Cass. 1re civ., 20 décembre 1993, n° 92-11.189
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Grégoire
Rapporteur :
Mme Gié
Avocat général :
Mme le Foyer de Costil
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que suivant acte notarié du 27 novembre 1985, les époux Y... ont acquis en indivision un terrain sur lequel ils ont fait construire une maison d'habitation ; que la liquidation judiciaire de M. Y... a été prononcée par un jugement du tribunal de commerce du 18 avril 1988 ; que M. X..., en qualité de mandataire liquidateur a formé, au nom du débiteur, une demande en partage et en licitation de l'immeuble indivis ; que l'arrêt attaqué (Bastia, 3 décembre 1991) relevant que M. X... n'avait pas été autorisé par le juge-commissaire et que les créances soumises à la procédure de vérification n'avaient pas encore fait l'objet d'une décision d'admission de ce dernier, a rejeté la demande ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 815-17 du Code civil, si les créanciers personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles, ils peuvent toutefois provoquer le partage au nom de leur débiteur ou intervenir dans le partage provoqué par lui, les coïndivisaires pouvant arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur ; que la demande en partage suppose seulement que le créancier soit titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible à l'égard du débiteur coïndivisaire ; que M. X... faisait valoir dans ses écritures d'appel que lors du dépôt de son dossier, M. Y... avait lui-même fait état d'un passif de 971 343,50 francs et que les créanciers avaient eux-mêmes déclaré leurs créances, dont la liste avait été communiquée au débiteur sans contestation de sa part ; qu'en exigeant que les créanciers aient préalablement notifié au coïndivisaire de leur débiteur le montant et l'origine de leurs créances, la cour d'appel en ajoutant à l'article 815-17 du Code civil une condition qu'il ne prévoit pas, l'a violé par refus d'application et alors, d'autre part, que l'application de l'article 154 de la loi du 25 janvier 1985 et donc l'intervention du juge-commissaire qu'il suppose n'a lieu d'être que lorsqu'il s'agit de vendre un immeuble appartenant exclusivement au débiteur ; que lorsque l'immeuble est un bien indivis, l'article 154 ne trouve plus d'application au profit de l'article 815-17 du Code civil, texte spécifique à l'indivision ; que s'il en était autrement, cela reviendrait d'une part, à provoquer une saisie de la part du débiteur dans cet immeuble indivis en violation de l'alinéa 2 de l'article 815-17, et, d'autre part, à méconnaître le droit expressément reconnu par l'alinéa 3 du même texte aux autres coïndivisaires d'arrêter l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur ; d'où il suit qu'en écartant l'application de l'article 815-17 au profit de l'article 154 de la loi du 25 janvier 1985, la cour d'appel a violé ces textes ;
Mais attendu que l'article 815-17, alinéa 3, du Code civil reconnait aux créanciers personnels d'un indivisaire la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur et aux coïndivisaires, celle d'arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur ; que la cour d'appel a justement estimé qu'en l'absence d'une décision définitive d'admission des créances au passif de la liquidation judiciaire de l'indivisaire, Mme Y..., coïndivisaire, n'était pas en mesure de connaître le montant de la dette qu'elle devrait payer pour arrêter le cours de l'action et en conséquence, que le partage ne pouvait être ordonné ;
Que par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.