-17.842
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mai 2000, n° 371), que, par trois jugements des 19 et 30 décembre 1996 et 13 février 1997, les sociétés du Groupe SPAD ont été mises en redressement judiciaire avec confusion des patrimoines ; que, par quatre jugements du 30 janvier 1997, ont été arrêtés des plans de cession partielle de l'entreprise ; que chaque jugement a fixé la durée du plan à deux ans, sauf prolongation, et a nommé M. Y..., auparavant administrateur judiciaire, en qualité de commissaire à l'exécution du plan ;
que, par jugement du 10 février 1999, rendu à la requête du commissaire à l'exécution du plan, le tribunal a prorogé pour une durée de deux ans à compter du 30 janvier 1999, soit jusqu'au 30 janvier 2001, la durée des plans et des fonctions de commissaire à l'exécution du plan ; que la Banque Worms a fait tierce opposition à ce jugement par lettre déposée au greffe le 26 mai 1999, tandis que la Banque de Neuflize Schlumberger Mallet Demachy (NSMD) est intervenue volontairement à titre accessoire par des conclusions déposées à l'audience ; que, par jugement du 29 septembre 1999, la tierce opposition a été déclarée irrecevable ; que la Banque Worms a relevé appel de ce jugement ; que la société Amyot Exco audit et M. X... ont fait tierce opposition incidente à cette décision et sont intervenus volontairement, à titre accessoire ; que la banque NSMD est également intervenue volontairement à l'instance, à titre accessoire ;
Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° D 00-18.518 et sur le premier moyen du pourvoi n° A 00-18.032, réunis :
Attendu que la société Amyot Exco audit et M. X... et la banque NSMD font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'appel formé par la Banque Worms contre le jugement du 29 septembre 1999, ayant lui-même déclaré irrecevable la tierce opposition formée par ladite banque contre le jugement du 10 février 1999, alors, selon le moyen :
1 / qu'aux termes de l'article 175 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction issue de la loi du 10 juin 1994, applicable en la cause, devenu l'article L. 623-7 du Code de commerce, la voie de la tierce opposition n'est fermée qu'à l'encontre des décisions rendues, en application des trois premiers alinéas de l'article 174 de la même loi, devenu l'article L. 623-6 du Code de commerce ; d'où il se déduit que cette voie est ouverte à l'encontre des jugements modifiant le plan de cession, visés à l'alinéa 5 dudit article, de sorte qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse interprétation, les dispositions des textes susvisés ;
2 / que le jugement rendu sur tierce opposition étant susceptible des mêmes recours que les décisions de la juridiction dont il émane, le jugement qui modifie le plan de cession n'est pas soumis aux dispositions de l'article 174, avant-dernier alinéa, de la loi du 25 janvier 1985 en ce qui concerne les personnes susceptibles de former un recours ; que l'appel interjeté contre un jugement statuant sur tierce opposition à un jugement qui aurait modifié, selon l'arrêt attaqué, le plan de cession était dès lors recevable ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 59 du nouveau Code de procédure civile et 174, avant-dernier alinéa, de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que l'article 175 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 623-7 du Code de commerce, définit quels sont les recours contre les arrêts rendus sur les recours exercés, en application de l'article 174 de la même loi, devenu l'article L. 623-6 du Code de commerce ; que l'arrêt énonce exactement qu'il résulte de l'article 174 précité que les jugements modifiant le plan de cession ne sont susceptibles d'appel que de la part, soit du ministère public, soit du cessionnaire, de sorte que la Banque Worms, qui n'aurait pas été recevable à faire appel du jugement du 10 février 1999, n'a pas davantage le droit de faire appel du jugement du 29 septembre 1999, rendu sur sa tierce opposition ; que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° U 00-17.842 et le deuxième moyen du pourvoi n° A 00-18.032, réunis :
