Cass. 2e civ., 7 juin 2012, n° 11-16.106
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loriferne
Avocats :
Me Blondel, SCP Defrenois et Levis
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 mars 2011), que M. et Mme X... ont souscrit auprès de la société Crédit immobilier de France Rhône Alpes Auvergne (la banque) trois prêts aux termes de trois actes notariés reçus respectivement les 17 février 2007, 15 mai 2007 et 17 décembre 2007, sur le fondement desquels la banque, qui n'était pas remboursée des sommes prêtées, a fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur des biens immobiliers appartenant à M. et Mme X... qui ont saisi un juge de l'exécution d'une demande de mainlevée de la mesure ;
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'ordonner la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire prise sur les biens immobiliers de M. et Mme X..., alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 34 du décret du 26 novembre 1971, dans sa rédaction issue du décret du 10 août 2005, n'impose pas que la copie exécutoire soit le fac-similé de l'acte notarié et contienne tous les documents mentionnés dans le corps de l'acte comme ayant été annexés à la minute de l'acte notarié ; qu'en l'espèce, ainsi que le faisait valoir la banque dans ses conclusions d'appel, les juges du fond ne pouvaient, au vu des seules copies exécutoires des actes de vente, dénier leur caractère exécutoire auxdites copies exécutoires au seul motif que les procurations mentionnées à l'acte comme ayant été annexées à la minute de l'acte de vente conservée par le notaire, n'était pas reproduites à la copie exécutoire de cet acte de vente ; que ce faisant, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard des articles 34 du décret du 26 novembre 1971, 1319 du code civil, 72 de la loi du 9 juillet 1991 et 217 et suivants du décret du 31 juillet 1992 ;
2°/ que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux des faits que l'officier public y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même ou comme s'étant passés en sa présence dans l'exercice de ses fonctions ; qu'en l'espèce, les époux X... reconnaissaient dans leurs écritures qu'ils avaient signé des procurations notariées permettant au notaire de les représenter pour la signature des actes authentiques de prêt et de vente et s'abstenaient de soulever la nullité des actes de prêts qu'ils avaient du reste commencé à exécuter ; qu'en déniant aux actes authentiques de prêt leur caractère exécutoire sans constater que les époux X... s'étaient inscrits en faux contre les mentions constatant l'annexion de leurs procurations aux minutes des actes de vente, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1319 du code civil ;
3°/ que l'irrégularité de forme affectant l'annexion des procurations à l'acte authentique, lorsqu'elle ne fait pas grief à l'emprunteur qui ne conteste pas avoir contracté son engagement, ne saurait priver l'acte authentique de son caractère exécutoire ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que les époux X... ne soulevaient pas la nullité des actes authentiques de prêt et reconnaissaient leurs engagements à l'égard de l'établissement bancaire, la cour d'appel ne pouvait considérer qu'à défaut d'annexion des procurations aux actes authentiques de vente, cette irrégularité formelle privait les actes authentiques de leur caractère exécutoire justifiant ainsi la mainlevée des hypothèques provisoires litigieuses ; que ce faisant, la cour d'appel a violé les articles 21 et 22 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971 dans sa rédaction issue du décret n°2005-973 du 10 août 2005, ensemble l'article 1318 du code civil, l'article 72 de la loi du 9 juillet 1991 et les articles 217 et suivants du décret du 31 juillet 1992 ;
4°/ que l'aveu fait pleine foi contre celui qui l'a fait, même dans le cas où la preuve doit être administrée par écrit ; que dans leurs conclusions d'appel les époux X... indiquaient que " les investissements proposés par Apollonia n'étaient en aucune façon autofinancés, bien au contraire, puisqu'après calcul des revenus et charges, notamment financières, des appartements acquis, et après compensation avec les revenus de leurs activités professionnelles, les demandeurs se retrouvent débiteurs tous les ans de la somme de 139 631 euros avant même d'avoir engagé la moindre dépense personnelle, que ce soit en nourriture, vêtements, logement" ; qu'en caractérisant l'absence de menace sur le recouvrement de la créance au vu de l'absence de risque d'insolvabilité des emprunteurs, circonstance qui était expressément contredite par l'aveu même de ces derniers, la cour d'appel a violé les articles 1356 et 1347 du code civil, ensemble les articles 67 et 72 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 ;
5°/ qu'après avoir constaté que la banque ne disposait que de simples promesses d'affectation hypothécaire et de délégation de loyers, et d'un privilège de prêteur de deniers à hauteur seulement de 71 280 euros pour une créance en capital de 129 600 euros les biens grevés de ce privilège ayant été acquis de l'aveu même des époux X... dans le cadre d'une opération de défiscalisation, il s'en concluait que la banque ne bénéficiait pas d'une hypothèque de premier rang et que compte tenu de l'insolvabilité avouée des emprunteurs, il existait une réelle menace sur le recouvrement de la créance du la banque, au motif notamment d'ordre général que les organismes de crédit pour accorder un prêt ne prennent pas de risques outre mesure, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et des faits non contestés par les époux X..., en violation des articles 67 et 72 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. et Mme X... disposaient de revenus et avoirs leur procurant une aisance financière certaine et que la banque disposait déjà de garanties, la cour d'appel, abstraction faite des motifs critiqués par les quatre premières branches du moyen, appréciant souverainement l'absence de menace dans le recouvrement par la banque de sa créance, a retenu, à bon droit, que la mainlevée de la mesure conservatoire devait être ordonnée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.