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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 28 juin 2016, n° 15/16059

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Les Sources du Marais (SARL)

Défendeur :

Novak de la Croix (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Conseiller :

M. Bedouet

Avocats :

Me Nakache, Me Gourdain

T. com. Paris, du 10 mars 2015, n° 13/16…

10 mars 2015

Par jugement du 5 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la Sci Novak de la Croix et désigné la Scp B... Daudé, prise en la personne de Maître B..., en qualité de mandataire liquidateur.

Le 9 janvier 2014, la Sarl Les Sources du Marais a déclaré au passif de la Sci Novak de la Croix, au titre d'un jugement du 19 novembre 2009 du tribunal de grande instance et d'un arrêt du 10 octobre 2012 de la cour d'appel de Paris, une créance de 343.294,19 euros.

Cette créance figure comme admise à titre chirographaire dans l'état des créances du 5 février 2015.

Par requête du 25 juillet 2014, la société Les Sources du Marais a sollicité le paiement provisionnel de sa créance à hauteur de 330.000 euros en application des dispositions de l'article L. 643-3 du code de commerce fixé. Cette demande a été rejetée par ordonnance du juge-commissaire en date du 10 mars 2015.

La société Les Sources du Marais a relevé appel de cette décision selon déclaration du 23 juillet 2015 et demande à la cour dans ses conclusions signifiées le 4 avril 2016 d'infirmer l'ordonnance du 10 mars 2015, de constater sa qualité de créancier hypothécaire à l'encontre de la Sci Novak de la Croix, de dire et juger qu'elle a déclaré sa créance en qualité de créancier privilégié, d'ordonner le paiement provisionnel de la créance à hauteur de 330.000 euros et de condamner les intimés solidairement lui à payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses écritures signifiées le 27 novembre 2015, la Scp B...-Daudé, ès qualités, demande à la cour de confirmer l'ordonnance du 10 mars 2015 en toutes ses dispositions, de condamner la société

Les Sources du Marais à lui payer la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil, ainsi qu'une somme de 2.500 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, outre la prise en charge des dépens.

La Sci Novak de la Croix n'a pas constitué avocat sur la signification de la déclaration d'appel qui lui a été faite par acte du 12 octobre 2015.

SUR CE

- Sur la demande de provision

La créance de la société Les Sources du Marais qui résultait d'un titre exécutoire (arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 10 octobre 2012), n'ayant pas été contestée dans le cadre de la vérification des créances, n'a pas donné lieu à une instance en contestation devant le juge-commissaire. Elle a en conséquence été portée comme admise sur l'état des créances déposé par Maître B... le 2 février 2015 et signé par le juge-commissaire le 5 février 2015, pour 343.294,19 euros, à titre chirographaire

Le premier juge, saisi d'une demande de provision sur le fondement de l'article L 643-3 du code de commerce selon lequel le juge-commissaire peut à la demande d'un créancier ordonner le paiement à titre provisionnel d'une quote-part d'une créance définitivement admise, a rejeté la requête de la société Les Sources du Marais aux motifs que sa créance avait été admise à titre chirographaire faute pour la déclaration de créance d'avoir mentionné expressément la nature du privilège ou de la sûreté dont elle bénéficiait conformément aux dispositions de l'article L. 622-25 du code de commerce.

Au soutien de son appel, la société Les Sources du Marais demande à la cour de constater sa qualité de créancier hypothécaire, faisant valoir que l'article L.622-25 du code de commerce n'impose pas que la mention du privilège soit expresse dans la déclaration, la volonté de déclarer une créance à titre privilégié pouvant résulter des précisions figurant dans la déclaration de créance, sa déclaration mentionnant en l'espèce l'état hypothécaire et qu'en outre, plusieurs courriers adressés au mandataire liquidateur avant que le juge-commissaire ne statue sur l'état des créances, mentionnant le caractère hypothécaire de la créance, sont venus compléter la déclaration et corriger l'erreur matérielle.

Maître B..., ès-qualités, soutient que l'action fondée sur l'article L 643-3 du code de commerce par la société Les Sources du Marais tend à revenir sur la force de chose jugée de son admission au passif de la liquidation judiciaire de la Sci Novak de la Croix, qu'il résulte de l'article L. 622-25 alinéa 1 du code de commerce que la déclaration de créance doit préciser la nature du privilège ou de la sûreté dont la créance est éventuellement assortie, que rien de tel ne figure dans la déclaration de créance, qu'il résulte d'une jurisprudence constante qu'un privilège ne peut faire l'objet d'une déclaration complémentaire au-delà du délai de l'article R. 622-24 du code de commerce, que le seul actif de la société Novak de la Croix est constitué par le prix d'adjudication d'un immeuble soit 1.350.000 euros, qu'il est donc inconcevable de faire bénéficier la société Les Sources du Marais d'un paiement provisionnel alors que le passif chirographaire du débiteur s'élève à la somme de 1.548.777,30 euros et qu'il existe en outre un passif non définitif de 1.862.546,38 euros.

La cour se trouve saisie, à la suite du juge-commissaire, de la requête en paiement d'une provision sur le fondement de l'article L 643-3 du code de commerce, qu'investie en appel des pouvoirs du premier juge, il ne lui appartient pas dans ce cadre juridique de statuer sur la contestation de l'état des créances ayant admis la créance de l'appelante à titre chirographaire et de revenir sur l'état des créances signé par le juge-commissaire le 5 février 2015, dont l'intimé soutient qu'il a acquis l'autorité de la chose jugée, cette admission s'imposant tant que l'état n'aura pas été modifié.

C'est en conséquence à juste titre que le juge-commissaire a, dans le cadre de la requête qui lui était soumise, apprécié la demande de provision au vu du caractère chirographaire de la créance quand bien même la société Les Sources du Marais justifierait de l'existence d'une inscription hypothécaire à son profit.

L'état des créances mentionne un passif définitif échu admis pour 2.056.060,62 euros, dont 507.283,32 euros de passif à titre privilégié, outre 1.862.546,38 euros de passif non définitif, contesté ou lié à des instances en cours.

Il n'est pas contesté que le seul actif de la Sci est constitué par le prix d'adjudication d'un bien immobilier d'un montant de 1.350.000 euros.

En cet état, une partie importante de l'actif ayant vocation à être absorbée par les créanciers privilégiés et le passif chirographaire n'étant pas arrêté, le juge-commissaire sera approuvé d'avoir rejeté la demande de provision. L'ordonnance sera en conséquence confirmée de ce chef.

- Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive

Le caractère abusif de l'appel n'est pas établi, la société Les Sources du Marais qui a inscrit une hypothèque sur le bien, ayant pu se méprendre sur ses droits et la portée de son recours.

La Scp B... Daudé, ès qualités, sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.

La société Les Sources du Marais sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance,

Y ajoutant,

Déboute la Scp B... Daudé, ès qualités, de sa demande de dommages et intérêts,

Déboute les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Les Sources du Marais aux dépens.