Attendu que la Banque Worms et la banque NSMD font grief à l'arrêt, d'avoir déclaré irrecevable l'appel du jugement du 29 septembre 1999, déclarant irrecevable la tierce opposition contre le jugement du 10 février 1999, ayant prorogé pour deux ans le plan de cession des sociétés SPAD, alors, selon le moyen :
1 / que l'article 174, avant-dernier alinéa de la loi du 25 janvier 1985, ne limite les possibilités d'appel qu'à l'égard des jugements qui modifient le plan de cession ; que, selon l'article 68 de la loi, la modification du plan de cession suppose une modification substantielle dans ses objectifs et ses moyens ; qu'ainsi, en considérant que, même en l'absence de telles modifications substantielles, le jugement du 10 février 1999, qui avait prolongé de deux ans la durée du plan de cession, constituait un jugement modifiant le plan de cession qui ne pouvait être frappé d'appel, la cour d'appel a violé, par fausse application, les textes susvisés ;
2 / que seul un jugement rendu à la requête du chef d'entreprise et apportant une modification substantielle dans les objectifs et les moyens du plan est soumis à la restriction au droit d'appel, issue de l'article 174, avant-dernier alinéa, de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 68 et 174 de la loi du 25 janvier 1985 ;
3 / que le jugement du 10 février 1999, rendu sur requête du commissaire à l'exécution du plan se contente, sous couvert d'une prétendue prorogation de la durée du plan en réalité déjà exécuté, de prolonger la seule durée de la mission du commissaire à l'exécution du plan, afin de lui permettre de poursuivre les procédures en cours et d'introduire de nouvelles procédures ; qu'un tel jugement ne constitue pas un jugement "modifiant le plan de cession" au sens de l'article 174 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'ainsi la cour d'appel a violé les articles 174 et 68 de la loi du 25 janvier 1985 ;
4 / qu'aucune disposition de la loi du 25 janvier 1985 ne prohibe l'exercice de l'appel à l'encontre d'une décision qui proroge la mission du commissaire à l'exécution du plan, ou la durée du plan, de sorte que le jugement rendu sur tierce opposition contre ce jugement était lui-même susceptible d'appel ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 592 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé que le jugement qui a prolongé de deux années la durée du plan de cession et la mission du commissaire à l'exécution du plan constitue un jugement modifiant le plan de cession, relevant des dispositions de l'article 174, avant-dernier alinéa, de la loi du 25 janvier 1985, l'arrêt retient que la Banque Worms, qui n'aurait pas été recevable à faire appel du jugement du 10 février 1999, n'a pas davantage le droit de faire appel du jugement du 29 septembre 1999 rendu sur sa tierce opposition ; que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les second et troisième moyens du pourvoi n° U 00-17.842, sur les troisième et quatrième moyens du pourvoi n° A 00-18.032, pris en leurs diverses branches et sur les deux dernières branches du moyen unique du pourvoi n° D 00-18.518, réunis :
Attendu que la Banque Worms, la banque NSMD, la société Amyot Exco audit et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'appel-nullité formé par la Banque Worms contre le jugement du 29 septembre 1999, statuant sur la tierce opposition formée par la Banque Worms contre le jugement du 10 février 1999 ;
Mais attendu, en premier lieu, que les demandeurs au pourvoi ne peuvent prétendre que l'appel-nullité contre le jugement du 29 septembre 1999 est recevable en invoquant un excès de pouvoir qui aurait été commis par les premiers juges en rendant le jugement du 10 février 1999 ; que le moyen est pour partie inopérant ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient qu'aucun manquement à un principe fondamental de procédure n'est allégué contre le jugement du 29 septembre 1999 et que les premiers juges, qui ont appliqué le droit s'agissant d'une décision ayant modifié le plan de cession, entrant dans les prévisions de l'article 174 de la loi du 25 janvier 1985, n'ont commis aucun excès de pouvoir dans ce jugement, en déniant à la Banque Worms le droit de faire tierce opposition au jugement du 10 février 1999 ; que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable pour partie, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.